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15/04/2022 | FRANCE | N°446813

France | France, Conseil d'État, 5ème chambre, 15 avril 2022, 446813


Vu la procédure suivante :

M. B... A... a demandé au tribunal administratif de Lille de condamner le centre hospitalier d'Armentières à l'indemniser des préjudices qu'il estime avoir subis du fait de sa prise en charge dans cet établissement en mai 2007. Par un jugement n° 1602174 du 22 mai 2019, le tribunal administratif de Lille a condamné le centre hospitalier à lui verser à ce titre une somme de 158 185 euros.

Par un arrêt n° 19DA01636,19DA01702 du 22 septembre 2020, la cour administrative d'appel de Douai a, sur appel de la caisse primaire d'assurance maladie de

Flandres et du centre hospitalier d'Armentières, ramené l'indemnité qu...

Vu la procédure suivante :

M. B... A... a demandé au tribunal administratif de Lille de condamner le centre hospitalier d'Armentières à l'indemniser des préjudices qu'il estime avoir subis du fait de sa prise en charge dans cet établissement en mai 2007. Par un jugement n° 1602174 du 22 mai 2019, le tribunal administratif de Lille a condamné le centre hospitalier à lui verser à ce titre une somme de 158 185 euros.

Par un arrêt n° 19DA01636,19DA01702 du 22 septembre 2020, la cour administrative d'appel de Douai a, sur appel de la caisse primaire d'assurance maladie de Flandres et du centre hospitalier d'Armentières, ramené l'indemnité que cet établissement a été condamné à verser à M. A... à 23 453 euros.

Par un pourvoi et un nouveau mémoire, enregistrés les 23 novembre 2020 et 30 septembre 2021 au secrétariat du contentieux du Conseil d'Etat, M. A... demande au Conseil d'Etat :

1°) d'annuler cet arrêt ;

2°) réglant l'affaire au fond, de rejeter l'appel du centre hospitalier d'Armentières ;

3°) de mettre à la charge du centre hospitalier d'Armentières la somme de 5 000 euros au titre de l'article L. 761-1 du code de justice administrative.

Vu les autres pièces du dossier ;

Vu :

- le code de la santé publique ;

- le code de justice administrative ;

Après avoir entendu en séance publique :

- le rapport de M. Jean-Dominique Langlais, conseiller d'Etat,

- les conclusions de M. Florian Roussel, rapporteur public ;

La parole ayant été donnée, après les conclusions, à la SCP Duhamel - Rameix - Gury - Maître, avocat de M. A... et à la SARL Le Prado - Gilbert, avocat du centre hospitalier d'Armentières ;

Considérant ce qui suit :

1. Il ressort des pièces du dossier soumis au juge du fond que M. A..., né le 27 mars 1966, chef de quai dans une entreprise de transports, a subi le 7 mai 2007 une fracture de la cheville gauche qui, à la suite de sa prise en charge par le centre hospitalier d'Armentières, lui a laissé diverses séquelles, sous la forme d'une algoneurodystrophie et d'une arthrose post-traumatique. Son état, dont la consolidation a été fixée au 24 février 2010, a entraîné son licenciement pour inaptitude physique le 2 septembre 2010. Par un jugement du 22 mai 2019, le tribunal administratif de Lille a jugé que la prise en charge fautive par le centre hospitalier d'Armentières engageait sa responsabilité à l'égard de M. A... à hauteur de 80 % de perte de chance d'éviter le dommage et fixé le préjudice de l'intéressé à la somme totale de 158 185 euros. M. A... se pourvoit en cassation contre l'arrêt du 22 septembre 2020 par lequel la cour administratif d'appel de Douai a, sur les appels de la caisse primaire d'assurance maladie (CPAM) de Flandres et du centre hospitalier d'Armentières, ramené son indemnisation à la somme de 23 453 euros. Eu égard à la teneur de ses écritures, il doit être regardé comme ne demandant l'annulation de cet arrêt qu'en tant qu'il statue sur l'indemnisation de son préjudice professionnel.

