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30/03/2022 | FRANCE | N°444019

France | France, Conseil d'État, 5ème chambre, 30 mars 2022, 444019


Vu la procédure suivante :

M. D... A... a demandé au tribunal administratif d'Orléans d'annuler pour excès de pouvoir la décision implicite du 17 juin 2018 par laquelle le préfet du Loiret a refusé de lui accorder le concours de la force publique et de condamner l'Etat à l'indemniser du préjudice qu'il estime avoir subi du fait de cette décision. Par un jugement n° 1803166 du 1er avril 2020, le tribunal administratif a annulé la décision du préfet du Loiret, lui a enjoint d'accorder le concours de la force publique à M. A... et a rejeté le surplus de ses conclusions. >
Par un pourvoi et un mémoire en réplique, enregistrés le 11 septembre ...

Vu la procédure suivante :

M. D... A... a demandé au tribunal administratif d'Orléans d'annuler pour excès de pouvoir la décision implicite du 17 juin 2018 par laquelle le préfet du Loiret a refusé de lui accorder le concours de la force publique et de condamner l'Etat à l'indemniser du préjudice qu'il estime avoir subi du fait de cette décision. Par un jugement n° 1803166 du 1er avril 2020, le tribunal administratif a annulé la décision du préfet du Loiret, lui a enjoint d'accorder le concours de la force publique à M. A... et a rejeté le surplus de ses conclusions.

Par un pourvoi et un mémoire en réplique, enregistrés le 11 septembre 2020 et le 24 septembre 2021 au secrétariat du contentieux du Conseil d'Etat, le ministre de l'intérieur demande au Conseil d'Etat d'annuler ce jugement en tant qu'il prononce une injonction. Il soutient que ce jugement est entaché d'erreur de droit et de dénaturation des pièces du dossier en ce qu'il juge que le jugement d'expulsion de M. A... était exécutoire. Il soutient, par ailleurs, que le pourvoi incident de M. A... est irrecevable et que ses moyens ne sont pas fondés.

Par un mémoire en défense et un nouveau mémoire, enregistrés les 8 septembre et 15 novembre 2021, M. D... A... conclut au rejet du pourvoi du ministre de l'intérieur et, par la voie du pourvoi incident, à ce que le jugement du tribunal administratif soit annulé en tant qu'il rejette ses conclusions indemnitaires.

Vu les autres pièces du dossier ;

Vu :

- le code des procédures civiles d'exécution ;

- l'ordonnance n° 2020-305 du 25 mars 2020 ;

- l'ordonnance n° 2020-306 du 25 mars 2020 ;

- l'ordonnance n° 2020-560 du 13 mai 2020 ;

- le code de justice administrative ;

Après avoir entendu en séance publique :

- le rapport de Mme Flavie Le Tallec, maître des requêtes en service extraordinaire,

- les conclusions de M. Florian Roussel, rapporteur public.

La parole ayant été donnée, après les conclusions, à Me Carbonnier, avocat de M. D... A....

Considérant ce qui suit :

1. Il ressort des pièces du dossier soumis aux juges du fond que, par un jugement du 21 décembre 2017, le tribunal paritaire des baux ruraux d'Orléans a, au bénéfice de l'exécution provisoire, prononcé la résiliation du bail rural conclu entre M. A..., bailleur et M. B..., preneur et ordonné l'expulsion de ce dernier. Par une décision du 17 juin 2018, le préfet du Loiret a refusé d'accorder à M. A... le concours de la force publique aux fins d'exécuter le jugement du tribunal paritaire des baux ruraux. Par un jugement du 1er avril 2020, le tribunal administratif d'Orléans a annulé cette décision de rejet, enjoint au préfet du Loiret d'accorder le concours de la force publique à M. A... pour l'expulsion du bâtiment de ferme restant occupé par M. B... et rejeté les conclusions indemnitaires de M. A.... Le ministre de l'intérieur se pourvoit en cassation contre ce jugement, en tant qu'il lui enjoint d'accorder le concours de la force publique à M. A.... Par la voie du pourvoi incident, M. A... demande l'annulation de l'arrêt en tant qu'il rejette ses conclusions indemnitaires.

