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25/05/2022 | FRANCE | N°438597

France | France, Conseil d'État, 5ème - 6ème chambres réunies, 25 mai 2022, 438597


Vu la procédure suivante :

M. A... B... a demandé au tribunal administratif de Lyon d'annuler la décision du 30 juin 2017 par laquelle le préfet de la zone de défense et de sécurité sud-est a refusé de lui verser l'arriéré de rémunération attaché à la prise en compte du bénéfice de l'avantage spécifique d'ancienneté antérieurement au 1erjanvier 2012 et d'enjoindre à l'Etat de lui verser l'intégralité des sommes résultant de la reconstitution de sa carrière. Par un jugement n° 1709058 du 13 mars 2019, le tribunal administratif a rejeté sa demande.

Par un

arrêt n° 19LY01914 du 12 décembre 2019, la cour administrative d'appel de Lyon a reje...

Vu la procédure suivante :

M. A... B... a demandé au tribunal administratif de Lyon d'annuler la décision du 30 juin 2017 par laquelle le préfet de la zone de défense et de sécurité sud-est a refusé de lui verser l'arriéré de rémunération attaché à la prise en compte du bénéfice de l'avantage spécifique d'ancienneté antérieurement au 1erjanvier 2012 et d'enjoindre à l'Etat de lui verser l'intégralité des sommes résultant de la reconstitution de sa carrière. Par un jugement n° 1709058 du 13 mars 2019, le tribunal administratif a rejeté sa demande.

Par un arrêt n° 19LY01914 du 12 décembre 2019, la cour administrative d'appel de Lyon a rejeté l'appel formé par M. B... contre ce jugement.

Par un pourvoi sommaire, un mémoire complémentaire et un mémoire en réplique, enregistrés les 12 février et 27 mai 2020 et le 30 novembre 2021 au secrétariat du contentieux du Conseil d'Etat, M. B... demande au Conseil d'Etat :

1°) d'annuler cet arrêt ;

2°) de mettre à la charge de l'Etat la somme de 5 000 euros au titre de l'article L. 761-1 du code de justice administrative.

Vu les autres pièces du dossier ;

Vu :

- la loi n° 68-1250 du 31 décembre 1968 ;

- la loi n° 91-715 du 26 juillet 1991 ;

- le décret n° 95-313 du 21 mars 1995 ;

- l'arrêté du 3 décembre 2015 fixant la liste des secteurs prévue au 1° de l'article 1er du décret du 21 mars 1995 ;

- le code de justice administrative ;

Après avoir entendu en séance publique :

- le rapport de M. Joachim Bendavid, auditeur,

- les conclusions de M. Florian Roussel, rapporteur public.

La parole ayant été donnée, après les conclusions, à la SCP Lyon-Caen, Thiriez, avocat de M. B... ;

Considérant ce qui suit :

1. Il ressort des pièces du dossier soumis aux juges du fond que, par une décision du 30 mai 2017, le ministre de l'intérieur a octroyé à M. B..., fonctionnaire de police, le bénéfice de l'avantage spécifique d'ancienneté au titre de ses fonctions exercées du 1er septembre 2001 au 31 août 2007 à la circonscription de sécurité publique de Lyon. Toutefois, par une décision du 30 juin suivant, le préfet délégué pour la défense et la sécurité de la zone Sud-Est a opposé la prescription quadriennale aux rappels de traitement qui devaient être versés à l'intéressée à la suite de la reconstitution de sa carrière ayant tenu compte de cet avantage. M. B... se pourvoit en cassation contre l'arrêt du 12 décembre 2019 de la cour administrative d'appel de Lyon rejetant son appel dirigé contre le jugement du 13 mars 2019 par lequel le tribunal administratif de Lyon a rejeté sa demande d'annulation de cette dernière décision.

2. D'une part, aux termes de l'article 11 de la loi du 26 juillet 1991 : " Les fonctionnaires de l'Etat (...) affectés pendant une durée fixée par décret en Conseil d'Etat dans un quartier urbain où se posent des problèmes sociaux et de sécurité particulièrement difficiles, ont droit, pour le calcul de l'ancienneté requise au titre de l'avancement d'échelon, à un avantage spécifique d'ancienneté dans des conditions fixées par ce même décret ". Aux termes de l'article 1er du décret du 21 mars 1995 pris pour l'application de ces dispositions, les quartiers urbains où se posent des problèmes sociaux et de sécurité particulièrement difficiles doivent correspondre " en ce qui concerne les fonctionnaires de police, à des circonscriptions de police ou à des subdivisions de ces circonscriptions désignées par arrêté conjoint du ministre chargé de la sécurité, du ministre chargé de la ville, du ministre chargé de la fonction publique et du ministre chargé du budget ".

3. Un arrêté interministériel du 17 janvier 2001 a d'abord limité le bénéfice de cet avantage aux fonctionnaires de police en fonction dans les circonscriptions de police relevant des secrétariats généraux pour l'administration de la police de Paris et de Versailles. Par une décision n° 327428 du 16 mars 2011, le Conseil d'État statuant au contentieux a jugé que ces dispositions étaient illégales en ce qu'elles écartaient par principe du bénéfice de cet avantage tout fonctionnaire de police affecté hors de ces deux circonscriptions. Un arrêté interministériel du 3 décembre 2015, publié le 16 décembre suivant, a alors défini les nouveaux secteurs d'affectation concernés par cet avantage et une directive du 9 mars 2016 a redéfini, à titre rétroactif, les circonscriptions de police devant être regardées comme ouvrant droit à l'avantage spécifique d'ancienneté entre le 1er janvier 1995 et le 16 décembre 2016.

