La jurisprudence francophone des Cours suprêmes


recherche avancée

27/12/2022 | FRANCE | N°450222

France | France, Conseil d'État, 6ème chambre, 27 décembre 2022, 450222


Vu la procédure suivante :

La société La Morinie a demandé au tribunal administratif de Lille d'annuler pour excès de pouvoir la décision de la communauté d'agglomération des deux baies en Montreuillois du 29 juin 2017 approuvant le plan local d'urbanisme du Touquet Paris-Plage, à titre principal dans son intégralité et, à titre subsidiaire, en tant qu'elle approuve le classement de l'ensemble du secteur du Polo en zone NH, des parcelles BC17 et BC18 en zone NL et des parcelles de ce secteur correspondant à des dents creuses en zone NL. Par un jugement n° 1707706 du 4 avri

l 2019, le tribunal administratif a rejeté sa demande.

Par un arrê...

Vu la procédure suivante :

La société La Morinie a demandé au tribunal administratif de Lille d'annuler pour excès de pouvoir la décision de la communauté d'agglomération des deux baies en Montreuillois du 29 juin 2017 approuvant le plan local d'urbanisme du Touquet Paris-Plage, à titre principal dans son intégralité et, à titre subsidiaire, en tant qu'elle approuve le classement de l'ensemble du secteur du Polo en zone NH, des parcelles BC17 et BC18 en zone NL et des parcelles de ce secteur correspondant à des dents creuses en zone NL. Par un jugement n° 1707706 du 4 avril 2019, le tribunal administratif a rejeté sa demande.

Par un arrêt n° 19DA01295 du 29 décembre 2020, la cour administrative d'appel de Douai a rejeté l'appel formé par la société La Morinie contre ce jugement.

Par un pourvoi sommaire et deux mémoires complémentaires, enregistrés les 1er mars, 2 juin 2021 et 14 novembre 2022 au secrétariat du contentieux du Conseil d'Etat, la société La Morinie demande au Conseil d'Etat :

1°) d'annuler cet arrêt ;

2°) réglant l'affaire au fond, de faire droit à son appel ;

3°) de mettre à la charge de la communauté d'agglomération des deux baies en Montreuillois la somme de 5 000 euros au titre de l'article L. 761-1 du code de justice administrative.

Vu les autres pièces du dossier ;

Vu :

- le code de l'urbanisme ;

- le code de justice administrative ;

Après avoir entendu en séance publique :

- le rapport de M. Bruno Bachini, conseiller d'Etat,

- les conclusions de M. Nicolas Agnoux, rapporteur public ;

La parole ayant été donnée, après les conclusions, à la SCP Nicolaÿ, de Lanouvelle, avocat de la société La Morinie et à la SCP Foussard, Froger, avocat de la communauté d'agglomération des deux baies en Montreuillois ;

Considérant ce qui suit :

1. Par une délibération du 29 juin 2017, le conseil de la communauté d'agglomération des deux baies en Montreuillois a approuvé le plan local d'urbanisme de la commune du Touquet Paris-Plage. La société La Morinie, propriétaire des parcelles BC n° 17 et n° 18 situées dans le secteur dit " du Polo ", a demandé l'annulation pour excès de pouvoir de cette délibération. Par un jugement du 4 avril 2019, le tribunal administratif de Lille a rejeté sa demande. La société se pourvoit en cassation contre l'arrêt de la cour administrative d'appel de Douai du 29 décembre 2020 rejetant son appel.

2. En premier lieu, aux termes de l'article L. 121-23 du code de l'urbanisme : " Les documents et décisions relatifs à la vocation des zones ou à l'occupation et à l'utilisation des sols préservent les espaces terrestres et marins, sites et paysages remarquables ou caractéristiques du patrimoine naturel et culturel du littoral, et les milieux nécessaires au maintien des équilibres biologiques (...) ". Aux termes de l'article L. 131-1 du code de l'urbanisme : " Les schémas de cohérence territoriale prévus à l'article L. 141-1 sont compatibles avec : / 1° Les dispositions particulières au littoral et aux zones de montagne prévues aux chapitres Ier et II du titre II (...) ".