Sur le pourvoi du ministre de l'intérieur :

2. D'une part, aux termes de l'article R. 821-1 du code de justice administrative : " Sauf disposition contraire, le délai de recours en cassation est de deux mois. (...) ". D'autre part, aux termes de l'article 2 de l'ordonnance du 25 mars 2020 relative à la prorogation des délais échus pendant la période d'urgence sanitaire et à l'adaptation des procédures pendant cette même période, rendu applicable aux procédures devant les juridictions de l'ordre administratif par l'article 15 de l'ordonnance du 25 mars 2020 portant adaptation des règles applicables devant les juridictions de l'ordre administratif : " Tout acte, recours, action en justice, formalité, inscription, déclaration, notification ou publication prescrit par la loi ou le règlement à peine de nullité, sanction, caducité, forclusion, prescription, inopposabilité, irrecevabilité, péremption, désistement d'office, application d'un régime particulier, non avenu ou déchéance d'un droit quelconque et qui aurait dû être accompli pendant la période mentionnée à l'article 1er sera réputé avoir été fait à temps s'il a été effectué dans un délai qui ne peut excéder, à compter de la fin de cette période, le délai légalement imparti pour agir, dans la limite de deux mois ". Enfin, aux termes de l'article 1er de la même ordonnance, dans sa rédaction résultant de l'ordonnance du 13 mai 2020 fixant les délais applicables à diverses procédures pendant la période d'urgence sanitaire : " I.- Les dispositions du présent titre sont applicables aux délais et mesures qui ont expiré ou qui expirent entre le 12 mars 2020 et le 23 juin 2020 inclus (...) ".

3. Il ressort des pièces du dossier que le jugement contre lequel le ministre de l'intérieur se pourvoit en cassation a été rendu le 1er avril 2020 et notifié au ministre de l'intérieur le 2 avril, de sorte que le délai de recours en cassation expirait, compte-tenu de l'application des dispositions citées ci-dessus, le 24 août 2020. Le pourvoi du ministre, enregistré le 11 septembre 2020 est donc tardif et ne peut, par suite, qu'être rejeté.

Sur le pourvoi " incident " de M. A... :

4. En premier lieu, il résulte des articles L. 412-1 et R. 153-1 du code des procédures civiles d'exécution que le refus d'octroi du concours de la force publique n'engage la responsabilité de l'Etat qu'à l'expiration d'un délai de deux mois suivant la demande. Par suite, en jugeant que la responsabilité fautive de l'Etat était engagée à compter du 17 juin 2018, soit deux mois après la demande de concours de la force publique qui avait été présentée le 17 avril 2018, le tribunal administratif n'a, contrairement à ce que soutient M. A..., pas commis d'erreur de droit.

5. En second lieu, le moyen par lequel M. A... conteste le jugement qu'il attaque au motif qu'un préjudice résulterait " " nécessairement " du refus de concours de la force publique n'est pas assorti des précisions permettant d'en apprécier le bien-fondé.

6. Il résulte de ce qui précède, sans qu'il soit besoin de statuer sur la fin de non-recevoir opposée par le ministre de l'intérieur, que M. A... n'est pas fondé à demander l'annulation du jugement en tant qu'il rejette ses demandes indemnitaires.

D E C I D E :

--------------

Article 1er : Le pourvoi du ministre de l'intérieur est rejeté.

Article 2 : Le pourvoi de M. A... est rejeté.

Article 3 : La présente décision sera notifiée au ministre de l'intérieur et à M. D... A....

Délibéré à l'issue de la séance du 10 février 2022 où siégeaient : M. Denis Piveteau, président de chambre, présidant ; M. Jean-Philippe Mochon, conseiller d'Etat et Mme Flavie Le Tallec, maître des requêtes en service extraordinaire-rapporteure.

Rendu le 30 mars 2022.

Le président :

Signé : M. Denis Piveteau

La rapporteure :

Signé : Mme Flavie Le Tallec

La secrétaire :

Signé : Mme E... C...


Synthèse
Formation : 5ème chambre
Numéro d'arrêt : 444019
Date de la décision : 30/03/2022
Type d'affaire : Administrative
Type de recours : Excès de pouvoir

Publications
Proposition de citation : CE, 30 mar. 2022, n° 444019
Inédit au recueil Lebon

Composition du Tribunal
Rapporteur ?: Mme Flavie Le Tallec
Rapporteur public ?: M. Florian Roussel
Avocat(s) : CARBONNIER

Origine de la décision
Date de l'import : 05/04/2022
Fonds documentaire ?: Legifrance
Identifiant ECLI : ECLI:FR:CE:2022:444019.20220330
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