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29/12/2022 | FRANCE | N°461529

France | France, Conseil d'État, 1ère chambre, 29 décembre 2022, 461529


Vu la procédure suivante :

Par une requête sommaire, un mémoire complémentaire et un mémoire en réplique enregistrés les 15 février, 14 avril et 5 octobre 2022 au secrétariat du contentieux du Conseil d'Etat, la Confédération française de l'encadrement - Confédération générale des cadres (CFE-CGC) demande au Conseil d'Etat :

1°) d'annuler le décret n° 2021-1792 du 23 décembre 2021 relatif à la composition et au fonctionnement du Conseil d'orientation des conditions de travail et des comités régionaux ;

2°) d'enjoindre au Premier ministre et à la m

inistre du travail, de l'emploi et de l'insertion d'adopter un nouveau décret fixant les m...

Vu la procédure suivante :

Par une requête sommaire, un mémoire complémentaire et un mémoire en réplique enregistrés les 15 février, 14 avril et 5 octobre 2022 au secrétariat du contentieux du Conseil d'Etat, la Confédération française de l'encadrement - Confédération générale des cadres (CFE-CGC) demande au Conseil d'Etat :

1°) d'annuler le décret n° 2021-1792 du 23 décembre 2021 relatif à la composition et au fonctionnement du Conseil d'orientation des conditions de travail et des comités régionaux ;

2°) d'enjoindre au Premier ministre et à la ministre du travail, de l'emploi et de l'insertion d'adopter un nouveau décret fixant les modalités d'adoption des délibérations du comité national de la prévention et de la santé au travail (CNPST) en formation paritaire en retenant une répartition égalitaire du nombre de voix entre organisations syndicales ;

3°) de mettre à la charge de l'Etat la somme de 5 000 euros au titre de l'article L. 761-1 du code de justice administrative.

Vu les autres pièces du dossier ;

Vu :

- le code des relations entre le public et l'administration ;

- le code du travail ;

- la loi n° 2021-1018 du 2 août 2021 ;

- le code de justice administrative ;

Après avoir entendu en séance publique :

- le rapport de Mme Anne Lazar Sury, conseillère d'Etat,

- les conclusions de Mme Marie Sirinelli, rapporteure publique ;

La parole ayant été donnée, après les conclusions, à la SCP Gatineau, Fattaccini, Rebeyrol, avocat de la Confédération française de l'encadrement - Confédération générale des cadres ;

Considérant ce qui suit :

1. En vertu de l'article L. 4641-1 du code du travail, le Conseil d'orientation des conditions de travail est placé auprès du ministre chargé du travail. L'article L. 4641-2-1 du code du travail, issu de l'article 36 de la loi du 2 août 2021 pour renforcer la prévention en santé au travail, prévoit qu'au sein de ce conseil, " le comité national de prévention et de santé au travail ", dont il définit les missions, " est composé de représentants de l'Etat, de la Caisse nationale de l'assurance maladie, de la caisse centrale de la mutualité sociale agricole, des organisations professionnelles d'employeurs représentatives au niveau national et interprofessionnel et des organisations syndicales de salariés représentatives au niveau national et interprofessionnel ", en renvoyant à un décret en Conseil d'Etat la détermination des missions, de la composition, de l'organisation et du fonctionnement de ce comité. La Confédération française de l'encadrement - Confédération générale des cadres (CFE-CGC) demande l'annulation pour excès de pouvoir du décret du 23 décembre 2021 relatif à la composition du Conseil d'orientation des conditions de travail et des comités régionaux, qui précise notamment les modalités de délibération et de fonctionnement du comité national de prévention et de santé au travail.

Sur la légalité externe :

2. En premier lieu, il ressort de la copie de la minute de la section sociale du Conseil d'Etat, versée au dossier par le ministre du travail, de l'emploi et de l'insertion, que le décret publié ne comporte pas de dispositions qui différeraient à la fois du projet issu du gouvernement et du texte adopté par le Conseil d'Etat. Par suite, le moyen tiré de la méconnaissance des règles qui gouvernent l'examen par le Conseil d'Etat du projet de décret ne peut qu'être écarté.

3. En deuxième lieu, le 2° du II de l'article R. 4641-1 du code du travail prévoit que le Conseil d'orientation des conditions de travail est consulté notamment sur les projets de décrets relevant de la quatrième partie de ce code, relative à la santé et à la sécurité au travail. Le premier alinéa de l'article R. 4641-9 du même code précise que : " La commission générale est consultée (...) sur les projets de décret pris sur le rapport du ministre chargé du travail. Sur ces textes, elle rend l'avis du Conseil d'orientation des conditions de travail. ". Il ressort des pièces du dossier qu'en l'espèce, la commission générale du Conseil d'orientation des conditions de travail a été consultée sur le projet de décret, sur lequel elle a émis un avis lors de sa séance du 17 novembre 2021.

4. D'une part, il ressort du compte-rendu, versé au dossier, de la réunion du 17 novembre 2021 de la commission générale du Conseil d'orientation des conditions de travail, au cours de laquelle ce conseil a rendu son avis sur le projet de décret attaqué, que, contrairement à ce qui est soutenu, plus de la moitié des vingt-neuf membres composant cette commission en vertu de l'article L. 4641-10 du code du travail étaient présents ou avaient donné mandat, le quorum étant ainsi atteint conformément au premier alinéa de l'article R. 133-10 du code des relations entre le public et l'administration, applicable à cette instance en l'absence de dispositions spécifiques.

