La jurisprudence francophone des Cours suprêmes


recherche avancée

26/05/2023 | FRANCE | N°467838

France | France, Conseil d'État, 5ème chambre, 26 mai 2023, 467838


Vu la procédure suivante :

M. B... A... a demandé au juge des référés du tribunal administratif de la Martinique, statuant sur le fondement de l'article L. 521-1 du code de justice administrative, de suspendre l'exécution de la décision du 22 août 2022 par laquelle le commandant de police, chef du service territorial du recrutement et de la formation l'a informé qu'il ne pouvait pas être recruté au sein de la 18ème promotion des cadets de la République option police nationale. Par une ordonnance n° 2200516 du 12 septembre 2022, le juge des référés a fait droit à cette

demande et enjoint au ministre de l'intérieur d'intégrer à titre provis...

Vu la procédure suivante :

M. B... A... a demandé au juge des référés du tribunal administratif de la Martinique, statuant sur le fondement de l'article L. 521-1 du code de justice administrative, de suspendre l'exécution de la décision du 22 août 2022 par laquelle le commandant de police, chef du service territorial du recrutement et de la formation l'a informé qu'il ne pouvait pas être recruté au sein de la 18ème promotion des cadets de la République option police nationale. Par une ordonnance n° 2200516 du 12 septembre 2022, le juge des référés a fait droit à cette demande et enjoint au ministre de l'intérieur d'intégrer à titre provisoire le requérant au sein de la 18ème promotion des cadets de la République option police nationale, recrutés dans le département de la Martinique, dans un délai de trois jours à compter de la notification de l'ordonnance.

Par un pourvoi, enregistré le 27 septembre 2022 au secrétariat du contentieux du Conseil d'Etat, le ministre de l'intérieur et des outre-mer demande au Conseil d'Etat :

1°) d'annuler cette ordonnance ;

2°) réglant l'affaire au fond, de rejeter la demande de première instance.

Vu les autres pièces du dossier ;

Vu :

- le code de la sécurité intérieure ;

- le code de justice administrative ;

- la loi n° 91-647 du 10 juillet 1991 ;

Après avoir entendu en séance publique :

- le rapport de Mme Sylvie Pellissier, conseillère d'Etat,

- les conclusions de M. Maxime Boutron, rapporteur public.

La parole ayant été donnée, après les conclusions, à la SCP Gaschignard, Loiseau, Massignon, avocat de M. A....

Vu la note en délibéré, enregistrée le 23 mars 2023, présentée par M. A... ;

Considérant ce qui suit :

1. Il ressort des pièces du dossier soumis au juge des référés du tribunal administratif de la Martinique que M. A..., qui avait passé avec succès les épreuves de sélection pour être recruté en qualité d'adjoint de sécurité de la police nationale au titre des " cadets de la République ", a été informé par l'administration, par un courriel du 22 août 2022, que son recrutement ne pourrait intervenir car il avait dépassé l'âge limite de 30 ans. Il a formé un recours pour excès de pouvoir en vue de l'annulation de cette décision, et présenté, en référé, une demande tendant à sa suspension, à laquelle le juge des référés du tribunal administratif a fait droit, par une ordonnance du 12 septembre 2022 contre laquelle le ministre de l'intérieur et des outre-mer se pourvoit en cassation.

2. Aux termes du troisième alinéa de l'article R. 411-10 du code de la sécurité intérieure : " Les adjoints de sécurité peuvent (...), à leur demande et après y avoir été admis, bénéficier d'une période de formation dans un lycée en exécution d'une convention passée avec le ministre chargé de l'éducation nationale. Ils se voient alors conférer, pour la durée de leur formation professionnelle initiale, l'appellation de " cadets de la République, option police nationale " et bénéficient durant cette période, à l'exclusion de toute autre rémunération, d'une allocation d'études. " Aux termes de l'article R. 411-8 du même code : " Nul ne peut être recruté en qualité d'adjoint de sécurité : (...) 2° S'il est âgé de moins de dix-huit ans ou de plus de trente ans ; (...) ". Aux termes de l'article R. 411-9 : " Les adjoints de sécurité sont recrutés par contrat écrit, pour une durée de trois ans renouvelable une fois par reconduction expresse, conclu, au nom de l'Etat (...) ". Il résulte de ces dispositions que les conditions d'âge posées par l'article R. 411-8 du code de la sécurité intérieure doivent être appréciées à la date de prise d'effet du contrat de recrutement conclu en application de l'article R. 411-9 du même code.

