La jurisprudence francophone des Cours suprêmes


recherche avancée

21/12/2021 | FRANCE | N°445640

France | France, Conseil d'État, 7ème chambre, 21 décembre 2021, 445640


Vu la procédure suivante :

Mme D... F... a demandé au tribunal administratif de Poitiers d'annuler la décision du 29 août 2018 par laquelle la ministre des armées a rejeté sa demande de pension militaire de retraite d'ayant-cause. Par un jugement n° 1802884 du 5 mars 2020, le tribunal administratif de Poitiers a rejeté sa demande.

Par un pourvoi sommaire et un mémoire complémentaire, enregistrés les 25 octobre 2020 et 22 janvier 2021 au secrétariat du contentieux du Conseil d'Etat, Mme F... demande au Conseil d'Etat :

1°) d'annuler ce jugement ;

2°) r

glant l'affaire au fond, de faire droit à sa demande ;

3°) de mettre à la charge de ...

Vu la procédure suivante :

Mme D... F... a demandé au tribunal administratif de Poitiers d'annuler la décision du 29 août 2018 par laquelle la ministre des armées a rejeté sa demande de pension militaire de retraite d'ayant-cause. Par un jugement n° 1802884 du 5 mars 2020, le tribunal administratif de Poitiers a rejeté sa demande.

Par un pourvoi sommaire et un mémoire complémentaire, enregistrés les 25 octobre 2020 et 22 janvier 2021 au secrétariat du contentieux du Conseil d'Etat, Mme F... demande au Conseil d'Etat :

1°) d'annuler ce jugement ;

2°) réglant l'affaire au fond, de faire droit à sa demande ;

3°) de mettre à la charge de l'Etat la somme de 3 000 euros au titre de l'article L. 761-1 du code de justice administrative.

Par une ordonnance du 4 octobre 2021, la clôture de l'instruction a été fixée au 12 octobre 2021.

Vu les autres pièces du dossier ;

Vu :

- le code civil ;

- le code des pensions civiles et militaires de retraite ;

- la loi n° 2010-1657 du 29 décembre 2010 ;

- le décret n° 2010-1691 du 30 décembre 2010 ;

- l'arrêté interministériel du 30 décembre 2010 portant application du décret du 30 décembre 2010 ;

- le code de justice administrative ;

Après avoir entendu en séance publique :

- le rapport de M. Guillaume Leforestier, maître des requêtes,

- les conclusions de M. Marc Pichon de Vendeuil, rapporteur public ;

La parole ayant été donnée, après les conclusions, à la SCP Bouzidi, Bouhanna, avocat de Mme F... ;

Considérant ce qui suit :

1. Il ressort des pièces du dossier soumis aux juges du fond que Mme F... a demandé par courrier du 17 septembre 2012 au ministre de la défense de lui octroyer le bénéfice d'une pension en sa qualité d'ayant-cause de M. C..., bénéficiaire d'une pension militaire de retraite du 1er octobre 1956, date de sa radiation des cadres, au 5 avril 1983, date de son décès. Par une décision du 29 août 2018, la ministre des armées a rejeté sa demande. Mme F... se pourvoit en cassation contre le jugement du 5 mars 2020 par lequel le tribunal administratif de Poitiers a rejeté sa demande tendant à l'annulation de cette décision.

Sur la régularité du jugement attaqué :

2. Aux termes de l'article R. 613-3 du code de justice administrative : " Les mémoires produits après la clôture de l'instruction ne donnent pas lieu à communication, sauf réouverture de l'instruction ". Lorsque, postérieurement à la clôture de l'instruction, le juge est saisi d'un nouveau mémoire, il lui appartient de faire application des règles générales relatives à toutes les productions postérieures à la clôture de l'instruction. A ce titre, et conformément au principe selon lequel, devant les juridictions administratives, le juge dirige l'instruction, il lui appartient, dans tous les cas, de prendre connaissance de ce mémoire avant de rendre sa décision, ainsi que de le viser sans l'analyser. S'il a toujours la faculté, dans l'intérêt d'une bonne justice, d'en tenir compte - après l'avoir visé et, cette fois, analysé - il n'est tenu de le faire, à peine d'irrégularité de sa décision, que si ce mémoire contient soit l'exposé d'une circonstance de fait dont la partie qui l'invoque n'était pas en mesure de faire état avant la clôture de l'instruction écrite et que le juge ne pourrait ignorer sans fonder sa décision sur des faits matériellement inexacts, soit d'une circonstance de droit nouvelle ou que le juge devrait relever d'office.

