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13/04/2023 | FRANCE | N°466057

France | France, Conseil d'État, 4ème chambre, 13 avril 2023, 466057


Vu la procédure suivante :

Par une requête et un mémoire en réplique enregistrés le 25 juillet 2022 et le 6 février 2023 au secrétariat du contentieux du Conseil d'Etat, M. B... A... demande au Conseil d'Etat :

1°) d'annuler pour excès de pouvoir la décision du 17 mai 2022 par laquelle le Conseil national de l'ordre des médecins, statuant en formation restreinte, l'a suspendu du droit d'exercer la profession de médecin pour une durée d'un an et a subordonné la reprise de son activité à la justification du respect d'obligations de formation ;

2°) de mettre

à la charge du Conseil national de l'ordre des médecins la somme de 4 000 euros a...

Vu la procédure suivante :

Par une requête et un mémoire en réplique enregistrés le 25 juillet 2022 et le 6 février 2023 au secrétariat du contentieux du Conseil d'Etat, M. B... A... demande au Conseil d'Etat :

1°) d'annuler pour excès de pouvoir la décision du 17 mai 2022 par laquelle le Conseil national de l'ordre des médecins, statuant en formation restreinte, l'a suspendu du droit d'exercer la profession de médecin pour une durée d'un an et a subordonné la reprise de son activité à la justification du respect d'obligations de formation ;

2°) de mettre à la charge du Conseil national de l'ordre des médecins la somme de 4 000 euros au titre de l'article L. 761-1 du code de justice administrative.

Vu les autres pièces du dossier ;

Vu :

- le code de la santé publique ;

- le code de justice administrative ;

Après avoir entendu en séance publique :

- le rapport de M. Edouard Solier, maître des requêtes,

- les conclusions de M. Raphaël Chambon, rapporteur public ;

La parole ayant été donnée, après les conclusions, à la SCP Duhamel - Rameix - Gury - Maître, avocat de M. A... et à la SARL Matuchansky, Poupot, Valdelièvre, avocat du Conseil national de l'ordre des médecins ;

Considérant ce qui suit :

1. Aux termes de l'article R. 4124-3-5 du code de la santé publique : " I. - En cas d'insuffisance professionnelle rendant dangereux l'exercice de la profession, la suspension temporaire, totale ou partielle, du droit d'exercer est prononcée par le conseil régional ou interrégional pour une période déterminée, qui peut, s'il y a lieu, être renouvelée. / Le conseil régional ou interrégional est saisi à cet effet soit par le directeur général de l'agence régionale de santé, soit par une délibération du conseil départemental ou du conseil national. Ces saisines ne sont pas susceptibles de recours. / II. - La suspension ne peut être ordonnée que sur un rapport motivé établi à la demande du conseil régional ou interrégional dans les conditions suivantes : / 1° Pour les médecins, le rapport est établi par trois médecins qualifiés dans la même spécialité que celle du praticien concerné désignés comme experts, le premier par l'intéressé, le deuxième par le conseil régional ou interrégional et le troisième par les deux premiers experts. (...) / III. - En cas de carence de l'intéressé lors de la désignation du premier expert ou de désaccord des deux experts lors de la désignation du troisième, la désignation est faite, à la demande du conseil régional ou interrégional, par ordonnance du président du tribunal judiciaire dans le ressort duquel se trouve la résidence professionnelle de l'intéressé. (...)/IV. - Les experts procèdent ensemble, sauf impossibilité manifeste, à l'examen des connaissances théoriques et pratiques du praticien. Le rapport d'expertise (...) indique les insuffisances relevées au cours de l'expertise, leur dangerosité et préconise les moyens de les pallier par une formation théorique et, si nécessaire, pratique (...). / VI. - Si le conseil régional ou interrégional n'a pas statué dans le délai de deux mois à compter de la réception de la demande dont il est saisi, l'affaire est portée devant le Conseil national de l'ordre. / VII. - La décision de suspension temporaire du droit d'exercer pour insuffisance professionnelle définit les obligations de formation du praticien. (...) ".