3. En ce qu'elle juge que, faute pour l'article R. 411-8 2° du code de la sécurité intérieure de préciser à quelle date s'apprécie la condition d'âge maximal, celle-ci pouvait être appréciée à la date du dépôt de candidature à un recrutement en qualité de cadet de la République, l'ordonnance attaquée est entachée, eu égard à l'office du juge des référés statuant sur le fondement de l'article L. 521-1 du code de justice administrative, d'une erreur de droit. Le ministre de l'intérieur et des outre-mer est par suite fondé à en demander, pour ce motif, et sans qu'il soit besoin de statuer sur l'autre moyen du pourvoi, l'annulation.

4. Il y a lieu, pour le Conseil d'Etat statuant au contentieux, de régler le litige au titre des pouvoirs du juge des référés par application de l'article L. 822-1 du code de justice administrative.

5. Aux termes du premier alinéa de l'article L. 521-1 du code de justice administrative : " Quand une décision administrative, même de rejet, fait l'objet d'une requête en annulation ou en réformation, le juge des référés, saisi d'une demande en ce sens, peut ordonner la suspension de l'exécution de cette décision, ou de certains de ses effets, lorsque l'urgence le justifie et qu'il est fait état d'un moyen propre à créer, en l'état de l'instruction, un doute sérieux quant à la légalité de la décision. "

6. Si M. A... fait valoir que la décision qu'il conteste, en l'empêchant de suivre la formation en qualité de cadet de la République pour être ensuite recruté comme adjoint de sécurité au sein de la police nationale, le prive d'une possibilité d'améliorer sa situation matérielle, cette argumentation ne caractérise pas une situation d'urgence au sens des dispositions de l'article L. 521-1 du code de justice administrative citées au point 5., d'autant que l'intéressé, qui a indiqué travailler comme " assistant moniteur de tennis " puis percevoir le revenu de solidarité active, n'allègue pas être dépourvu de ressources et se trouver dans une situation financière précaire. Il suit de là que ses conclusions tendant à la suspension de la décision du 22 août 2022 du commandant de police, chef du service territorial doivent être rejetées, sans qu'il soit besoin de se prononcer sur l'existence, en l'état de l'instruction, d'un moyen propre à créer un doute sérieux quant à la légalité de cette décision.

7. Les dispositions de l'article L. 761-1 du code de justice administrative font obstacle à ce qu'il soit fait droit aux conclusions présentées par M. A... sur le fondement des dispositions combinées de cet article et de l'article 37 de la loi du 10 juillet 1991 relative à l'aide juridique.

D E C I D E :

--------------

Article 1er : L'ordonnance du juge des référés du tribunal administratif de la Martinique du 12 septembre 2022 est annulée.

Article 2 : La demande présentée par M. A... devant le juge des référés du tribunal administratif de la Martinique ainsi que ses conclusions tendant à l'application des articles 37 de la loi du 10 juillet 1991 et L. 761-1 du code de justice administrative sont rejetées.

Article 3 : La présente décision sera notifiée au ministre de l'intérieur et des outre-mer et à M. B... A....

Délibéré à l'issue de la séance du 23 mars 2023 où siégeaient : M. Jean-Philippe Mochon, président de chambre, présidant ; M. Olivier Yeznikian, conseiller d'Etat et Mme Sylvie Pellissier, conseillère d'Etat-rapporteure.

Rendu le 26 mai 2023.

Le président :

Signé : M. Jean-Philippe Mochon

La rapporteure :

Signé : Mme Sylvie Pellissier

La secrétaire :

Signé : Mme Nathalie Pilet


Synthèse
Formation : 5ème chambre
Numéro d'arrêt : 467838
Date de la décision : 26/05/2023
Type d'affaire : Administrative
Type de recours : Excès de pouvoir

Publications
Proposition de citation : CE, 26 mai. 2023, n° 467838
Inédit au recueil Lebon

Composition du Tribunal
Rapporteur ?: Mme Sylvie Pellissier
Rapporteur public ?: M. Maxime Boutron
Avocat(s) : SCP GASCHIGNARD, LOISEAU, MASSIGNON

Origine de la décision
Date de l'import : 02/06/2023
Fonds documentaire ?: Legifrance
Identifiant ECLI : ECLI:FR:CE:2023:467838.20230526
Association des cours judiciaires suprmes francophones
Organisation internationale de la francophonie
Juricaf est un projet de l'AHJUCAF, l'association des Cours suprêmes judiciaires francophones. Il est soutenu par l'Organisation Internationale de la Francophonie. Juricaf est un projet de l'AHJUCAF, l'association des Cours suprêmes judiciaires francophones. Il est soutenu par l'Organisation Internationale de la Francophonie.
Logo iall 2012 website award