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20/06/2022 | FRANCE | N°438885

France | France, Conseil d'État, 4ème - 1ère chambres réunies, 20 juin 2022, 438885


Vu la procédure suivante :

La société Henri Berruer, venant aux droits de la société Benichou Legrain Berruer, a demandé au tribunal administratif de Paris de condamner l'Etat à l'indemniser des préjudices qu'elle estime avoir subis du fait de l'illégalité de la décision du 26 août 2010 par laquelle l'inspecteur du travail de l'unité territoriale de Paris l'a autorisée à licencier M. B... A.... Par un jugement n° 1519414/3-2 du 25 janvier 2017, le tribunal administratif a condamné l'Etat à lui verser une somme de 32 052,66 euros, assortie des intérêts au taux légal.



Par un arrêt n° 17PA01038 du 20 décembre 2019, la cour administrative d...

Vu la procédure suivante :

La société Henri Berruer, venant aux droits de la société Benichou Legrain Berruer, a demandé au tribunal administratif de Paris de condamner l'Etat à l'indemniser des préjudices qu'elle estime avoir subis du fait de l'illégalité de la décision du 26 août 2010 par laquelle l'inspecteur du travail de l'unité territoriale de Paris l'a autorisée à licencier M. B... A.... Par un jugement n° 1519414/3-2 du 25 janvier 2017, le tribunal administratif a condamné l'Etat à lui verser une somme de 32 052,66 euros, assortie des intérêts au taux légal.

Par un arrêt n° 17PA01038 du 20 décembre 2019, la cour administrative d'appel de Paris a, sur les appels de la société Henri Berruer et de la ministre du travail, condamné l'Etat à verser à la société Henri Berruer une somme de 96 232,82 euros, assortie des intérêts au taux légal.

Par un pourvoi sommaire et un mémoire complémentaire, enregistrés les 20 février et 28 juillet 2020 au secrétariat du contentieux du Conseil d'Etat, la société Henri Berruer demande au Conseil d'Etat :

1°) d'annuler cet arrêt en tant qu'il n'a pas intégralement fait droit à ses conclusions d'appel ;

2°) réglant l'affaire au fond, de faire droit à son appel ;

3°) de mettre à la charge de l'Etat la somme de 5 000 euros au titre de l'article L. 761-1 du code de justice administrative.

Vu les autres pièces du dossier ;

Vu :

- le code du travail ;

- le code de justice administrative ;

Après avoir entendu en séance publique :

- le rapport de M. Laurent Cabrera, conseiller d'Etat,

- les conclusions de M. Raphaël Chambon, rapporteur public ;

La parole ayant été donnée, après les conclusions, à la SCP Thouin-Palat, Boucard, avocat de la société Henri Berruer ;

Vu la note en délibéré, enregistrée le 25 mai 2022, présentée par la société Henri Berruer ;

Considérant ce qui suit :

1. Il ressort des pièces du dossier soumis aux juges du fond que, par une décision du 26 août 2010, confirmée sur recours hiérarchique par la ministre chargée du travail, l'inspecteur du travail du secteur Nord-Est de Paris a autorisé la société Benichou Legrain Berruer à licencier M. A.... Ces décisions ont été annulées par un jugement du 4 avril 2013 du tribunal administratif de Paris devenu définitif, au motif que la lettre par laquelle l'employeur avait convoqué le salarié à un entretien préalable mentionnait uniquement la possibilité pour l'intéressé de se faire assister, lors de l'entretien, par une personne de son choix appartenant obligatoirement au personnel de l'entreprise, en méconnaissance des dispositions de l'article L. 1232-4 du code du travail. Par un arrêt du 1er mars 2018, la cour d'appel de Paris a jugé sans cause réelle et sérieuse le licenciement de M. A... et condamné la société Henri Berruer, venant aux droits de la société Benichou Legrain Berruer, à indemniser le salarié. La société Henri Berruer a demandé au tribunal administratif de Paris de condamner l'Etat à lui verser une somme de 346 568,45 euros en réparation des préjudices qu'elle estime avoir subis à raison de l'illégalité des décisions ayant autorisé le licenciement de M. A.... Par un jugement du 25 janvier 2017, le tribunal administratif a condamné l'Etat à verser à la société la somme de 32 052,66 euros. Par un arrêt du 20 décembre 2019, la cour administrative d'appel de Paris, sur appel de la société Henri Berruer et appel incident de la ministre du travail, a porté à la somme de 96 232,82 euros l'indemnité mise à la charge de l'État. La société Henri Berruer se pourvoit en cassation contre cet arrêt en tant qu'il n'a pas intégralement fait droit à ses conclusions d'appel.

