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07/04/2023 | FRANCE | N°450231

France | France, Conseil d'État, 5ème chambre, 07 avril 2023, 450231


Vu la procédure suivante :

M. A... B... a demandé au tribunal administratif de Besançon d'annuler les décisions implicites par lesquelles auraient été rejetées par le directeur du centre hospitalier de Belfort-Montbéliard, le directeur du centre hospitalier Saint-Jacques de Thann, le directeur de l'agence régionale de santé de Franche-Comté, le préfet du Haut-Rhin et le préfet du Territoire de Belfort, les demandes qu'il leur a envoyées tendant à la reconnaissance de l'imputabilité au service des congés de maladie pris depuis le 5 février 2001 ainsi que la décision no

tifiée le 28 novembre 2014 par laquelle le directeur de l'agence régiona...

Vu la procédure suivante :

M. A... B... a demandé au tribunal administratif de Besançon d'annuler les décisions implicites par lesquelles auraient été rejetées par le directeur du centre hospitalier de Belfort-Montbéliard, le directeur du centre hospitalier Saint-Jacques de Thann, le directeur de l'agence régionale de santé de Franche-Comté, le préfet du Haut-Rhin et le préfet du Territoire de Belfort, les demandes qu'il leur a envoyées tendant à la reconnaissance de l'imputabilité au service des congés de maladie pris depuis le 5 février 2001 ainsi que la décision notifiée le 28 novembre 2014 par laquelle le directeur de l'agence régionale de santé d'Alsace a explicitement rejeté une demande ayant le même objet. Par un jugement n° 1500438 du 4 juillet 2017 le tribunal administratif a rejeté sa demande.

Par un arrêt n° 17NC02185 du 26 juin 2020, la cour administrative d'appel de Nancy a rejeté les conclusions de l'appel de M. B... tendant à l'annulation de ce jugement en tant seulement qu'il a rejeté ses conclusions dirigées contre de prétendues décisions implicites de rejet de l'agence régionale de santé de Franche-Comté, des centres hospitaliers de Belfort-Montbéliard et Saint-Jacques de Thann et des préfets du Territoire de Belfort et du Haut-Rhin ainsi que contre la décision de l'agence régionale de santé d'Alsace du 25 janvier 2015 et sursis à statuer sur le surplus des conclusions de la requête afin d'appeler en cause le Centre national de gestion des praticiens hospitaliers et des personnels de direction de la fonction publique hospitalière (CNG).

Par un arrêt du 28 décembre 2020 pris sous le même numéro, la cour administrative d'appel de Nancy a annulé le jugement de première instance en tant qu'il a omis de statuer sur les conclusions de M. B... tendant à l'annulation de la décision implicite née du silence gardé par le CNG sur la demande d'imputabilité au service de celui-ci et rejeté ces conclusions.

Par un pourvoi sommaire et un mémoire complémentaire, enregistrés les 1ers mars et 1er juin 2021 au secrétariat du contentieux du Conseil d'Etat, M. B... demande au Conseil d'Etat :

1°) d'annuler ces deux arrêts de la cour administrative d'appel de Nancy ;

2°) réglant l'affaire au fond, de faire droit à sa demande de première instance ;

3°) de mettre à la charge solidaire du centre hospitalier de Belfort-Montbéliard, du centre hospitalier Saint-Jacques de Thann, de l'agence régionale de santé de Franche-Comté, de l'agence régionale de santé d'Alsace, de l'Etat et du CNG de la somme de 3 500 euros au titre de l'article L. 761-1 du code de justice administrative.

Vu les autres pièces du dossier ;

Vu :

- le code de la santé publique ;

- le décret n° 2007-704 du 4 mai 2007 ;

- le code de justice administrative ;

Après avoir entendu en séance publique :

- le rapport de M. Alain Seban, conseiller d'Etat,

- les conclusions de M. Florian Roussel, rapporteur public.

La parole ayant été donnée, après les conclusions, à la SCP Thouvenin, Coudray, Grevy, avocat de M. B....