3. En premier lieu, il ressort des pièces du dossier soumis aux juges du fond que, par une ordonnance du 13 décembre 2019, le président de la 2ème chambre du tribunal administratif de Poitiers a clos l'instruction le 13 janvier 2021 à midi. Il ne ressort pas des énonciations du mémoire produit par la ministre des armées le 7 février 2020, postérieurement à la clôture de l'instruction, et il n'est d'ailleurs pas soutenu par Mme F... que cette pièce contiendrait soit l'exposé d'une circonstance de fait dont la partie qui l'invoque n'était pas en mesure de faire état avant la clôture de l'instruction écrite et que le juge ne pourrait ignorer sans fonder sa décision sur des faits matériellement inexacts, soit d'une circonstance de droit nouvelle ou que le juge devrait relever d'office. Par suite, Mme F... n'est pas fondée à soutenir que le tribunal aurait rendu son jugement au terme d'une procédure irrégulière faute de lui avoir communiqué cette production.

4. En second lieu, le juge, auquel il incombe de veiller à la bonne administration de la justice, n'a aucune obligation, hormis le cas où des motifs exceptionnels tirés des exigences du débat contradictoire l'imposeraient, de faire droit à une demande de report de l'audience formulée par une partie. Si, en l'espèce, l'avocat de Mme F... avait, par courrier du 11 février 2020, sollicité le report de l'audience prévue le 13 février au motif qu'il participait à un mouvement de grève national contre la réforme des retraites, ces circonstances ne constituaient pas un motif exceptionnel de nature à imposer aux premiers juges, eu égard aux exigences du débat contradictoire, de faire droit à la demande de report. Ainsi, et contrairement à ce que soutient Mme F..., le tribunal n'a pas méconnu le caractère contradictoire de la procédure en refusant de reporter l'audience.

Sur le bien-fondé du jugement attaqué :

5. En premier lieu, contrairement à ce qui est soutenu par Mme F..., c'est par des motifs exempts de dénaturation que les premiers juges ont constaté que la copie intégrale de l'acte de naissance de M. C... qu'elle a produit ne faisait état d'aucun mariage avec la requérante. Par ailleurs, contrairement à ce qui est soutenu par la requérante, le tribunal administratif n'a pas relevé dans les énonciations de son jugement qu'une telle mention ne figurait pas sur l'acte de naissance A... la requérante.

6. En second lieu, aux termes de l'article 47 du code civil, dans sa rédaction applicable au présent litige : " Tout acte de l'état civil des Français et des étrangers fait en pays étranger et rédigé dans les formes usitées dans ce pays fait foi, sauf si d'autres actes ou pièces détenus, des données extérieures ou des éléments tirés de l'acte lui-même établissent, le cas échéant après toutes vérifications utiles, que cet acte est irrégulier, falsifié ou que les faits qui y sont déclarés ne correspondent pas à la réalité. "

7. Aux termes de l'article 211 de la loi du 29 décembre 2010 de finances pour 2011, applicable aux demandes de pension de réversion : " I. - (...) les pensions civiles et militaires de retraite et les retraites du combattant servies aux ressortissants des pays ou territoires ayant appartenu à l'Union française ou à la Communauté ou ayant été placés sous le protectorat ou sous la tutelle de la France sont calculées dans les conditions prévues aux paragraphes suivants. (...) / V. - Les demandes de pensions présentées en application du présent article sont instruites dans les conditions prévues par le code des pensions militaires d'invalidité et des victimes de la guerre et par le code des pensions civiles et militaires de retraite. (...) / VIII. - Un décret fixe les modalités d'application du présent article, notamment les mesures d'information des bénéficiaires ainsi que les modalités de présentation et d'instruction des demandes mentionnées aux III, IV et V./ (...) ".