2. En application des dispositions du code du travail, le licenciement d'un salarié protégé ne peut intervenir que sur autorisation de l'autorité administrative. L'illégalité de la décision autorisant un tel licenciement constitue une faute de nature à engager la responsabilité de la puissance publique à l'égard de l'employeur, pour autant qu'il en soit résulté pour celui-ci un préjudice direct et certain.

Sur le partage de responsabilité :

3. En application des principes généraux de la responsabilité de la puissance publique, il peut le cas échéant être tenu compte, pour déterminer l'étendue de la responsabilité de l'Etat à l'égard de l'employeur à raison de la délivrance d'une autorisation de licenciement entachée d'illégalité, au titre notamment du versement au salarié des indemnités mises à la charge de l'employeur par le juge judiciaire, de la faute également commise par l'employeur en sollicitant la délivrance d'une telle autorisation.

4. Aux termes de l'article L. 1232-2 du code du travail : " L'employeur qui envisage de licencier un salarié le convoque, avant toute décision, à un entretien préalable. (...) ". Aux termes de l'article L. 1232-4 du même code : " Lors de son audition, le salarié peut se faire assister par une personne de son choix appartenant au personnel de l'entreprise. / Lorsqu'il n'y a pas d'institutions représentatives du personnel dans l'entreprise, le salarié peut se faire assister soit par une personne de son choix appartenant au personnel de l'entreprise, soit par un conseiller du salarié choisi sur une liste dressée par l'autorité administrative. / La lettre de convocation à l'entretien préalable adressée au salarié mentionne la possibilité de recourir à un conseiller du salarié et précise l'adresse des services dans lesquels la liste de ces conseillers est tenue à sa disposition. " L'article R. 1232-1 de ce code dispose enfin que : " La lettre de convocation prévue à l'article L. 1232-2 (...) rappelle que le salarié peut se faire assister pour cet entretien par une personne de son choix appartenant au personnel de l'entreprise ou, en l'absence d'institutions représentatives dans l'entreprise, par un conseiller du salarié ". Il résulte de ces dispositions que, en l'absence d'institution représentative du personnel au sein d'une entreprise, la lettre de l'employeur convoquant le salarié à l'entretien préalable au licenciement doit mentionner la possibilité pour le salarié convoqué de se faire assister par une personne de son choix appartenant au personnel de l'entreprise ou par un conseiller du salarié. Lorsque ces mentions ne figurent pas dans la lettre, la procédure est, en principe, entachée d'irrégularité.

5. Il ressort des énonciations de l'arrêt attaqué que la cour administrative d'appel de Paris a retenu que la lettre de convocation à l'entretien préalable, adressée par la SCP Benichou Legrain Berruer à M. A..., ne comportait pas la mention de la possibilité, pour l'intéressé, de se faire assister par un conseiller du salarié lors de son entretien préalable alors que cette société ne comportait pas d'institution représentative du personnel. En jugeant qu'une telle convocation entachait la procédure de licenciement de M. A... d'irrégularité et en déduisant, d'une part, que l'autorité administrative avait commis une faute de nature à engager sa responsabilité en autorisant le licenciement de M. A... et que, d'autre part, la SCP Benichou Legrain Berruer, qui avait rédigé cette lettre, avait elle-même commis une faute de nature à exonérer partiellement celle de l'Etat, la cour administrative d'appel n'a pas inexactement qualifié les faits de l'espèce.

Sur les préjudices :

En ce qui concerne l'indemnité versée au titre de l'article L. 2422-4 du code du travail :

6. Aux termes de l'article L. 2422-4 du code du travail : " Lorsque l'annulation d'une décision d'autorisation est devenue définitive, le salarié investi d'un des mandats mentionnés à l'article L. 2422-1 a droit au paiement d'une indemnité correspondant à la totalité du préjudice subi au cours de la période écoulée entre son licenciement et sa réintégration, s'il en a formulé la demande dans le délai de deux mois à compter de la notification de la décision. / L'indemnité correspond à la totalité du préjudice subi au cours de la période écoulée entre son licenciement et l'expiration du délai de deux mois s'il n'a pas demandé sa réintégration. (...) " .

