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11/02/2022 | FRANCE | N°453111

France | France, Conseil d'État, 7ème chambre, 11 février 2022, 453111


Vu la procédure suivante :

Par une requête sommaire et un mémoire complémentaire, enregistrés les 31 mai et 1er septembre 2021 au secrétariat du contentieux du Conseil d'Etat, le Conseil national de l'ordre des architectes demande au Conseil d'Etat :

1°) d'annuler pour excès de pouvoir l'article 2 du décret n° 2021-357 du 30 mars 2021 portant diverses dispositions en matière de commande publique ;

2°) de mettre à la charge de l'Etat la somme de 4 000 euros au titre de l'article L. 761-1 du code de justice administrative.

Vu les autres pièces du dossier

;

Vu :

- le code de la commande publique ;

- la loi n° 77-2 du 3 janvier 1977 ;
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Vu la procédure suivante :

Par une requête sommaire et un mémoire complémentaire, enregistrés les 31 mai et 1er septembre 2021 au secrétariat du contentieux du Conseil d'Etat, le Conseil national de l'ordre des architectes demande au Conseil d'Etat :

1°) d'annuler pour excès de pouvoir l'article 2 du décret n° 2021-357 du 30 mars 2021 portant diverses dispositions en matière de commande publique ;

2°) de mettre à la charge de l'Etat la somme de 4 000 euros au titre de l'article L. 761-1 du code de justice administrative.

Vu les autres pièces du dossier ;

Vu :

- le code de la commande publique ;

- la loi n° 77-2 du 3 janvier 1977 ;

- la loi n° 2020-1525 du 7 décembre 2020 ;

- le code de justice administrative ;

Après avoir entendu en séance publique :

- le rapport de M. Alexis Goin, auditeur,

- les conclusions de M. Marc Pichon de Vendeuil, rapporteur public ;

La parole ayant été donnée, après les conclusions, à la SARL Matuchansky, Poupot, Valdelièvre, avocat du Conseil national de l'ordre des architectes ;

Vu la note en délibéré, enregistrée le 25 janvier 2022, présentée par le Conseil national de l'ordre des architectes ;

Considérant ce qui suit :

1. Aux termes de l'article R. 2171-16 du code de la commande publique, dans sa rédaction résultant de l'article 2 du décret attaqué du 30 mars 2021 portant diverses dispositions en matière de commande publique : " Un jury est désigné par l'acheteur à l'exception des cas suivants :/ 1° Pour les marchés de conception-réalisation passés par les pouvoirs adjudicateurs dans les hypothèses énumérées aux 1° à 3° et au 5° de l'article R. 2172-2 ;/ 1° bis Pour les marchés globaux de performance passés par les pouvoirs adjudicateurs dans les hypothèses énumérées à l'article R. 2172-2 ;/ 2° Pour les marchés de conception-réalisation et les marchés globaux de performance passés par les entités adjudicatrices selon la procédure de dialogue compétitif ou selon la procédure avec négociation ".

2. Les dispositions précitées de l'article 2 du décret du 30 mars 2021, dont le Conseil national de l'ordre des architectes demande l'annulation pour excès de pouvoir, ont pour objet d'étendre les cas de dispense de jury prévus par les dispositions du code de la commande publique aux marchés globaux de conception-réalisation et aux marchés globaux de performance relatifs à la réalisation d'ouvrages par les bailleurs sociaux et les centres régionaux des œuvres universitaires et scolaires, visés au 5° de l'article R. 2172-2 du code de la commande publique, ainsi qu'aux marchés globaux de performance qui ne confient aucune mission de conception au titulaire, visés au 4° du même article.

3. Aux termes de l'article R. 2171-18 du code de la commande publique : " Le jury dresse un procès-verbal d'examen des candidatures et formule un avis motivé sur la liste des candidats à retenir. L'acheteur arrête la liste des candidats admis à réaliser des prestations / Les candidats admis exécutent des prestations sur lesquelles se prononce le jury, après les avoir entendus. Ces prestations comportent au moins un avant-projet sommaire pour un ouvrage de bâtiment ou, pour un ouvrage d'infrastructure, un avant-projet accompagné de la définition des performances techniques de l'ouvrage. / (...) ".

4. En premier lieu, les dispositions citées aux points 1 et 3, qui sont dépourvues d'ambiguïté, n'ont pas pour objet et ne sauraient avoir pour effet de faire obstacle à ce que certaines prestations, telles que la réalisation d'un avant-projet sommaire, soient exigées des candidats quand aucun jury n'est désigné par l'acheteur, lorsqu'elles sont prévues par les documents de consultation ou prescrites par les lois et règlements. Les moyens tirés de ce qu'elles méconnaîtraient l'objectif de valeur constitutionnelle de clarté et d'intelligibilité de la norme et seraient, sur ce point, entachées d'erreur manifeste d'appréciation doivent, par suite, être écartés.

