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11/02/2022 | FRANCE | N°450622

France | France, Conseil d'État, 1ère chambre, 11 février 2022, 450622


Vu la procédure suivante :

M. A... D... a demandé au tribunal administratif de Strasbourg, à titre principal, d'annuler la décision du 6 mars 2019 par laquelle la caisse d'allocations familiales du Haut-Rhin a rejeté son recours gracieux relatif à la pénalité administrative du 5 décembre 2018 et la décision du 18 mars 2019 par laquelle le conseil départemental du Haut-Rhin a rejeté son recours gracieux relatif à l'indu de revenu de solidarité active (RSA) et, à titre subsidiaire, de ramener cet indu à la somme 2 898,04 euros. Par un jugement n° 1903550 du 25 février 20

21, le tribunal administratif de Strasbourg a rejeté cette demande.

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Vu la procédure suivante :

M. A... D... a demandé au tribunal administratif de Strasbourg, à titre principal, d'annuler la décision du 6 mars 2019 par laquelle la caisse d'allocations familiales du Haut-Rhin a rejeté son recours gracieux relatif à la pénalité administrative du 5 décembre 2018 et la décision du 18 mars 2019 par laquelle le conseil départemental du Haut-Rhin a rejeté son recours gracieux relatif à l'indu de revenu de solidarité active (RSA) et, à titre subsidiaire, de ramener cet indu à la somme 2 898,04 euros. Par un jugement n° 1903550 du 25 février 2021, le tribunal administratif de Strasbourg a rejeté cette demande.

Par un pourvoi sommaire et un mémoire complémentaire, enregistrés les 12 mars et 8 juin 2021 au secrétariat du contentieux du Conseil d'Etat, M. D... demande au Conseil d'Etat :

1°) d'annuler ce jugement ;

2°) réglant l'affaire au fond, de faire droit à sa demande ;

3°) de mettre à la charge du département du Haut-Rhin, de la caisse d'allocations familiales du Haut-Rhin et de l'Etat la somme de 3 000 euros au titre de l'article L. 761-1 du code de justice administrative.

Vu les autres pièces du dossier ;

Vu :

- le code de l'action sociale et des familles ;

- le code de justice administrative ;

Après avoir entendu en séance publique :

- le rapport de Mme Cécile Chaduteau-Monplaisir, maître des requêtes,

- les conclusions de Mme Marie Sirinelli, rapporteure publique ;

La parole ayant été donnée, après les conclusions, à la SCP Delamarre, Jéhannin, avocat de M. A... D... et à la SCP Buk Lament, Robillot, avocat de la Département du Bas-Rhin ;

Considérant ce qui suit :

1. Il ressort des pièces du dossier soumis aux juges du fond qu'à la suite d'un contrôle de la situation de M. D..., bénéficiaire du revenu de solidarité active depuis le 1er octobre 2015, la caisse d'allocations familiales du Haut-Rhin lui a réclamé, par une décision du 17 octobre 2018, le remboursement d'un indu de revenu de solidarité active d'un montant de 10 374,47 euros, ainsi que, par une décision du 5 décembre 2018, le paiement d'une pénalité administrative d'un montant de 3 340 euros, motivée par le constat d'une manœuvre frauduleuse. M. D... se pourvoit en cassation contre le jugement du 25 février 2021 par lequel le tribunal administratif de Strasbourg a rejeté sa demande tendant à l'annulation des décisions des 6 et 18 mars 2019 par lesquelles la caisse d'allocations familiales du Haut-Rhin et le département du Haut-Rhin ont rejeté ses recours gracieux contre, respectivement, la pénalité administrative et l'indu de revenu de solidarité active.

2. En premier lieu, il ressort des pièces du dossier soumis aux juges du fond et notamment de la lettre adressée par M. D... à la présidente du conseil départemental du Haut-Rhin le 8 décembre 2018 ainsi que de ses écritures de première instance que celui-ci entendait contester le bien-fondé même de l'indu de revenu de solidarité active dont le remboursement lui était réclamé par la caisse d'allocations familiales du Haut-Rhin et non en demander la remise gracieuse. Par suite, il n'est pas fondé à soutenir que le tribunal aurait commis une erreur de droit ou méconnu son office en ne se prononçant par sur le bien-fondé d'une telle demande de remise.