Considérant ce qui suit :

1. Il ressort des pièces du dossier soumis aux juges du fond que M. B..., praticien hospitalier, a exercé ses fonctions au centre hospitalier Saint-Jacques de Thann, puis, à compter de 2006, au centre hospitalier de Belfort-Montbéliard. Par courrier du 17 novembre 2014 adressé au centre hospitalier de Belfort-Montbéliard, au centre hospitalier Saint-Jacques de Thann, à l'agence régionale de santé de Franche-Comté, à l'agence régionale de santé d'Alsace, au préfet du Haut-Rhin et au préfet du Territoire de Belfort, il a sollicité la reconnaissance de l'imputabilité au service du syndrome dépressif dont il souffrait et qui avait conduit à son placement, à deux reprises, en congé de longue durée. Il a demandé l'annulation de la décision du 25 janvier 2015 par laquelle l'agence régionale de santé d'Alsace s'est déclarée incompétente pour statuer sur sa demande et de la décision implicite prise par l'autorité compétente au tribunal administratif de Besançon, qui a rejeté sa demande par un jugement du 4 juillet 2017. Sur appel de M. B..., la cour administrative d'appel de Nancy, par un arrêt avant-dire-droit du 26 juin 2020 et un arrêt du 28 décembre 2020, a rejeté l'appel formé par M. B... contre ce jugement. M. B... se pourvoit en cassation contre ces arrêts.

Sur le cadre juridique du litige :

2. D'une part, aux termes de l'article R. 6152-35 du code de la santé publique dans sa version applicable jusqu'au 1er avril 2017, applicable en l'espèce : " Les praticiens régis par la présente section ont droit : / (...) 4° A des congés de maladie, longue maladie, longue durée dans des conditions fixées aux articles R. 6152-37 à R. 6152-39 ; (...) ". Aux termes de l'article R. 6152-37 du même code dans sa version applicable jusqu'à cette même date : " En cas de maladie dûment constatée et attestée par un certificat médical mettant un praticien dans l'impossibilité d'exercer ses fonctions, celui-ci est de droit mis en congé par décision du directeur de l'établissement. (...) "

3. D'autre part, aux termes du 2° de l'article 2 du décret du 4 mai 2007 relatif à l'organisation et au fonctionnement du Centre national de gestion des praticiens hospitaliers et des personnels de direction de la fonction publique hospitalière (CNG) et modifiant le code de la santé publique, visé ci-dessus, le directeur général de cet établissement public assure " au nom du ministre chargé de la santé la gestion statutaire et le développement des ressources humaines (....) des praticiens hospitaliers à temps plein et à temps partiel et, à ce titre : (...) 2° La nomination et les autres actes de gestion de la carrière des praticiens hospitaliers ".

4. La reconnaissance de l'imputabilité au service d'une maladie contractée par un praticien hospitalier ne constitue pas un acte de gestion de la carrière de ce praticien qu'il appartiendrait au directeur général du CNG de prendre en application des dispositions citées au point 3. Si l'article R. 6152-41 du code de la santé publique, dans sa rédaction applicable en l'espèce, prévoyait que : " Les dispositions des articles R. 6152-37 à R. 6152-39 ne s'appliquent pas en cas de maladie imputable au service ou d'accident survenu dans l'exercice des fonctions ou à l'occasion desdites fonctions ", ces dispositions, relatives aux conditions de rémunération et du durée du congé maladie et de saisine du comité médical, n'avaient pas pour objet ni pour effet de retirer au directeur de l'établissement de santé dans lequel le praticien est affecté la compétence pour statuer sur ses droits à congé, y compris en cas d'affection imputable au service, qu'il tenait des dispositions de l'article R. 6152-37 du même code. Il suit de là que M. B... doit être regardé comme demandant l'annulation pour excès de pouvoir des décisions implicites de refus résultant du silence gardé par les directeurs respectifs du centre hospitalier Saint-Jacques de Thann et du centre hospitalier de Belfort-Montbéliard sur ses demandes tendant à voir reconnaître l'imputabilité au service des affections dont il souffrait.

Sur le défaut de consultation du comité médical :

5. Aux termes du premier alinéa de l'article R. 6152-36 du code de la santé publique : " Un comité médical, placé auprès de chaque préfet, est chargé de donner un avis sur l'aptitude physique et mentale des praticiens régis par le présent statut à exercer leurs fonctions, ainsi que sur toute question d'ordre médical les intéressant pour l'application des dispositions du présent statut. " En estimant que ces dispositions n'imposaient pas, à elles seules, et en tout état de cause, la consultation du comité médical sur les décisions refusant de reconnaître l'imputabilité au service de l'affection dont souffrait le requérant, la cour administrative d'appel de Nancy n'a pas commis d'erreur de droit.