5. En deuxième lieu, aux termes de l'article 1er de la loi du 3 janvier 1977 sur l'architecture : " La création architecturale, la qualité des constructions, leur insertion harmonieuse dans le milieu environnant, le respect des paysages naturels ou urbains ainsi que du patrimoine sont d'intérêt public. Les autorités habilitées à délivrer le permis de construire ainsi que les autorisations de lotir s'assurent, au cours de l'instruction des demandes, du respect de cet intérêt ". Le respect de l'intérêt public ainsi défini est notamment assuré par les dispositions des articles 3 et 5-1 de la même loi, qui, respectivement, prescrivent le recours à un architecte par quiconque désire entreprendre des travaux soumis à une autorisation de construire et prévoient que les maîtres d'ouvrage publics et privés favorisent l'organisation de concours d'architecture pour la passation des marchés de maîtrise d'œuvre ayant pour objet la réalisation d'un ouvrage de bâtiment. Contrairement à ce qui est soutenu, le décret attaqué ne méconnaît pas ces dispositions et n'est pas entaché d'erreur manifeste d'appréciation du seul fait qu'il dispense de recours à un jury les marchés globaux de conception-réalisation et les marchés globaux de performance relatifs à la réalisation d'ouvrages par les bailleurs sociaux et les centres régionaux des œuvres universitaires et scolaires, ainsi que les marchés globaux de performance qui ne confient aucune mission de conception au titulaire.

6. En troisième lieu, aux termes du premier alinéa de l'article L. 3 du code de la commande publique : " Les acheteurs et les autorités concédantes respectent le principe d'égalité de traitement des candidats à l'attribution d'un contrat de la commande publique. Ils mettent en œuvre les principes de liberté d'accès et de transparence des procédures, dans les conditions définies dans le présent code ". Si le recours à un jury a notamment pour objet d'assurer l'impartialité et la transparence de la procédure de passation dans laquelle il s'inscrit, il ne s'ensuit pas qu'une telle procédure méconnaîtrait ces principes, dont le respect est notamment assuré par les dispositions précitées de l'article L. 3, du seul fait qu'elle ne prévoit la constitution d'aucun jury. Le moyen tiré de ce que les dispositions attaquées méconnaîtraient les principes d'impartialité et de transparence en soustrayant de nouvelles catégories de marchés globaux à l'obligation de constituer un jury ne peut, dès lors, qu'être écarté.

7. Il résulte de ce qui précède que le Conseil national de l'ordre des architectes n'est pas fondé à demander l'annulation des dispositions de l'article 2 du décret qu'il attaque.

8. Les dispositions de l'article L. 761-1 du code de justice administrative font obstacle à ce qu'une somme soit mise à ce titre à la charge de l'Etat qui n'est pas, dans la présente instance, la partie perdante.

D E C I D E :

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Article 1er : La requête du Conseil national de l'ordre des architectes est rejetée.

Article 2 : La présente décision sera notifiée au Conseil national de l'ordre des architectes, au Premier ministre et au ministre de l'économie, des finances et de la relance.

Délibéré à l'issue de la séance du 21 janvier 2022 où siégeaient : M. Olivier Japiot, président de chambre, présidant ; M. Benoît Bohnert, conseiller d'Etat et M. Alexis Goin, auditeur-rapporteur.

Rendu le 11 février 2022.

Le président:

Signé : M. Olivier Japiot

Le rapporteur

Signé : M. Alexis Goin

La secrétaire:

Signé : Mme A... B...


Synthèse
Formation : 7ème chambre
Numéro d'arrêt : 453111
Date de la décision : 11/02/2022
Type d'affaire : Administrative
Type de recours : Excès de pouvoir

Publications
Proposition de citation : CE, 11 fév. 2022, n° 453111
Inédit au recueil Lebon

Composition du Tribunal
Rapporteur ?: M. Guillaume Leforestier
Rapporteur public ?: M. Marc Pichon de Vendeuil
Avocat(s) : SARL MATUCHANSKY, POUPOT, VALDELIEVRE

Origine de la décision
Date de l'import : 08/03/2022
Fonds documentaire ?: Legifrance
Identifiant ECLI : ECLI:FR:CE:2022:453111.20220211
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