La jurisprudence francophone des Cours suprêmes


recherche avancée

14/04/2022 | FRANCE | N°454879

France | France, Conseil d'État, 1ère chambre, 14 avril 2022, 454879


Vu la procédure suivante :

M. D... C... et Mme E... C... ont demandé au tribunal d'administratif de Melun d'annuler, d'une part, la décision par laquelle le président du conseil départemental du Val-de-Marne a implicitement confirmé la décision du 22 décembre 2017 leur réclamant le remboursement d'un trop perçu d'un montant de 16 109,54 euros au titre du revenu de solidarité active pour la période du 1er mars 2011 au 31 mai 2013, ainsi que cette dernière décision et, d'autre part, d'annuler l'avis de saisie administrative à tiers détenteur émis le 24 octobre 2019 par le

centre des finances publiques du Val-de-Marne en vue du recouvrement ...

Vu la procédure suivante :

M. D... C... et Mme E... C... ont demandé au tribunal d'administratif de Melun d'annuler, d'une part, la décision par laquelle le président du conseil départemental du Val-de-Marne a implicitement confirmé la décision du 22 décembre 2017 leur réclamant le remboursement d'un trop perçu d'un montant de 16 109,54 euros au titre du revenu de solidarité active pour la période du 1er mars 2011 au 31 mai 2013, ainsi que cette dernière décision et, d'autre part, d'annuler l'avis de saisie administrative à tiers détenteur émis le 24 octobre 2019 par le centre des finances publiques du Val-de-Marne en vue du recouvrement du solde de cet indu pour un montant de 15 659,54 euros. Par un jugement n° 1910732 du 14 mai 2021, le tribunal administratif de Melun a rejeté cette demande.

Par une ordonnance n° 21PA03314 du 20 juillet 2021, enregistrée le 23 juillet 2021 au secrétariat du contentieux du Conseil d'Etat, le président de la cour administrative d'appel de Paris a transmis au Conseil d'Etat, en application de l'article R. 351-2 du code de justice administrative, les conclusions, enregistrées le 15 juin 2021 au greffe de cette cour, présentées par M. et Mme C....

Par ces conclusions et par un mémoire complémentaire, enregistré le 21 septembre 2021 au secrétariat du contentieux du Conseil d'Etat, M. et Mme C... demandent au Conseil d'Etat :

1°) d'annuler ce jugement ;

2°) de faire droit à leur demande de première instance ;

3°) de mettre à la charge du département du Val-de-Marne la somme de 1 500 euros au titre de l'article 761-1 du code de justice administrative.

En application de l'article R. 611-7 du code de justice administrative, les parties ont été informées que la décision du Conseil d'Etat était susceptible d'être fondée sur le moyen, relevé d'office, tiré de ce que le tribunal administratif a incompétemment statué sur les conclusions de la demande de première instance de M. et Mme C... en tant qu'elles portaient sur l'avis de saisie administrative à tiers détenteur émis le 24 octobre 2019 par le centre des finances publiques du Val-de-Marne en vue du recouvrement d'un indu de revenu de solidarité active, l'ensemble du contentieux du recouvrement des créances non fiscales des collectivités territoriales relevant, depuis la loi n° 2017-1775 du 28 décembre 2017 de finances rectificative pour 2017, de la compétence du juge de l'exécution.

Vu les autres pièces du dossier ;

Vu :

- le code de l'action sociale et des familles ;

- le code général des collectivités territoriales ;

- le livre des procédures fiscales ;

- le code de justice administrative ;

Après avoir entendu en séance publique :

- le rapport de Mme Agnès Pic, maître des requêtes en service extraordinaire,

- les conclusions de Mme Marie Sirinelli, rapporteure publique ;

La parole ayant été donnée, après les conclusions, à Me Balat, avocat de M. et Mme C... ;

Considérant ce qui suit :

Sur le jugement attaqué, en tant qu'il statue sur les conclusions de M. et Mme C... relatives aux décisions du département du Val-de-Marne relatives à un indu de revenu de solidarité active :

1. Aux termes de l'article L. 822-1 du code de justice administrative : " Le pourvoi en cassation devant le Conseil d'Etat fait l'objet d'une procédure préalable d'admission. L'admission est refusée par décision juridictionnelle si le pourvoi est irrecevable ou n'est fondé sur aucun moyen sérieux ".

