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10/10/2022 | FRANCE | N°456102

France | France, Conseil d'État, 1ère - 4ème chambres réunies, 10 octobre 2022, 456102


Vu la procédure suivante :

Par une requête sommaire, un mémoire complémentaire et un mémoire en réplique, enregistrés le 30 août et le 3 novembre 2021 et le 14 septembre 2022 au secrétariat du contentieux du Conseil d'Etat, l'Union des entreprises de transport et de logistique, la Fédération nationale des transports routiers, la Fédération nationale du bois, le Syndicat français de l'industrie cimentière, l'Union nationale des industries de l'impression et de la communication, l'Union inter-secteurs papiers cartons pour le dialogue et l'ingénierie sociale, l'Union des tr

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Vu la procédure suivante :

Par une requête sommaire, un mémoire complémentaire et un mémoire en réplique, enregistrés le 30 août et le 3 novembre 2021 et le 14 septembre 2022 au secrétariat du contentieux du Conseil d'Etat, l'Union des entreprises de transport et de logistique, la Fédération nationale des transports routiers, la Fédération nationale du bois, le Syndicat français de l'industrie cimentière, l'Union nationale des industries de l'impression et de la communication, l'Union inter-secteurs papiers cartons pour le dialogue et l'ingénierie sociale, l'Union des transformateurs de polymères POLYVIA, l'Association nationale des industries alimentaires et la Fédération organisation des transports routiers européens demandent au Conseil d'État :

1°) d'annuler pour excès de pouvoir l'arrêté du 28 juin 2021 relatif aux secteurs d'activité et aux employeurs entrant dans le champ d'application du bonus-malus ;

2°) de mettre à la charge de l'État la somme de 600 euros à verser à chacun d'entre eux au titre de l'article L. 761-1 du code de justice administrative.

Vu les autres pièces du dossier ;

Vu :

- le code du travail ;

- le décret n° 2007-1888 du 26 décembre 2007 ;

- le décret n° 2019-797 du 26 juillet 2019 ;

- le décret n° 2021-346 du 30 mars 2021 ;

- le code de justice administrative ;

Après avoir entendu en séance publique :

- le rapport de M. Eric Buge, maître des requêtes en service extraordinaire,

- les conclusions de Mme Marie Sirinelli, rapporteure publique ;

La parole ayant été donnée, après les conclusions, à la SCP Célice, Texidor, Perier, avocat de l'Union des entreprises de transport et de logistique, de la Fédération nationale des transports routiers, de la Fédération nationale du bois, du Syndicat français de l'industrie cimentière, de l'Union nationale des industries de l'impression et de la communication, de l'Union inter-secteurs papiers cartons pour le dialogue et l'ingénierie sociale, de l'Union des transformateurs de polymères POLYVIA, de l'Association nationale des industries alimentaires et de la Fédération organisation des transports routiers européens ;

Considérant ce qui suit :

1. L'article L. 5422-9 du code du travail dispose que l'assurance chômage est notamment financée par des contributions des employeurs. Le taux de contribution de chaque employeur peut, en vertu de l'article L. 5422-12 du même code, être minoré ou majoré en fonction notamment " 1° Du nombre de fins de contrat de travail et de contrats de mise à disposition mentionnés au 1° de l'article L. 1251-1, à l'exclusion des démissions, des contrats de travail et des contrats de mise à disposition conclus avec une structure d'insertion par l'activité économique mentionnée à l'article L. 5132-4 et des contrats de mission mentionnés au 2° de l'article L. 1251-1, et sous réserve de l'inscription des personnes concernées par ces fins de contrat sur la liste des demandeurs d'emploi mentionnée à l'article L. 5411-1 ; (...) / 5° Du secteur d'activité de l'entreprise ". Le règlement d'assurance chômage figurant en annexe A du décret du 26 juillet 2019 relatif au régime d'assurance chômage prévoit, à ses articles 50-2 à 50-15, les modalités de mise en œuvre de cette modulation. A ce titre, le premier alinéa du I de l'article 50-3 réserve la modulation des contributions d'assurance chômage aux entreprises relevant de secteurs d'activité dans lesquels le taux de séparation moyen est supérieur à un seuil de 150 %, en renvoyant à un arrêté du ministre chargé de l'emploi le soin de préciser, pour une période de trois ans, les secteurs d'activité concernés par référence à la nomenclature des secteurs d'activité figurant à l'article 50-3-1. Le même arrêté doit également préciser, en vertu du 2° du II du même article, quels sont les secteurs d'activité pour lesquels il est fait application du taux majoré ou minoré, dit " bonus-malus ", au cours de la première période d'emploi, qui fait l'objet de règles dérogatoires, c'est-à-dire pour les rémunérations dues au titre des périodes d'emploi courant du 1er septembre au 31 octobre 2022. Les requérants demandent l'annulation pour excès de pouvoir de l'arrêté du 28 juin 2021 relatif aux secteurs d'activité et aux employeurs entrant dans le champ d'application du bonus-malus, qui détermine les secteurs d'activité et les entreprises entrant dans le champ de cette modulation.

