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06/01/2023 | FRANCE | N°461471

France | France, Conseil d'État, 7ème chambre, 06 janvier 2023, 461471


Vu la procédure suivante :

M. C... D... a demandé au tribunal administratif de Marseille d'annuler l'arrêté du 23 février 2021 par lequel le préfet des Bouches-du-Rhône a rejeté sa demande d'asile, l'a obligé à quitter le territoire français dans un délai de trente jours et a fixé le pays à destination duquel il pourra être renvoyé. Par une ordonnance n° 2104231 du 9 juin 2021, la magistrate désignée par la présidente du tribunal administratif de Marseille a rejeté sa demande.

Par une ordonnance n° 21MA02831 du 10 novembre 2021, le président de la 1ère cha

mbre de la cour administrative d'appel de Marseille a rejeté l'appel formé par M. D...

Vu la procédure suivante :

M. C... D... a demandé au tribunal administratif de Marseille d'annuler l'arrêté du 23 février 2021 par lequel le préfet des Bouches-du-Rhône a rejeté sa demande d'asile, l'a obligé à quitter le territoire français dans un délai de trente jours et a fixé le pays à destination duquel il pourra être renvoyé. Par une ordonnance n° 2104231 du 9 juin 2021, la magistrate désignée par la présidente du tribunal administratif de Marseille a rejeté sa demande.

Par une ordonnance n° 21MA02831 du 10 novembre 2021, le président de la 1ère chambre de la cour administrative d'appel de Marseille a rejeté l'appel formé par M. D... contre cette ordonnance.

Par un pourvoi sommaire et un mémoire complémentaire, enregistrés les 14 février et 16 mai 2022 au secrétariat du contentieux du Conseil d'Etat, M. D... demande au Conseil d'Etat :

1°) d'annuler cette ordonnance ;

2°) réglant l'affaire au fond, de faire droit à son appel ;

3°) de mettre à la charge de l'Etat la somme de 3 500 euros à verser à son avocat, la SCP Thouvenin, Coudray, Grévy, au titre des articles L. 761-1 du code de justice administrative et 37 de la loi du 10 juillet 1991.

Vu les autres pièces du dossier ;

Vu :

- la convention européenne de sauvegarde des droits de l'homme et des libertés fondamentales ;

- le code de l'entrée et du séjour des étrangers et du droit d'asile ;

- la loi n° 91- 647 du 10 juillet 1991 ;

- le code de justice administrative ;

Après avoir entendu en séance publique :

- le rapport de M. Hervé Cassara, maître des requêtes,

- les conclusions de M. A... B... de Vendeuil, rapporteur public ;

La parole ayant été donnée, après les conclusions, à la SCP Thouvenin, Coudray, Grevy, avocat de M. D... ;

Considérant ce qui suit :

1. Il ressort des pièces du dossier soumis aux juges du fond que M. D..., ressortissant de nationalité guinéenne, a demandé au tribunal administratif de Marseille d'annuler l'arrêté du 23 février 2021 par lequel le préfet des Bouches-du-Rhône a rejeté sa demande d'asile, lui a fait obligation de quitter le territoire français dans un délai de trente jours à compter de la notification de cet arrêté, et a fixé le pays à destination duquel il pourra être reconduit d'office. Par une ordonnance du 9 juin 2021, la magistrate désignée par la présidente du tribunal administratif de Marseille a rejeté sa demande. M. D... se pourvoit en cassation contre l'ordonnance du 10 novembre 2021 par laquelle le président de la 1ère chambre de la cour administrative d'appel de Marseille a rejeté son appel formé contre cette ordonnance.

2. D'une part, aux termes de l'article R. 421-5 du code de justice administrative : " Les délais de recours contre une décision administrative ne sont opposables qu'à la condition d'avoir été mentionnés, ainsi que les voies de recours, dans la notification de la décision ".

