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12/04/2022 | FRANCE | N°440736

France | France, Conseil d'État, 1ère - 4ème chambres réunies, 12 avril 2022, 440736


Vu les procédures suivantes :

1° M. D... L... a demandé au tribunal administratif de Montpellier d'annuler la décision du 14 juin 2018 par laquelle le directeur de la caisse d'allocations familiales de l'Hérault a mis à sa charge des indus de 10 364,60 euros de revenu de solidarité active pour la période de juin 2016 à janvier 2018, de 304,90 euros d'aide exceptionnelle de fin d'année pour 2016 et 2017 et de 14,22 euros de prime d'activité pour la période de janvier à mars 2017, ainsi que la décision du 4 octobre 2018 portant rejet de son recours gracieux. Par un jugement

n° 1805880 du 18 mars 2020, le tribunal administratif de Montpellie...

Vu les procédures suivantes :

1° M. D... L... a demandé au tribunal administratif de Montpellier d'annuler la décision du 14 juin 2018 par laquelle le directeur de la caisse d'allocations familiales de l'Hérault a mis à sa charge des indus de 10 364,60 euros de revenu de solidarité active pour la période de juin 2016 à janvier 2018, de 304,90 euros d'aide exceptionnelle de fin d'année pour 2016 et 2017 et de 14,22 euros de prime d'activité pour la période de janvier à mars 2017, ainsi que la décision du 4 octobre 2018 portant rejet de son recours gracieux. Par un jugement n° 1805880 du 18 mars 2020, le tribunal administratif de Montpellier a rejeté cette demande.

Par une ordonnance n° 20MA01835 du 19 mai 2020, enregistrée le même jour au secrétariat du contentieux du Conseil d'Etat sous le n° 440736, la présidente de la cour administrative d'appel de Marseille a transmis au Conseil d'Etat, en application de l'article R. 351-2 du code de justice administrative, le pourvoi, enregistré le 18 mai 2020 au greffe de cette cour, présenté par M. L....

Par ce pourvoi, ainsi que par un nouveau mémoire et un mémoire en réplique, enregistrés les 3 mai et 28 septembre 2021 au secrétariat du contentieux du Conseil d'Etat, M. L... demande au Conseil d'Etat :

1°) d'annuler ce jugement ;

2°) réglant l'affaire au fond, de faire droit à sa demande ;

3°) de mettre à la charge du département de l'Hérault et de la caisse d'allocations familiales de l'Hérault la somme de 4 500 euros au titre de l'article L. 761-1 du code de justice administrative.

2° M. D... L... a formé opposition devant le tribunal administratif de Montpellier à la contrainte émise à son encontre le 24 décembre 2018 par le directeur de la caisse d'allocations familiales de l'Hérault, d'un montant de 304,90 euros, pour le recouvrement d'un indu d'aide exceptionnelle de fin d'année au titre des années 2016 et 2017. Par un jugement n° 1900348 du 18 mars 2020, le tribunal administratif de Montpellier a rejeté cette demande.

Par une ordonnance n° 20MA01836 du 19 mai 2020, enregistrée le même jour au secrétariat du contentieux du Conseil d'Etat sous le n° 440737, la présidente de la cour administrative d'appel de Marseille a transmis au Conseil d'Etat, en application de l'article R. 351-2 du code de justice administrative, le pourvoi, enregistré le 18 mai 2020 au greffe de cette cour, présenté par M. L....

Par ce pourvoi et par un nouveau mémoire, enregistré le 3 mai 2021 au secrétariat du contentieux du Conseil d'Etat, M. L... demande au Conseil d'Etat :

1°) d'annuler ce jugement ;

2°) réglant l'affaire au fond, de faire droit à sa demande ;

3°) de mettre à la charge du département de l'Hérault et de la caisse d'allocations familiales de l'Hérault la somme de 4 500 euros au titre de l'article L. 761-1 du code de justice administrative.

....................................................................................

Vu les autres pièces des dossiers ;

Vu :

- le code de l'action sociale et des familles ;

- le code de la sécurité sociale ;

- le décret n° 2016-1945 du 28 décembre 2016 ;

- le décret n° 2017-1785 du 27 décembre 2017 ;

- le code de justice administrative ;

Après avoir entendu en séance publique :

- le rapport de Mme Manon Chonavel, auditrice,

- les conclusions de Mme Marie Sirinelli, rapporteure publique ;

La parole ayant été donnée, après les conclusions, à la SCP Lyon-Caen, Thiriez, avocat de M. L... et à la SARL Meier-Bourdeau, Lecuyer et associés, avocat du département de l'Hérault ;

Considérant ce qui suit :