2. Il ressort des pièces du dossier que le conseil régional de Bretagne de l'ordre des médecins a été saisi par le conseil départemental du Morbihan de l'ordre des médecins, sur le fondement des dispositions de l'article R. 4124-3-5 du code de la santé publique citées au point 1, de la situation de M. A..., médecin qualifié spécialiste en médecine générale. Par la décision attaquée du 17 mai 2022, prise en application du VI du même article sur renvoi du conseil régional de Bretagne de l'ordre des médecins, la formation restreinte du Conseil national de l'ordre des médecins a suspendu M. A... du droit d'exercer la profession de médecin pour une durée d'un an et subordonné la reprise de son activité à la justification du respect d'obligations de formation qu'elle a précisée.

3. En premier lieu, il ressort des pièces du dossier que M. A... a été avisé de la possibilité de désigner lui-même un expert et que c'est en raison de la carence de l'intéressé qu'en application des dispositions du III de l'article R. 4124-3-5 du code de la santé publique, le président du tribunal judiciaire de Lorient a désigné comme expert M. C.... Par suite, le moyen tiré de ce que l'expertise réalisée le concernant serait irrégulière en ce qu'il n'a pas été invité à désigner l'un des trois experts manque en fait.

4. En second lieu, si M. A... fait valoir que le rapport d'expertise le concernant ne conclut pas à l'existence d'une insuffisance professionnelle rendant dangereux l'exercice de la profession, il résulte toutefois des termes mêmes de ce rapport qu'il constate une formation médicale ancienne sans remise à niveau théorique ou pratique récente, fait état des lacunes nombreuses dans ses connaissances médicales, n'écarte un risque pour la sécurité des patients qu'en considération de la pratique limitée de M. A... en cabinet, qui se borne pour l'essentiel à prescrire des arrêts de travail et dans une moindre mesure des renouvellements d'ordonnance, tout en recommandant qu'il cesse son activité de médecin de garde à la maison médicale de Locminé en raison de lacunes dans le domaine de l'urgence. Il s'ensuit qu'en estimant que M. A... présentait une insuffisance professionnelle rendant dangereux l'exercice de la médecine générale et en prononçant à son encontre, par la décision attaquée, une mesure de suspension de son activité pour une durée d'un an assortie de l'obligation de suivre une formation adaptée, et ce sans limiter la suspension, eu égard aux lacunes relevées, à la seule activité de médecine de garde, la formation restreinte du Conseil national de l'ordre des médecins a fait une exacte application des dispositions de l'article R. 4124-3-5 du code de la santé publique.

5. Il résulte de tout ce qui précède que M. A... n'est pas fondé à demander l'annulation de la décision qu'il attaque. Les dispositions de l'article L. 761-1 du code de justice administrative font, par suite, obstacle à ce qu'une somme soit mise, à ce titre, à la charge du Conseil national de l'ordre des médecins, qui n'est pas, dans la présente instance, la partie perdante. Il n'y a pas lieu, dans les circonstances de l'espèce, de mettre à la charge de M. A... la somme que demande le Conseil national de l'ordre des médecins au titre de ces mêmes dispositions.

D E C I D E :

--------------

Article 1er : La requête de M. A... est rejetée.

Article 2 : Les conclusions du Conseil national de l'ordre des médecins présentées au titre des dispositions de l'article L. 761-1 du code de la justice administrative sont rejetées.

Article 3: La présente décision sera notifiée à M. B... A... et au Conseil national de l'ordre des médecins.


Synthèse
Formation : 4ème chambre
Numéro d'arrêt : 466057
Date de la décision : 13/04/2023
Type d'affaire : Administrative
Type de recours : Excès de pouvoir

Publications
Proposition de citation : CE, 13 avr. 2023, n° 466057
Inédit au recueil Lebon

Composition du Tribunal
Rapporteur ?: M. Edouard Solier
Rapporteur public ?: M. Raphaël Chambon
Avocat(s) : SCP DUHAMEL - RAMEIX - GURY- MAITRE ; SARL MATUCHANSKY, POUPOT, VALDELIEVRE

Origine de la décision
Date de l'import : 23/04/2023
Fonds documentaire ?: Legifrance
Identifiant ECLI : ECLI:FR:CE:2023:466057.20230413
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