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21/07/2022 | FRANCE | N°449789

France | France, Conseil d'État, 5ème - 6ème chambres réunies, 21 juillet 2022, 449789


Vu la procédure suivante :

M. A... C... et Mme B... C... ont demandé au tribunal administratif de Lyon de condamner les hospices civils de Lyon et leur assureur, la société hospitalière d'assurances mutuelles (SHAM), à les indemniser des préjudices qu'ils estiment avoir subis du fait de la prise en charge de M. C.... La caisse locale déléguée pour la sécurité sociale des travailleurs indépendants, venant aux droits et obligations du régime social des indépendants, mis en cause, a demandé au tribunal administratif de condamner les hospices civils de Lyon à lui rembourser

les débours exposés pour M. C... après consolidation de son état. Les...

Vu la procédure suivante :

M. A... C... et Mme B... C... ont demandé au tribunal administratif de Lyon de condamner les hospices civils de Lyon et leur assureur, la société hospitalière d'assurances mutuelles (SHAM), à les indemniser des préjudices qu'ils estiment avoir subis du fait de la prise en charge de M. C.... La caisse locale déléguée pour la sécurité sociale des travailleurs indépendants, venant aux droits et obligations du régime social des indépendants, mis en cause, a demandé au tribunal administratif de condamner les hospices civils de Lyon à lui rembourser les débours exposés pour M. C... après consolidation de son état. Les hospices civils de Lyon et la SHAM ont demandé au tribunal administratif de condamner le régime social des indépendants à leur rembourser les sommes qu'ils ont estimé lui avoir indûment versées en 2014 au titre des débours exposés par ce tiers-payeur pour M. C... avant consolidation de son état. Par un jugement n° 1508155 du 30 novembre 2018, le tribunal administratif a condamné les hospices civils de Lyon et la SHAM à verser les sommes de 17 672,94 euros à M. C... et 2 000 euros à Mme C..., et rejeté le surplus des conclusions des parties.

Par un arrêt n° 19LY00442, 19LY00443, 19LY00504 du 17 décembre 2020, la cour administrative d'appel de Lyon a annulé le jugement du 20 novembre 2018 en tant que, par son article 6, il rejette les conclusions dirigées par les hospices civils de Lyon et la SHAM contre la caisse primaire d'assurance maladie du Puy-de-Dôme, venue aux droits du régime social des indépendants, et a rejeté ces mêmes conclusions comme portées devant une juridiction incompétente pour en connaître.

Par un pourvoi sommaire et un mémoire complémentaire, enregistrés les 17 février et 17 mai 2021 au secrétariat du contentieux du Conseil d'Etat, les hospices civils de Lyon et autre demandent au Conseil d'Etat :

1°) d'annuler cet arrêt en tant qu'il rejette leurs conclusions dirigées contre la caisse primaire d'assurance maladie du Puy-de-Dôme ;

2°) de mettre à la charge de la caisse primaire d'assurance maladie du Puy-de-Dôme la somme de 3 500 euros au titre des dispositions de l'article L. 761-1 du code de justice administrative.

Vu les autres pièces du dossier ;

Vu :

- le code de la santé publique ;

- la loi n° 2001-1168 du 11 décembre 2001 ;

- le code de justice administrative ;

Après avoir entendu en séance publique :

- le rapport de M. Jean-Dominique Langlais, conseiller d'Etat,

- les conclusions de M. Florian Roussel, rapporteur public.