2. Pour demander l'annulation du jugement qu'ils attaquent en tant qu'il statue sur leur contestation de l'indu de revenu de solidarité active dont la récupération a été décidée par le président du conseil départemental du Val-de-Marne pour la période du 1er mars 2011 au 31 mai 2013, M. et Mme C... soutiennent que les sommes réclamées sont prescrites et que le tribunal administratif a insuffisamment motivé son jugement, méconnu les règles de dévolution de la charge de la preuve, commis une erreur de droit et dénaturé les pièces du dossier qui lui était soumis en rejetant leur demande sans caractériser que les sommes réclamées avaient effectivement été perçues par eux.

3. Aucun de ces moyens n'est de nature à permettre l'admission du pourvoi.

Sur le jugement attaqué, en tant qu'il statue sur les conclusions de M. et Mme C... relatives à l'avis de saisie administrative à tiers détenteur émis le 24 octobre 2019 pour le recouvrement du solde de cet indu :

4. L'article R. 351-5-1 du code de justice administrative dispose que : " Lorsque le Conseil d'Etat est saisi de conclusions se rapportant à un litige qui ne relève pas de la compétence de la juridiction administrative, il est compétent, nonobstant les règles relatives aux voies de recours et à la répartition des compétences entre les juridictions administratives, pour se prononcer sur ces conclusions et décliner la compétence de la juridiction administrative ".

5. Aux termes de l'article L. 1617-5 du code général des collectivités territoriales : " (...) 1° En l'absence de contestation, le titre de recettes individuel ou collectif émis par la collectivité territoriale ou l'établissement public local permet l'exécution forcée d'office contre le débiteur. / (...) / L'action dont dispose le débiteur d'une créance assise et liquidée par une collectivité territoriale ou un établissement public local pour contester directement devant la juridiction compétente le bien-fondé de ladite créance se prescrit dans le délai de deux mois à compter de la réception du titre exécutoire ou, à défaut, du premier acte procédant de ce titre ou de la notification d'un acte de poursuite. / 2° La contestation qui porte sur la régularité d'un acte de poursuite est présentée selon les modalités prévues à l'article L. 281 du livre des procédures fiscales. (...) "

6. Aux termes de l'article L. 281 du livre des procédures fiscales : " Les contestations relatives au recouvrement des impôts, taxes, redevances, amendes, condamnations pécuniaires et sommes quelconques dont la perception incombe aux comptables publics doivent être adressées à l'administration dont dépend le comptable qui exerce les poursuites. / (...) / Les contestations relatives au recouvrement ne peuvent pas remettre en cause le bien-fondé de la créance. Elles peuvent porter : / 1° Sur la régularité en la forme de l'acte ; / 2° A l'exclusion des amendes et condamnations pécuniaires, sur l'obligation au paiement, sur le montant de la dette compte tenu des paiements effectués et sur l'exigibilité de la somme réclamée. / Les recours contre les décisions prises par l'administration sur ces contestations sont portés dans le cas prévu au 1° devant le juge de l'exécution. Dans les cas prévus au 2°, ils sont portés: / (...) c) Pour les créances non fiscales des collectivités territoriales, des établissements publics locaux et des établissements publics de santé, devant le juge de l'exécution ".

7. Il résulte de ces dispositions que l'ensemble du contentieux du recouvrement des créances non fiscales des collectivités territoriales est de la compétence du juge de l'exécution, tandis que le contentieux du bien-fondé de ces créances est de celle du juge compétent pour en connaître sur le fond.

