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17/02/2023 | FRANCE | N°458114

France | France, Conseil d'État, 6ème chambre, 17 février 2023, 458114


Vu la procédure suivante :

Par une requête sommaire et un mémoire complémentaire, enregistrés les 2 novembre 2021 et 2 février 2022 au secrétariat du contentieux du Conseil d'Etat, les associations Réseau sortir du nucléaire, Comité de réflexion d'information et de lutte anti-nucléaire et Greenpeace France demandent au Conseil d'Etat :

1°) d'annuler pour excès de pouvoir l'arrêté du 30 août 2021 par lequel la ministre de la transition écologique a autorisé la société Electricité de France (EDF) à exploiter au titre de l'article L. 311-5 du code de l'énergi

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Vu la procédure suivante :

Par une requête sommaire et un mémoire complémentaire, enregistrés les 2 novembre 2021 et 2 février 2022 au secrétariat du contentieux du Conseil d'Etat, les associations Réseau sortir du nucléaire, Comité de réflexion d'information et de lutte anti-nucléaire et Greenpeace France demandent au Conseil d'Etat :

1°) d'annuler pour excès de pouvoir l'arrêté du 30 août 2021 par lequel la ministre de la transition écologique a autorisé la société Electricité de France (EDF) à exploiter au titre de l'article L. 311-5 du code de l'énergie une installation de production d'électricité sur le territoire de la commune de Flamanville ;

2°) de mettre à la charge de l'Etat la somme de 3 000 euros au titre de l'article L. 761-1 du code de justice administrative.

Vu les autres pièces du dossier ;

Vu :

- le code de l'énergie ;

- le code de l'environnement ;

- le code de justice administrative ;

Après avoir entendu en séance publique :

- le rapport de M. Cédric Fraisseix, maître des requêtes en service extraordinaire,

- les conclusions de M. Nicolas Agnoux, rapporteur public ;

La parole ayant été donnée, après les conclusions, à la SAS Hannotin avocats, avocat de l'association Réseau sortir du nucléaire et autres, et à la SCP Piwnica, Molinié, avocat de la société Electricité de France ;

Considérant ce qui suit :

1. Les associations Réseau sortir du nucléaire, Comité de réflexion d'information et de lutte anti-nucléaire (CRILAN) et Greenpeace France demandent au Conseil d'Etat d'annuler pour excès de pouvoir l'arrêté du 30 août 2021 par lequel la ministre de la transition écologique a autorisé la société Electricité de France (EDF) à exploiter, au titre de l'article L. 311-5 du code de l'énergie, une centrale de production électrique de type nucléaire à eau pressurisée de troisième génération, dite EPR de Flamanville 3, d'une capacité de production de 1 675 mégawatts (MW) sur le territoire de la commune de Flamanville (Manche).

2. D'une part, aux termes de l'article R. 311-1 du code de justice administrative : " Le Conseil d'Etat est compétent pour connaître en premier et dernier ressort : / 1° Des recours dirigés contre les ordonnances du Président de la République et les décrets ; / 2° Des recours dirigés contre les actes réglementaires des ministres et des autres autorités à compétence nationale et contre leurs circulaires et instructions de portée générale ; / (...) 4° Des recours dirigés contre les décisions prises par les organes des autorités suivantes, au titre de leur mission de contrôle ou de régulation : / (...) - l'Autorité de sûreté nucléaire ".

3. D'autre part, aux termes de l'article L. 311-1 du code de l'énergie : " Sous réserve de l'article L. 311-6, l'exploitation de toute nouvelle installation de production d'électricité est subordonnée à l'obtention d'une autorisation administrative (...) ". Aux termes de l'article L. 311-5 du même code : " L'autorisation d'exploiter une installation de production d'électricité est délivrée par l'autorité administrative en tenant compte des critères suivants : / 1° L'impact de l'installation sur l'équilibre entre l'offre et la demande et sur la sécurité d'approvisionnement, évalués au regard de l'objectif fixé à l'article L. 100-1 ; / 2° La nature et l'origine des sources d'énergie primaire au regard des objectifs mentionnés aux articles L. 100-1, L. 100-2 et L. 100-4 ; / 3° L'efficacité énergétique de l'installation, comparée aux meilleures techniques disponibles à un coût économiquement acceptable ; / 4° Les capacités techniques, économiques et financières du candidat ou du demandeur ; / 5° L'impact de l'installation sur les objectifs de lutte contre l'aggravation de l'effet de serre (...) ". Aux termes de l'article L. 311-5-4 du même code : " L'autorisation d'exploiter est nominative. En cas de changement d'exploitant et lorsque la puissance autorisée est supérieure au seuil mentionné à l'article L. 311-6, l'autorisation est transférée au nouvel exploitant par décision de l'autorité administrative ". En vertu de l'article L. 311-5-6 du même code : " Lorsqu'une installation de production d'électricité est soumise au régime des installations nucléaires de base, la demande d'autorisation d'exploiter mentionnée à l'article L. 311-5 du présent code doit être déposée au plus tard dix-huit mois avant la date de mise en service mentionnée à l'article L. 593-11 du code de l'environnement, et en tout état de cause au plus tard dix-huit mois avant l'expiration du délai mentionné à l'article L. 593-8 du même code ". Selon l'article R. 311-7 du même code : " Le ministre chargé de l'énergie statue sur la demande d'autorisation d'exploiter dans un délai de quatre mois à compter de la date de réception de la demande d'autorisation complète. Il peut demander des précisions complémentaires au pétitionnaire. / Le refus d'autorisation est motivé. Le silence gardé pendant plus de quatre mois par le ministre chargé de l'énergie sur la demande d'autorisation vaut décision de rejet. / L'autorisation d'exploiter précise les conditions dans lesquelles l'installation de production devra être exploitée ". Enfin, aux termes de l'article R. 311-11-1 du même code : " Le ministre chargé de l'énergie fait procéder à la publication, par extraits, au Journal officiel de la République française des autorisations délivrées. Cette publication contient les éléments mentionnés au 1° de l'article R. 311-5 ainsi que les informations relatives à la capacité de production, aux énergies primaires, aux techniques de production utilisées et à la localisation de l'installation ".