3. D'autre part, aux termes du I bis de l'article L. 512-1 du code de l'entrée et du séjour des étrangers et du droit d'asile, dans sa rédaction en vigueur à la date de l'arrêté en litige : " L'étranger qui fait l'objet d'une obligation de quitter le territoire français sur le fondement des 1°, 2°, 4° ou 6° du I de l'article L. 511-1 et qui dispose du délai de départ volontaire mentionné au premier alinéa du II du même article L. 511-1 peut, dans un délai de quinze jours à compter de sa notification, demander au président du tribunal administratif l'annulation de cette décision, ainsi que l'annulation de la décision mentionnant le pays de destination et de la décision d'interdiction de retour sur le territoire français qui l'accompagnent le cas échéant. / La même procédure s'applique lorsque l'étranger conteste une obligation de quitter le territoire fondée sur le 6° du I dudit article L. 511-1 et une décision relative au séjour intervenue concomitamment. Dans cette hypothèse, le président du tribunal administratif ou le juge qu'il désigne à cette fin statue par une seule décision sur les deux contestations. / (...) L'étranger peut demander au président du tribunal administratif ou au magistrat désigné à cette fin le concours d'un interprète et la communication du dossier contenant les pièces sur la base desquelles la décision contestée a été prise. / L'audience est publique. Elle se déroule sans conclusions du rapporteur public, en présence de l'intéressé, sauf si celui-ci, dûment convoqué, ne se présente pas. L'étranger est assisté de son conseil s'il en a un. Il peut demander au président du tribunal administratif ou au magistrat désigné à cette fin qu'il lui en soit désigné un d'office (...) ".

4. Aux termes du deuxième alinéa du I de l'article R. 776-2 du code de justice administrative, dans sa rédaction applicable à la date de l'arrêté en litige : " Conformément aux dispositions du I bis de l'article L. 512-1 du même code, la notification d'une obligation de quitter le territoire français avec délai de départ volontaire, prise en application des 1°, 2°, 4° ou 6° du I de l'article L. 511-1 du même code, fait courir un délai de quinze jours pour contester cette obligation ainsi que les décisions relatives au séjour, au délai de départ volontaire, au pays de renvoi et à l'interdiction de retour notifiées simultanément. Cette notification fait courir ce même délai pour demander la suspension de l'exécution de la mesure d'éloignement dans les conditions prévues à l'article L. 743-3 du même code ". Aux termes du II de l'article R. 776-5 du même code : " Les délais de quarante-huit heures mentionnés aux articles R. 776-2 et R. 776-4 et les délais de quinze jours mentionnés aux articles R. 776-2 et R. 776-3 ne sont susceptibles d'aucune prorogation. / Lorsque le délai est de quarante-huit heures ou de quinze jours, le second alinéa de l'article R. 411-1 n'est pas applicable et l'expiration du délai n'interdit pas au requérant de soulever des moyens nouveaux, quelle que soit la cause juridique à laquelle ils se rattachent. / Le requérant qui, dans le délai de quarante-huit heures ou de quinze jours selon les cas, a demandé l'annulation de l'une des décisions qui lui ont été notifiées simultanément peut, jusqu'à la clôture de l'instruction, former des conclusions dirigées contre toute autre de ces décisions ".

5. Il résulte de la combinaison des dispositions citées aux points 3 et 4 que l'étranger, informé par la notification de la décision prononçant une obligation de quitter le territoire français de la possibilité de la contester dans un délai de quinze jours devant le tribunal administratif, peut, dès la saisine de ce tribunal par une requête susceptible d'être motivée même après l'expiration du délai de recours, demander à son président le concours d'un interprète et que lui soit désigné d'office un avocat. Ce délai de quinze jours n'est susceptible d'aucune prorogation. Dès lors, l'introduction d'une demande d'aide juridictionnelle, alors que l'étranger dispose de la faculté de demander au président du tribunal la désignation d'office d'un avocat, ne saurait avoir pour effet de proroger le délai de quinze jours mentionné au I bis de l'article L. 512-1 du code de l'entrée et du séjour des étrangers et du droit d'asile et à l'article R. 776-2 du code de justice administrative pour contester les décisions portant obligation de quitter le territoire français mentionnées par ces dispositions.