2. En premier lieu, le moyen tiré de ce que l'arrêté contesté devrait être annulé par voie de conséquence de l'annulation du décret du 30 mars 2021 portant diverses mesures relatives au régime d'assurance chômage, dont sont issus les articles 50-2 à 50-15 du règlement d'assurance chômage, ne peut qu'être écarté dès lors que le Conseil d'Etat, statuant au contentieux a rejeté, par sa décision nos 452209, 452783, 452796, 452831, 452836, 452842, 453181, 455121 du 15 décembre 2021, les conclusions des requêtes tendant à l'annulation de ce décret.

3. En deuxième lieu, l'annexe 1 de l'arrêté attaqué fixe la liste des secteurs d'activité auxquels s'applique la modulation, sous la forme d'un tableau mentionnant en face de chacun des secteurs d'activité retenu son taux de séparation moyen pour la période de référence, assorti de la mention de la source des données et de la méthodologie. D'une part, aucun texte ni aucun principe n'imposait que l'arrêté, qui revêt un caractère règlementaire et n'avait donc pas à être motivé, précise les modalités et éléments de calcul de ces taux. Au demeurant, comme il a été dit, outre que les modalités selon lesquelles doit être calculé ce taux de séparation moyen sont précisées par l'article 50-3 du règlement d'assurance chômage, l'annexe 1 de l'arrêté comporte la mention des sources de données utilisées et détaille la méthodologie employée pour calculer les taux de séparation moyens figurant à cette annexe. D'autre part, si les requérants soutiennent que ces taux ne correspondent pas aux chiffres dont eux-mêmes disposeraient et à la situation réelle des différents secteurs d'activité concernés, ils n'apportent aucun élément de nature à remettre en cause les taux de séparation moyens figurant à cette annexe. Par suite, ils ne sont pas fondés à soutenir que l'arrêté attaqué serait pour ces motifs entaché d'erreur manifeste d'appréciation.

4. En troisième lieu, les articles 2 et 4 de l'arrêté contesté retiennent, pour affecter une entreprise au sein d'un secteur d'activité, en vue de déterminer si elle entre dans le champ d'application du bonus-malus, deux critères cumulatifs : la convention collective dont relève leur activité principale ou à laquelle elle adhère ou qu'elle applique de manière volontaire (code IDCC) et le code caractérisant l'activité principale exercée (APE). Si l'employeur n'applique aucune convention collective ou si la majorité des contrats de travail au sein de l'entreprise n'est associée à aucune convention collective, seul le code APE est pris en considération pour l'affecter dans un secteur d'activité.