1. Il ressort des pièces des dossiers soumis aux juges du fond qu'après un contrôle de la situation de M. L..., la caisse d'allocations familiales de l'Hérault a décidé, le 14 juin 2018, de récupérer un indu d'un montant de 10 364,60 euros de revenu de solidarité active pour la période de juin 2016 à février 2018, un indu d'un montant de 14,22 euros de prime d'activité pour la même période ainsi qu'un indu d'un montant de 304,90 euros d'aide exceptionnelle de fin année au titre des années 2016 et 2017, au motif qu'il n'avait pas déclaré les revenus issus de la sous-location de son logement. Par un courrier du 20 juillet 2018, M. L... a formé un recours contre cette décision et sollicité le bénéfice d'une remise gracieuse de sa dette. Le président du conseil départemental a implicitement rejeté sa demande en tant qu'elle portait sur l'indu de revenu de solidarité active et le directeur de la caisse d'allocations familiales de l'Hérault a, par un courrier du 4 octobre 2018, rejeté sa demande de remise gracieuse en tant qu'elle portait sur les indus de prime d'activité et d'aide exceptionnelle de fin d'année et doit être regardé comme ayant implicitement rejeté son recours contre ces indus dans cette même mesure. Enfin, le directeur de la caisse d'allocations familiales de l'Hérault a émis le 24 décembre 2018 à l'encontre de M. L... une contrainte d'un montant de 304,90 euros pour le recouvrement de l'indu d'aide exceptionnelle de fin d'année. M. L... a demandé l'annulation des décisions du 14 juin et du 4 octobre 2018 au tribunal administratif de Montpellier, qui a rejeté cette demande par un jugement n° 1805880 du 18 mars 2020. Il a également formé, devant le même tribunal, opposition à la contrainte émise par la caisse d'allocations familiales de l'Hérault en vue du remboursement de l'indu d'aide exceptionnelle de fin d'année. Le tribunal a également rejeté cette opposition par un jugement n° 1900348 du 18 mars 2020. Par deux pourvois, qu'il y a lieu de joindre pour statuer par une même décision, M. L... demande l'annulation de chacun de ces jugements.

2. D'une part, aux termes de l'article L. 262-3 du code de l'action sociale et des familles : " L'ensemble des ressources du foyer (...) est pris en compte pour le calcul du revenu de solidarité active, dans des conditions fixées par un décret en Conseil d'Etat qui détermine notamment : / (...) / 2° Les modalités d'évaluation des ressources, y compris les avantages en nature. L'avantage en nature lié à la disposition d'un logement à titre gratuit est déterminé de manière forfaitaire (...) ". Selon l'article R. 262-6 du même code : " Les ressources prises en compte pour la détermination du montant du revenu de solidarité active comprennent, (...) l'ensemble des ressources, de quelque nature qu'elles soient, de toutes les personnes composant le foyer (...) ".

3. D'autre part, les décrets du 28 décembre 2016 et du 27 décembre 2017 instituent une aide exceptionnelle de fin d'année en faveur des allocataires du revenu de solidarité active qui ont droit à cette allocation au titre du mois de novembre ou, à défaut, du mois de décembre des années 2016 et 2017 sous certaines conditions. En outre, l'article L. 842-1 du code de la sécurité sociale prévoit que : " Toute personne résidant en France de manière stable et effective qui perçoit des revenus tirés d'une activité professionnelle a droit à une prime d'activité (...) ". Aux termes de l'article L. 842-3 du même code : " La prime d'activité est égale à la différence entre : / 1° Un montant forfaitaire dont le niveau varie en fonction de la composition du foyer et du nombre d'enfants à charge, augmenté d'une fraction des revenus professionnels des membres du foyer, et qui peut faire l'objet d'une ou de plusieurs bonifications ; / 2° Les ressources du foyer, qui sont réputées être au moins égales au montant forfaitaire mentionné au 1° (...) ".

4. Pour l'application de ces dispositions, lorsque l'allocataire sous-loue une partie du bien immobilier qu'il occupe lui-même en qualité de locataire, les ressources devant être prises en compte à ce titre au sens de l'article R. 262-6 du code de l'action sociale et des familles sont constituées des bénéfices qu'il retire le cas échéant de cette sous-location. Par suite, en jugeant que devait être pris en compte pour le calcul des droits de M. L... au revenu de solidarité active le sous-loyer qu'il percevait de la sous-location d'une partie du logement qu'il occupait lui-même en qualité de locataire, alors même que celui-ci faisait valoir qu'il n'en retirait aucun bénéfice, cette sous-location lui ayant seulement permis de faire face à ses charges locatives en y contribuant partiellement, le tribunal administratif a commis une erreur de droit.