3. En deuxième lieu, aux termes de l'article L. 262-3 du code de l'action sociale et des familles : " (...) L'ensemble des ressources du foyer, y compris celles qui sont mentionnées à l'article L. 132-1, est pris en compte pour le calcul du revenu de solidarité active, dans des conditions fixées par un décret en Conseil d'Etat qui détermine notamment : (...) 2° Les modalités d'évaluation des ressources (...) ". L'article L. 132-1 de ce code dispose que : " Il est tenu compte, pour l'appréciation des ressources des postulants à l'aide sociale, des revenus professionnels et autres et de la valeur en capital des biens non productifs de revenu, qui est évaluée dans les conditions fixées par voie réglementaire. (...) ". L'article R. 132-1 du même code prévoit, enfin, que : " Pour l'appréciation des ressources des postulants prévus à l'article L. 132-1, les biens non productifs de revenu, à l'exclusion de ceux constituant l'habitation principale du demandeur, sont considérés comme procurant un revenu annuel égal à 50 % de leur valeur locative s'il s'agit d'immeubles bâtis, à 80 % de cette valeur s'il s'agit de terrains non bâtis et à 3 % du montant des capitaux ".

4. Il résulte de ces dispositions que seules peuvent être évaluées sur la base forfaitaire prévue par les articles L. 132-1 et R. 132-1 du code de l'action sociale et des familles les ressources que l'allocataire est supposé pouvoir retirer de biens non productifs de revenu. Par suite, si les capitaux dont il dispose ont fait l'objet de placements productifs de revenus, seuls ces derniers peuvent être pris en compte, quand bien même le taux d'intérêt de ces placements serait inférieur au taux de 3 % prévu par l'article R. 132-1. La circonstance que l'allocataire n'aurait pas spontanément déclaré ces revenus ou que ces revenus seraient capitalisés et, à ce titre, temporairement indisponibles, est sans incidence sur l'application de ces dispositions.

5. Par suite, M. D... est fondé à soutenir que le tribunal a commis une erreur de droit en jugeant que la caisse d'allocations familiales du Haut-Rhin avait pu réviser ses droits à revenu de solidarité active sur la période de juillet 2015 à juin 2018 en considérant que les sommes placées sur son plan d'épargne logement lui avaient procuré des revenus annuels à hauteur de 3 % de leur montant, à hauteur de 0,75 % par trimestre, sans rechercher les revenus réels procurés par ce placement, qui est productif de revenus.

6. Il résulte de ce qui précède que M. D... est fondé à demander l'annulation du jugement qu'il attaque en tant seulement qu'il statue sur l'indu de revenu de solidarité active mis à sa charge, sans qu'il soit besoin de se prononcer sur les autres moyens de ce pourvoi, qui viennent tous au soutien de la contestation du jugement en tant qu'il statue sur cet indu.

7. Les dispositions de l'article L. 761-1 du code de justice administrative font obstacle à ce qu'une somme soit mise à ce titre à la charge de l'Etat qui n'est pas, dans la présente instance, la partie perdante. Il y a lieu, dans les circonstances de l'espèce, de mettre à la charge de la Collectivité européenne d'Alsace une somme de 1 500 euros à verser à M. D..., au titre de l'article L. 761-1 du code de justice administrative.

D E C I D E :

--------------

Article 1er : Le jugement du 25 février 2021 du tribunal administratif de Strasbourg est annulé en tant qu'il statue l'indu de revenu de solidarité active.

Article 2 : L'affaire est renvoyée dans cette mesure au tribunal administratif de Strasbourg.

Article 3 : La Collectivité européenne d'Alsace versera une somme de 1 500 euros à M. D... au titre de l'article L.761-1 du code de justice administrative.

Article 4 : Le surplus des conclusions de M. D... est rejeté.

Article 5 : La présente décision sera notifiée à M. A... D... et à la Collectivité européenne d'Alsace.

Délibéré à l'issue de la séance du 14 janvier 2022 où siégeaient : Mme Gaëlle Dumortier, présidente de chambre, présidant ; M. Jean-Luc Nevache, conseiller d'Etat et Mme Cécile Chaduteau-Monplaisir, maître des requêtes-rapporteure.

Rendu le 11 février 2022.

La présidente:

Signé : Mme Gaëlle Dumortier

La rapporteure

Signé : Mme Cécile Chaduteau-Monplaisir

La secrétaire:

Signé : Mme B... C...


Synthèse
Formation : 1ère chambre
Numéro d'arrêt : 450622
Date de la décision : 11/02/2022
Type d'affaire : Administrative
Type de recours : Excès de pouvoir

Publications
Proposition de citation : CE, 11 fév. 2022, n° 450622
Inédit au recueil Lebon

Composition du Tribunal
Rapporteur ?: Mme Cécile Chaduteau-Monplaisir
Rapporteur public ?: Mme Marie Sirinelli
Avocat(s) : SCP BUK LAMENT - ROBILLOT ; SCP DELAMARRE, JEHANNIN

Origine de la décision
Date de l'import : 15/02/2022
Fonds documentaire ?: Legifrance
Identifiant ECLI : ECLI:FR:CE:2022:450622.20220211
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