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23/12/2022 | FRANCE | N°455300

France | France, Conseil d'État, 3ème chambre, 23 décembre 2022, 455300


Vu la procédure suivante :

Mme B... A... a demandé au tribunal administratif de Montpellier de condamner le lycée polyvalent Jean Mermoz, établissement support du groupement d'établissements (GRETA) Montpellier - Littoral, à lui verser la somme de 3 863,73 euros au titre des rémunérations dues pour l'année scolaire 2016-2017, ainsi que des différents préjudices qu'elle estime avoir subis. Par un jugement nos 1703719, 1704481 du 22 novembre 2019, le tribunal administratif de Montpellier a rejeté ses demandes.

Par un arrêt n° 20MA00233 du 12 juillet 2021, la cour admi

nistrative d'appel de Marseille a, sur appel de Mme A..., annulé ce jugem...

Vu la procédure suivante :

Mme B... A... a demandé au tribunal administratif de Montpellier de condamner le lycée polyvalent Jean Mermoz, établissement support du groupement d'établissements (GRETA) Montpellier - Littoral, à lui verser la somme de 3 863,73 euros au titre des rémunérations dues pour l'année scolaire 2016-2017, ainsi que des différents préjudices qu'elle estime avoir subis. Par un jugement nos 1703719, 1704481 du 22 novembre 2019, le tribunal administratif de Montpellier a rejeté ses demandes.

Par un arrêt n° 20MA00233 du 12 juillet 2021, la cour administrative d'appel de Marseille a, sur appel de Mme A..., annulé ce jugement et a condamné le lycée polyvalent Jean Mermoz à lui verser la somme de 4 363,73 euros.

Par un pourvoi sommaire et un mémoire complémentaire, enregistrés les 5 août et 5 novembre 2021 au secrétariat du contentieux du Conseil d'Etat, le lycée polyvalent Jean Mermoz demande au Conseil d'Etat :

1°) d'annuler cet arrêt ;

2°) réglant l'affaire au fond de rejeté l'appel de Mme A... ;

3°) de mettre à la charge de de Mme A..., la somme de 4 000 euros au titre de l'article L. 761-1 du code de justice administrative.

Vu les autres pièces du dossier ;

Vu :

- le décret n° 68-536 du 23 mai 1968 ;

- le décret n° 92-1189 du 6 novembre 1992 ;

- le décret n° 93-438 du 24 mars 1993 ;

- le code de justice administrative ;

Après avoir entendu en séance publique :

- le rapport de Mme Rose-Marie Abel, maître des requêtes en service extraordinaire,

- les conclusions de M. Thomas Pez-Lavergne, rapporteur public ;

La parole ayant été donnée, après les conclusions, à la SCP Delamarre, Jéhannin, avocat du lycée polyvalent Jean Mermoz et à la SCP Spinosi, avocat de Mme B... A... ;

Considérant ce qui suit :

1. Il ressort des pièces du dossier soumis aux juges du fond que Mme B... A..., professeure de lycée professionnel, participe, en supplément de ses obligations de service, en qualité de directrice déléguée aux formations professionnelles et technologiques du lycée Jules Guesde à Montpellier, aux activités de formation du GRETA Montpellier - Littoral, dans le cadre des brevets de technicien supérieur " comptabilité-gestion " et " assistant de gestion PME-PMI ". Par courrier du 15 juin 2017, elle a demandé au lycée Jean Mermoz, établissement support du GRETA Montpellier-Littoral, de lui payer des heures supplémentaires pour le premier semestre de l'année scolaire 2016-2017 et de l'indemniser du préjudice subi du fait du refus opposé à cette demande, à hauteur de 500 euros au titre des troubles dans les conditions d'existence et de 500 euros au titre du préjudice moral. Cette demande a été rejetée le 16 juin 2017. Le 15 septembre 2017, Mme A... a présenté une réclamation similaire en ce qui concerne le second semestre de l'année scolaire 2016-2017, sollicitant à ce titre 2 208 euros au titre de sa rémunération et les mêmes sommes au titre des deux mêmes chefs de préjudices. Cette demande a fait l'objet d'un rejet implicite. Mme A... a saisi le tribunal administratif de Montpellier qui par un jugement du 22 novembre 2019 a rejeté ses deux demandes. Le lycée polyvalent Jean Mermoz se pourvoit en cassation contre l'arrêt de la cour administrative d'appel de Marseille du 12 juillet 2021 qui, sur appel de Mme A..., a annulé le jugement du tribunal administratif de Montpellier et l'a condamné à verser à Mme A... la somme de 4 363,73 euros.

Sur le pourvoi en cassation :

En ce qui concerne la régularité de l'arrêt :

2. Il ressort des pièces du dossier soumis aux juges du fond, et notamment de la requête d'appel de Mme A..., que son action était introduite à l'encontre de lycée polyvalent Jean Mermoz en qualité d'établissement support du GRETA Montpellier - Littoral. Par suite s'est sans se méprendre sur le sens des écritures des parties et sans commettre d'erreur de droit que la cour administrative d'appel de Marseille a regardé la requête comme dirigée contre le lycée polyvalent Jean Mermoz, établissement support du GRETA Montpellier - Littoral, et en a déduit qu'elle était recevable.