3. Il résulte des dispositions des articles L. 131-4 et L. 131-7 du code de l'urbanisme, que, s'agissant d'un plan local d'urbanisme, il appartient à ses auteurs de s'assurer, sous le contrôle du juge de l'excès de pouvoir, de sa compatibilité avec les dispositions du code de l'urbanisme particulières au littoral. Dans le cas où le territoire concerné est couvert par un schéma de cohérence territoriale, cette compatibilité s'apprécie en tenant compte des dispositions de ce document relatives à l'application des dispositions du code de l'urbanisme particulières au littoral, sans pouvoir en exclure certaines au motif qu'elles seraient insuffisamment précises, sous la seule réserve de leur propre compatibilité avec ces dernières.

4. Il ressort des pièces du dossier soumis aux juges du fond, d'une part, que le schéma de cohérence territoriale du pays de Montreuillois a identifié l'espace remarquable dans lequel s'insèrent le secteur du Polo et les parcelles BC n° 17 et n° 18 dont la société La Morinie est propriétaire et, d'autre part, que le plan local d'urbanisme du Touquet Paris-Plage classe ces parcelles en zone NL, définie comme couvrant les " espaces naturels littoraux présentant le caractère d'espaces remarquables ". Il s'ensuit que la cour, à laquelle il appartenait, comme elle l'a fait, de contrôler que les dispositions du schéma de cohérence territoriale étaient compatibles avec les dispositions du code de l'urbanisme particulières au littoral, a relevé que les parcelles en cause, identifiées comme étant des espaces remarquables par ce document, correspondaient à des " dents creuses " dans le secteur du Polo, étaient situées au sein d'un vaste espace boisé, dans la zone d'intérêt écologique, faunistique et floristique de type 1, dénommée " forêt du Touquet ", en raison principalement de la flore qui s'y développe, que cet espace boisé présentait un intérêt écologique certain et que sa délimitation en espace naturel remarquable était conforme à l'orientation du projet d'aménagement et de développement durables visant à promouvoir la qualité des milieux naturels et des espèces. La cour a ainsi fondé son appréciation sur l'intérêt écologique de la zone et ses caractéristiques propres au regard des critères définissant les espaces remarquables, pour en déduire que les parcelles étaient incluses dans une zone constituant un espace remarquable bénéficiant de la protection prévue par les dispositions précitées de l'article L. 121-23 du code de l'urbanisme. Il résulte de ce qui précède que la société La Morinie n'est pas fondée à soutenir que la cour, qui a suffisamment motivé son arrêt sur ce point, aurait commis une erreur de droit, ni qu'elle aurait inexactement qualifié les faits de l'espèce en qualifiant ces parcelles d'espace remarquable au sens de l'article L. 121-23 du code de l'urbanisme. Il résulte, par ailleurs, des motifs de l'arrêt attaqué que la cour a, à ce titre, exercé un contrôle normal et n'a, par suite, ce faisant, pas commis d'erreur de droit ni méconnu son office.

5. En second lieu, aux termes de l'article R. 151-24 du code de l'urbanisme : " Les zones naturelles et forestières sont dites " zones N ". Peuvent être classés en zone naturelle et forestière, les secteurs de la commune, équipés ou non, à protéger en raison : / 1° Soit de la qualité des sites, milieux et espaces naturels, des paysages et de leur intérêt, notamment du point de vue esthétique, historique ou écologique ; / 2° Soit de l'existence d'une exploitation forestière ; / 3° Soit de leur caractère d'espaces naturels ; / 4° Soit de la nécessité de préserver ou restaurer les ressources naturelles ; / 5° Soit de la nécessité de prévenir les risques notamment d'expansion des crues ". Il appartient aux auteurs d'un plan local d'urbanisme de déterminer le parti d'aménagement à retenir pour le territoire concerné par le plan, en tenant compte de la situation existante et des perspectives d'avenir, et de fixer en conséquence le zonage et les possibilités de construction. A cet effet, ils peuvent être amenés à classer en zone naturelle, pour les motifs énoncés par les dispositions citées ci-dessus, un secteur qu'ils entendent soustraire, pour l'avenir, à l'urbanisation.