7. Il ressort des énonciations de l'arrêt attaqué que la cour administrative d'appel de Paris a limité l'indemnité accordée à la société Henri Berruer au titre du préjudice né du versement au salarié, par cette société, de l'indemnité due au titre de l'article L. 2422-4 du code du travail, à la période comprise entre la date du licenciement et le 9 octobre 2014, date à laquelle la cour d'appel de Paris statuant en référé a ordonné à l'employeur la réintégration sous astreinte du salarié dans son emploi de clerc principal ou un emploi équivalent. Elle a ainsi exclu du préjudice indemnisable l'indemnité versée au titre de la période comprise entre la date de l'arrêt de la cour d'appel et, en l'absence de réintégration effective, celle de la prise d'acte par le salarié de la rupture de son contrat de travail. En estimant que cette partie du préjudice trouvait sa cause directe et exclusive dans la faute commise par l'employeur, elle n'a pas inexactement qualifié les faits de l'espèce.

8. Il résulte de ce qui est dit au point précédent que le moyen tiré, par la société Berruer, de ce que les dispositions de l'ordonnance du 2 novembre 1945 relative au statut des huissiers faisaient obstacle à la réintégration du salarié était inopérant, s'agissant de la part d'indemnité mentionnée au point 7. Par suite, la société Berruer ne peut utilement soutenir que l'arrêt serait entaché d'insuffisance de motivation et d'erreur de droit en ce qu'il juge par un motif surabondant, pour refuser d'indemniser cet élément de préjudice, que ces dispositions ne faisaient pas en l'espèce obstacle à la réintégration du salarié. Est également inopérant, pour le même motif, le moyen tiré de ce que la cour administrative d'appel de Paris aurait commis une erreur de droit en se fondant sur une décision de la cour d'appel de Paris rendue en référé et dépourvue, par suite, d'autorité de chose jugée.

En ce qui concerne les frais mis à la charge de la société Henri Berruer au titre de l'article L. 761-1 du code de justice administrative :

9. Les frais de justice exposés devant le juge administratif en conséquence directe d'une faute de l'administration sont susceptibles d'être pris en compte dans le préjudice résultant de la faute imputable à celle-ci, dans les conditions suivantes. Lorsqu'une partie avait la qualité de demanderesse à une instance à l'issue de laquelle le juge annule pour excès de pouvoir une décision administrative illégale, la part de son préjudice correspondant à des frais exposés et non compris dans les dépens est réputée intégralement réparée par la décision que prend le juge dans l'instance en cause sur le fondement de l'article L. 761-1 du code de justice administrative. Lorsqu'en revanche une partie autre que l'administration ayant pris la décision illégale avait la qualité de défenderesse à une telle instance ou relève appel du jugement rendu à l'issue de l'instance ayant annulé cette décision, les frais de justice utilement exposés par elle, ainsi que, le cas échéant, les frais mis à sa charge par le juge au titre de l'article L. 761-1 du code de justice administrative, sont susceptibles d'être pris en compte dans le préjudice résultant de la faute imputable à l'administration.

10. La société Benichou Legrain Berruer était appelante du jugement du 4 avril 2013 par lequel le tribunal administratif de Paris a annulé la décision administrative l'ayant autorisée à licencier M. A.... En jugeant que les frais mis à la charge de cette société au titre de l'article L. 761-1 du code de justice administrative par l'arrêt du 9 décembre 2013 ayant rejeté l'appel de la société, ne constituaient pas un élément de préjudice indemnisable, la cour administrative d'appel de Paris a commis une erreur de droit.

11. Il résulte de tout ce qui précède que la société Henri Berruer n'est fondée à demander l'annulation de l'arrêt attaqué qu'en tant qu'il a statué sur les conclusions tendant à la réparation du préjudice consistant dans les frais mis à la charge de société Benichou Legrain Berruer au titre de l'article L. 761-1 du code de justice administrative par l'arrêt du 9 décembre 2013 rejetant son appel contre le jugement du 4 avril 2013 du tribunal administratif de Paris.

12. Il y a lieu, dans les circonstances de l'espèce, de régler l'affaire au fond en application des dispositions de l'article L. 821-2 du code de justice administrative, dans la mesure de la cassation prononcée, et de statuer sur l'appel incident de la ministre du travail dans cette même mesure.

