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22/07/2022 | FRANCE | N°452730

France | France, Conseil d'État, 10ème chambre, 22 juillet 2022, 452730


Vu la procédure suivante :

La caisse nationale des barreaux français a demandé au tribunal administratif de Paris de prononcer la décharge, en droits et pénalités, de la cotisation sur la valeur ajoutée des entreprises (CVAE), de la taxe additionnelle à cette cotisation et des frais de gestion auxquelles elle a été assujettie au titre des années 2011 et 2012. Par un jugement n° 1516785 du 8 décembre 2016, le tribunal administratif de Paris a prononcé la décharge de ces impositions.

Par un arrêt n° 17PA01155 du 14 mars 2018, la cour administrative d'appel de Paris

, sur appel du ministre de l'action et des comptes publics, a annulé ce juge...

Vu la procédure suivante :

La caisse nationale des barreaux français a demandé au tribunal administratif de Paris de prononcer la décharge, en droits et pénalités, de la cotisation sur la valeur ajoutée des entreprises (CVAE), de la taxe additionnelle à cette cotisation et des frais de gestion auxquelles elle a été assujettie au titre des années 2011 et 2012. Par un jugement n° 1516785 du 8 décembre 2016, le tribunal administratif de Paris a prononcé la décharge de ces impositions.

Par un arrêt n° 17PA01155 du 14 mars 2018, la cour administrative d'appel de Paris, sur appel du ministre de l'action et des comptes publics, a annulé ce jugement et remis à la charge de la caisse nationale des barreaux français les impositions en litige.

Par une décision n° 420605 du 12 février 2020, le Conseil d'État, statuant au contentieux, a, sur le pourvoi de la caisse nationale des barreaux français, annulé l'arrêt de la cour et lui a renvoyé l'affaire.

Par un arrêt n° 20PA00539 du 18 mars 2021, la cour administrative d'appel de Paris a annulé le jugement du tribunal administratif de Paris du 8 décembre 2016 et remis à la charge de la caisse nationale des barreaux français les impositions en litige.

Par un pourvoi sommaire, un mémoire complémentaire et un mémoire en réplique, enregistrés les 18 mai et 18 août 2021 et le 29 mai 2022 au secrétariat du contentieux du Conseil d'Etat, la caisse nationale des barreaux français demande au Conseil d'Etat :

1°) d'annuler cet arrêt ;

2°) réglant l'affaire au fond, de rejeter l'appel du ministre ;

3°) de mettre à la charge de l'Etat la somme de 4 000 euros au titre de l'article L. 761-1 du code de justice administrative.

Elle soutient que la cour administrative d'appel de Paris a entaché son arrêt :

- d'erreur de droit en faisant application de la présomption de caractère professionnel des activités de location d'immeubles nus à usage autre que d'habitation prévue au I de l'article 1447 du code général des impôts pour apprécier si les conditions posées par le premier alinéa du 1 bis de l'article 206 du même code étaient remplies ;

- d'erreur de droit en qualifiant de revenus d'activités lucratives au sens du premier alinéa du 1 bis de l'article 206 du code général des impôts des revenus d'activités patrimoniales régies par le 5 de cet article ;

- d'erreur de droit en jugeant qu'était sans incidence la circonstance que son activité de location d'immeuble était intrinsèquement liée à la réalisation de sa mission désintéressée de gestion des retraites des avocats.

