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30/03/2022 | FRANCE | N°441191

France | France, Conseil d'État, 3ème chambre, 30 mars 2022, 441191


Vu les procédures suivantes :

Mme A... B... a demandé au tribunal administratif de Clermont-Ferrand d'annuler l'arrêté du 4 juin 2015 du ministre de l'agriculture, de l'agroalimentaire et de la forêt, en tant qu'il la classe au 4ème échelon du corps des ingénieurs de l'agriculture et de l'environnement à l'indice brut 611 et à l'indice majoré 513 avec une date d'ancienneté dans cet échelon fixée au 1er juin 2015 et détermine sa rémunération en conséquence, ainsi que la décision implicite rejetant son recours gracieux dirigé contre cet arrêté. Par un jugement n° 15

01881 du 2 novembre 2017, le tribunal administratif de Clermont-Ferrand a re...

Vu les procédures suivantes :

Mme A... B... a demandé au tribunal administratif de Clermont-Ferrand d'annuler l'arrêté du 4 juin 2015 du ministre de l'agriculture, de l'agroalimentaire et de la forêt, en tant qu'il la classe au 4ème échelon du corps des ingénieurs de l'agriculture et de l'environnement à l'indice brut 611 et à l'indice majoré 513 avec une date d'ancienneté dans cet échelon fixée au 1er juin 2015 et détermine sa rémunération en conséquence, ainsi que la décision implicite rejetant son recours gracieux dirigé contre cet arrêté. Par un jugement n° 1501881 du 2 novembre 2017, le tribunal administratif de Clermont-Ferrand a rejeté sa demande.

Par un arrêt n° 18LY00179 du 9 avril 2020, la cour administrative d'appel de Lyon a d'une part, annulé ce jugement en tant qu'il a rejeté les conclusions de Mme B... tendant à l'annulation de la décision du ministre de l'agriculture du 4 juin 2015 fixant sa rémunération à l'indice brut 611 et l'indice majoré 513 ainsi que, dans cette même mesure, l'arrêté du ministre du 4 juin 2015 et la décision implicite de rejet du recours gracieux de Mme B... et, d'autre part, enjoint au ministre de l'agriculture et de l'alimentation de fixer à nouveau l'indice de rémunération de Mme B..., à la date de sa nomination, de façon à ce qu'il corresponde à celui qui permettrait de déterminer son traitement mensuel brut au plus proche d'un traitement égal à 70 % de la moyenne des six meilleures rémunérations mensuelles antérieures versées au cours des douze derniers mois de son activité d'agent contractuel, équivalentes à l'exercice de fonctions à plein temps et prenant en compte le solde de la prime spéciale et de résultats versé en juillet 2014.

Par un pourvoi, enregistré le 15 juin 2020 au secrétariat du contentieux du Conseil d'Etat, le ministre de l'agriculture et de l'alimentation demande au Conseil d'Etat d'annuler cet arrêt en ce qu'il a réformé le jugement du 2 novembre 2017 et annulé l'arrêté du 4 juin 2015 ainsi que la décision implicite de rejet en ce que ces décisions fixent à l'indice brut 611 et l'indice majoré 513 la rémunération de Mme B... et lui a enjoint de fixer à nouveau l'indice de rémunération de Mme B... à la date de sa nomination.

Vu les autres pièces du dossier ;

Vu :

- la loi n° 83-634 du 13 juillet 1983 ;

- la loi n° 84-16 du 11 janvier 1984 ;

- la loi n° 2012-347 du 12 mars 2012 ;

- le décret n° 2006-8 du 4 janvier 2006 ;

- le décret n° 2006-1827 du 23 décembre 2006 ;

- le code de justice administrative ;

Après avoir entendu en séance publique :

- le rapport de M. Mathieu Le Coq, maître des requêtes,

- les conclusions de Mme Marie-Gabrielle Merloz, rapporteure publique ;

La parole ayant été donnée, après les conclusions, à Me Bouthors, avocat de Mme B... ;

Considérant ce qui suit :

