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17/02/2023 | FRANCE | N°450924

France | France, Conseil d'État, 6ème chambre, 17 février 2023, 450924


Vu la procédure suivante :

Mme A... B... a demandé au tribunal administratif de La Réunion d'annuler pour excès de pouvoir l'arrêté du 4 octobre 2019 par lequel le préfet de La Réunion lui a refusé la délivrance d'un titre de séjour, l'a obligée à quitter le territoire français dans un délai de trente jours et a fixé le pays de destination de son éloignement. Par un jugement n° 1901607 du 16 juin 2020, le tribunal administratif de La Réunion a rejeté sa demande.

Par un arrêt n° 20BX02232 du 19 janvier 2021, la cour administrative d'appel de Bordeaux, sur ap

pel formé par Mme B..., a, d'une part, annulé ce jugement et l'arrêté du 4 octobr...

Vu la procédure suivante :

Mme A... B... a demandé au tribunal administratif de La Réunion d'annuler pour excès de pouvoir l'arrêté du 4 octobre 2019 par lequel le préfet de La Réunion lui a refusé la délivrance d'un titre de séjour, l'a obligée à quitter le territoire français dans un délai de trente jours et a fixé le pays de destination de son éloignement. Par un jugement n° 1901607 du 16 juin 2020, le tribunal administratif de La Réunion a rejeté sa demande.

Par un arrêt n° 20BX02232 du 19 janvier 2021, la cour administrative d'appel de Bordeaux, sur appel formé par Mme B..., a, d'une part, annulé ce jugement et l'arrêté du 4 octobre 2019 du préfet de La Réunion et, d'autre part, enjoint au préfet de La Réunion de délivrer à Mme B... un titre de séjour temporaire portant la mention " vie privée et familiale " dans un délai de deux mois à compter de la notification de son arrêt.

Par un pourvoi, enregistré le 22 mars 2021 au secrétariat du contentieux du Conseil d'Etat, le ministre de l'intérieur demande au Conseil d'Etat d'annuler cet arrêt.

Vu les autres pièces du dossier ;

Vu :

- le code de l'entrée et du séjour des étrangers et du droit d'asile ;

- la loi n° 2018-778 du 10 septembre 2018 ;

- le code de justice administrative ;

Après avoir entendu en séance publique :

- le rapport de M. Cédric Fraisseix, maître des requêtes en service extraordinaire,

- les conclusions de M. Nicolas Agnoux, rapporteur public ;

Considérant ce qui suit :

1. Il ressort des pièces du dossier soumis aux juges du fond que Mme A... B..., ressortissante comorienne, a sollicité un titre de séjour " vie privée et familiale " en qualité de parent de l'enfant français J... K..., reconnue à sa naissance par M. L... K..., ressortissant français. Par un arrêté du 4 octobre 2019, le préfet de La Réunion a refusé de lui délivrer ce titre de séjour et lui a fait obligation de quitter le territoire français dans un délai d'un mois à destination des Comores, en retenant notamment le caractère frauduleux de la reconnaissance de paternité de sa fille et la circonstance que le père de l'enfant ne contribuait pas effectivement à l'entretien et à l'éducation de cette dernière. Par un jugement du 16 juin 2020, le tribunal administratif de La Réunion a rejeté sa demande tendant à l'annulation de cet arrêté. Par un arrêt du 19 janvier 2021, contre lequel le ministre de l'intérieur se pourvoit en cassation, la cour administrative d'appel de Bordeaux a, d'une part, annulé le jugement du tribunal administratif de La Réunion et l'arrêté du préfet de La Réunion et, d'autre part, enjoint au préfet de La Réunion de délivrer à Mme B... un titre de séjour temporaire portant la mention " vie privée et familiale " dans un délai de deux mois.

