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22/12/2022 | FRANCE | N°462287

France | France, Conseil d'État, 5ème chambre, 22 décembre 2022, 462287


Vu la procédure suivante :

M. A... B... a demandé au tribunal administratif de Cergy-Pontoise d'annuler pour excès de pouvoir l'arrêté du 31 août 2020 par lequel le préfet du Val-d'Oise a prononcé la suspension de son permis de conduire pour une durée de six mois. Par un jugement n° 2009364 du 13 janvier 2022, la vice-présidente désignée par le président du tribunal administratif a annulé cette décision.

Par un pourvoi, enregistré le 14 mars 2022 au secrétariat du contentieux du Conseil d'Etat, le ministre de l'intérieur demande au Conseil d'Etat :

1°)

d'annuler ce jugement ;

2°) réglant l'affaire au fond, de rejeter la demande de M. B...

Vu la procédure suivante :

M. A... B... a demandé au tribunal administratif de Cergy-Pontoise d'annuler pour excès de pouvoir l'arrêté du 31 août 2020 par lequel le préfet du Val-d'Oise a prononcé la suspension de son permis de conduire pour une durée de six mois. Par un jugement n° 2009364 du 13 janvier 2022, la vice-présidente désignée par le président du tribunal administratif a annulé cette décision.

Par un pourvoi, enregistré le 14 mars 2022 au secrétariat du contentieux du Conseil d'Etat, le ministre de l'intérieur demande au Conseil d'Etat :

1°) d'annuler ce jugement ;

2°) réglant l'affaire au fond, de rejeter la demande de M. B....

Vu les autres pièces du dossier ;

Vu :

- le code de la route ;

- le code des relations entre le public et l'administration ;

- le code de justice administrative ;

Après avoir entendu en séance publique :

- le rapport de M. Joachim Bendavid, auditeur,

- les conclusions de M. Maxime Boutron, rapporteur public.

La parole ayant été donnée, après les conclusions, à la SCP Thouin-Palat, Boucard, avocat de M. B....

Considérant ce qui suit :

1. Il ressort des pièces du dossier soumis au juge du fond que le préfet du Val-d'Oise a pris, le 31 août 2020, sur le fondement de l'article L. 224-2 du code de la route, un arrêté suspendant, pour une durée de six mois, le permis de conduire de M. B... qui avait, le 30 août, dépassé d'au moins 40 km/h la vitesse maximale autorisée. Le ministre de l'intérieur se pourvoit en cassation contre le jugement du 13 janvier 2022 par lequel la vice-présidente désignée par le président du tribunal administratif de Cergy-Pontoise a, à la demande de M. B..., annulé cet arrêté.

2. D'une part, l'article L. 224-1 du code de la route prévoit que les officiers et agents de police judiciaire procèdent à la rétention à titre conservatoire d'un permis de conduire, notamment, lorsque le dépassement de 40 km/h ou plus de la vitesse maximale est établi au moyen d'un appareil homologué et lorsque le véhicule est intercepté. L'article L. 224-2 du même code permet au préfet, si les mêmes conditions sont remplies, de prononcer, dans les 72 heures qui suivent, la suspension du permis pour une durée pouvant aller jusqu'à six mois.

3. D'autre part, aux termes de l'article L. 121-1 du code des relations entre le public et l'administration : " Exception faite des cas où il est statué sur une demande, les décisions individuelles qui doivent être motivées en application de l'article L. 211-2, ainsi que les décisions qui, bien que non mentionnées à cet article, sont prises en considération de la personne, sont soumises au respect d'une procédure contradictoire préalable ". Aux termes de l'article L. 121-2 du même code : " Les dispositions de l'article L. 121-1 ne sont pas applicables : / 1° En cas d'urgence ou de circonstances exceptionnelles ; / 2° Lorsque leur mise en œuvre serait de nature à compromettre l'ordre public ou la conduite des relations internationales ; / 3° Aux décisions pour lesquelles des dispositions législatives ont instauré une procédure contradictoire particulière ; / (...) ". Les modalités de la procédure contradictoire applicables aux décisions mentionnées à l'article L. 211-2 sont définies à l'article L. 122-1 du même code. La suspension d'un permis de conduire est une mesure de police qui doit être motivée en application de l'article L. 211-2 du même code.

4. Compte tenu des conditions particulières d'urgence dans lesquelles intervient la décision par laquelle le préfet suspend un permis de conduire sur le fondement de l'article L. 224-2 du code de la route, qui doit être prise dans les 72 heures et qui a pour objet de faire obstacle à ce qu'un conducteur ayant commis un grave excès de vitesse retrouve l'usage de son véhicule, le préfet peut légalement prendre cette décision en se dispensant de procédure contradictoire en application du 1° de l'article L. 121-2 du code des relations entre le public et l'administration cité au point précédent.

5. Il résulte de ce qui précède qu'en jugeant que l'arrêté attaqué était entaché d'un défaut de motivation en ce que le préfet du Val-d'Oise n'avait pas précisé les motifs pour lesquels le conducteur entrait dans le champ d'application des dispositions précitées, justifiant que la mesure de suspension soit édictée sans le respect d'une procédure contradictoire préalable, alors que cet arrêté comportait l'énoncé des raisons de droit et de fait justifiant la mesure de suspension prise dans les 72 heures, la vice-présidente désignée par le président du tribunal administratif a commis une erreur de droit qui justifie, sans qu'il soit besoin de se prononcer sur l'autre moyen de cassation, l'annulation de son jugement.

6. Les dispositions de l'article L. 761-1 du code de justice administrative font obstacle à ce qu'une somme soit mise à ce titre à la charge de l'État, qui n'est pas la partie perdante dans la présente instance.

D E C I D E :

--------------

Article 1er : Le jugement du tribunal administratif de Cergy-Pontoise du 13 janvier 2022 est annulé.

Article 2 : L'affaire est renvoyée au tribunal administratif de Cergy-Pontoise.

Article 3 : Les conclusions présentées par M. B... au titre de l'article L. 761-1 du code de justice administrative sont rejetées.

Article 4 : La présente décision sera notifiée au ministre de l'intérieur et des outre-mer et à M. A... B....

Délibéré à l'issue de la séance du 1er décembre 2022 où siégeaient : M. Olivier Yeznikian, assesseur, présidant ; Mme Fabienne Lambolez, conseillère d'Etat et M. Joachim Bendavid, auditeur-rapporteur.

Rendu le 22 décembre 2022.

Le président :

Signé : M. Olivier Yeznikian

Le rapporteur :

Signé : M. Joachim Bendavid

La secrétaire :

Signé : Mme Nathalie Pilet


Synthèse
Formation : 5ème chambre
Numéro d'arrêt : 462287
Date de la décision : 22/12/2022
Type d'affaire : Administrative
Type de recours : Plein contentieux

Publications
Proposition de citation : CE, 22 déc. 2022, n° 462287
Inédit au recueil Lebon

Composition du Tribunal
Rapporteur ?: M. Joachim Bendavid
Rapporteur public ?: M. Maxime Boutron
Avocat(s) : SCP THOUIN-PALAT, BOUCARD

Origine de la décision
Date de l'import : 29/01/2023
Fonds documentaire ?: Legifrance
Identifiant ECLI : ECLI:FR:CE:2022:462287.20221222
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