2. Il ressort des écritures de M. A... devant les juges du fond que, pour demander l'indemnisation de ses pertes de gains professionnels, celui-ci soutenait, alors même que son déficit fonctionnel permanent avait été évalué à 15 % seulement, que, d'une part, il s'accompagnait de limitations fonctionnelles importantes, en particulier d'une exclusion de la station debout prolongée ou de la station assise prolongée, du travail en hauteur, du travail avec utilisation d'échelle ou d'escabeau, des montées ou descentes d'escaliers répétées et de la marche prolongée ou en terrain instable, que, d'autre part, ces contraintes l'avaient forcé à abandonner un projet de reconversion dans la restauration ou l'hôtellerie après son licenciement et qu'enfin, eu égard à son âge et à son niveau de qualification, elles l'avaient privé, et le privaient pour l'avenir, de toute chance réelle et sérieuse de retrouver un emploi. En se fondant sur la seule circonstance qu'il n'était pas définitivement inapte à toute activité professionnelle pour rejeter ses conclusions tendant à l'indemnisation de ses pertes de gains professionnels, sans indiquer les motifs pour lesquels elle estimait que, dans les circonstances de l'espèce et eu égard à la teneur de l'argumentation dont elle était saisie, le déficit fonctionnel permanent de l'intéressé ne devait pas être regardé, eu égard notamment à son âge, à son secteur d'activité et à son niveau de formation, comme la cause directe d'une perte de toute possibilité de retrouver un revenu professionnel, tant pour la période antérieure que pour la période postérieure à son arrêt, la cour administrative d'appel a insuffisamment motivé sa décision.

3. Il résulte de tout ce qui précède qu'il y a seulement lieu d'annuler cet arrêt, dont le dispositif n'est entaché d'aucune contradiction, contrairement à ce qui est soutenu, en tant qu'il se prononce sur la réparation du préjudice professionnel de M. A....

4. Il y a lieu, dans les circonstances de l'espèce, de condamner le centre hospitalier d'Armentières à verser la somme de 3 000 euros à M. A... au titre de l'article L. 761 1 du code de justice administrative.

D E C I D E :

--------------

Article 1er : L'arrêt du 20 septembre 2020 de la cour administrative d'appel de Douai est annulé en tant qu'il se prononce sur l'indemnisation du préjudice professionnel de M. A....

Article 2 : L'affaire est renvoyée à la cour administrative d'appel de Douai dans la limite de la cassation prononcée.

Article 3 : Le centre hospitalier d'Armentières versera la somme de 3 000 euros à M. A... au titre de l'article L. 761-1 du code de justice administrative.

Article 4 : La présente décision sera notifiée à M. B... A... et au centre hospitalier d'Armentières.

Délibéré à l'issue de la séance du 24 mars 2022 où siégeaient : M. Olivier Yeznikian, assesseur, présidant ; M. Jean-Philippe Mochon, conseiller d'Etat et M. Jean-Dominique Langlais, conseiller d'Etat-rapporteur.

Rendu le 15 avril 2022.

Le président :

Signé : M. Olivier Yeznikian

Le rapporteur :

Signé : M. Jean-Dominique Langlais

Le secrétaire :

Signé : M. C... D...


Synthèse
Formation : 5ème chambre
Numéro d'arrêt : 446813
Date de la décision : 15/04/2022
Type d'affaire : Administrative
Type de recours : Excès de pouvoir

Publications
Proposition de citation : CE, 15 avr. 2022, n° 446813
Inédit au recueil Lebon

Composition du Tribunal
Rapporteur ?: M. Jean-Dominique Langlais
Rapporteur public ?: M. Florian Roussel
Avocat(s) : SCP DUHAMEL - RAMEIX - GURY- MAITRE ; SARL LE PRADO – GILBERT

Origine de la décision
Date de l'import : 21/04/2022
Fonds documentaire ?: Legifrance
Identifiant ECLI : ECLI:FR:CE:2022:446813.20220415
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