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06/03/2023 | FRANCE | N°461466

France | France, Conseil d'État, 10ème chambre, 06 mars 2023, 461466


Vu la procédure suivante :

M. D... B... A... a demandé à la Cour nationale du droit d'asile d'annuler la décision du 10 février 2021 par laquelle l'Office français de protection des réfugiés et apatrides (OFPRA) a rejeté sa demande d'asile.

Par une décision n° 21016398 du 22 septembre 2021, la Cour nationale du droit d'asile a rejeté sa demande.

Par un pourvoi sommaire et un mémoire complémentaire, enregistrés les 14 février et 16 mai 2022 au secrétariat du contentieux du Conseil d'Etat, M. B... A... demande au Conseil d'Etat :

1°) d'annuler cett

e décision ;

2°) de mettre à la charge de l'OFPRA la somme de 3 000 euros, à verser à l...

Vu la procédure suivante :

M. D... B... A... a demandé à la Cour nationale du droit d'asile d'annuler la décision du 10 février 2021 par laquelle l'Office français de protection des réfugiés et apatrides (OFPRA) a rejeté sa demande d'asile.

Par une décision n° 21016398 du 22 septembre 2021, la Cour nationale du droit d'asile a rejeté sa demande.

Par un pourvoi sommaire et un mémoire complémentaire, enregistrés les 14 février et 16 mai 2022 au secrétariat du contentieux du Conseil d'Etat, M. B... A... demande au Conseil d'Etat :

1°) d'annuler cette décision ;

2°) de mettre à la charge de l'OFPRA la somme de 3 000 euros, à verser à la SCP Zribi et Texier, son avocat, au titre des articles L. 761-1 du code de justice administrative et 37 de la loi du 10 juillet 1991.

Vu les autres pièces du dossier ;

Vu :

- la convention de Genève du 28 juillet 1951 relative au statut

des réfugiés et le protocole signé à New York le 31 janvier 1967 ;

- le code de l'entrée et du séjour des étrangers et du droit d'asile ;

- la loi n° 91-647 du 10 juillet 1991 ;

- le code de justice administrative ;

Après avoir entendu en séance publique :

- le rapport de Mme Myriam Benlolo Carabot, maître des requêtes en service extraordinaire,

- les conclusions de Mme Esther de Moustier, rapporteure publique ;

La parole ayant été donnée, après les conclusions, à la SCP Zribi et Texier, avocat de M. D... B... A... ;

Considérant ce qui suit :

1. M. D... B... A..., ressortissant somalien, se pourvoit en cassation contre la décision du 22 septembre 2021 par laquelle la Cour nationale du droit d'asile a rejeté son recours dirigé contre la décision du 10 février 2021 de l'Office français de protection des réfugiés et apatrides (OFPRA) rejetant sa demande de protection internationale.

2. En premier lieu, la " note en délibéré " de M. B... A... en date du 1er septembre 2021, qui se borne à communiquer à la Cour nationale du droit d'asile deux pièces, assorties d'une brève précision factuelle concernant la première, doit être regardée, malgré son intitulé, comme une production que la cour pouvait se borner à viser, comme elle l'a fait, au nombre des " autres pièces du dossier ". Le moyen tiré de ce que la cour aurait entaché sa décision d'irrégularité faute d'avoir visé cette production doit, par suite, être écarté.

3. En deuxième lieu, en relevant que le récit de M. B... A... comportait de nombreuses zones d'ombre et imprécisions concernant notamment l'emploi qu'il occupait au sein d'une organisation non gouvernementale italienne, les circonstances de l'arrestation dont il aurait fait l'objet de la part de miliciens Al-Shabaab trois ans après avoir quitté cet emploi, les conditions de son hospitalisation à plus d'un millier de kilomètres de sa localité d'origine et les circonstances de son évasion puis de son départ de Somalie, la Cour nationale du droit d'asile, qui ne s'est pas méprise sur la portée des écritures dont elle était saisie, a porté sur les faits de l'espèce une appréciation souveraine exempte de dénaturation. En en déduisant, par une décision suffisamment motivée, que les risques de persécution allégués provenant de l'organisation Al-Shabaab en raison de la confession religieuse de l'intéressé, des opinions politiques pro-gouvernementales qui lui sont imputées et de l'emploi précédemment mentionné n'étaient pas établis, la Cour nationale du droit d'asile n'a pas commis d'erreur de droit ni entaché sa décision de dénaturation des pièces du dossier.

4. En troisième lieu, en vertu du 3° de l'article L. 512-1 du code de l'entrée et du séjour des étrangers et du droit d'asile, le bénéfice de la protection subsidiaire est accordé à tout civil qui ne remplit pas les conditions pour se voir reconnaître la qualité de réfugié mais pour lequel il existe des motifs sérieux et avérés de croire qu'il serait exposé dans son pays à une menace grave et individuelle contre sa vie ou sa personne en raison d'une violence qui peut s'étendre à des personnes sans considération de leur situation personnelle et résultant d'une situation de conflit armé interne ou international.

