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06/03/2023 | FRANCE | N°458553

France | France, Conseil d'État, 10ème chambre, 06 mars 2023, 458553


Vu la procédure suivante :

M. et Mme D... ont demandé au tribunal administratif de Versailles de prononcer la décharge des cotisations supplémentaires d'impôt sur le revenu et de contributions sociales auxquelles ils ont été assujettis au titre des années 2012 et 2013. Par un jugement n° 1607710 du 22 novembre 2019, le tribunal administratif de Versailles a prononcé un non-lieu à statuer à concurrence du dégrèvement de la majoration de la base imposable des contributions sociales prononcé en cours d'instance, déchargé M. et Mme D... des impositions contestées et rejet

le surplus de leurs demandes.

Par un arrêt n° 20VE00743 du 21 septem...

Vu la procédure suivante :

M. et Mme D... ont demandé au tribunal administratif de Versailles de prononcer la décharge des cotisations supplémentaires d'impôt sur le revenu et de contributions sociales auxquelles ils ont été assujettis au titre des années 2012 et 2013. Par un jugement n° 1607710 du 22 novembre 2019, le tribunal administratif de Versailles a prononcé un non-lieu à statuer à concurrence du dégrèvement de la majoration de la base imposable des contributions sociales prononcé en cours d'instance, déchargé M. et Mme D... des impositions contestées et rejeté le surplus de leurs demandes.

Par un arrêt n° 20VE00743 du 21 septembre 2021, la cour administrative d'appel de Versailles, sur l'appel du ministre de l'économie, des finances et de la relance, a annulé les articles 1 et 2 du jugement du tribunal administratif et a remis à la charge de M. et Mme D... les impositions en litige.

Par un pourvoi sommaire, un mémoire complémentaire et un mémoire en réplique, enregistrés les 19 novembre 2021, 21 février 2022 et 27 janvier 2023 au secrétariat du contentieux du Conseil d'Etat, M. et Mme D... demandent au Conseil d'Etat :

1°) d'annuler cet arrêt ;

2°) réglant l'affaire au fond, de faire droit à leurs conclusions d'appel ;

3°) de mettre à la charge de l'Etat la somme de 5 000 euros au titre de l'article L. 761-1 du code de justice administrative.

Vu les autres pièces du dossier ;

Vu :

- le code général des impôts et le livre des procédures fiscales ;

- le code de justice administrative ;

Après avoir entendu en séance publique :

- le rapport de Mme Myriam Benlolo Carabot, maître des requêtes en service extraordinaire,

- les conclusions de Mme Esther de Moustier, rapporteure publique ;

La parole ayant été donnée, après les conclusions, à la SARL Matuchansky, Poupot, Valdelièvre, avocat de Mme A... D... et de M. C... D... ;

Considérant ce qui suit :

1. Il ressort des pièces du dossier soumis aux juges du fond que M. et Mme D... ont procédé, le 12 décembre 2011, à la donation-partage des titres de la SARL PA Finances, dont ils étaient associés, en faveur de leurs deux fils. A l'issue de la vérification de comptabilité de cette société, M. et Mme D... ont été assujettis à des cotisations supplémentaires d'impôt sur le revenu et de contributions sociales au titre des années 2012 et 2013 à raison des sommes prélevées sur le compte courant d'associé, dont M. D... disposait encore dans la société PA Finances, que l'administration fiscale a regardées comme des avantages occultes au sens des dispositions du c de l'article 111 du code général des impôts. M. et Mme D... se pourvoient en cassation contre l'arrêt du 21 septembre 2021 par lequel la cour administrative d'appel de Versailles a, sur appel du ministre de l'économie, des finances et de la relance, annulé le jugement du tribunal administratif de Versailles du 22 novembre 2019 en tant qu'il avait prononcé la décharge des impositions restant en litige et a remis ces dernières à leur charge.

2. L'article 111 du code général des impôts dispose que " Sont notamment considérés comme revenus distribués : (...) c. Les rémunérations et avantages occultes ". Lorsqu'une société se dessaisit d'une somme au profit d'un tiers sans que la comptabilisation de cette opération ne révèle, par elle-même, l'octroi d'un avantage, il appartient à l'administration, si elle entend faire application des dispositions du c de l'article 111 du code général des impôts pour imposer, dans les mains du tiers, cette somme, d'établir, d'une part, que cette opération ne comportait pas de contrepartie pour la société, et d'autre part, qu'il existait une intention, pour celle-ci, d'octroyer, et pour le tiers, de recevoir, une libéralité. L'intention libérale est présumée en présence de liens familiaux.