8. Aux termes de l'article L. 39 du code des pensions civiles et militaires de retraite : " (...) le droit à pension de veuve est reconnu :/ (...) ; 2° (...) si le mariage, antérieur ou postérieur à la cessation de l'activité, a duré au moins quatre années ".

9. Aux termes, enfin, de l'article 3 du décret du 30 décembre 2010, pris pour l'application des dispositions précitées de la loi de finances pour 2011 : " Un arrêté conjoint des ministres chargés de la défense, des affaires étrangères, des anciens combattants et du budget énumère les pièces justificatives à produire à l'appui de toute demande visée à l'article 1er ". L'annexe 3 de l'arrêté du 30 décembre 2010 pris pour l'application de ce décret cite, parmi les pièces exigées pour une demande de pension d'un ayant cause, " l'acte de mariage mentionnant la date de transcription sur les registres d'état-civil ".

10. Pour juger que les pièces produites par Mme F... au soutien de sa demande ne permettaient pas d'établir la réalité de son union dans les conditions prévues par les dispositions citées au point 9, le tribunal administratif de Poitiers s'est fondé sur la circonstance, d'une part, que l'additif à l'acte de mariage produit par la requérante, daté du 16 octobre 2018, a été établi sur la seule foi des déclarations de l'intéressée, postérieurement au décès de M. C..., survenu en 1983, et d'autre part, que la copie intégrale de l'acte de naissance de l'intéressé ne faisait état d'aucun mariage avec Mme F.... En jugeant que ces pièces étaient insuffisamment probantes pour établir la réalité de l'union entre Mme F... et M. C..., faute de transcription de ce mariage sur un registre d'état civil, le tribunal administratif n'a pas commis d'erreur de droit.

11. Il résulte de ce qui précède que Mme F... n'est pas fondée à demander l'annulation du jugement qu'elle attaque.

Sur les frais de l'instance :

12. Les dispositions de l'article L. 761-1 du code de justice administrative font obstacle à ce qu'une somme soit mise à ce titre à la charge de l'Etat qui n'est pas, dans la présente instance, la partie perdante.

D E C I D E :

--------------

Article 1er : Le pourvoi de Mme F... est rejeté.

Article 2 : La présente décision sera notifiée à Mme D... F... et à la ministre des armées.

Délibéré à l'issue de la séance du 6 décembre 2021 où siégeaient : M. Benoît Bohnert, assesseur, présidant ; M. Gilles Pellissier, conseiller d'Etat et M. Guillaume Leforestier, maître des requêtes-rapporteur.

Rendu le 21 décembre 2021.

Le président :

Signé : M. Benoît Bohnert

Le rapporteur :

Signé : M. Guillaume Leforestier

La secrétaire :

Signé : Mme E... B...


Synthèse
Formation : 7ème chambre
Numéro d'arrêt : 445640
Date de la décision : 21/12/2021
Type d'affaire : Administrative
Type de recours : Excès de pouvoir

Publications
Proposition de citation : CE, 21 déc. 2021, n° 445640
Inédit au recueil Lebon

Composition du Tribunal
Rapporteur ?: M. Guillaume Leforestier
Rapporteur public ?: M. Marc Pichon de Vendeuil
Avocat(s) : SCP BOUZIDI, BOUHANNA

Origine de la décision
Date de l'import : 25/01/2022
Fonds documentaire ?: Legifrance
Identifiant ECLI : ECLI:FR:CE:2021:445640.20211221
Association des cours judiciaires suprmes francophones
Organisation internationale de la francophonie
Juricaf est un projet de l'AHJUCAF, l'association des Cours suprêmes judiciaires francophones. Il est soutenu par l'Organisation Internationale de la Francophonie. Juricaf est un projet de l'AHJUCAF, l'association des Cours suprêmes judiciaires francophones. Il est soutenu par l'Organisation Internationale de la Francophonie.
Logo iall 2012 website award