5. Il résulte de ce qui précède que, sans qu'il soit besoin de se prononcer sur les autres moyens du pourvoi n° 440736, M. L... est fondé à demander l'annulation du jugement qu'il attaque.

6. Le jugement n° 1805880, qui statue notamment sur le bien-fondé de l'indu d'aide exceptionnelle de fin d'année mis à la charge de M. L... pour les années 2016 et 2017, étant ainsi annulé, le jugement n° 1900348, qui statue sur le bien-fondé de la contrainte émise par la caisse d'allocations familiales de l'Hérault en vue du recouvrement de cet indu, doit être annulé par voie de conséquence, sans qu'il soit besoin de se prononcer sur les moyens du pourvoi n° 440737.

7. Il y a lieu, dans les circonstances de l'espèce, de mettre à la charge du département de l'Hérault le versement à M. L... d'une somme de 1 500 euros au titre de l'article L. 761-1 du code de justice administrative. Les mêmes dispositions font obstacle à ce qu'une somme soit mise à ce titre à la charge de la caisse d'allocations familiales de l'Hérault qui, n'ayant été appelée en la cause que pour présenter des observations, n'est pas partie aux présentes instances.

D E C I D E :

--------------

Article 1er : Les jugements du 18 mars 2020 du tribunal administratif de Montpellier sont annulés.

Article 2 : Les affaires sont renvoyées au tribunal administratif de Montpellier.

Article 3 : Le département de l'Hérault versera une somme de 1 500 euros à M. L... au titre de l'article L. 761-1 du code de justice administrative.

Article 4 : Le surplus des conclusions de M. L... est rejeté.

Article 5 : La présente décision sera notifiée à M. D... L..., au département de l'Hérault et au ministre des solidarités de la santé.

Copie en sera adressée à la caisse d'allocations familiales de l'Hérault.

Délibéré à l'issue de la séance du 16 mars 2022 où siégeaient : Mme Maud Vialettes, présidente de chambre, présidant ; Mme Gaëlle Dumortier, présidente de chambre ; M. A... K..., Mme C... F..., Mme H... J..., M. I... G..., M. Damien Botteghi, conseillers d'Etat ; M. Damien Pons, maître des requêtes en service extraordinaire et Mme Manon Chonavel, auditrice-rapporteure.

Rendu le 12 avril 2022.

La présidente :

Signé : Mme Maud Vialettes

La rapporteure :

Signé : Mme Manon Chonavel

Le secrétaire :

Signé : M. B... E...


Synthèse
Formation : 1ère - 4ème chambres réunies
Numéro d'arrêt : 440736
Date de la décision : 12/04/2022
Type d'affaire : Administrative
Type de recours : Plein contentieux

Analyses

04-02-06 AIDE SOCIALE. - DIFFÉRENTES FORMES D'AIDE SOCIALE. - REVENU MINIMUM D'INSERTION (RMI). - RSA – RESSOURCES PRISES EN COMPTE POUR LE CALCUL DE L'ALLOCATION – CAS D’UN ALLOCATAIRE SOUS-LOUANT UNE PARTIE D’UN BIEN QU’IL OCCUPE COMME LOCATAIRE – BÉNÉFICES ÉVENTUELLEMENT RETIRÉS DE LA SOUS-LOCATION.

04-02-06 Pour l’application des articles L. 262-3 et R. 262-6 du code de l’action sociale et des familles (CASF), relatifs au revenu de solidarité active, des décrets du 28 décembre 2016 et du 27 décembre 2017 instituant une aide exceptionnelle de fin d’année en faveur des allocataires du revenu de solidarité active et des articles L. 842-1 et L. 842-3 du code de la sécurité sociale (CSS), relatifs à la prime d’activité, lorsque l’allocataire sous-loue une partie du bien immobilier qu’il occupe lui-même en qualité de locataire, les ressources devant être prises en compte à ce titre au sens de l’article R. 262-6 du CASF sont constituées des bénéfices qu’il retire le cas échéant de cette sous-location.


Publications
Proposition de citation : CE, 12 avr. 2022, n° 440736
Mentionné aux tables du recueil Lebon

Composition du Tribunal
Rapporteur ?: Mme Manon Chonavel
Rapporteur public ?: Mme Marie Sirinelli
Avocat(s) : SCP LYON-CAEN, THIRIEZ ; SARL MEIER-BOURDEAU, LECUYER ET ASSOCIES

Origine de la décision
Date de l'import : 26/04/2022
Fonds documentaire ?: Legifrance
Identifiant ECLI : ECLI:FR:CE:2022:440736.20220412
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