Vu les procédures suivantes :
La société Parc éolien d'Argenteuil a demandé à la cour administrative d'appel de Lyon d'annuler l'arrêté du 21 octobre 2019 par lequel le préfet de l'Yonne a refusé de lui délivrer l'autorisation d'exploiter un parc éolien composé de sept éoliennes et un poste de livraison sur le territoire de la commune d'Argenteuil-sur-Armançon. Par un arrêt n° 19LY04659 du 18 novembre 2021, la cour administrative d'appel, après avoir admis l'intervention de l'association Paysages et Forêts de l'Armançon, a annulé l'arrêté préfectoral et enjoint au préfet de l'Yonne de délivrer l'autorisation sollicitée assortie, le cas échéant, des prescriptions indispensables à la protection des intérêts mentionnés à l'article L. 511-1 du code de l'environnement.
I. Sous le n° 460474, par un pourvoi sommaire, un mémoire complémentaire et un mémoire en réplique, enregistrés les 17 janvier et 5 avril 2022 et 23 novembre 2023 au secrétariat du contentieux du Conseil d'Etat, l'association Paysages et Forêts de l'Armançon demande au Conseil d'Etat :
1°) d'annuler cet arrêt ;
2°) réglant l'affaire au fond, de rejeter la demande de la société Parc éolien d'Argenteuil ;
3°) de mettre à la charge de l'Etat et de la société Parc éolien d'Argenteuil la somme de 3 500 euros au titre de l'article L. 761-1 du code de justice administrative.
II. Sous le n° 460637, par un pourvoi sommaire et un mémoire complémentaire, enregistrés les 19 janvier et 19 avril 2022 au secrétariat du contentieux du Conseil d'Etat, la ministre de la transition écologique demande au Conseil d'Etat d'annuler cet arrêt.
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Vu les autres pièces des dossiers ;
Vu :
- le code de l'environnement ;
- le code du patrimoine ;
- le code de l'urbanisme ;
- le code de justice administrative ;
Après avoir entendu en séance publique :
- le rapport de M. David Gaudillère, maître des requêtes,
- les conclusions de M. Stéphane Hoynck, rapporteur public ;
La parole ayant été donnée, après les conclusions, à la SCP Marlange, de la Burgade, avocat de l'association Paysages et Forêts de l'Armançon, à la SARL Meier-Bourdeau, Lecuyer et associés, avocat de la société Parc éolien d'Argenteuil ;
Considérant ce qui suit :
1. Par un arrêté du 21 octobre 2019, le préfet de l'Yonne a refusé de délivrer à la société Parc éolien d'Argenteuil l'autorisation unique qu'elle avait sollicitée pour construire et exploiter un parc composé de sept éoliennes et un poste de livraison sur le territoire de la commune d'Argenteuil-sur-Armançon. Par un arrêt du 18 novembre 2021, la cour administrative d'appel de Lyon a annulé cet arrêté et enjoint au préfet de l'Yonne de délivrer l'autorisation demandée, le cas échéant assortie des prescriptions nécessaires. Par deux pourvois qu'il y a lieu de joindre pour statuer par une seule décision, l'association Paysages et Forêts de l'Armançon et la ministre de la transition écologique demandent au Conseil d'Etat d'annuler cet arrêt.
2. Aux termes de l'article R. 111-27 du code de l'urbanisme : " Le projet peut être refusé ou n'être accepté que sous réserve de l'observation de prescriptions spéciales si les constructions, par leur situation, leur architecture, leurs dimensions ou l'aspect extérieur des (...) ouvrages à édifier (...), sont de nature à porter atteinte au caractère ou à l'intérêt des lieux avoisinants, aux sites, aux paysages naturels ou urbains ainsi qu'à la conservation des perspectives monumentales ".
3. Il résulte de ces dispositions que, si les constructions projetées portent atteinte au caractère ou à l'intérêt des lieux avoisinants, aux sites, aux paysages naturels ou urbains ou encore à la conservation des perspectives monumentales, l'autorité administrative compétente peut refuser de délivrer le permis de construire sollicité ou l'assortir de prescriptions spéciales. Pour rechercher l'existence d'une atteinte de nature à fonder le refus de permis de construire ou les prescriptions spéciales accompagnant la délivrance de ce permis, il lui appartient d'apprécier, dans un premier temps, la qualité du site sur lequel la construction est projetée et d'évaluer, dans un second temps, l'impact que cette construction, compte tenu de sa nature et de ses effets, pourrait avoir sur le site. Les dispositions de cet article excluent qu'il soit procédé, dans le second temps du raisonnement, à une balance d'intérêts divers en présence, autres que ceux mentionnés par cet article et, le cas échéant, par le plan local d'urbanisme de la commune.
4. Pour apprécier aussi bien la qualité du site que l'impact de la construction projetée sur ce site, il appartient à l'autorité administrative, sous le contrôle du juge, de prendre en compte l'ensemble des éléments pertinents et notamment, le cas échéant, la covisibilité du projet avec des bâtiments remarquables, quelle que soit la protection dont ils bénéficient par ailleurs au titre d'autres législations.
5. Il résulte de ce qui précède qu'en jugeant que le critère de covisibilité avec des monuments historiques ne pouvait être utilement invoqué pour caractériser une atteinte contraire à l'article R. 111-27 du code de l'urbanisme en raison de l'implantation du projet en dehors du périmètre de protection résultant des articles L. 621-30 et L. 621-31 du code du patrimoine, la cour administrative d'appel a commis une erreur de droit. Par suite, sans qu'il soit nécessaire de se prononcer sur les autres moyens soulevés, la ministre de la transition écologique est fondée à demander l'annulation de l'arrêt attaqué.
6. Les dispositions de l'article L. 761-1 du code de justice administrative font obstacle à que les sommes demandées à ce titre par la société Parc éolien d'Argenteuil soient mises à la charge de l'Etat et de l'association Paysages et Forêts de l'Armançon, qui ne sont pas les parties perdantes dans la présente instance. Il n'y a pas lieu, dans les circonstances de l'espèce, de mettre à la charge de la société Parc éolien d'Argenteuil la somme que l'association demande au titre des mêmes dispositions.
D E C I D E :
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Article 1er : L'arrêt du 18 novembre 2021 de la cour administrative de Lyon est annulé.
Article 2 : L'affaire est renvoyée à la cour administrative d'appel de Lyon.
Article 3 : Les conclusions présentées par l'association Paysages et Forêts de l'Armançon et la société Parc éolien d'Argenteuil au titre de l'article L. 761-1 du code de justice administrative sont rejetées.
Article 4 : La présente décision sera notifiée au ministre de la transition écologique et de la cohésion des territoires, à l'association Paysages et Forêts de l'Armançon et à la société Parc éolien d'Argenteuil.
Délibéré à l'issue de la séance du 16 février 2023 où siégeaient : M. Cyril Roger-Lacan, assesseur, présidant ; Mme Suzanne von Coester, conseillère d'Etat et M. David Gaudillère, maître des requêtes-rapporteur.
Rendu le 24 mars 2023.
Le président :
Signé : M. Cyril Roger-Lacan
Le rapporteur :
Signé : M. David Gaudillère
La secrétaire :
Signé : Mme Marie-Adeline Allain