13. La somme de 1 500 euros mise à la charge de la société Benichou Legrain Berruer au titre de l'article L. 761-1 du code de justice administrative, partie perdante à l'instance d'appel contre le jugement du tribunal administratif de Paris du 25 janvier 2017 ayant annulé la décision du 26 août 2010 ayant autorisé le licenciement de M. A..., constitue pour cette société un préjudice direct et certain, dont elle est fondée à obtenir réparation. Il y a cependant lieu, compte tenu du partage de responsabilité retenu par la cour administrative d'appel de Paris, dont l'arrêt n'est pas remis en cause sur ce point, de ne condamner l'Etat à indemniser la société Henri Berruer que de la moitié du préjudice subi à ce titre par l'employeur, soit la somme de 750 euros.

14. Il résulte de ce qui est dit au point 13 que la ministre du travail est seulement fondée à soutenir que c'est à tort que le tribunal administratif de Paris a mis à la charge de l'Etat le versement d'une somme de 1 500 euros, au lieu de 750 euros, à la société Benichou Legrain Berruer. Il y a lieu, par voie de conséquence, de réformer en ce sens le jugement du 25 janvier 2017.

Sur les conclusions présentées au titre de l'article L. 761-1 du code de justice administrative :

15. Les dispositions de l'article L. 761-1 du code de justice administrative font obstacle à ce qu'une somme soit mise à ce titre à la charge de l'État, qui n'est pas, dans la présente instance, la partie perdante pour l'essentiel.

D E C I D E :

--------------

Article 1er : L'arrêt de la cour administrative d'appel de Paris du 20 décembre 2019 est annulé en tant qu'il s'est prononcé sur les conclusions tendant à la réparation du préjudice consistant dans les frais mis à la charge de la société Benichou Legrain Berruer au titre de l'article L. 761-1 du code de justice administrative par son arrêt du 9 décembre 2013.

Article 2 : A l'article 1er de cet arrêt, la somme de 96 232,82 euros que l'Etat est condamné à verser à la société Berruer est portée à la somme de 96 982,82 euros.

Article 3 : Le jugement du tribunal administratif de Paris du 25 janvier 2017 est réformé en ce qu'il a de contraire à la présente décision.

Article 4 : Le surplus des conclusions du pourvoi est rejeté.

Article 5 : La présente décision sera notifiée à la société Henri Berruer et au ministre du travail, du plein emploi et de l'insertion.


Synthèse
Formation : 4ème - 1ère chambres réunies
Numéro d'arrêt : 438885
Date de la décision : 20/06/2022
Type d'affaire : Administrative
Type de recours : Excès de pouvoir

Analyses

PROCÉDURE - JUGEMENTS - FRAIS ET DÉPENS - REMBOURSEMENT DES FRAIS NON COMPRIS DANS LES DÉPENS - FRAIS MIS À LA CHARGE D’UNE SOCIÉTÉ AYANT FAIT APPEL D’UN JUGEMENT ANNULANT UNE AUTORISATION DE LICENCIEMENT D’UN SALARIÉ PROTÉGÉ – PRÉJUDICE INDEMNISABLE – EXISTENCE - SOUS RÉSERVE D’UN ÉVENTUEL PARTAGE DE RESPONSABILITÉ [RJ1] [RJ2].

54-06-05-11 En application des dispositions du code du travail, le licenciement d’un salarié protégé ne peut intervenir que sur autorisation de l’autorité administrative. L’illégalité de la décision autorisant un tel licenciement constitue une faute de nature à engager la responsabilité de la puissance publique à l’égard de l’employeur, pour autant qu’il en soit résulté pour celui-ci un préjudice direct et certain....Société étant appelante du jugement par lequel le tribunal administratif a annulé la décision administrative l’ayant autorisée à licencier un salarié protégé. ...Les frais mis à la charge de cette société au titre de l’article L. 761-1 du code de justice administrative (CJA) par l’arrêt ayant rejeté l’appel de la société constituent un élément de préjudice direct et certain, dont elle est fondée à obtenir réparation, compte tenu, le cas échéant, d’un partage de responsabilité avec l’État.