Vu les autres pièces du dossier ;

Vu :

- le code général des impôts et le livre des procédures fiscales ;

- le code de la sécurité sociale ;

- le code de justice administrative ;

Après avoir entendu en séance publique :

- le rapport de Mme Dominique Agniau-Canel, maître des requêtes en service extraordinaire,

- les conclusions de M. Laurent Domingo, rapporteur public ;

La parole ayant été donnée, après les conclusions, à la SCP Sevaux, Mathonnet, avocat de la caisse nationale des barreaux français ;

Vu la note en délibéré, enregistrée le 7 juillet 2022, présentée par la caisse nationale des barreaux français ;

Considérant ce qui suit :

1. Il ressort des pièces du dossier soumis aux juges du fond qu'à l'issue de la vérification de comptabilité dont elle a fait l'objet, la caisse nationale des barreaux français, organisme de sécurité sociale chargé de la gestion de la retraite et de la prévoyance des avocats, a été assujettie, à raison des revenus tirés de la location de biens immobiliers, à la cotisation sur la valeur ajoutée des entreprises (CVAE), à la taxe additionnelle à la CVAE et aux frais de gestion de cette cotisation au titre des années 2011 et 2012. Par un jugement du 8 décembre 2016, le tribunal administratif de Paris a fait droit à sa demande de décharge de ces impositions. La caisse nationale des barreaux français se pourvoit en cassation contre l'arrêt du 18 mars 2021 par lequel la cour administrative d'appel de Paris a, sur appel du ministre de l'action et des comptes publics, annulé ce jugement et remis les impositions litigieuses à sa charge.

2. L'article 1586 ter du code général des impôts dispose que : " I. - Les personnes physiques ou morales ainsi que les sociétés non dotées de la personnalité morale et les fiduciaires pour leur activité exercée en vertu d'un contrat de fiducie qui exercent une activité dans les conditions fixées aux articles 1447 et 1447 bis et dont le chiffre d'affaires est supérieur à 152 500 euros sont soumises à la cotisation sur la valeur ajoutée des entreprises. (...) ". Aux termes de l'article 1447 du même code : " I. - La cotisation foncière des entreprises est due chaque année par les personnes physiques ou morales, les sociétés non dotées de la personnalité morale ou les fiduciaires pour leur activité exercée en vertu d'un contrat de fiducie qui exercent à titre habituel une activité professionnelle non salariée. / Pour l'établissement de la cotisation foncière des entreprises, les activités de location ou de sous-location d'immeubles, autres que les activités de location ou sous-location d'immeubles nus à usage d'habitation, sont réputées exercées à titre professionnel ; toutefois, la cotisation foncière des entreprises n'est pas due lorsque l'activité de location ou de sous-location d'immeubles nus est exercée par des personnes qui, au cours de la période de référence définie à l'article 1467 A, en retirent des recettes brutes hors taxes, au sens de l'article 29, inférieures à 100 000 euros ou un chiffre d'affaires, au sens du 1 du I de l'article 1586 sexies, inférieur à 100 000 euros. / Lorsque la période de référence ne correspond pas à une période de douze mois, le montant des recettes ou du chiffre d'affaires est ramené ou porté, selon le cas, à douze mois. / II. - La cotisation foncière des entreprises n'est pas due par les organismes mentionnés au premier alinéa du 1 bis de l'article 206 qui remplissent les trois conditions fixées par ce même alinéa. / III. - Les personnes et sociétés mentionnées au I ne sont pas soumises à la cotisation foncière des entreprises à raison de leurs activités qui ne sont assujetties ni à l'impôt sur les sociétés ni à l'impôt sur le revenu en raison des règles de territorialité propres à ces impôts. ". Aux termes du premier alinéa du 1 bis de l'article 206 du même code, dans sa rédaction alors en vigueur : " (...) ne sont pas passibles de l'impôt sur les sociétés prévu au 1 les associations régies par la loi du 1er juillet 1901, les associations régies par la loi locale maintenue en vigueur dans les départements de la Moselle, du Bas-Rhin et du Haut-Rhin, les syndicats régis par les articles L. 2131-1 à L. 2135-2 du code du travail, les fondations reconnues d'utilité publique, les fondations d'entreprise, les fonds de dotation et les congrégations, dont la gestion est désintéressée, lorsque leurs activités non lucratives restent significativement prépondérantes et le montant de leurs recettes d'exploitation encaissées au cours de l'année civile au titre de leurs activités lucratives n'excède pas 60 000 euros (...) ".