La parole ayant été donnée, après les conclusions, à la SARL Le Prado-Gilbert, avocat des hospices civils de Lyon et de la société hospitalière d'assurances mutuelles et à la SCP Foussard, Froger, avocat de la caisse primaire d'assurance maladie du Puy-de-Dôme ;

Considérant ce qui suit :

1. Il ressort des pièces du dossier soumis aux juges du fond qu'à la suite d'un avis rendu le 11 juillet 2012 par la commission de conciliation et d'indemnisation des victimes d'accidents médicaux de Rhône-Alpes, retenant la responsabilité des hospices civils de Lyon à l'égard de M. et Mme C... au titre de fautes commises en 2009 dans la prise en charge de M. C..., la société hospitalière d'assurances mutuelles (SHAM), agissant en qualité d'assureur des hospices civils de Lyon sur le fondement des dispositions de l'article L. 1142-14 du code de la santé publique, a, d'une part, adressé une offre d'indemnisation transactionnelle à M. et Mme C..., qui l'ont refusée, et, d'autre part, versé au régime social des indépendants (RSI) une somme de 442 462,81 euros calculée par référence aux débours exposé par ce tiers payeur pour M. C... avant consolidation de son état. Au vu de l'expertise médicale ordonnée par le tribunal administratif de Lyon à la demande de M. et Mme C..., les hospices civils de Lyon et la SHAM, estimant que les fautes imputables à l'hôpital n'avaient occasionné qu'une fraction des débours exposés par le tiers payeur, ont demandé au RSI de leur rembourser la somme de 420 504,81 euros. Par un jugement du 30 novembre 2018, le tribunal administratif a rejeté comme irrecevables les conclusions dirigées par les hospices civils de Lyon et la SHAM contre le RSI, aux droits duquel est venue en dernier lieu la caisse primaire d'assurance maladie (CPAM) du Puy-de-Dôme. Par un arrêt du 17 décembre 2020, la cour administrative d'appel de Lyon a annulé sur ce point le jugement du tribunal administratif puis, statuant par la voie de l'évocation, a rejeté les conclusions des hospices civils de Lyon et de la SHAM dirigées contre le tiers payeur comme portées devant une juridiction incompétente pour en connaître, au motif que ce litige relevait du contentieux général de la sécurité sociale, soumis à la compétence des juridictions judiciaires. Les hospices civils de Lyon et la SHAM se pourvoient, dans cette mesure, en cassation contre cet arrêt.

2. Aux termes des deux premiers alinéas de l'article L. 1142-14 du code de la santé publique : " Lorsque la commission régionale de conciliation et d'indemnisation des accidents médicaux, des affections iatrogènes et des infections nosocomiales estime qu'un dommage relevant du premier alinéa de l'article L. 1142-8 engage la responsabilité d'un professionnel de santé, d'un établissement de santé, d'un service de santé ou d'un organisme mentionné à l'article L. 1142-1 ou d'un producteur d'un produit de santé mentionné à l'article L. 1142-2, l'assureur qui garantit la responsabilité civile ou administrative de la personne considérée comme responsable par la commission adresse à la victime ou à ses ayants droit, dans un délai de quatre mois suivant la réception de l'avis, une offre d'indemnisation visant à la réparation intégrale des préjudices subis dans la limite des plafonds de garantie des contrats d'assurance. / (...) Les prestations et indemnités qui font l'objet d'une déduction du montant de l'offre sont remboursées directement par l'assureur du responsable du dommage aux débiteurs concernés ".

3. Le remboursement au tiers payeur des prestations et indemnités qui font l'objet d'une déduction du montant de l'offre adressée à la victime par l'assureur de l'établissement public de santé en application de ces dispositions poursuit l'exécution de l'obligation de réparer qui pèse sur l'assureur en vertu du contrat d'assurance qui le lie à cette personne publique. Par suite, lorsque ce contrat présente le caractère d'un contrat administratif, le litige qui se rattache à la détermination des prestations et indemnités remboursables au tiers payeur relève de la compétence du juge administratif. Il en va de même de l'action en répétition de l'indu exercée, le cas échéant, par l'assureur contre le tiers payeur au titre de sommes versées à titre amiable.