8. M. et Mme C... ont demandé au tribunal administratif de Melun d'annuler l'avis de saisie administrative à tiers détenteur émis le 24 octobre 2019 par le centre des finances publiques du Val-de-Marne en vue du recouvrement du solde de l'indu de revenu de solidarité active constitué pour la période du 1er mars 2011 au 31 mai 2013. Il résulte de ce qui a été dit aux points précédents qu'il n'appartient qu'à la juridiction judiciaire de connaître de telles conclusions. Par suite, ces conclusions se rapportent à un litige qui ne relève pas de la compétence de la juridiction administrative. Le tribunal les a rejetées sans relever l'incompétence de la juridiction administrative. Dès lors, sans qu'il soit besoin d'examiner les moyens d'erreur de droit et de dénaturation des pièces du dossier se rapportant au bien-fondé du rejet de ces conclusions soulevés par M. et Mme C..., il y a lieu d'annuler le jugement dans cette mesure et, statuant par la voie de l'évocation, de rejeter les conclusions de la demande de M. et Mme C... relatives à l'avis de saisie administrative à tiers détenteur comme portées devant un ordre de juridiction incompétent pour en connaître.

9. Les dispositions de l'article L. 761-1 du code de justice administrative font obstacle à ce qu'une somme soit mise à ce titre à la charge du département du Val-de-Marne, qui n'est pas la partie perdante dans la présente instance.

D E C I D E :

--------------

Article 1er : Le pourvoi de M. et Mme C... dirigé contre le jugement du 14 mai 2021 du tribunal administratif de Melun, en tant qu'il statue sur leur contestation des décisions du département du Val-de-Marne relative à l'indu de revenu de solidarité active pour la période du 1er mars 2011 au 31 mai 2013, n'est pas admis.

Article 2 : Le jugement du 14 mai 2021 du tribunal administratif de Melun est annulé en tant qu'il statue sur les conclusions de M. et Mme C... relatives à l'avis de saisie administrative à tiers détenteur émis le 24 octobre 2019 pour le recouvrement du solde de cet indu.

Article 3 : Les conclusions de la demande de M. et Mme C... présentées devant le tribunal administratif de Melun relatives à l'avis de saisie administrative à tiers détenteur émis le 24 octobre 2019 sont rejetées comme portées devant un ordre de juridiction incompétent pour en connaître.

Article 4 : Les conclusions présentées par M. et Mme C... au titre de l'article L. 761-1 du code de justice administrative sont rejetées.

Article 5 : La présente décision sera notifiée à M. D... C... et Mme E... C... et au ministre de l'économie, des finances et de la relance.

Copie en sera adressée au département du Val-de-Marne.

Délibéré à l'issue de la séance du 24 mars 2022 où siégeaient : Mme Gaëlle Dumortier, présidente de chambre, présidant ; M. Damien Botteghi, conseiller d'Etat et Mme Agnès Pic, maître des requêtes en service extraordinaire-rapporteure.

Rendu le 14 avril 2022.

La présidente :

Signé : Mme Gaëlle Dumortier

La rapporteure :

Signé : Mme Agnès Pic

La secrétaire :

Signé : Mme A... B...


Synthèse
Formation : 1ère chambre
Numéro d'arrêt : 454879
Date de la décision : 14/04/2022
Type d'affaire : Administrative
Type de recours : Excès de pouvoir

Publications
Proposition de citation : CE, 14 avr. 2022, n° 454879
Inédit au recueil Lebon

Composition du Tribunal
Rapporteur ?: Mme Agnès Pic
Rapporteur public ?: Mme Marie Sirinelli
Avocat(s) : BALAT

Origine de la décision
Date de l'import : 26/04/2022
Fonds documentaire ?: Legifrance
Identifiant ECLI : ECLI:FR:CE:2022:454879.20220414
Association des cours judiciaires suprmes francophones
Organisation internationale de la francophonie
Juricaf est un projet de l'AHJUCAF, l'association des Cours suprêmes judiciaires francophones. Il est soutenu par l'Organisation Internationale de la Francophonie. Juricaf est un projet de l'AHJUCAF, l'association des Cours suprêmes judiciaires francophones. Il est soutenu par l'Organisation Internationale de la Francophonie.
Logo iall 2012 website award