RESPONSABILITÉ DE LA PUISSANCE PUBLIQUE - RÉPARATION - CAUSES EXONÉRATOIRES DE RESPONSABILITÉ - FAUTE DE LA VICTIME - ILLÉGALITÉ DE L’AUTORISATION DE LICENCIEMENT D’UN SALARIÉ PROTÉGÉ – RESPONSABILITÉ DE L'ETAT AU TITRE DU PRÉJUDICE DIRECT ET CERTAIN SUBI PAR L’EMPLOYEUR – EXONÉRATION PARTIELLE DE RESPONSABILITÉ DU FAIT DE LA FAUTE COMMISE PAR L'EMPLOYEUR [RJ1] – 1) SALARIÉ NON INFORMÉ DE SON DROIT À ÊTRE ASSISTÉ – CONSÉQUENCE – PROCÉDURE IRRÉGULIÈRE – 2) A) FAUTE DE L’AUTORITÉ ADMINISTRATIVE – EXISTENCE – B) FAUTE DE L’EMPLOYEUR – EXISTENCE.

60-04-02-01 En application des dispositions du code du travail, le licenciement d’un salarié protégé ne peut intervenir que sur autorisation de l’autorité administrative. L’illégalité de la décision autorisant un tel licenciement constitue une faute de nature à engager la responsabilité de la puissance publique à l’égard de l’employeur, pour autant qu’il en soit résulté pour celui-ci un préjudice direct et certain....En application des principes généraux de la responsabilité de la puissance publique, il peut le cas échéant être tenu compte, pour déterminer l’étendue de la responsabilité de l’Etat à l’égard de l’employeur à raison de la délivrance d’une autorisation de licenciement entachée d’illégalité, au titre notamment du versement au salarié des indemnités mises à la charge de l’employeur par le juge judiciaire, de la faute également commise par l’employeur en sollicitant la délivrance d’une telle autorisation....1) Il résulte des articles L. 1232-2, L. 1232-4 et R. 1232-1 du code du travail que, en l’absence d’institution représentative du personnel au sein d’une entreprise, la lettre de l’employeur convoquant le salarié à l'entretien préalable au licenciement doit mentionner la possibilité pour le salarié convoqué de se faire assister par une personne de son choix appartenant au personnel de l’entreprise ou par un conseiller du salarié. Lorsque ces mentions ne figurent pas dans la lettre, la procédure est, en principe, entachée d’irrégularité....2) a) D’une part, l’autorité administrative commet une faute de nature à engager sa responsabilité en autorisant le licenciement d’un salarié dont la convocation à l’entretien préalable à son licenciement ne comportait pas la mention de la possibilité, pour le salarié, de se faire assister par un conseiller du salarié lors de son entretien préalable alors que la société ne comportait pas d’institution représentative du personnel....b) D’autre part, la société, qui a rédigé cette lettre, commet elle-même une faute de nature à exonérer partiellement celle de l’État.

RESPONSABILITÉ DE LA PUISSANCE PUBLIQUE - RÉPARATION - ÉVALUATION DU PRÉJUDICE - PRÉJUDICE MATÉRIEL - FRAIS DE JUSTICE (L - 761-1 DU CJA) MIS À LA CHARGE D’UNE SOCIÉTÉ AYANT FAIT APPEL D’UN JUGEMENT ANNULANT UNE AUTORISATION DE LICENCIEMENT D’UN SALARIÉ PROTÉGÉ – PRÉJUDICE INDEMNISABLE – EXISTENCE - SOUS RÉSERVE D’UN ÉVENTUEL PARTAGE DE RESPONSABILITÉ [RJ1] [RJ2].

60-04-03-02 En application des dispositions du code du travail, le licenciement d’un salarié protégé ne peut intervenir que sur autorisation de l’autorité administrative. L’illégalité de la décision autorisant un tel licenciement constitue une faute de nature à engager la responsabilité de la puissance publique à l’égard de l’employeur, pour autant qu’il en soit résulté pour celui-ci un préjudice direct et certain....Société étant appelante du jugement par lequel le tribunal administratif a annulé la décision administrative l’ayant autorisée à licencier un salarié protégé. ...Les frais mis à la charge de cette société au titre de l’article L. 761-1 du code de justice administrative (CJA) par l’arrêt ayant rejeté l’appel de la société constituent un élément de préjudice direct et certain, dont elle est fondée à obtenir réparation, compte tenu, le cas échéant, d’un partage de responsabilité avec l’État.

