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28/10/2022 | FRANCE | N°453605

France | France, Conseil d'État, 5ème chambre, 28 octobre 2022, 453605


Vu la procédure suivante :

M. I... D... et Mme A... E... ont demandé au tribunal administratif de Grenoble de condamner le centre hospitalier universitaire (CHU) de Grenoble à les indemniser des préjudices qu'ils estiment avoir subis du fait de la prise en charge de M. D... par cet établissement à compter du 5 octobre 2007. Par un jugement n° 1506400 du 16 mai 2017, le tribunal administratif de Grenoble a condamné le CHU de Grenoble à verser à M. D... et Mme E... une somme de 746 560 euros avec intérêts au taux légal à compter du 20 octobre 2015 ainsi qu'une rente trimestr

ielle de 9 061 euros.

Par un arrêt-avant-dire droit n° 17LY02768,...

Vu la procédure suivante :

M. I... D... et Mme A... E... ont demandé au tribunal administratif de Grenoble de condamner le centre hospitalier universitaire (CHU) de Grenoble à les indemniser des préjudices qu'ils estiment avoir subis du fait de la prise en charge de M. D... par cet établissement à compter du 5 octobre 2007. Par un jugement n° 1506400 du 16 mai 2017, le tribunal administratif de Grenoble a condamné le CHU de Grenoble à verser à M. D... et Mme E... une somme de 746 560 euros avec intérêts au taux légal à compter du 20 octobre 2015 ainsi qu'une rente trimestrielle de 9 061 euros.

Par un arrêt-avant-dire droit n° 17LY02768, 17LY02778 du 29 août 2019, la cour administrative d'appel de Lyon, statuant sur l'appel de la caisse primaire d'assurance maladie (CPAM) du Rhône, venant aux droits de la CPAM de l'Isère, sur l'appel du CHU de Grenoble et sur les appels provoqué et incident de M. D..., de Mme E..., de Mme C... H..., épouse D..., de M. F... D... et de Mme B... D..., a rejeté comme irrecevables les conclusions d'appel présentées par Mme E... en son nom propre et ordonné une nouvelle expertise portant sur les conditions de la prise en charge de M. D....

Par un arrêt n° 17LY02768, 17LY02778 du 13 avril 2021, la cour administrative d'appel de Lyon a, d'une part, ramené à 278 601,32 euros la somme que le CHU de Grenoble a été condamné à verser à Mme E... en qualité d'ayant droit de son mari, décédé en cours d'instance, d'autre part, condamné le CHU de Grenoble à verser la somme de 654 582,22 euros à la CPAM du Rhône, venue aux droits de la CPAM de l'Isère, et rejeté les conclusions présentées en leur nom propre par Mme C... H..., épouse D..., M. F... D... et Mme B... D....

Par un pourvoi sommaire, un mémoire complémentaire et un mémoire en réplique, enregistrés les 14 juin 2021, 13 septembre 2021 et 11 mars 2022 au secrétariat du contentieux du Conseil d'Etat, Mme E..., Mme C... H..., épouse D..., M. F... D... et Mme B... D... demandent au Conseil d'Etat :

1°) d'annuler cet arrêt en tant qu'il rejette le surplus de leurs conclusions ;

2°) réglant l'affaire au fond, de faire intégralement droit à leurs conclusions d'appel ;

3°) de mettre à la charge du CHU de Grenoble la somme de 4 000 euros au titre de l'article L. 761-1 du code de justice administrative.

Vu les autres pièces du dossier ;

Vu

- le code civil

- le code de justice administrative ;

Après avoir entendu en séance publique :

- le rapport de M. Jean-Dominique Langlais, conseiller d'Etat,

- les conclusions de M. Florian Roussel, rapporteur public.

La parole ayant été donnée, après les conclusions, à la SCP Boré, Salve de Bruneton, Mégret, avocat de Mme E... et autres et à la SARL Le Prado - Gilbert, avocat du centre hospitalier universitaire de Grenoble.

Considérant ce qui suit :

1. Il résulte des pièces du dossier soumis aux juges du fond que, par un jugement du 16 mai 2017, le tribunal administratif de Grenoble, retenant l'entière responsabilité du CHU de Grenoble dans les préjudices ayant résulté pour M. I... D... et son épouse Mme E... des conditions de prise en charge de M. D... dans cet établissement à compter du 5 octobre 2007, a condamné ce CHU à verser à M. D... et Mme E... la somme de 746 560 euros ainsi qu'une rente trimestrielle de 9 061 euros. Par un arrêt avant-dire-droit du 19 août 2019, la cour administrative d'appel de Lyon, statuant sur l'appel de la CPAM du Rhône, venant aux droits de la CPAM de l'Isère, sur l'appel du CHU de Grenoble et sur l'appel provoqué et l'appel incident de M. D... et de Mme E..., a rejeté comme irrecevables les conclusions d'appel présentées par Mme E... en son nom propre et ordonné une nouvelle expertise. M. D... étant ultérieurement décédé en cours de l'instance, ses parents, Mme C... H..., épouse D... et M. F... D..., et sa sœur, Mme B... D..., ont présenté devant la cour des conclusions tendant à l'indemnisation des préjudices propres ayant résulté pour eux de son décès. Par un arrêt du 13 avril 2021, la cour administrative d'appel a, notamment, rejeté comme irrecevables les conclusions présentées pour la première fois en appel par les parents et la sœur de M. D..., réformé le jugement du tribunal administratif de Grenoble en ramenant à 278 601,32 la somme à verser à Mme E... en qualité d'ayant droit de son mari mise à la charge du CHU de Grenoble et rejeté le surplus de ses conclusions. Mme E..., Mme C... H..., épouse D..., M. F... D... et Mme B... D... demandent l'annulation de cet arrêt par un pourvoi qui, eu égard au moyen qu'il soulève, doit être regardé comme tendant à l'annulation de l'arrêt en tant qu'il limite à 278 601,32 euros la réparation des préjudices de Mme E... en qualité d'ayant droit de son époux.

