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01/06/2022 | FRANCE | N°440917

France | France, Conseil d'État, 6ème - 5ème chambres réunies, 01 juin 2022, 440917


Vu la procédure suivante :

L'association Erquy environnement et Habitat, M. et Mme D... B..., E... A... et F... C... ont demandé au tribunal administratif de Rennes d'annuler pour excès de pouvoir l'arrêté du 8 avril 2016 par lequel le maire d'Erquy a délivré à la société SPI un permis d'aménager un lotissement de 31 lots et au maximum de 40 lots pour la construction de maisons individuelles et, accessoirement, l'accueil d'activités libérales, sur un terrain situé rue de la Corniche. Par un jugement n° 1602682 du 15 mars 2019, le tribunal administratif de Rennes a rejeté

leur demande.

Par un arrêt n° 19NT01840 du 30 mars 2020, la cour ad...

Vu la procédure suivante :

L'association Erquy environnement et Habitat, M. et Mme D... B..., E... A... et F... C... ont demandé au tribunal administratif de Rennes d'annuler pour excès de pouvoir l'arrêté du 8 avril 2016 par lequel le maire d'Erquy a délivré à la société SPI un permis d'aménager un lotissement de 31 lots et au maximum de 40 lots pour la construction de maisons individuelles et, accessoirement, l'accueil d'activités libérales, sur un terrain situé rue de la Corniche. Par un jugement n° 1602682 du 15 mars 2019, le tribunal administratif de Rennes a rejeté leur demande.

Par un arrêt n° 19NT01840 du 30 mars 2020, la cour administrative d'appel de Nantes a rejeté leur appel dirigé contre ce jugement.

Par un pourvoi sommaire et un mémoire complémentaire, enregistrés les 28 mai et 26 août 2020, au secrétariat du contentieux du Conseil d'Etat, l'association Erquy environnement et Habitat et M. et Mme B... demandent au Conseil d'Etat :

1°) d'annuler cet arrêt ;

2°) de mettre à la charge de la commune d'Erquy la somme de 4 000 euros au titre de l'article L. 761-1 du code de justice administrative.

Vu les autres pièces du dossier ;

Vu :

- le code de l'urbanisme ;

- le code de justice administrative ;

Après avoir entendu en séance publique :

- le rapport de Mme Carine Chevrier, conseillère d'Etat,

- les conclusions de M. Nicolas Agnoux, rapporteur public ;

La parole ayant été donnée, après les conclusions, à la SCP Melka-Prigent-Drusch, avocat de l'association Erquy environnement et Habitat et autres, et à la SARL Didier-Pinet, avocat de la société SPI ;

Considérant ce qui suit :

1. Il ressort des pièces du dossier soumis aux juges du fond que la société SPI est titulaire d'un permis d'aménager délivré par arrêté du 8 avril 2016 du maire d'Erquy, portant sur la réalisation de 31 à 40 lots pour la construction de maisons individuelles et d'activités libérales accessoires. Par un jugement du 15 mars 2019, le tribunal administratif de Rennes a rejeté les demandes de l'association Erquy Environnement et Habitat et de plusieurs voisins tendant à l'annulation pour excès de pouvoir de ce permis. L'association Erquy Environnement et Habitat et autres se pourvoient en cassation contre l'arrêt du 30 mars 2020 par lequel la cour administrative d'appel de Nantes a rejeté l'appel qu'ils avaient formé contre ce jugement.

2. En premier lieu, aux termes de l'article 1AU 3 du règlement du plan local d'urbanisme d'Erquy : " Un terrain pour être constructible doit disposer d'un accès sur une voie publique ou privée, ou bien le pétitionnaire doit produire une servitude de passage suffisante, instituée par acte authentique ou par voie judiciaire en application de l'article 682 du code civil (...). Pour écarter le moyen tiré de la méconnaissance de ces dispositions, la cour administrative d'appel a retenu que le lotissement projeté était desservi par la rue de la Corniche au nord, la rue de la Franchise à l'est ainsi que par la rue Louis Veuillot à l'ouest et a relevé que l'accès aux lots n° 17 et 20 à 27 s'effectuerait par la voie interne du lotissement et non par la rue des Forges, ce qui rendait inopérantes la circonstance que cette dernière rue n'est pas une voie ouverte à la circulation publique et l'absence de servitude de passage. En statuant ainsi pour écarter l'argumentation qui lui était soumise quant au respect des dispositions de l'article 1AU 3 du règlement du plan local d'urbanisme, la cour administrative d'appel n'a pas entaché son arrêt d'une insuffisance de motivation.

3. En deuxième lieu, il ressort des pièces du dossier soumis aux juges du fond que les avis du service départemental d'incendie et de secours (SDIS) et de l'agence technique départementale concernant le projet ont été respectivement émis les 5 janvier et 13 janvier 2016, antérieurement aux compléments apportés le 15 janvier 2016 par le pétitionnaire de la demande de permis d'aménager, déposée le 3 novembre 2015, et comprenant la notice hydraulique, la convention de rétrocession des équipements communs et des réponses aux remarques techniques relatives au projet. En retenant que ces compléments n'avaient pas vocation à modifier le projet et n'étaient pas de nature à modifier le sens des avis déjà émis par le SDIS et l'agence technique départementale, nonobstant la circonstance qu'ils ont justifié une prolongation du délai d'instruction de la demande de trois mois à compter de leur réception, la cour administrative d'appel a, sans erreur de droit, porté sur les faits soumis à son examen une appréciation souveraine exempte de dénaturation.