En ce qui concerne le bien-fondé de l'arrêt :

3. Aux termes des dispositions de l'article 1er du décret du 23 mai 1968 fixant la rémunération des personnes assurant le fonctionnement des cours et centres de perfectionnement conduisant à la promotion sociale ouverts dans des établissements d'enseignement public : " Les personnes qui, en dehors du service qu'elles assurent au titre de leur activité principale, exercent une fonction d'enseignement dans les centres ou cours de perfectionnement conduisant à la promotion sociale organisés auprès d'établissements d'enseignement public relevant de la direction de la pédagogie, des enseignements scolaires et de l'orientation du ministère de l'éducation nationale et autorisés par elle sont rémunérées dans les conditions précisées aux articles 2 et 3 ci-dessous. / Les personnes remplissant les fonctions de chefs de travaux sont considérées comme personnel enseignant. Elles sont rémunérées dans les conditions précisées à l'article 3 bis ci-après. ". Aux termes de l'article 2 de ce même décret : " Les personnes chargées d'un enseignement à caractère général, technique, théorique ou pratique sont rétribuées pour chaque heure de cours assurée, au moyen d'une indemnité horaire (...) ". Aux termes de l'article 3 bis de ce même décret : " Les personnes remplissant les fonctions de chefs de travaux sont rémunérées selon les modalités et aux taux prévus aux articles 2 et 3 ci-dessus, pour un enseignement technique théorique de la catégorie correspondant au niveau des travaux pratiques dispensés par les personnels dont ils assurent l'encadrement. / Le droit à rémunération n'est ouvert que lorsque la durée des travaux pratiques est au minimum de six heures et à raison d'une demi-heure par tranche de six heures. ". Aux termes de l'article 8 de ce même décret : " Le montant annuel des indemnités prévues au présent texte varie uniquement en fonction des critères qu'il définit sans qu'il soit tenu compte, notamment, ni de l'ancienneté de service des bénéficiaires, ni, en cas de modification dans l'importance des tâches qui leur sont confiées, des taux des indemnités auxquelles ils pouvaient antérieurement prétendre. / L'attribution de ces indemnités est liée à l'exercice effectif des fonctions y ouvrant droit. ". Aux termes de l'article 3 du décret du 6 novembre 1992 relatif au statut particulier des professeurs de lycée professionnel : " Les professeurs de lycée professionnel peuvent exercer les fonctions de directeur délégué aux formations professionnelles et technologiques. / Les fonctions de directeur délégué aux formations professionnelles et technologiques consistent à assurer, sous l'autorité directe du chef d'établissement, l'organisation et la coordination des enseignements technologiques et professionnels ainsi que la gestion des moyens mis en œuvre pour ces enseignements. Le directeur délégué aux formations professionnelles et technologiques conseille le chef d'établissement pour le choix, l'installation et l'utilisation des équipements pédagogiques. Il participe aux relations extérieures de l'établissement, notamment avec les entreprises. ". Aux termes de l'article 1er du décret du 24 mars 1993 fixant la rémunération des personnes participant aux activités de formation continue des adultes organisées par le ministère chargé de l'éducation nationale : " Les personnels relevant du ministre chargé de l'éducation nationale qui participent aux activités de formation continue des adultes organisées en application de l'article 19 de la loi du 10 juillet 1989 susvisée, en dehors de leurs obligations de service, perçoivent une indemnité horaire. (...) ". Aux termes de l'article 9 de ce même décret : " Les dispositions du présent décret se substituent aux dispositions du décret du 6 octobre 1950 susvisé et aux articles 1er, 2 et 3 du décret du 23 mai 1968 modifié susvisé, pour les personnes et les activités visées au présent décret. ".

4. En premier lieu, c'est sans erreur de droit que la cour administrative d'appel a jugé qu'il résulte de la combinaison des dispositions citées au point 3 que les agents du ministère de l'éducation nationale ayant la qualité de directeur délégué aux formations professionnelles et technologiques, titre prévu par le décret du 6 novembre 1992 précité qui a remplacé la fonction antérieurement qualifiée de " chef de travaux ", et qui participent effectivement, en cette qualité, aux missions de formation continue assurée par les GRETA au-delà de leurs obligations de service au titre de la formation initiale, bénéficient d'une rémunération s'ajoutant à leur traitement principal, dont le montant est égal à la rémunération d'une demi-heure par tranche de six heures d'enseignement réalisées par les enseignants placés sous leur responsabilité sous forme de travaux pratiques, terme qui doit être regardé comme englobant l'ensemble des enseignements d'apprentissage professionnel ne présentant pas un caractère purement théorique, qu'ils concernent les formations du secteur agricole, industriel ou tertiaire.

5. En deuxième lieu, c'est par une appréciation souveraine des pièces du dossier soumis à son examen, exempte de dénaturation que la cour administrative d'appel a jugé que Mme A... avait encadré 599,5 heures d'enseignements d'apprentissage professionnel ne présentant pas un caractère purement théorique pour chacun des semestres de l'année scolaire 2016-2017.