3. En premier lieu, il ressort des dispositions précitées de l'article 1447 du code général des impôts que le paragraphe II de cet article déroge au principe posé par son paragraphe I d'assujettissement à la cotisation foncière des entreprises de toutes les personnes physiques ou morales qui exercent à titre habituel une activité professionnelle non salariée en exonérant de cette imposition certains organismes. Les conditions pour bénéficier de cette dérogation s'apprécient exclusivement au regard des dispositions du 1 bis de l'article 206 du même code. Il s'ensuit qu'en faisant application de la présomption irréfragable de caractère professionnel des activités de location d'immeubles nus qui ne sont pas à usage d'habitation, instituée par le deuxième alinéa du I de l'article 1447, pour juger que les recettes locatives de la caisse nationale des barreaux français avaient un caractère lucratif au sens des dispositions du 1 bis de l'article 206 du code général des impôts, la cour a commis une erreur de droit.

4. Toutefois, ainsi que le faisait valoir le ministre de l'économie, des finances et de la relance devant les juges du fond, la caisse nationale des barreaux français, qui, aux termes de l'article L. 651-2 du code de la sécurité sociale, est une caisse privée de sécurité sociale, ne relève d'aucune des catégories de personnes morales limitativement énumérées par le premier alinéa du 1 bis de l'article 206 du code général des impôts et ne peut, dès lors, invoquer le bénéfice de l'exonération prévue par le II de l'article 1447 du même code. Ce motif, dont l'examen n'implique l'appréciation d'aucune circonstance de fait, doit être substitué au motif erroné retenu par l'arrêt attaqué, dont il justifie le dispositif.

5. En second lieu, si la caisse nationale des barreaux de français fait valoir que la cour a entaché son arrêt d'erreur de droit en regardant les loyers perçus comme des revenus d'une activité lucrative dès lors que, d'une part, ils étaient exclusivement régis par le 5 de l'article 206 du code général des impôts et que, d'autre part, ils étaient directement affectés à la réalisation même de sa mission désintéressée de gestion des retraites des avocats, ces moyens sont inopérants dès lors que cet organisme de sécurité sociale, ainsi qu'il a été dit au point précédent, n'entre pas dans le champ des personnes couvertes par le 1 bis de l'article 206.

6. Il résulte de tout ce qui précède que les conclusions de la caisse nationale des barreaux français, y compris celles présentées au titre de l'article L. 761-1 du code de justice administrative, doivent être rejetées.

D E C I D E :

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Article 1er : Le pourvoi de la caisse nationale des barreaux français est rejeté.

Article 2 : La présente décision sera notifiée à la caisse nationale des barreaux français et au ministre de l'économie, des finances et de la souveraineté industrielle et numérique.

Délibéré à l'issue de la séance du 7 juillet 2022 où siégeaient : M. Bertrand Dacosta, président de chambre, présidant ; M. Alexandre Lallet, conseiller d'Etat et Mme Dominique Agniau-Canel, maître des requêtes en service extraordinaire-rapporteure.

Rendu le 22 juillet 2022.

Le président :

Signé : M. Bertrand Dacosta

La rapporteure :

Signé : Mme Dominique Agniau-Canel

La secrétaire :

Signé : Mme Sylvie Leporcq


Synthèse
Formation : 10ème chambre
Numéro d'arrêt : 452730
Date de la décision : 22/07/2022
Type d'affaire : Administrative
Type de recours : Plein contentieux

Publications
Proposition de citation : CE, 22 jui. 2022, n° 452730
Inédit au recueil Lebon

Composition du Tribunal
Rapporteur ?: Mme Dominique Agniau-Canel
Rapporteur public ?: M. Laurent Domingo
Avocat(s) : SCP SEVAUX, MATHONNET

Origine de la décision
Date de l'import : 26/07/2022
Fonds documentaire ?: Legifrance
Identifiant ECLI : ECLI:FR:CE:2022:452730.20220722
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