1. Il ressort des pièces du dossier soumis aux juges du fond que Mme A... B..., agent contractuel de l'Office national des forêts, a été admise au concours réservé d'accès des agents non titulaires au corps des ingénieurs de l'agriculture et de l'environnement. Par un arrêté du 4 juin 2015, le ministre de l'agriculture a nommé Mme B... ingénieur de l'agriculture et de l'environnement stagiaire. Par un jugement du 2 novembre 2017, le tribunal administratif de Clermont-Ferrand a rejeté la demande de Mme B... tendant à l'annulation de cet arrêté en tant qu'il la classe à l'échelon 4 de ce corps avec une date d'ancienneté au 1er juin 2015 et fixe sa rémunération à l'indice brut 611 et à l'annulation de la décision implicite de rejet du recours gracieux qu'elle a formé contre cet arrêté le 24 juin 2015. Par un arrêt du 9 avril 2020, la cour administrative d'appel de Lyon a, sur appel de Mme B..., annulé ce jugement en tant qu'il a rejeté les conclusions de celle-ci tendant à l'annulation de la décision du ministre de l'agriculture du 4 juin 2015 fixant sa rémunération à l'indice brut 611 et l'indice majoré 513 ainsi que, dans cette même mesure, l'arrêté du ministre du 4 juin 2015 et la décision implicite de rejet du recours gracieux de Mme B.... Le ministre de l'agriculture et de l'alimentation se pourvoit en cassation contre cet arrêt en tant qu'il a réformé le jugement du 2 novembre 2017 du tribunal administratif de Lyon.

2. En premier lieu, aux termes du I de l'article 7 du décret du 23 décembre 2006 relatif aux règles du classement d'échelon consécutif à la nomination dans certains corps de catégorie A de la fonction publique de l'Etat : " Les agents qui justifient de services d'ancien fonctionnaire civil, de services en tant qu'agent d'une organisation internationale intergouvernementale ou de services d'agent public non titulaire, autres que des services accomplis en qualité d'élève ou de stagiaire, sont classés à un échelon déterminé en prenant en compte une fraction de leur ancienneté de services publics civils (...) ". Aux termes du II de l'article 12 de ce décret : " Les agents qui avaient, avant leur nomination, la qualité d'agent non titulaire de droit public et qui sont classés en application de l'article 7 à un échelon doté d'un traitement dont le montant est inférieur à celui de la rémunération qu'ils percevaient avant leur nomination conservent à titre personnel le bénéfice d'un traitement représentant une fraction conservée de leur rémunération antérieure, jusqu'au jour où ils bénéficient dans leur nouveau grade d'un traitement au moins égal au montant ainsi déterminé. (...) ".

3. Pour l'application de ces dispositions, l'article 1er de l'arrêté du 29 juin 2007 fixant le pourcentage et les éléments de rémunération pris en compte pour le maintien partiel de la rémunération de certains agents non titulaires accédant à un corps soumis aux dispositions du décret précité dispose que : " Le traitement maintenu, à titre personnel, en application du II de l'article 12 du décret du 23 décembre 2006 susvisé est celui qui correspond à l'indice majoré le plus proche de celui qui permet à l'intéressé d'obtenir un traitement mensuel brut égal à 70 % de sa rémunération mensuelle antérieure. " Aux termes de l'article 2 de ce même arrêté : " La rémunération mensuelle antérieure prise en compte pour l'application de l'article 1er est la moyenne des six meilleures rémunérations mensuelles perçues par l'agent dans son dernier emploi, au cours de la période de douze mois précédant la nomination dans un corps de catégorie A. (...) ".

4. Il résulte des dispositions citées aux point 2 et 3, dont l'objet est de garantir une rémunération minimale aux agents titularisés dans certains corps de catégorie A de la fonction publique de l'Etat, qu'à quotité de travail inchangée, le traitement brut effectivement perçu par un agent postérieurement à sa titularisation ne peut être inférieur à 70 % de la rémunération moyenne mensuelle brute effectivement perçue avant cette titularisation, calculée sur la base des six meilleures rémunérations mensuelles perçues par l'agent dans son dernier emploi au cours de la période de douze mois précédant sa titularisation.

5. Il ressort des pièces du dossier soumis aux juges du fond que Mme B... qui bénéficiait d'un temps de travail partiel de 6/7ème dans le dernier poste qu'elle occupait avant sa nomination par l'arrêté du 4 juin 2015 et a continué de travailler, en application de celui-ci, selon la même quotité de temps, bénéficiait alors d'une rémunération seulement équivalente à 65 % de son revenu antérieur.