6. S'il résulte des dispositions de l'article R. 421-5 du code de justice administrative citées au point 2 que, lorsque les mentions relatives aux délais de recours contre une décision administrative figurant dans la notification de cette décision sont erronées, elles doivent être regardées comme seules opposables au destinataire de la décision lorsqu'elles conduisent à indiquer un délai plus long que celui qui résulterait des dispositions normalement applicables, la circonstance que la notification d'une décision de l'autorité préfectorale portant obligation de quitter le territoire français mentionne par erreur un délai de trente jours pour contester cette décision est sans incidence sur l'application des dispositions du premier alinéa du II de l'article R. 776-5 du code de justice administrative, aux termes desquelles le délai de recours n'est susceptible d'aucune prorogation, y compris en cas d'introduction d'une demande d'aide juridictionnelle dans ce délai.

7. Il ressort des pièces du dossier soumis aux juges du fond que la notification de l'arrêté du 23 février 2021, par lequel le préfet des Bouches-du-Rhône a notamment fait obligation au requérant de quitter le territoire français, mentionnait un délai de recours de trente jours, alors que cet arrêté, pris en application du 6° du I de l'article L. 511-1 du code de l'entrée et du séjour des étrangers et du droit d'asile, dans sa rédaction applicable au litige, ne pouvait faire l'objet d'un recours, en application du I bis de l'article L. 512-1 du même code dans la même rédaction, que dans un délai de quinze jours à compter de sa notification. Compte tenu de ce qui a été dit aux points 5 et 6, cette mention erronée était toutefois sans incidence sur l'application des dispositions du premier alinéa du II de l'article R. 776-5 du code de justice administrative, aux termes desquelles le délai de recours n'est susceptible d'aucune prorogation. Il suit de là qu'après avoir relevé que M. D... disposait du délai de trente jours mentionné par la notification de l'arrêté attaqué pour le contester, le président de la 1ère chambre n'a pas commis d'erreur de droit en déduisant le caractère tardif, et par suite, manifestement irrecevable de la demande formée par l'intéressé, de la circonstance que cette dernière n'a été enregistrée au greffe du tribunal administratif de Marseille que le 10 mai 2021, soit après l'expiration de ce délai de trente jours, nonobstant la circonstance qu'il a introduit une demande d'aide juridictionnelle dans ce délai.

8. Il résulte de ce qui précède que le pourvoi de M. D... doit être rejeté, y compris ses conclusions présentées au titre des articles L. 761-1 du code de justice administrative et 37 de la loi du 10 juillet 1991.

D E C I D E :

--------------

Article 1er : Le pourvoi de M. D... est rejeté.

Article 2 : La présente décision sera notifiée à M. C... D... et au ministre de l'intérieur et des outre-mer.

Délibéré à l'issue de la séance du 7 décembre 2022 où siégeaient : M. Olivier Japiot, président de chambre, présidant ; M. Benoît Bohnert, conseiller d'Etat et M. Hervé Cassara, maître des requêtes-rapporteur.

Rendu le 6 janvier 2023.

Le président :

Signé : M. Olivier Japiot

Le rapporteur :

Signé : M. Hervé Cassara

La secrétaire :

Signé : Mme Pierrette Kimfunia


Synthèse
Formation : 7ème chambre
Numéro d'arrêt : 461471
Date de la décision : 06/01/2023
Type d'affaire : Administrative
Type de recours : Excès de pouvoir

Publications
Proposition de citation : CE, 06 jan. 2023, n° 461471
Inédit au recueil Lebon

Composition du Tribunal
Rapporteur ?: M. Hervé Cassara
Rapporteur public ?: M. Marc Pichon de Vendeuil
Avocat(s) : SCP THOUVENIN, COUDRAY, GREVY

Origine de la décision
Date de l'import : 11/01/2023
Fonds documentaire ?: Legifrance
Identifiant ECLI : ECLI:FR:CE:2023:461471.20230106
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