4. En troisième lieu, aux termes de l'article L. 121-13 du code de l'urbanisme, dans sa version applicable au permis litigieux : " L'extension limitée de l'urbanisation des espaces proches du rivage ou des rives des plans d'eau intérieurs désignés au 1° de l'article L. 321-2 du code de l'environnement est justifiée et motivée dans le plan local d'urbanisme, selon des critères liés à la configuration des lieux ou à l'accueil d'activités économiques exigeant la proximité immédiate de l'eau (...) ". Une opération qu'il est projeté de réaliser en agglomération ou, de manière générale, dans des espaces déjà urbanisés ne peut être regardée comme une extension de l'urbanisation, au sens de cet article, que si elle conduit à étendre ou à renforcer de manière significative l'urbanisation de quartiers périphériques ou si elle modifie de manière importante les caractéristiques d'un quartier, notamment en augmentant sensiblement la densité des constructions en son sein. En revanche, la seule réalisation dans un quartier urbain d'un ou plusieurs bâtiments qui est une simple opération de construction ne peut être regardée comme constituant une extension au sens de la loi.

5. Il ressort des énonciations de l'arrêt attaqué que le permis d'aménager litigieux prévoit la construction de 9 700 mètres carrés de surface de plancher, répartis entre 31 à 40 lots destinés à la construction de maisons individuelles et, accessoirement, à l'activité libérale et dont les emprises au sol sont comprises entre 148 et 998 m2, sur un terrain distant d'un peu plus de cent mètres de la limite haute du rivage, qui constitue un espace proche du rivage au sens du code de l'urbanisme. La cour administrative d'appel a également retenu que le terrain d'assiette du projet litigieux, dont la superficie est de 18 975 m2, dont 4 073 m2 seront dévolus à des espaces verts, est entouré de terrains déjà bâtis et se situe dans un quartier d'habitat balnéaire dense à proximité immédiate du centre bourg. En jugeant, au vu de l'ensemble des circonstances de l'espèce, que le projet litigieux ne pouvait être regardé comme constituant une extension de l'urbanisation au sens des dispositions de l'article L. 121-13 du code de l'urbanisme, laquelle s'apprécie au regard du caractère déjà urbanisé du quartier ainsi qu'il a été dit au point 4, la cour a porté sur les faits qui lui était soumis une appréciation souveraine, exempte de dénaturation.

6. Il résulte de ce qui précède que l'association Erquy Environnement et Habitat et autres ne sont pas fondés à demander l'annulation de l'arrêt qu'ils attaquent.

7. Les dispositions de l'article L. 761-1 du code de justice administrative font obstacle à ce qu'une somme soit mise, à ce titre, à la charge de la commune d'Erquy qui n'est pas, dans la présente instance, la partie perdante. Il y a lieu, en revanche, dans les circonstances de l'espèce, de mettre à la charge de l'association Erquy Environnement et Habitat et autres la somme de 3 000 euros à verser à la société SPI au titre de ces mêmes dispositions.

D E C I D E :

--------------

Article 1er : Le pourvoi de l'association Erquy Environnement et Habitat et autres est rejeté.

Article 2 : L'association Erquy Environnement et Habitat et autres verseront à la société SPI la somme de 3 000 euros au titre de l'article L. 761-1 du code de justice administrative.

Article 3 : La présente décision sera notifiée à l'association Erquy Environnement et Habitat, à M. et Mme D... B..., à la SARL SPI et à la commune d'Erquy.

Délibéré à l'issue de la séance du 11 mai 2022 où siégeaient : M. Jacques-Henri Stahl, président adjoint de la section du contentieux, présidant ; M. Denis Piveteau, Mme Isabelle de Silva, présidents de chambre ; Mme Suzanne von Coester, M. Olivier Yeznikian, M. Cyril Roger-Lacan, Mme Bénédicte Fauvarque-Cosson, Mme Rozen Noguellou, conseillers d'Etat et Mme Carine Chevrier, conseillère d'Etat-rapporteure.

Rendu le 1er juin 2022.

Le président :

Signé : M. Jacques-Henri Stahl

La rapporteure :

Signé : Mme Carine Chevrier

La secrétaire :

Signé : Mme Marie-Adeline Allain


Synthèse
Formation : 6ème - 5ème chambres réunies
Numéro d'arrêt : 440917
Date de la décision : 01/06/2022
Type d'affaire : Administrative
Type de recours : Excès de pouvoir

Publications
Proposition de citation : CE, 01 jui. 2022, n° 440917
Inédit au recueil Lebon

Composition du Tribunal
Rapporteur ?: Mme Carine Chevrier
Rapporteur public ?: M. Nicolas Agnoux
Avocat(s) : SCP MELKA-PRIGENT-DRUSCH ; SARL DIDIER-PINET

Origine de la décision
Date de l'import : 07/06/2022
Fonds documentaire ?: Legifrance
Identifiant ECLI : ECLI:FR:CE:2022:440917.20220601
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