5. D'une part, le neuvième alinéa du I de l'article 50-3 du règlement d'assurance chômage dispose que l'affectation d'un employeur dans l'un des secteurs d'activité soumis à bonus-malus " est effectuée en fonction de l'activité économique principale qu'il exerce ou, le cas échéant, de son objet social, et de la convention collective à laquelle il est rattaché, selon des modalités fixées par arrêté du ministre chargé de l'emploi. " En retenant comme critère d'affectation la convention collective dont relève l'activité principale de l'employeur ou à laquelle il adhère ou qu'il applique de manière volontaire, l'arrêté contesté n'a méconnu ni ces dispositions, ni celles de l'article L. 5422-12 du code du travail. En outre, si l'arrêté retient aussi le code APE à titre de critère supplémentaire, il ressort des pièces du dossier que ce code, attribué par l'Institut national de la statistique et des études économiques (INSEE), caractérise, comme l'indique l'article 5 du décret du 26 décembre 2007 portant approbation des nomenclatures d'activités et de produits françaises, l'activité principale exercée par l'employeur, que les cas dans lesquels, faute de convention collective applicable, le code APE est seul appliqué pour rattacher un employeur à un secteur d'activité sont limités à 1 % des entreprises concernées et qu'il est possible à l'employeur de demander à l'INSEE la modification de ce code s'il ne correspond pas à l'activité principale de l'entreprise, voire d'invoquer cette circonstance dans le cadre de la contestation du montant de la contribution mise à sa charge. Dans ces conditions, en prévoyant que ce critère s'ajoute à celui découlant de la convention collective tout en ne pouvant, hormis en l'absence de convention collective applicable, conduire qu'à exclure l'entreprise du champ d'application du bonus-malus, l'arrêté attaqué n'a nullement méconnu les dispositions de l'article L. 5422-12 du code du travail ou celles du règlement d'assurance chômage et n'est pas entaché d'erreur manifeste d'appréciation.

6. D'autre part, l'arrêté contesté traitant de la même manière l'ensemble des entreprises de onze salariés et plus, quelle que soit leur taille ou leur appartenance à un groupe de sociétés, pour les affecter dans un secteur d'activité, conformément à l'article L. 5422-12 du code du travail qui prévoit que le taux de contribution est calculé pour chaque employeur, le moyen tiré de ce que cet arrêté méconnaîtrait le principe d'égalité selon la taille de l'entreprise ou son appartenance à un groupe de sociétés ne peut qu'être écarté.

7. Il résulte de tout ce qui précède que les requérants ne sont pas fondés à demander l'annulation pour excès de pouvoir de l'arrêté qu'ils attaquent.

8. Les dispositions de l'article L. 761-1 du code de justice administrative font obstacle à ce qu'une somme soit mise à la charge de l'Etat qui n'est pas, dans la présente instance, la partie perdante.

D E C I D E :

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Article 1er : La requête de l'Union des entreprises de transport et de logistique et autres est rejetée.

Article 2 : La présente décision sera notifiée à l'Union des entreprises de transport et de logistique, première dénommée, pour l'ensemble des requérants, et au ministre du travail, du plein emploi et de l'insertion.

Délibéré à l'issue de la séance du 26 septembre 2022 où siégeaient : M. Jacques-Henri Stahl, président adjoint de la section du contentieux, présidant ; Mme Maud Vialettes, Mme Gaëlle Dumortier, présidentes de chambre ; M. Yves Doutriaux, M. Jean-Luc Nevache, M. Damien Botteghi, M. Alban de Nervaux, conseillers d'Etat ; Mme Agnès Pic, maître des requêtes en service extraordinaire et M. Eric Buge, maître des requêtes en service extraordinaire-rapporteur.

Rendu le 10 octobre 2022.

Le président :

Signé : M. Jacques-Henri Stahl

Le rapporteur :

Signé : M. Eric Buge

Le secrétaire :

Signé : M. Hervé Herber


Synthèse
Formation : 1ère - 4ème chambres réunies
Numéro d'arrêt : 456102
Date de la décision : 10/10/2022
Type d'affaire : Administrative
Type de recours : Excès de pouvoir

Publications
Proposition de citation : CE, 10 oct. 2022, n° 456102
Inédit au recueil Lebon

Composition du Tribunal
Rapporteur ?: M. Eric Buge
Rapporteur public ?: Mme Marie Sirinelli
Avocat(s) : SCP CELICE, TEXIDOR, PERIER

Origine de la décision
Date de l'import : 10/11/2022
Fonds documentaire ?: Legifrance
Identifiant ECLI : ECLI:FR:CE:2022:456102.20221010
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