4. Il résulte des dispositions citées au point 3 ci-dessus que l'autorisation administrative prévue par les articles L. 311-1 et L. 311-5 du code de l'énergie a pour objet d'autoriser l'exploitation d'une installation de production d'électricité et désigne non seulement le titulaire de cette autorisation mais également le mode de production et la capacité autorisée ainsi que le lieu d'implantation de l'installation. Cette décision, prise par le ministre chargé de l'énergie, ne présente pas de caractère réglementaire et n'est ainsi pas au nombre des décisions mentionnées par le 2° de l'article R. 311-1 du code de justice administrative. Aucune autre disposition ne donne compétence au Conseil d'Etat pour connaître en premier et dernier ressort d'un recours dirigé contre la décision du ministre chargé de l'énergie délivrant, au titre des articles L. 311-1 et suivants du code de l'énergie, une autorisation d'exploiter une installation de production d'énergie nucléaire.

5. Aux termes du premier alinéa de l'article R. 312-10 du code de justice administrative : " Les litiges relatifs aux législations régissant les activités professionnelles, notamment (...) les activités agricoles, commerciales et industrielles, (...) relèvent, lorsque la décision attaquée n'a pas un caractère réglementaire, de la compétence du tribunal administratif dans le ressort duquel se trouve soit l'établissement ou l'exploitation dont l'activité est à l'origine du litige, soit le lieu d'exercice de la profession ".

6. Le présent litige relève de la compétence du tribunal administratif dans lequel se trouve la centrale de production électrique de type nucléaire à eau pressurisée de troisième génération, dite EPR de Flamanville 3, au sens de l'article R. 312-10 du code de justice administrative précité. Il y a lieu par suite, en application de l'article R. 351-1 du code de justice administrative, d'attribuer le jugement de sa demande au tribunal administratif de Caen.

D E C I D E :

--------------

Article 1er : Le jugement de la demande de l'association Réseau sortir du nucléaire et autres est attribué au tribunal administratif de Caen.

Article 2 : La présente décision sera notifiée à l'association Réseau sortir du nucléaire, première dénommée pour l'ensemble des requérantes, au ministre de la transition écologique et de la cohésion des territoires, à la ministre de la transition énergétique et à la société Electricité de France (EDF).

Copie sera adressée au président du tribunal administratif de Caen.

Délibéré à l'issue de la séance du 19 janvier 2023 où siégeaient : Mme Isabelle de Silva, présidente de chambre, présidant ; M. Cyril Roger-Lacan, conseiller d'Etat et M. Cédric Fraisseix, maître des requêtes en service extraordinaire-rapporteur.

Rendu le 17 février 2023.

La présidente :

Signé : Mme Isabelle de Silva

Le rapporteur :

Signé : M. Cédric Fraisseix

La secrétaire :

Signé : Mme Valérie Peyrisse


Synthèse
Formation : 6ème chambre
Numéro d'arrêt : 458114
Date de la décision : 17/02/2023
Type d'affaire : Administrative
Type de recours : Excès de pouvoir

Publications
Proposition de citation : CE, 17 fév. 2023, n° 458114
Inédit au recueil Lebon

Composition du Tribunal
Rapporteur ?: M. Cédric Fraisseix
Rapporteur public ?: M. Nicolas Agnoux
Avocat(s) : SAS HANNOTIN AVOCATS ; SCP PIWNICA, MOLINIE

Origine de la décision
Date de l'import : 19/02/2023
Fonds documentaire ?: Legifrance
Identifiant ECLI : ECLI:FR:CE:2023:458114.20230217
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