4. D'autre part, aux termes de l'article 1er de la loi du 31 décembre 1968 relative à la prescription des créances sur l'Etat, les départements, les communes et les établissements publics : " Sont prescrites, au profit de l'Etat, (...), toutes créances qui n'ont pas été payées dans un délai de quatre ans à partir du premier jour de l'année suivant celle au cours de laquelle les droits ont été acquis (...) ". Aux termes de l'article 2 de cette loi : " La prescription est interrompue par : / Toute demande de paiement ou toute réclamation écrite adressée par un créancier à l'autorité administrative, dès lors que la demande ou la réclamation a trait au fait générateur, à l'existence, au montant ou au paiement de la créance (...) ". Aux termes de son article 3 : " La prescription ne court ni contre le créancier qui ne peut agir, soit par lui-même (...) soit pour une cause de force majeure, ni contre celui qui peut être légitimement regardé comme ignorant l'existence de sa créance (...) ". Lorsqu'un litige oppose un agent public à son administration sur le montant des rémunérations auxquelles il a droit, le fait générateur de la créance se trouve en principe dans les services accomplis par l'intéressé. Dans ce cas, le délai de prescription de la créance relative à ces services court, sous réserve des cas prévus à l'article 3 cité ci-dessus, à compter du 1er janvier de l'année suivant celle au titre de laquelle ils auraient dû être rémunérés.

5. En premier lieu, en jugeant, ainsi qu'il résulte des termes de son arrêt, que M. B... était, en raison de l'avantage spécifique dont il aurait dû bénéficier entre le 1er septembre 2001 et le 31 août 2007 pour le calcul de l'ancienneté requise pour ses avancements d'échelon, titulaire de créances correspondant au montant des rémunérations supplémentaires que ces avancements plus rapides auraient dû lui procurer, pour en déduire que ces créances, dont le calcul résultait ainsi d'une reconstitution de sa carrière, étaient susceptibles de se voir opposer la prescription quadriennale instituée par la loi du 31 décembre 1968 citée ci-dessus, la cour, dont l'arrêt est suffisamment motivé sur ce point, n'a pas commis d'erreur de droit.

6. En deuxième lieu, en jugeant que les faits générateurs des créances détenues par M. B... au titre de cette reconstitution de sa carrière étaient constitués par les services qu'il avait effectués et sur lesquels portait cette reconstitution de carrière, la cour n'a pas commis d'erreur de droit.

7. Enfin, en estimant que, bien que la circonscription de sécurité publique de Lyon n'ait été intégrée qu'en 2016 au nombre de celles bénéficiant de l'avantage spécifique d'ancienneté, l'intéressé ne pouvait être légitimement regardé comme ignorant l'existence de ses créances au sens des dispositions, citées au point 4, de l'article 3 de la loi du 31 décembre 1968, la cour a porté sur les pièces du dossier une appréciation souveraine, exempte de dénaturation. En déduisant de cette appréciation et de ce qui a été dit au point 6 que, compte tenu de la date du 30 mai 2017 à laquelle avait été prise la décision d'octroi à M. B... de l'avantage spécifique d'ancienneté, ses créances antérieures au 1er janvier 2012 étaient prescrites, la cour, qui a suffisamment motivé son arrêt sur ce point, n'a pas commis d'erreur de droit.

8. Il résulte de ce qui précède que M. B... n'est pas fondé à demander l'annulation de l'arrêt qu'il attaque. Son pourvoi doit, par suite, être rejeté, y compris, par voie de conséquence, ses conclusions présentées au titre de l'article L. 761-1 du code de justice administrative.

D E C I D E :

--------------

Article 1er : Le pourvoi de M. B... est rejeté.

Article 2 : La présente décision sera notifiée à M. A... B... et au ministre de l'intérieur.

Délibéré à l'issue de la séance du 22 avril 2022 où siégeaient : M. Rémy Schwartz, président adjoint de la section du contentieux, présidant ; M. Denis Piveteau, M. Fabien Raynaud, présidents de chambre ; M. Jean-Philippe Mochon, Mme Bénédicte Fauvarque-Cosson, M. Olivier Yeznikian, M. Cyril Roger-Lacan, M. Jean-Dominique Langlais, conseillers d'Etat et M. Joachim Bendavid, auditeur-rapporteur.

Rendu le 25 mai 2022.

Le président :

Signé : M. Rémy Schwartz

Le rapporteur :

Signé : M. Joachim Bendavid

Le secrétaire :

Signé : M. Bernard Longieras


Synthèse
Formation : 5ème - 6ème chambres réunies
Numéro d'arrêt : 438597
Date de la décision : 25/05/2022
Type d'affaire : Administrative
Type de recours : Plein contentieux

Publications
Proposition de citation : CE, 25 mai. 2022, n° 438597
Inédit au recueil Lebon

Composition du Tribunal
Rapporteur ?: M. Joachim Bendavid
Rapporteur public ?: M. Florian Roussel
Avocat(s) : SCP LYON-CAEN, THIRIEZ

Origine de la décision
Date de l'import : 31/05/2022
Fonds documentaire ?: Legifrance
Identifiant ECLI : ECLI:FR:CE:2022:438597.20220525
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