3. Il ressort des énonciations de l'arrêt attaqué que pour juger que les sommes prélevées par M. D... sur son compte courant d'associé au sein de la société PA Finances, à hauteur de la quasi-totalité de la trésorerie de cette dernière, avait le caractère non pas, comme le soutenait l'intéressé, d'un prêt opéré en sa faveur afin qu'il procède au placement des sommes en cause à des conditions meilleures que celles dont pouvait bénéficier la société, mais d'une libéralité, la cour a relevé que la convention de placement conclue le 10 juillet 2012 entre M. D... et la société PA Finances était dépourvue de date certaine, ne précisait pas le nom de ses signataires, ne mentionnait ni le montant des sommes confiées à M. D..., ni les placements envisagés et que si elle prévoyait, au demeurant, sans autre précision, que le rendement escompté devait être " du double du taux de rémunération versé par notre nouvelle banque " et que les sommes devaient être restituées " à première demande ", elle n'organisait aucun mécanisme de garantie. La cour a ensuite constaté que, si les procès-verbaux d'assemblée générale du 20 juillet 2013 et du 27 juin 2014 faisaient mention de cette convention, ils n'apportaient pas davantage de précisions sur les modalités de l'opération. Elle a également retenu le fait qu'aucun produit financier résultant de ces placements n'avait été enregistré par la société au cours des exercices vérifiés et que les sommes en cause n'avaient été restituées à la société que le 5 décembre 2014, soit postérieurement à la notification de la proposition de rectification en date du 20 novembre 2014. Par suite, en déduisant de l'ensemble de ces constatations souveraines, exemptes de dénaturation, que l'opération en cause constituait une libéralité, la cour, par un arrêt suffisamment motivé, n'a ni inexactement qualifié les faits qui lui étaient soumis, ni commis d'erreur de droit. Par ailleurs, dès lors que si la somme prélevée avait bien été portée dans la comptabilité de la société PA Finances, cette comptabilisation ne révélait pas, par elle-même, la libéralité en cause, la cour n'a pas commis d'erreur de droit en jugeant que l'administration avait pu imposer les sommes en litige en qualité d'avantages occultes au sens des dispositions du c) de l'article 111 du code général des impôts, cité au point 2. Ce faisant, elle n'a pas non plus commis d'erreur de droit en remettant, en conséquence, à la charge des époux D... la majoration prévue à l'article 1729 du code général des impôts.

4. Il résulte de ce qui précède que M. et Mme D... ne sont pas fondés à demander l'annulation de l'arrêt qu'ils attaquent.

5. Les dispositions de l'article L. 761-1 du code de justice administrative font obstacle à ce qu'une somme soit mise à ce titre à la charge de l'Etat qui n'est pas, dans la présente instance, la partie perdante.

D E C I D E :

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Article 1er : Le pourvoi de M. et Mme D... est rejeté.

Article 2 : La présente décision sera notifiée à Mme A... D..., première requérante dénommée, pour l'ensemble des requérants et au ministre de l'économie, des finances et de la souveraineté industrielle et numérique.

Délibéré à l'issue de la séance du 16 février 2023 où siégeaient : Mme Nathalie Escaut, conseillère d'Etat, présidant ; M. Alexandre Lallet, conseiller d'Etat et Mme Myriam Benlolo Carabot, maître des requêtes en service extraordinaire-rapporteure.

Rendu le 6 mars 2023.

La présidente :

Signé : Mme Nathalie Escaut

La rapporteure :

Signé : Mme Myriam Benlolo Carabot

La secrétaire :

Signé : Mme Sylvie Leporcq


Synthèse
Formation : 10ème chambre
Numéro d'arrêt : 458553
Date de la décision : 06/03/2023
Type d'affaire : Administrative
Type de recours : Plein contentieux

Publications
Proposition de citation : CE, 06 mar. 2023, n° 458553
Inédit au recueil Lebon

Composition du Tribunal
Rapporteur ?: Mme Myriam Benlolo Carabot
Rapporteur public ?: Mme Esther de Moustier
Avocat(s) : SARL MATUCHANSKY, POUPOT, VALDELIEVRE

Origine de la décision
Date de l'import : 23/04/2023
Fonds documentaire ?: Legifrance
Identifiant ECLI : ECLI:FR:CE:2023:458553.20230306
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