5. D'autre part, il ressort des pièces du dossier que si le projet sur lequel la commission générale s'est prononcée diffère de celui en définitive soumis au Conseil d'Etat par la saisine rectificative intervenue le 29 novembre 2021, également versée au dossier, les modifications apportées par cette saisine rectificative, qui étaient destinées à tenir compte des observations que la commission générale avait émises lors de la séance du 17 novembre 2021, ne soulevaient pas de question nouvelle. Par suite, le moyen tiré de ce que le Conseil d'orientation des conditions de travail n'aurait pas été consulté sur le projet en définitive soumis au Conseil d'Etat ne peut qu'être écarté.

Sur la légalité interne :

6. En premier lieu, l'article L. 4641-2-1 du code du travail prévoit que le comité national de prévention et de santé au travail a notamment pour missions : "3° De définir la liste et les modalités de mise en œuvre de l'ensemble socle de services en matière de prévention des risques professionnels, de suivi individuel des travailleurs et de prévention de la désinsertion professionnelle prévus à l'article L. 4622-9-1, et de contribuer à définir les indicateurs permettant d'évaluer la qualité de cet ensemble socle de services ; / 4° De proposer les référentiels et les principes guidant l'élaboration du cahier des charges de certification des services de prévention et de santé au travail interentreprises dans les conditions prévues à l'article L. 4622-9-3 ; / 5° De déterminer les modalités de mise en œuvre ainsi que les conditions de mise à la disposition de l'employeur du passeport de prévention prévu à l'article L. 4141-5, et d'assurer le suivi du déploiement de ce passeport " et que, pour l'exercice de ces trois catégories de missions particulières, " les délibérations sont adoptées par les seuls représentants des organisations professionnelles d'employeurs et des organisations syndicales de salariés mentionnés au premier alinéa, dans des conditions définies par voie réglementaire. " Ni les dispositions du premier alinéa de l'article L. 4641-2-1 du code du travail citées au point 1, relatives à la composition du comité, ni aucun autre texte ou principe n'imposent, contrairement à ce que soutient la requérante, que, pour l'adoption des délibérations du collège restreint du comité, les voix des représentants des organisations syndicales de salariés soient décomptées en donnant un poids égal à chacune de ces organisations. En prévoyant que ces délibérations doivent, de la même façon que les accords interprofessionnels en vertu de l'article L. 2232-2 du code du travail, recueillir le vote favorable d'une ou plusieurs organisations syndicales de salariés représentative ayant obtenu, aux élections prises en compte pour la mesure de l'audience au niveau national et interprofessionnel, au moins 30 % des suffrages exprimés en faveur d'organisations représentatives à ce niveau, quel que soit le nombre de votants, sans faire l'objet d'une opposition majoritaire, le décret attaqué n'est pas davantage entaché d'erreur manifeste d'appréciation.

7. En second lieu, en ne prévoyant pas que les mêmes règles s'appliquent, pour l'adoption de ces délibérations, au vote des organisations professionnelles d'employeurs, le décret attaqué ne peut être regardé comme créant une différence de traitement contraire au principe d'égalité.

8. Il résulte de tout ce qui précède que la Confédération française de l'encadrement - Confédération générale des cadres n'est pas fondée à demander l'annulation du décret qu'elle attaque. Par suite, ses conclusions à fin d'injonction ne peuvent qu'être également rejetées.

9. Les dispositions de l'article L. 761-1 du code de justice administrative font obstacle à ce qu'une somme soit mise à la charge de l'Etat, qui n'est pas, dans la présente instance, la partie perdante.

D E C I D E :

--------------

Article 1er : : La requête de la Confédération française de l'encadrement - Confédération générale des cadres est rejetée.

Article 2 : La présente décision sera notifiée à la Confédération française de l'encadrement - Confédération générale des cadres et au ministre du travail, du plein emploi et de l'insertion.

Copie en sera adressée à la Première ministre.

Délibéré à l'issue de la séance du 24 novembre 2022 où siégeaient : Mme Gaëlle Dumortier, présidente de chambre, présidant ; M. Damien Botteghi, conseiller d'Etat et Mme Anne Lazar Sury, conseillère d'Etat-rapporteure.

Rendu le 29 décembre 2022.

La présidente :

Signé : Mme Gaëlle Dumortier

La rapporteure :

Signé : Mme Anne Lazar Sury

Le secrétaire :

Signé : M. Mickaël Lemasson


Synthèse
Formation : 1ère chambre
Numéro d'arrêt : 461529
Date de la décision : 29/12/2022
Type d'affaire : Administrative
Type de recours : Excès de pouvoir

Publications
Proposition de citation : CE, 29 déc. 2022, n° 461529
Inédit au recueil Lebon

Composition du Tribunal
Rapporteur ?: Mme Anne Lazar Sury
Rapporteur public ?: Mme Marie Sirinelli
Avocat(s) : SCP GATINEAU, FATTACCINI, REBEYROL

Origine de la décision
Date de l'import : 01/01/2023
Fonds documentaire ?: Legifrance
Identifiant ECLI : ECLI:FR:CE:2022:461529.20221229
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