TRAVAIL ET EMPLOI - LICENCIEMENTS - AUTORISATION ADMINISTRATIVE - SALARIÉS PROTÉGÉS - RESPONSABILITÉ - ILLÉGALITÉ DE L’AUTORISATION DE LICENCIEMENT D’UN SALARIÉ PROTÉGÉ – RESPONSABILITÉ DE L'ETAT AU TITRE DU PRÉJUDICE DIRECT ET CERTAIN SUBI PAR L’EMPLOYEUR – 1) EXONÉRATION PARTIELLE DE RESPONSABILITÉ DE L’ÉTAT DU FAIT DE LA FAUTE COMMISE PAR L'EMPLOYEUR [RJ1] – A) SALARIÉ NON INFORMÉ DE SON DROIT À ÊTRE ASSISTÉ – CONSÉQUENCE – PROCÉDURE IRRÉGULIÈRE – B) I) FAUTE DE L’AUTORITÉ ADMINISTRATIVE – EXISTENCE – II) FAUTE DE L’EMPLOYEUR – EXISTENCE – 2) FRAIS MIS À LA CHARGE DE LA SOCIÉTÉ AU TITRE DE L’ARTICLE L - 761-1 DU CJA – PRÉJUDICE INDEMNISABLE – EXISTENCE - SOUS RÉSERVE D’UN ÉVENTUEL PARTAGE DE RESPONSABILITÉ [RJ2].

66-07-01-045 En application des dispositions du code du travail, le licenciement d’un salarié protégé ne peut intervenir que sur autorisation de l’autorité administrative. L’illégalité de la décision autorisant un tel licenciement constitue une faute de nature à engager la responsabilité de la puissance publique à l’égard de l’employeur, pour autant qu’il en soit résulté pour celui-ci un préjudice direct et certain....1) En application des principes généraux de la responsabilité de la puissance publique, il peut le cas échéant être tenu compte, pour déterminer l’étendue de la responsabilité de l’Etat à l’égard de l’employeur à raison de la délivrance d’une autorisation de licenciement entachée d’illégalité, au titre notamment du versement au salarié des indemnités mises à la charge de l’employeur par le juge judiciaire, de la faute également commise par l’employeur en sollicitant la délivrance d’une telle autorisation....a) Il résulte des articles L. 1232-2, L. 1232-4 et R. 1232-1 du code du travail que, en l’absence d’institution représentative du personnel au sein d’une entreprise, la lettre de l’employeur convoquant le salarié à l'entretien préalable au licenciement doit mentionner la possibilité pour le salarié convoqué de se faire assister par une personne de son choix appartenant au personnel de l’entreprise ou par un conseiller du salarié. Lorsque ces mentions ne figurent pas dans la lettre, la procédure est, en principe, entachée d’irrégularité....b) i) D’une part, l’autorité administrative commet une faute de nature à engager sa responsabilité en autorisant le licenciement d’un salarié dont la convocation à l’entretien préalable à son licenciement ne comportait pas la mention de la possibilité, pour le salarié, de se faire assister par un conseiller du salarié lors de son entretien préalable alors que la société ne comportait pas d’institution représentative du personnel....ii) D’autre part, la société, qui a rédigé cette lettre, commet elle-même une faute de nature à exonérer partiellement celle de l’État....2) Société étant appelante du jugement par lequel le tribunal administratif a annulé la décision administrative l’ayant autorisée à licencier un salarié protégé. ...Les frais mis à la charge de cette société au titre de l’article L. 761-1 du code de justice administrative (CJA) par l’arrêt ayant rejeté l’appel de la société constituent un élément de préjudice direct et certain, dont elle est fondée à obtenir réparation, compte tenu, le cas échéant, d’un partage de responsabilité avec l’État.


Références :

[RJ1]

Cf., en l’étendant, CE, 4 novembre 2020, Société financière Mag, venant aux droits de la Société Novopac, n° 428741, T. pp. 992-1038-1039. ...

[RJ2]

Rappr. CE, 15 octobre 2021, Société 2AB et Commune de Pézenas, n°s 436725 436746, à mentionner aux Tables.


Publications
Proposition de citation : CE, 20 jui. 2022, n° 438885
Mentionné aux tables du recueil Lebon

Composition du Tribunal
Rapporteur ?: M. Laurent Cabrera
Rapporteur public ?: M. Raphaël Chambon
Avocat(s) : SCP THOUIN-PALAT, BOUCARD

Origine de la décision
Date de l'import : 07/07/2022
Fonds documentaire ?: Legifrance
Identifiant ECLI : ECLI:FR:CE:2022:438885.20220620
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