6. Pour juger que Mme B... était fondée à soutenir que c'est à tort que le tribunal administratif avait refusé d'annuler la décision du ministre en tant qu'il fixe sa rémunération en fonction de l'indice brut 611 et de l'indice majoré 513, la cour a estimé que les dispositions précitées ont pour objet de garantir aux agents nommés dans certains corps de catégorie A de la fonction publique de l'Etat un montant de traitement au moins égal à 70 % du montant de la rémunération qu'ils percevaient avant leur nomination et doivent pour ce faire, dans le cas spécifique des agents ayant exercé leurs fonctions à temps partiel au cours des douze mois précédant leur titularisation, être interprétées de façon à ce que l'échelon de reclassement soit déterminé à partir de la rémunération que ces agents auraient dû percevoir s'ils avaient exercé leurs fonctions à plein temps avant titularisation. En statuant comme elle l'a fait, la cour, par cette interprétation qui suffit à elle seule à justifier la décision retenue, n'a pas commis d'erreur de droit.

7. En second lieu, aux termes de l'article 3 du décret du 30 décembre 2005 relatif au régime indemnitaire applicable aux personnels de l'Office national des forêts : " une prime spéciale et de résultats est attribuée aux fonctionnaires mentionnées à l'article 1er du présent décret. Cette prime est définie selon un montant de base et un montant de référence ". Aux termes de l'article 6 de ce décret : " Les attributions individuelles de la prime spéciale et de résultats peuvent varier de 75% à 150% du montant de référence en fonction des résultats obtenus par l'agent par rapport aux objectifs définis pour l'année. (...) / Le solde de la prime spéciale et de résultats est versé, pour la période de référence, au cours du 1er semestre de l'année suivante ".

8. L'article 2 de l'arrêté du 29 juin 2007 cité au point 3 prévoit que, à quotité de travail inchangé, la rémunération mensuelle antérieure à prendre en compte est égale à la moyenne des six meilleures rémunérations mensuelles perçues par l'agent dans son dernier emploi, au cours de la période de douze mois précédant la nomination dans un corps de catégorie A. Par suite, c'est sans erreur de droit que la cour a jugé qu'en ne prenant pas en compte dans la détermination du montant de la rémunération de Mme B... servant de base de calcul au montant de son traitement minimum garanti le solde de la prime spéciale de résultats versée en juillet 2014, nonobstant la circonstance que ce solde lui aurait été attribué au titre de 2013, le ministre de l'agriculture a méconnu ces dispositions.

9. Il résulte de tout ce qui précède que le pourvoi du ministre de l'agriculture et de l'alimentation doit être rejeté.

10. Il y a lieu, dans les circonstances de l'espèce, de mettre à la charge de l'Etat la somme de 3 000 euros à verser à Mme B... au titre de l'article L. 761-1 du code de justice administrative.

D E C I D E :

--------------

Article 1er : Le pourvoi du ministre de l'agriculture et de l'alimentation est rejeté.

Article 2 : l'Etat versera à Mme B... la somme de 3 000 euros au titre de l'article L. 761-1 du code de justice administrative.

Article 3 : La présente décision sera notifiée au ministre de l'agriculture et de l'alimentation et à Mme A... B....

Délibéré à l'issue de la séance du 17 février 2022 où siégeaient : M. Guillaume Goulard, président de chambre, présidant ; M. Christian Fournier, conseiller d'Etat et M. Mathieu Le Coq, maître des requêtes-rapporteur.

Rendu le 30 mars 2022.

Le président :

Signé : M. Guillaume Goulard

Le rapporteur :

Signé : M. Mathieu Le Coq

La secrétaire :

Signé : Mme C... D...


Synthèse
Formation : 3ème chambre
Numéro d'arrêt : 441191
Date de la décision : 30/03/2022
Type d'affaire : Administrative
Type de recours : Excès de pouvoir

Publications
Proposition de citation : CE, 30 mar. 2022, n° 441191
Inédit au recueil Lebon

Composition du Tribunal
Rapporteur ?: M. Mathieu Le Coq
Rapporteur public ?: Mme Marie-Gabrielle Merloz
Avocat(s) : BOUTHORS

Origine de la décision
Date de l'import : 05/04/2022
Fonds documentaire ?: Legifrance
Identifiant ECLI : ECLI:FR:CE:2022:441191.20220330
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