La jurisprudence francophone des Cours suprêmes


recherche avancée

25/04/2023 | FRANCE | N°462201

France | France, Conseil d'État, 5ème chambre, 25 avril 2023, 462201


Vu la procédure suivante :

Par une décision du 23 septembre 2022, le Conseil d'Etat statuant au contentieux a prononcé l'admission des conclusions présentées par Mme B... A... dirigées contre l'ordonnance n° 2200297 du 15 février 2022 du juge des référés du tribunal administratif de Marseille en tant qu'elle statue sur la demande de suspension de l'exécution de la décision du 16 décembre 2021 de la directrice de la caisse primaire d'assurance maladie (CPAM) du Vaucluse de procéder, à l'expiration d'un délai de trente jours à compter de la notification de l'interdiction

d'exercer dont elle fait l'objet, à une " récupération financière " à ...

Vu la procédure suivante :

Par une décision du 23 septembre 2022, le Conseil d'Etat statuant au contentieux a prononcé l'admission des conclusions présentées par Mme B... A... dirigées contre l'ordonnance n° 2200297 du 15 février 2022 du juge des référés du tribunal administratif de Marseille en tant qu'elle statue sur la demande de suspension de l'exécution de la décision du 16 décembre 2021 de la directrice de la caisse primaire d'assurance maladie (CPAM) du Vaucluse de procéder, à l'expiration d'un délai de trente jours à compter de la notification de l'interdiction d'exercer dont elle fait l'objet, à une " récupération financière " à sa charge des remboursements aux assurés sociaux des consultations, soins et prescriptions qu'elle effectuerait en méconnaissance de l'interdiction d'exercer.

Le pourvoi a été communiqué à la caisse primaire d'assurance maladie du Vaucluse, qui n'a pas produit de mémoire.

Le pourvoi a été communiqué au ministre de la santé et de la prévention, qui n'a pas produit d'observations.

Vu les autres pièces du dossier ;

Vu :

- le code de la sécurité sociale ;

- le code de l'organisation judiciaire ;

- la loi n° 2021-1040 du 5 août 2021 ;

- le code de justice administrative ;

Après avoir entendu en séance publique :

- le rapport de Mme Flavie Le Tallec, maître des requêtes en service extraordinaire,

- les conclusions de M. Maxime Boutron, rapporteur public.

La parole ayant été donnée, après les conclusions, à la SCP Marlange, de la Burgade, avocat de Mme A....

Considérant ce qui suit :

1. Aux termes de l'article 12 de la loi du 5 août 2021 relative à la gestion de la crise sanitaire : " I. - Doivent être vaccinés, sauf contre-indication médicale reconnue, contre la covid-19 (...) / 2° Les professionnels de santé mentionnés à la quatrième partie du code de la santé publique, lorsqu'ils ne relèvent pas du 1° du présent I (...) " et aux termes de l'article 14 de la même loi : " I (...) B. - A compter du 15 septembre 2021, les personnes mentionnées au I de l'article 12 ne peuvent plus exercer leur activité si elles n'ont pas présenté les documents mentionnés au I de l'article 13 ou, à défaut, le justificatif de l'administration des doses de vaccins requises par le décret mentionné au II de l'article 12 (...)./ IV. - Les agences régionales de santé vérifient que les personnes mentionnées aux 2° et 3° du I de l'article 12 qui ne leur ont pas adressé les documents mentionnés au I de l'article 13 ne méconnaissent pas l'interdiction d'exercer leur activité prévue au I du présent article (...) ". Et aux termes de l'article 16 de la même loi : " I. - La méconnaissance de l'interdiction d'exercer, mentionnée au I de l'article 14, est sanctionnée dans les mêmes conditions que celles prévues à l'article L. 3136-1 du code de la santé publique pour le fait, pour toute personne, de se rendre dans un établissement recevant du public en méconnaissance d'une mesure édictée sur le fondement du 5° du I de l'article L. 3131-15 du même code. (...) ".

2. Il ressort des pièces du dossier soumis au juge des référés que, par courrier du 17 août 2021, le directeur général de l'agence régionale de santé de Provence Alpes-Côte d'Azur a informé Mme B... A..., médecin libéral, de l'interdiction d'exercer dont elle ferait l'objet à compter du 15 septembre suivant jusqu'à ce qu'elle satisfasse à l'obligation de vaccination contre la covid-19, et l'a mise en demeure de produire les justificatifs de sa vaccination. Par courrier du 14 décembre 2021, le directeur général lui a notifié l'interdiction d'exercer sa profession jusqu'à ce qu'elle satisfasse à l'obligation vaccinale, sous peine de poursuites pénales. En outre, la directrice de la caisse primaire d'assurance maladie (CPAM) du Vaucluse a fait part à Mme A..., par courrier du 16 décembre 2021, de son intention de procéder, à l'expiration d'un délai de trente jours à compter de la notification de l'interdiction d'exercer dont elle fait l'objet, à une " récupération financière " à sa charge des remboursements aux assurés sociaux des consultations, soins et prescriptions qu'elle effectuerait en méconnaissance de l'interdiction d'exercer. Par un courrier du 6 janvier 2022, le président du conseil départemental du Vaucluse de l'ordre des médecins a convoqué Mme A... afin que le conseil examine sa situation. Mme A... a demandé au juge des référés du tribunal administratif de Marseille, sur le fondement de l'article L. 521-1 du code de justice administrative, de suspendre l'exécution de l'ensemble de ces actes. Par une ordonnance du 15 février 2022, le juge des référés du tribunal administratif a rejeté sa demande. Par une décision du 23 septembre 2022, le Conseil d'Etat statuant au contentieux n'a admis les conclusions du pourvoi de Mme A... dirigées contre cette ordonnance qu'en tant qu'elle statue sur la demande de suspension de l'exécution de la décision de la directrice de la CPAM du Vaucluse du 16 décembre 2021.