Sur l'imputabilité au service :

6. Aux termes de l'article R. 6152-41 du code de la santé publique dans sa version applicable jusqu'au 1er avril 2017, applicable en l'espèce : " Les dispositions des articles R. 6152-37 à R. 6152-39 ne s'appliquent pas en cas de maladie imputable au service ou d'accident survenu dans l'exercice des fonctions ou à l'occasion desdites fonctions. En ce cas, l'intéressé continue à percevoir la totalité des émoluments qui lui sont accordés en application du 1° de l'article R. 6152-23 dans la limite d'une année. A l'issue de cette période, son cas est soumis par le préfet du département au comité médical qui propose, soit sa réintégration, soit la prolongation du congé dans les mêmes limites de durée et de rémunération, à concurrence d'un total de cinq années. " Une maladie contractée par un praticien hospitalier, ou son aggravation, doit être regardée comme imputable au service si elle présente un lien direct avec l'exercice des fonctions ou avec des conditions de travail de nature à susciter le développement de la maladie en cause, sauf à ce qu'un fait personnel de l'agent ou toute autre circonstance particulière conduisent à détacher la survenance ou l'aggravation de la maladie du service.

7. Pour juger que l'affection dont souffrait M. B... n'était pas imputable au service, l'arrêt attaqué du 28 décembre 2020 relève que, s'agissant, en premier lieu, de la période au cours de laquelle l'intéressé a été affecté au centre hospitalier de Thann, marquée par un contexte professionnel tendu, il ne met en évidence aucun élément propre à sa situation qui permettrait d'établir l'existence d'un lien direct entre le syndrome dépressif dont il a souffert et ce contexte professionnel. S'agissant, en second lieu, de la période au cours de laquelle M. B... a été affecté au centre hospitalier de Belfort-Montbéliard, à compter de 2006, le même arrêt relève qu'il a été placé sur un poste adapté à son état dépressif, reconnu comme maladie professionnelle. La cour administrative d'appel de Nancy n'a pas inexactement qualifié les faits de l'espèce en se fondant sur ces constatations souveraines pour refuser de reconnaître l'imputabilité au service de cette affection.

8. Il résulte de tout ce qui précède que M. B... n'est pas fondé à demander l'annulation des arrêts qu'il attaque. Son pourvoi doit, par suite, être rejeté y compris les conclusions à l'application des dispositions de l'article L. 761-1 du code de justice administrative.

D E C I D E :

--------------

Article 1er : Le pourvoi de M. B... est rejeté.

Article 2 : La présente décision sera notifiée à M. A... B....

Copie en sera adressée au centre national de gestion des praticiens hospitaliers et des personnels de direction de la fonction publique hospitalière et au groupe hospitalier de la région de Mulhouse et Sud-Alsace.

Délibéré à l'issue de la séance du 9 mars 2023 où siégeaient : M. Jean-Philippe Mochon, président de chambre, présidant ; M. Olivier Yeznikian, conseiller d'Etat et M. Alain Seban, conseiller d'Etat-rapporteur.

Rendu le 7 avril 2023.

Le président :

Signé : M. Jean-Philippe Mochon

Le rapporteur :

Signé : M. Alain Seban

La secrétaire :

Signé : Mme Anne-Lise Calvaire


Synthèse
Formation : 5ème chambre
Numéro d'arrêt : 450231
Date de la décision : 07/04/2023
Type d'affaire : Administrative

Publications
Proposition de citation : CE, 07 avr. 2023, n° 450231
Inédit au recueil Lebon

Composition du Tribunal
Rapporteur ?: M. Alain Seban
Rapporteur public ?: M. Florian Roussel
Avocat(s) : SCP THOUVENIN, COUDRAY, GREVY

Origine de la décision
Date de l'import : 20/04/2023
Fonds documentaire ?: Legifrance
Identifiant ECLI : ECLI:FR:CE:2023:450231.20230407
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