6. En estimant, pour juger que le classement en zone N des parcelles appartenant à la société La Morinie n'était pas entaché d'illégalité, qu'elles présentaient le caractère de dents creuses non bâties, que le secteur du Polo était, de manière générale, peu densifié et que la forêt existante y avait été conservée, que cet espace boisé relevait d'une zone d'intérêt écologique, faunistique et floristique, et qu'il présentait un intérêt écologique certain, la cour a porté sur les faits de l'espèce une appréciation souveraine, exempte de dénaturation, et n'a pas commis d'erreur de droit.

7. Il résulte de tout ce qui précède que la société La Morinie n'est pas fondée à demander l'annulation de l'arrêt qu'elle attaque.

8. Il y a lieu, dans les circonstances de l'espèce, de mettre à la charge de société La Morinie la somme de 3 000 euros à verser à la communauté d'agglomération des deux baies en Montreuillois au titre des dispositions de l'article L. 761-1 du code de justice administrative. Ces dispositions font, en revanche, obstacle à ce qu'une somme soit mise à ce titre à la charge de la communauté d'agglomération des deux baies en Montreuillois qui n'est pas, dans la présente instance, la partie perdante.

D E C I D E :

--------------

Article 1er : Le pourvoi de la société La Morinie est rejeté.

Article 2 : La société La Morinie versera à la communauté d'agglomération des deux baies en Montreuillois une somme de 3 000 euros, au titre de l'article L. 761-1 du code de justice administrative.

Article 3 : La présente décision sera notifiée à la société La Morinie et à la communauté d'agglomération des deux baies en Montreuillois.

Copie en sera adressée au ministre de la transition écologique et de la cohésion des territoires.

Délibéré à l'issue de la séance du 1er décembre 2022 où siégeaient : Mme Isabelle de Silva, présidente de chambre, présidant ; Mme Suzanne von Coester, conseillère d'Etat et M. Bruno Bachini, conseiller d'Etat-rapporteur.

Rendu le 27 décembre 2022.

La présidente :

Signé : Mme Isabelle de Silva

Le rapporteur :

Signé : M. Bruno Bachini

La secrétaire :

Signé : Mme Valérie Peyrisse


Synthèse
Formation : 6ème chambre
Numéro d'arrêt : 450222
Date de la décision : 27/12/2022
Type d'affaire : Administrative
Type de recours : Excès de pouvoir

Publications
Proposition de citation : CE, 27 déc. 2022, n° 450222
Inédit au recueil Lebon

Composition du Tribunal
Rapporteur ?: M. Bruno Bachini
Rapporteur public ?: M. Nicolas Agnoux
Avocat(s) : SCP FOUSSARD, FROGER ; SCP NICOLAY, DE LANOUVELLE

Origine de la décision
Date de l'import : 01/01/2023
Fonds documentaire ?: Legifrance
Identifiant ECLI : ECLI:FR:CE:2022:450222.20221227
Association des cours judiciaires suprmes francophones
Organisation internationale de la francophonie
Juricaf est un projet de l'AHJUCAF, l'association des Cours suprêmes judiciaires francophones. Il est soutenu par l'Organisation Internationale de la Francophonie. Juricaf est un projet de l'AHJUCAF, l'association des Cours suprêmes judiciaires francophones. Il est soutenu par l'Organisation Internationale de la Francophonie.
Logo iall 2012 website award