La jurisprudence francophone des Cours suprêmes


recherche avancée

28/09/2022 | FRANCE | N°451202

France | France, Conseil d'État, 9ème chambre, 28 septembre 2022, 451202


Vu la procédure suivante :

M. A... B... a demandé au tribunal administratif de Versailles de prononcer la décharge, en droits, majorations, amendes et intérêts de retard, des rappels de taxe sur la valeur ajoutée et des suppléments d'impôt sur les sociétés mis à la charge de la société de droit letton Sarto Sia, à raison de son établissement stable en France, dont il a été considéré comme le représentant légal, au titre des périodes et exercices clos en 2011 et 2012. Par une ordonnance n° 1708203 du 21 janvier 2020, le président de la 5ème chambre du tribunal ad

ministratif de Versailles a donné acte du désistement de la demande de M. B......

Vu la procédure suivante :

M. A... B... a demandé au tribunal administratif de Versailles de prononcer la décharge, en droits, majorations, amendes et intérêts de retard, des rappels de taxe sur la valeur ajoutée et des suppléments d'impôt sur les sociétés mis à la charge de la société de droit letton Sarto Sia, à raison de son établissement stable en France, dont il a été considéré comme le représentant légal, au titre des périodes et exercices clos en 2011 et 2012. Par une ordonnance n° 1708203 du 21 janvier 2020, le président de la 5ème chambre du tribunal administratif de Versailles a donné acte du désistement de la demande de M. B... en application de l'article R. 612-5-1 du code de justice administrative.

Par une ordonnance nos 20VE00282, 20VE00755 du 27 janvier 2021, le premier vice-président de la cour administrative d'appel de Versailles a, d'une part, rejeté l'appel formé par M. B... contre l'ordonnance du tribunal administratif de Versailles et, d'autre part, jugé qu'il n'y avait pas lieu à statuer sur ses conclusions tendant à la suspension de la mise en demeure de payer jusqu'à ce que la cour statue sur sa requête d'appel.

Par un pourvoi sommaire et un mémoire complémentaire, enregistrés les 29 mars et 18 juin 2021 au secrétariat du contentieux du Conseil d'Etat, M. B... demande au Conseil d'Etat :

1°) d'annuler cette ordonnance ;

2°) réglant l'affaire au fond, de faire droit à ses conclusions d'appel et de première instance ;

3°) de mettre à la charge de l'Etat la somme de 4 500 euros au titre de l'article L. 761-1 du code de justice administrative.

Vu les autres pièces du dossier ;

Vu :

- la convention européenne de sauvegarde des droits de l'homme et des libertés fondamentales ;

- le code de justice administrative ;

Après avoir entendu en séance publique :

- le rapport de M. Olivier Pau, auditeur,

- les conclusions de Mme Céline Guibé, rapporteure publique ;

La parole ayant été donnée, après les conclusions, à la SCP Fabiani, Luc-Thaler, Pinatel, avocat de M. B... ;

Considérant ce qui suit :

1. Aux termes de l'article R. 612-5-1 du code de justice administrative : " Lorsque l'état du dossier permet de s'interroger sur l'intérêt que la requête conserve pour son auteur, le président de la formation de jugement (...) peut inviter le requérant à confirmer expressément le maintien de ses conclusions. La demande qui lui est adressée mentionne que, à défaut de réception de cette confirmation à l'expiration du délai fixé, qui ne peut être inférieur à un mois, il sera réputé s'être désisté de l'ensemble de ses conclusions ".

2. Il ressort des pièces du dossier soumis aux juges du fond que M. B... a, par un mémoire enregistré le 23 novembre 2017, saisi le tribunal administratif de Versailles d'une demande tendant à la décharge, en droits, majorations, amendes et intérêts de retard, des rappels de taxe sur la valeur ajoutée et des suppléments d'impôt sur les sociétés mis à la charge de la société de droit letton Sarto Sia, à raison de son établissement stable en France, dont il a été considéré comme le représentant légal, au titre des périodes et exercices clos en 2011 et 2012. L'administration a produit un mémoire en défense enregistré le 4 mai 2018, auquel M. B... a répondu le 9 juillet suivant. L'administration a indiqué le 24 septembre 2018 que cette réplique n'appelait pas d'observations complémentaires de sa part. Par un courrier daté du 16 décembre 2019, mis à disposition par la voie de l'application informatique Télérecours le même jour, et dont il a été accusé réception le lendemain, le président de la 5ème chambre du tribunal administratif de Versailles a demandé au conseil de M. B... de confirmer le maintien de ses conclusions, en précisant qu'à défaut de réception de cette confirmation dans un délai d'un mois, il serait réputé s'être désisté de ses conclusions en application des dispositions précitées de 1'article R. 612-5-1 du code de justice administrative. Le requérant n'ayant pas répondu à cette demande dans le délai fixé, le président de la 5ème chambre a, par une ordonnance du 21 janvier 2020, donné acte de son désistement. M. B... se pourvoit en cassation contre l'ordonnance du 27 janvier 2021 par laquelle le premier vice-président de la cour administrative d'appel de Versailles a rejeté l'appel qu'il avait formé contre l'ordonnance du 21 janvier 2020.