5. Il ressort des énonciations de la décision attaquée que la Cour nationale du droit d'asile a recherché si, à la date de sa décision, M. B... A... se trouverait exposé à une situation de violence aveugle d'une telle intensité qu'il courrait, en cas de retour dans son pays et par sa seule présence dans celui-ci, un risque d'atteinte grave justifiant l'octroi de la protection subsidiaire. Par ailleurs, la cour n'était pas tenue de faire référence à l'intégralité de la documentation publique relative à une telle situation existant à la date de sa décision. Dans ces conditions, le requérant n'est pas fondé à soutenir que la cour ne s'est pas placée à la date de sa décision pour porter son appréciation sur la situation en Somalie et qu'elle a commis une erreur de droit en ne tenant pas compte d'un rapport du bureau européen d'appui pour l'asile publié deux jours avant le prononcé de sa décision, lequel, en tout état de cause, ne contredisait pas ses constatations.

6. En quatrième lieu, en estimant, au vu de la réalité et de l'hétérogénéité de la situation sécuritaire en Somalie qu'elle n'a pas dénaturées, que la seule invocation par le requérant de sa nationalité somalienne ne pouvait suffire à établir le bien-fondé de sa demande de protection subsidiaire, la Cour nationale du droit d'asile n'a pas entaché sa décision d'une inexacte qualification juridique des faits.

7. En cinquième lieu, en jugeant, au regard du nombre limité d'incidents de sécurité et de victimes, notamment civiles, du conflit armé affectant la province d'origine du requérant, le Galguduud, que les combats qui s'y déroulent n'exposaient pas l'ensemble des civils à des effets directs ou collatéraux et que cette région ne se caractérisait donc pas par une situation de violence aveugle justifiant l'octroi de la protection subsidiaire, la Cour nationale du droit d'asile a, sur la base des faits qu'elle a souverainement appréciés sans les dénaturer, procédé à leur exacte qualification juridique.

8. En sixième lieu, il ressort des pièces du dossier soumis aux juges du fond que les régions du Bénadir, notamment à Mogadiscio, ainsi que du Moyen-Shabelle étaient, à la date de la décision litigieuse, caractérisées par des violences d'intensité élevée en raison d'un conflit armé interne. Toutefois, en jugeant, tant au regard du nombre d'incidents et de victimes, notamment civiles, qu'au regard du nombre d'attaques violentes menées par la milice Al-Shabaab, que les violences affectant ces zones, par lesquelles le requérant se bornerait à transiter pour rejoindre sa province d'origine, n'atteignaient pas un seuil de gravité suffisant pour ouvrir droit au bénéfice de la protection subsidiaire, la cour, qui s'est fondée sur des faits qu'elle n'a pas dénaturés, ne les a pas inexactement qualifiés.

9. En dernier lieu, en estimant que M. B... A... n'établissait pas qu'il était susceptible d'être spécifiquement visé en raison d'éléments propres à sa situation personnelle en cas de retour dans sa province d'origine, la cour, qui a suffisamment motivé sa décision, a porté sur les faits de l'espèce une appréciation souveraine exempte de dénaturation.

10. Il résulte de tout ce qui précède que le pourvoi de M. B... A... doit être rejeté, y compris, par voie de conséquence, ses conclusions présentées au titre de l'article L. 761-1 du code de justice administrative et de l'article 37 de la loi du 10 juillet 1991.

D E C I D E :

--------------

Article 1er : Le pourvoi de M. B... A... est rejeté.

Article 2 : La présente décision sera notifiée à M. D... B... A... et à l'Office français de protection des réfugiés et apatrides.

Délibéré à l'issue de la séance du 16 février 2023 où siégeaient : Mme Nathalie Escaut, conseillère d'Etat, présidant ; M. Alexandre Lallet, conseiller d'Etat et Mme Myriam Benlolo Carabot, maître des requêtes en service extraordinaire-rapporteure.

Rendu le 6 mars 2023.

La présidente :

Signé : Mme Nathalie Escaut

La rapporteure :

Signé : Mme Myriam Benlolo Carabot

La secrétaire :

Signé : Mme Sylvie Leporcq


Synthèse
Formation : 10ème chambre
Numéro d'arrêt : 461466
Date de la décision : 06/03/2023
Type d'affaire : Administrative
Type de recours : Plein contentieux

Publications
Proposition de citation : CE, 06 mar. 2023, n° 461466
Inédit au recueil Lebon

Composition du Tribunal
Rapporteur ?: Mme Myriam Benlolo Carabot
Rapporteur public ?: Mme Esther de Moustier
Avocat(s) : SCP ZRIBI, TEXIER

Origine de la décision
Date de l'import : 23/04/2023
Fonds documentaire ?: Legifrance
Identifiant ECLI : ECLI:FR:CE:2023:461466.20230306
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