4. Il ressort des pièces du dossier soumis aux juges du fond que le contrat d'assurance liant l'établissement public des hospices civils de Lyon à la SHAM présente, compte tenu de la date à laquelle il a été conclu et en application de l'article 2 de la loi du 11 décembre 2001 portant mesures urgentes de réformes à caractère économique et financier alors en vigueur, le caractère d'un contrat administratif par détermination de la loi. L'action en répétition des sommes que l'assureur des hospices civils de Lyon estime avoir indument versées à titre amiable au tiers payeur sur le fondement de l'article L. 1142-14 du code de la santé publique, en exécution de ce contrat, relève, par suite, compte tenu de ce qui a été dit aux points 2 et 3, de la compétence de la juridiction administrative.

5. Il résulte de ce qui précède qu'en jugeant qu'en application des dispositions combinées des articles L. 142-1 et L. 142-8 du code de la sécurité sociale, le juge judiciaire était, au titre du contentieux général de la sécurité sociale, compétent pour connaître de l'action en répétition de l'indu exercée par la SHAM à l'encontre du tiers payeur, la cour administrative d'appel de Lyon a commis une erreur de droit qui justifie, sur ce point, l'annulation de son arrêt.

6. Il y a lieu, dans les circonstances de l'espèce, de mettre à la charge de la CPAM du Puy-de-Dôme la somme de 3 000 euros à verser à la SHAM au titre de l'article L. 761-1 du code de justice administrative. Les dispositions de ce même article font obstacle à ce que la somme demandée par la CPAM du Puy-de-Dôme soit mise à la charge de la SHAM, qui n'est pas, dans la présente instance, partie perdante.

D E C I D E :

--------------

Article 1er : L'article 1er de l'arrêt du 17 décembre 2020 de la cour administrative d'appel de Lyon est annulé.

Article 2 : L'affaire est renvoyée à la cour administrative d'appel de Lyon dans la limite de la cassation prononcée.

Article 3 : La CPAM du Puy-de-Dôme versera la somme de 3 000 euros à la SHAM au titre de l'article L. 761-1 du code de justice administrative.

Article 4 : Les conclusions de la CPAM du Puy-de-Dôme présentées au titre de l'article L. 761-1 du code de justice administrative sont rejetées.

Article 5 : La présente décision sera notifiée aux hospices civils de Lyon, à la société hospitalière d'assurance mutuelle, à la caisse primaire d'assurance maladie du Puy-de-Dôme et à M. et Mme A... C....

Délibéré à l'issue de la séance du 11 juillet 2022 où siégeaient : M. Rémy Schwartz, président adjoint de la section du contentieux, présidant ; Mme Isabelle de Silva, présidente de chambre ; M. Jean-Philippe Mochon, président de chambre ; Mme Sophie-Caroline de Margerie, Mme Suzanne von Coester, Mme Fabienne Lambolez, M. Olivier Yeznikian, M. Cyril Roger-Lacan, conseillers d'Etat et M. Jean-Dominique Langlais, conseiller d'Etat-rapporteur.

Rendu le 21 juillet 2022.

Le président :

Signé : M. Rémy Schwartz

Le rapporteur :

Signé : M. Jean-Dominique Langlais

Le secrétaire :

Signé : M. Bernard Longieras


Type d'affaire : Administrative
Type de recours : Plein contentieux

Références :

Publications
Proposition de citation: CE, 21 jui. 2022, n° 449789
Inédit au recueil Lebon
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Composition du Tribunal
Rapporteur ?: M. Jean-Dominique Langlais
Rapporteur public ?: M. Florian Roussel
Avocat(s) : SARL LE PRADO – GILBERT ; SCP FOUSSARD, FROGER

Origine de la décision
Formation : 5ème - 6ème chambres réunies
Date de la décision : 21/07/2022
Date de l'import : 02/08/2022

Fonds documentaire ?: Legifrance


Numérotation
Numéro d'arrêt : 449789
Numéro NOR : CETATEXT000046080986 ?
Identifiant URN:LEX : urn:lex;fr;conseil.etat;arret;2022-07-21;449789 ?
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