2. Aux termes du premier alinéa de l'article 724 du code civil : " Les héritiers désignés par la loi sont saisis de plein droit des biens, droits et actions du défunt ". Il résulte de ces dispositions que le droit à réparation d'un dommage est transmis aux héritiers et que chaque héritier a dès lors qualité, le cas échéant sans le concours des autres indivisaires, pour exercer l'action indemnitaire tendant à obtenir, au bénéfice de la succession, la réparation du préjudice subi.

3. Il résulte de ce qui est dit au point 2 que Mme E..., conjoint survivant de M. D..., avait été saisie de plein droit des biens, droits et actions du défunt et avait, dès lors, qualité, le cas échéant d'ailleurs sans le concours des autres indivisaires, pour exercer l'action indemnitaire tendant à obtenir, au bénéfice de la succession, la réparation du préjudice subi par M. D... du fait des fautes imputables au CHU de Grenoble. Par suite, en limitant le montant de l'indemnisation accordée à Mme E... en fonction de sa part dans la succession, la cour administrative d'appel a commis une erreur de droit qui justifie, dans cette mesure, l'annulation de son arrêt.

4. En application de l'article L. 821-2 du code de justice administrative, il y a lieu de régler l'affaire au fond dans la limite de la cassation prononcée.

5. Par l'arrêt attaqué, devenu définitif sur ce point, la cour administrative d'appel de Lyon a fixé à 557 202,63 euros le montant du préjudice ayant résulté pour M. D... des fautes commises par le CHU de Grenoble. L'action engagée devant elle par Mme E..., doit être regardée, en tant qu'elle tend à la réparation des préjudices de M. D..., comme conduite au bénéfice de la succession. Il y a lieu dès lors de condamner le centre hospitalier de Grenoble à verser la totalité de cette somme à Mme E..., au bénéfice de la succession de M. D....

6. Il y a lieu, dans les circonstances de l'espèce, de mettre à la charge du CHU de Grenoble une somme de 3 000 euros à verser à Mme E... au titre de l'article L. 761-1 du code de justice administrative.

D E C I D E :

--------------

Article 1er : L'arrêt du 13 avril 2021 de la cour administrative d'appel de Lyon est annulé en tant qu'il limite à 278 601,32 euros la somme allouée à Mme E... en qualité d'ayant droit de son époux.

Article 2 : Le CHU de Grenoble versera à Mme E..., au bénéfice de la succession de M. D..., la somme de 557 202,63 euros assortie des intérêts au taux légal à compter du 20 octobre 2015, déduction faite des sommes déjà versées, notamment à titre provisionnel. Les intérêts échus à la date du 14 novembre 2017 puis à chaque échéance annuelle à compter de cette date seront capitalisés à chacune de ces dates pour produire eux-mêmes intérêts.

Article 3 : Le CHU de Grenoble versera la somme de 3 000 euros à Mme E... au titre de l'article L. 761-1 du code de justice administrative.

Article 4 : La présente décision sera notifiée à Mme A... E..., première requérante dénommée, au centre hospitalier universitaire de Grenoble et à la caisse primaire d'assurance maladie du Rhône.

Délibéré à l'issue de la séance du 29 septembre 2022 où siégeaient : M. Jean-Philippe Mochon, président de chambre, présidant ; Mme Fabienne Lambolez, conseillère d'Etat et M. Jean-Dominique Langlais, conseiller d'Etat-rapporteur.

Rendu le 28 octobre 2022.

Le président :

Signé : M. Jean-Philippe Mochon

Le rapporteur :

Signé : M. Jean-Dominique Langlais

La secrétaire :

Signé : Mme Anne-Lise Calvaire


Synthèse
Formation : 5ème chambre
Numéro d'arrêt : 453605
Date de la décision : 28/10/2022
Type d'affaire : Administrative
Type de recours : Plein contentieux

Publications
Proposition de citation : CE, 28 oct. 2022, n° 453605
Inédit au recueil Lebon

Composition du Tribunal
Rapporteur ?: M. Jean-Dominique Langlais
Rapporteur public ?: M. Florian Roussel
Avocat(s) : SARL LE PRADO – GILBERT ; SCP BORE, SALVE DE BRUNETON, MEGRET

Origine de la décision
Date de l'import : 13/11/2022
Fonds documentaire ?: Legifrance
Identifiant ECLI : ECLI:FR:CE:2022:453605.20221028
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