6. En troisième lieu, toutefois, il résulte de ce qui a été dit au point 4 que le montant de l'indemnité d'un directeur délégué aux formations professionnelles est calculé sur la base d'une demi-heure par tranche de six heures d'enseignement réalisées par les enseignants placés sous sa responsabilité sous forme de travaux pratiques. Ces dispositions ne prévoyant aucun dispositif de proratisation, ne peuvent être prises en compte que des tranches de six heures complètes. Il s'ensuit que, la cour administrative d'appel ayant retenu que le nombre d'heures de travaux pratiques réalisées par les enseignants placés sous la responsabilité de Mme A... s'élevait, pour chacun des semestres au titre duquel l'administration en établissait le décompte, à 599,5 heures, soit 99,92 tranches de 6 heures, il convenait de retenir, pour calculer l'indemnité qui lui était due à ce titre, pour chacun de ces semestres, une base de 99 demi-heures, soit 49,5 heures. En retenant pour chacun des deux semestres une base de 49,96 heures, pour fixer à 3 863,73 euros la somme qui lui était due à ce titre, une fois déduites les 12,5 heures qui lui avaient déjà été payées chaque semestre, la cour administrative d'appel a entaché son arrêt d'erreur de droit.

7. Il résulte de tout ce qui précède que le lycée polyvalent Jean Mermoz est fondé à demander l'annulation de l'arrêt seulement en tant qu'il a fixé la rémunération due à Mme A... à 3 863,73 euros.

Sur le règlement au fond :

8. Il y a lieu, dans les circonstances de l'espèce, de régler, dans cette mesure, l'affaire au fond en application des dispositions de l'article L. 821-2 du code de justice administrative.

9. Il résulte de ce qui a été dit au point 6 que Mme A... est fondée à demander la condamnation du lycée polyvalent Jean Mermoz à lui verser, compte tenu du taux horaire de 44,20 euros de l'indemnité en cause, non contesté par l'établissement, et des 12,5 heures qui lui ont déjà été payées chaque semestre, la somme de 3 823,30 euros correspondant à la rémunération de 49,5 heures pour chaque semestre.

Sur l'application des dispositions de l'article L. 761-1 du code de justice administrative :

10. Il y a lieu, dans les circonstances de l'espèce, de mettre à la charge du lycée polyvalent Jean Mermoz la somme de 3 000 euros à verser à Mme A..., au titre de l'article L. 761-1 du code de justice administrative. Les mêmes dispositions font obstacle à ce qu'une somme soit mise à ce titre à la charge de Mme A... qui n'est pas, dans la présente instance, la partie perdante pour l'essentiel.

D E C I D E :

--------------

Article 1er : L'arrêt de la cour administrative d'appel de Marseille du 12 juillet 2021 est annulé en tant qu'il fixe à 3 863,73 euros la rémunération due à Mme A... par le lycée polyvalent Jean-Mermoz au titre de ses fonctions de directeur délégué aux formations professionnelles.

Article 2 : Le lycée polyvalent Jean Mermoz est condamné à verser à Mme A... la somme de 3 823,30 euros, en plus de l'indemnisation de 500 euros que lui a allouée la cour administrative d'appel en réparation de son préjudice moral et du préjudice découlant des troubles dans ses conditions d'existence.

Article 3 : Le surplus des conclusions du pourvoi du lycée polyvalent Jean Mermoz et de ses demandes présentées devant la cour administrative d'appel est rejeté.

Article 4 : Le lycée polyvalent Jean Mermoz versera à Mme A... une somme de 3 000 euros au titre de l'article L. 761-1 du code de justice administrative.

Article 5 : La présente décision sera notifiée au lycée polyvalent Jean Mermoz et à Mme B... A....

Délibéré à l'issue de la séance du 15 décembre 2022 où siégeaient : M. Guillaume Goulard, président de chambre, présidant ; M. Stéphane Verclytte, conseiller d'Etat et Mme Rose-Marie Abel, maître des requêtes en service extraordinaire-rapporteure.

Rendu le 23 décembre 2022.

Le président :

Signé : M. Guillaume Goulard

La rapporteure :

Signé : Mme Rose-Marie Abel

La secrétaire :

Signé : Mme Nathalie Martinez-Casanova


Type d'affaire : Administrative
Type de recours : Plein contentieux

Références :

Publications
Proposition de citation: CE, 23 déc. 2022, n° 455300
Inédit au recueil Lebon
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Composition du Tribunal
Rapporteur ?: Mme Rose-Marie Abel
Rapporteur public ?: M. Thomas Pez-Lavergne
Avocat(s) : SCP DELAMARRE, JEHANNIN ; SCP SPINOSI

Origine de la décision
Formation : 3ème chambre
Date de la décision : 23/12/2022
Date de l'import : 27/03/2023

Fonds documentaire ?: Legifrance


Numérotation
Numéro d'arrêt : 455300
Numéro NOR : CETATEXT000047259288 ?
Identifiant URN:LEX : urn:lex;fr;conseil.etat;arret;2022-12-23;455300 ?
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