3. Aux termes de l'article L. 521-1 du code de justice administrative : " Quand une décision administrative, même de rejet, fait l'objet d'une requête en annulation ou en réformation, le juge des référés, saisi d'une demande en ce sens, peut ordonner la suspension de l'exécution de cette décision, ou de certains de ses effets, lorsque l'urgence le justifie et qu'il est fait état d'un moyen propre à créer, en l'état de l'instruction, un doute sérieux quant à la légalité de la décision ". La demande présentée sur ce fondement ne doit pas être manifestement insusceptible de se rattacher à un litige relevant de la compétence de la juridiction administrative.

4. Aux termes du II de l'article R. 142-1- A du code de la sécurité sociale : " Sous réserve des dispositions particulières prévues par le présent chapitre, les demandes portées devant les juridictions spécialement désignées en application des articles L. 211-16, L. 311-15 et L. 311-16 du code de l'organisation judiciaire sont formées, instruites et jugées, au fond comme en référé, selon les dispositions du code de procédure civile ".

5. Il ressort des termes de l'ordonnance attaquée que le juge des référés du tribunal administratif de Marseille a rejeté la demande de Mme A..., en tant qu'elle tendait à la suspension de l'exécution de la décision de la directrice du 14 décembre 2021, comme portée devant un ordre de juridiction incompétent pour en connaître. En se fondant, pour statuer ainsi, sur les seules dispositions précitées de l'article R. 142-1-A du code de la sécurité sociale, qui se bornent à préciser les conditions dans lesquelles sont formées, instruites et jugées les demandes portées devant certaines juridictions spécialement désignées, notamment devant les tribunaux judiciaires connaissant, aux termes de l'article L. 211-16 du code de l'organisation judiciaire, des litiges relevant du contentieux de la sécurité sociale défini à l'article L. 142-1 du code de la sécurité sociale, le juge des référés a commis une erreur de droit. Mme A... est par suite fondée à demander, dans cette mesure, l'annulation de l'ordonnance qu'elle attaque.

6. Il y a lieu, dans les circonstances de l'espèce, de faire application de l'article L. 821-2 du code de justice administrative et de régler l'affaire au titre de la procédure de référé.

7. La condition d'urgence à laquelle est subordonné le prononcé d'une mesure de suspension, en application des dispositions de l'article L. 521-1 du code de justice administrative, ne peut être regardée comme remplie, Mme A... ne faisant valoir, à l'appui de sa demande de suspension de l'exécution de la décision du 16 décembre 2021, aucune circonstance de nature à caractériser l'existence d'une atteinte grave et immédiate à sa situation, et notamment aucun élément relatif à sa situation financière, ni à l'incidence financière de l'acte en litige.

8. Il résulte de ce qui précède que la demande de Mme A... doit être rejetée, y compris, par voie de conséquence, ses conclusions présentées au titre de l'article L. 761-1 du code de justice administrative.

D E C I D E :

--------------

Article 1er : L'ordonnance du 15 février 2022 du juge des référés du tribunal administratif de Marseille est annulée en tant qu'elle statue sur la demande de suspension de l'exécution de la décision de la directrice de la caisse primaire d'assurance maladie du Vaucluse du 16 décembre 2021.

Article 2 : La demande présentée par Mme A... devant le juge des référés du tribunal administratif de Marseille tendant à la suspension de l'exécution de cette décision est rejetée.

Article 3 : Les conclusions présentées par Mme A... au titre de l'article L. 761-1 du code de justice administrative sont rejetées.

Article 4 : La présente décision sera notifiée Mme B... A... et à la caisse primaire d'assurance maladie du Vaucluse.

Copie en sera adressée au ministre de la santé et de la prévention.

Délibéré à l'issue de la séance du 30 mars 2023 où siégeaient : Mme Fabienne Lambolez, assesseure, présidant ; M. Alain Seban, conseiller d'Etat et Mme Flavie Le Tallec, maître des requêtes en service extraordinaire-rapporteure.

Rendu le 25 avril 2023.

La présidente :

Signé : Mme Fabienne Lambolez

La rapporteure :

Signé : Mme Flavie Le Tallec

Le secrétaire :

Signé : M. Bernard Longieras


Synthèse
Formation : 5ème chambre
Numéro d'arrêt : 462201
Date de la décision : 25/04/2023
Type d'affaire : Administrative
Type de recours : Excès de pouvoir

Publications
Proposition de citation : CE, 25 avr. 2023, n° 462201
Inédit au recueil Lebon

Composition du Tribunal
Rapporteur ?: Mme Flavie Le Tallec
Rapporteur public ?: M. Maxime Boutron
Avocat(s) : SCP MARLANGE, DE LA BURGADE

Origine de la décision
Date de l'import : 27/04/2023
Fonds documentaire ?: Legifrance
Identifiant ECLI : ECLI:FR:CE:2023:462201.20230425
Association des cours judiciaires suprmes francophones
Organisation internationale de la francophonie
Juricaf est un projet de l'AHJUCAF, l'association des Cours suprêmes judiciaires francophones. Il est soutenu par l'Organisation Internationale de la Francophonie. Juricaf est un projet de l'AHJUCAF, l'association des Cours suprêmes judiciaires francophones. Il est soutenu par l'Organisation Internationale de la Francophonie.
Logo iall 2012 website award