2. Aux termes de l'article L. 313-11 du code de l'entrée et du séjour des étrangers et du droit d'asile, dans sa version applicable au litige et aujourd'hui codifié aux articles L. 423-7 et L. 423-8 du même code : " Sauf si sa présence constitue une menace pour l'ordre public, la carte de séjour temporaire portant la mention "vie privée et familiale" est délivrée de plein droit : (...) / 6° A l'étranger ne vivant pas en état de polygamie, qui est père ou mère d'un enfant français mineur résidant en France, à la condition qu'il établisse contribuer effectivement à l'entretien et à l'éducation de l'enfant dans les conditions prévues par l'article 371-2 du code civil depuis la naissance de celui-ci ou depuis au moins deux ans, sans que la condition prévue à l'article L. 313-2 soit exigée ; / Lorsque la filiation est établie à l'égard d'un parent, en application de l'article 316 du code civil, le demandeur, s'il n'est pas l'auteur de la reconnaissance de paternité ou de maternité, justifie que ce dernier contribue effectivement à l'entretien et à l'éducation de l'enfant, dans les conditions prévues à l'article 371-2 du même code, ou produit une décision de justice relative à la contribution à l'éducation et à l'entretien de l'enfant. Lorsque le lien de filiation est établi mais que la preuve de la contribution n'est pas rapportée ou qu'aucune décision de justice n'est intervenue, le droit au séjour du demandeur s'apprécie au regard du respect de sa vie privée et familiale et au regard de l'intérêt supérieur de l'enfant ".

3. D'une part, il résulte des dispositions citées du second alinéa du 6° de l'article L. 313-11 du code de l'entrée et du séjour des étrangers et du droit d'asile, qui sont entrées en vigueur le 1er mars 2019 et étaient applicables au litige, l'arrêté litigieux ayant été pris le 4 octobre 2019, que le demandeur du titre de séjour " vie privée et familiale " se prévalant de la qualité de parent d'un enfant français est tenu, s'il n'est pas l'auteur de la reconnaissance de paternité ou de maternité, de justifier que ce dernier contribue effectivement à l'entretien et à l'éducation de l'enfant. D'autre part, il ressort des pièces du dossier soumis aux juges du fond et des écritures du préfet devant la cour que le refus préfectoral contesté était notamment fondé sur la circonstance que le père de l'enfant, qui n'était pas le demandeur du titre, ne contribuait pas effectivement à l'entretien et à l'éducation de cette dernière.

4. Il ressort des énonciations de l'arrêt attaqué que la cour administrative d'appel de Bordeaux, pour estimer que le refus de titre de séjour contesté avait été pris en méconnaissance du 6° de l'article L. 313-11 du code de l'entrée et du séjour des étrangers et du droit d'asile, s'est fondée sur la circonstance que Mme B..., qui était à l'origine de la demande de titre de séjour, contribuait effectivement à l'entretien et à l'éducation de l'enfant, alors qu'il lui appartenait d'examiner en outre si tel était le cas de M. K..., auteur de la reconnaissance de paternité de cet enfant. Par suite, la cour a commis une erreur de droit.

5. Il résulte de ce qui précède que, sans qu'il soit besoin de se prononcer sur l'autre moyen du pourvoi, le ministre de l'intérieur est fondé à demander l'annulation de l'arrêt qu'il attaque.

D E C I D E :

--------------

Article 1er : L'arrêt de la cour administrative d'appel de Bordeaux du 19 janvier 2021 est annulé.

Article 2 : L'affaire est renvoyée à la cour administrative d'appel de Bordeaux.

Article 3 : La présente décision sera notifiée au ministre de l'intérieur et des outre-mer et à Mme A... B....

Délibéré à l'issue de la séance du 19 janvier 2023 où siégeaient : Mme Isabelle de Silva, présidente de chambre, présidant ; M. Cyril Roger-Lacan, conseiller d'Etat et M. Cédric Fraisseix, maître des requêtes en service extraordinaire-rapporteur.

Rendu le 17 février 2023.

La présidente :

Signé : Mme Isabelle de Silva

Le rapporteur :

Signé : M. Cédric Fraisseix

La secrétaire :

Signé : Mme Valérie Peyrisse


Synthèse
Formation : 6ème chambre
Numéro d'arrêt : 450924
Date de la décision : 17/02/2023
Type d'affaire : Administrative
Type de recours : Excès de pouvoir

Publications
Proposition de citation : CE, 17 fév. 2023, n° 450924
Inédit au recueil Lebon

Composition du Tribunal
Rapporteur ?: M. Cédric Fraisseix
Rapporteur public ?: M. Nicolas Agnoux

Origine de la décision
Date de l'import : 28/03/2023
Fonds documentaire ?: Legifrance
Identifiant ECLI : ECLI:FR:CE:2023:450924.20230217
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