3. A l'occasion de la contestation en appel de l'ordonnance prenant acte du désistement d'un requérant en l'absence de réponse à l'expiration du délai qui lui a été fixé, il incombe au juge d'appel, saisi de moyens en ce sens, de vérifier que l'intéressé a reçu la demande mentionnée par les dispositions de l'article R. 612-5-1 du code de justice administrative, que cette demande fixait un délai d'au moins un mois au requérant pour répondre et l'informait des conséquences d'un défaut de réponse dans ce délai et que le requérant s'est abstenu de répondre en temps utile et d'apprécier si le premier juge, dans les circonstances de l'affaire, a fait une juste application des dispositions de l'article R. 612-5-1. Il n'appartient au juge de cassation de remettre en cause cette dernière appréciation que dans le cas où il estime, au vu de l'ensemble des circonstances de l'espèce, qu'il a été fait un usage abusif de la faculté ouverte par ces dispositions.

4. Il suit de là qu'en jugeant que la procédure prévue par ces dispositions n'avait pas été mise en œuvre de façon abusive, sans apprécier s'il en avait été fait une juste application, le premier vice-président de la cour administrative d'appel de Versailles a méconnu son office et, partant, commis une erreur de droit. Par suite, sans qu'il soit besoin d'examiner les autres moyens du pourvoi, son ordonnance doit être annulée.

5. Il y a lieu, dans les circonstances de l'espèce, de régler l'affaire au fond en application des dispositions de l'article L. 821-2 du code de justice administrative.

6. La demande de M. B..., introduite devant le tribunal administratif de Versailles, tendait à la décharge d'un montant d'imposition de près d'un million d'euros et qui n'avait donné lieu à aucun dégrèvement, même partiel, en cours d'instance. M. B... avait en outre produit deux mémoires, dont le deuxième n'avait pas suscité d'observations complémentaires de la part de l'administration, selon son deuxième mémoire en défense, lequel n'appelait donc pas lui-même de réponse particulière de la part du requérant. Dès lors, rien ne permettait de s'interroger sur l'intérêt que conservait pour ce dernier sa demande. Ainsi, le président de la 5ème chambre du tribunal administratif de Versailles, en prenant acte du désistement de M. B..., n'a pas fait une juste application des dispositions de l'article R. 612-5-1 du code de justice administrative citées au point 1 mais statué irrégulièrement.

7. Par suite et sans qu'il soit besoin d'examiner les autres moyens de la requête, l'ordonnance du président de la 5ème chambre du tribunal administratif de Versailles doit être annulée. Il y a lieu, dans les circonstances de l'espèce, de renvoyer l'affaire devant ce tribunal pour qu'il soit statué sur la demande de M. B....

8. Il y a lieu, dans les circonstances de l'espèce, de mettre à la charge de l'Etat la somme de 4 500 euros à verser à M. B... au titre de l'article L. 761-1 du code de justice administrative

D E C I D E :

--------------

Article 1er : L'ordonnance du 27 janvier 2021 du premier vice-président de la cour administrative d'appel de Versailles et l'ordonnance du 21 janvier 2020 du président de la 5ème chambre du tribunal administratif de Versailles sont annulées.

Article 2 : L'affaire est renvoyée devant le tribunal administratif de Versailles.

Article 3 : L'Etat versera à M. B... la somme de 4 500 euros au titre de l'article L. 761-1 du code de justice administrative.

Article 4 : La présente décision sera notifiée à M. A... B... et au ministre de l'économie, des finances et de la souveraineté industrielle et numérique.


Synthèse
Formation : 9ème chambre
Numéro d'arrêt : 451202
Date de la décision : 28/09/2022
Type d'affaire : Administrative
Type de recours : Plein contentieux

Publications
Proposition de citation : CE, 28 sep. 2022, n° 451202
Inédit au recueil Lebon

Composition du Tribunal
Rapporteur ?: M. Olivier Pau
Rapporteur public ?: Mme Céline Guibé
Avocat(s) : SCP FABIANI, LUC-THALER, PINATEL

Origine de la décision
Date de l'import : 02/10/2022
Fonds documentaire ?: Legifrance
Identifiant ECLI : ECLI:FR:CE:2022:451202.20220928
Association des cours judiciaires suprmes francophones
Organisation internationale de la francophonie
Juricaf est un projet de l'AHJUCAF, l'association des Cours suprêmes judiciaires francophones. Il est soutenu par l'Organisation Internationale de la Francophonie. Juricaf est un projet de l'AHJUCAF, l'association des Cours suprêmes judiciaires francophones. Il est soutenu par l'Organisation Internationale de la Francophonie.
Logo iall 2012 website award