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21/12/2021 | FRANCE | N°436462

France | France, Conseil d'État, 9ème chambre, 21 décembre 2021, 436462


Vu la procédure suivante :

Par une décision du 28 septembre 2020, le Conseil d'Etat, statuant au contentieux, a prononcé l'admission des conclusions du pourvoi formé par M. et Mme A... contre l'arrêt n° 18VE00693 de la cour administrative d'appel de Versailles, en tant qu'il statue sur les conclusions tendant à la décharge de la majoration de 10 %.

Vu les autres pièces du dossier ;

Vu :

- le code général des impôts et le livre des procédures fiscales ;

- le code de justice administrative ;

Après avoir entendu en séance publique :

- le rapport de M. Cyril Martin de Lagarde, maître des requêtes en service extraordinaire,

- les concl...

Vu la procédure suivante :

Par une décision du 28 septembre 2020, le Conseil d'Etat, statuant au contentieux, a prononcé l'admission des conclusions du pourvoi formé par M. et Mme A... contre l'arrêt n° 18VE00693 de la cour administrative d'appel de Versailles, en tant qu'il statue sur les conclusions tendant à la décharge de la majoration de 10 %.

Vu les autres pièces du dossier ;

Vu :

- le code général des impôts et le livre des procédures fiscales ;

- le code de justice administrative ;

Après avoir entendu en séance publique :

- le rapport de M. Cyril Martin de Lagarde, maître des requêtes en service extraordinaire,

- les conclusions de Mme Emilie Bokdam-Tognetti, rapporteure publique ;

La parole ayant été donnée, après les conclusions, au Cabinet Briard, avocat de M. et Mme A... ;

Considérant ce qui suit :

1. Si l'administration fiscale est en droit, à tout moment de la procédure contentieuse, de justifier d'une pénalité en en modifiant le fondement juridique, c'est à la double condition que la substitution de base légale ainsi opérée ne prive le contribuable d'aucune des garanties de procédure prévues par la loi et que l'administration invoque, au soutien de la demande de substitution de base légale, des faits qu'elle avait retenus pour motiver la pénalité initialement appliquée.

2. Aux termes de l'article 1728 du code général des impôts dans sa rédaction applicable aux pénalités en litige : " 1. Le défaut de production dans les délais prescrits d'une déclaration ou d'un acte comportant l'indication d'éléments à retenir pour l'assiette ou la liquidation de l'impôt entraîne l'application, sur le montant des droits mis à la charge du contribuable ou résultant de la déclaration ou de l'acte déposé tardivement, d'une majoration de : / a. 10 % en l'absence de mise en demeure ou en cas de dépôt de la déclaration ou de l'acte dans les trente jours suivant la réception d'une mise en demeure, notifiée par pli recommandé, d'avoir à le produire dans ce délai ;(...) ". Aux termes de l'article 1758 A du même code, dans sa rédaction applicable au litige : " Le retard ou le défaut de souscription des déclarations qui doivent être déposées en vue de l'établissement de l'impôt sur le revenu ainsi que les inexactitudes ou les omissions relevées dans ces déclarations, qui ont pour effet de minorer l'impôt dû par le contribuable ou de majorer une créance à son profit, donnent lieu au versement d'une majoration égale à 10 % des droits supplémentaires ou de la créance indue. "

3. Pour juger que l'administration fiscale était en droit de demander de substituer, à la pénalité de 10% appliquée aux contribuables sur le fondement du a) du 1 de l'article 1728 du code général des impôts, celle prévue par les dispositions de l'article 1758 A du même code, la cour administrative d'appel de Versailles a estimé que les faits retenus pour justifier cette nouvelle pénalité étaient identiques à ceux retenus pour justifier celle initialement appliquée, à savoir l'inexacte qualification juridique de l'activité exercée par la société Calival, dont le résultat au titre des années 2009 et 2010 en litige a été déclaré à tort par M. et Mme A... dans la catégorie des bénéfices industriels et commerciaux au lieu de celle des bénéfices agricoles. En statuant ainsi, alors qu'il ressort des pièces du dossier soumis aux juges du fond, et notamment des termes des propositions de rectification des 20 et 21 décembre 2012, que la pénalité initialement appliquée était uniquement motivée par le défaut de déclaration par la société Calival des résultats de son activité agricole, la cour a dénaturé les pièces du dossier et commis une erreur de droit. Par suite, M. et Mme A... sont fondés à demander l'annulation de l'arrêt attaqué en tant qu'il statue sur les conclusions tendant à la décharge de la majoration de 10%.

4. Il y a lieu, dans les circonstances de l'espèce, de régler l'affaire au fond en application des dispositions de l'article L. 821-2 du code de justice administrative.

5. Il résulte de l'instruction que l'administration a appliqué la pénalité de 10 % prévue par les dispositions de l'article 1728 du code général des impôts après avoir constaté que la société Calival, dont M. et Mme A... étaient les uniques associés et dont les résultats étaient imposables à l'impôt sur le revenu au nom de ceux-ci, n'avait pas déposé de déclaration de résultat correspondant à l'activité agricole exercée en 2009 et 2010. Toutefois, dès lors qu'il est constant que ces résultats agricoles étaient déficitaires, leur prise en compte n'engendrait, par elle-même, aucune imposition. C'est donc à tort que des pénalités ont été mises à la charge de M. et Mme A... sur le fondement de ces dispositions.

6. Si le ministre a demandé à ce que soit substituée à cette pénalité celle prévue par l'article 1758 A du code général des impôts, il résulte de ce qui a été dit au point 3 que les faits invoqués dans les propositions de rectification des 20 et 21 décembre 2012 ne permettaient pas de justifier l'application de cette nouvelle pénalité.

7. Par suite, M. et Mme A... sont fondés à soutenir que c'est à tort que par le jugement qu'ils attaquent, le tribunal administratif de Lille a rejeté leurs conclusions tendant à la décharge de la pénalité qui leur a été appliquée sur le fondement de l'article 1728 du code général des impôts.

8. Il y a lieu, dans les circonstances de l'espèce, de mettre à la charge de l'Etat la somme de 2 000 euros à verser à M. et Mme A... au titre de l'article L. 761-1 du code de justice

D E C I D E :

--------------

Article 1er : L'arrêt de la cour administrative d'appel de Versailles du 3 octobre 2019 est annulé en tant qu'il statue sur les conclusions tendant à la décharge de la pénalité de 10 % qui leur a été appliquée.

Article 2 : M. et Mme A... sont déchargés de la pénalité de 10% qui leur a été appliquée au titre des années 2009 et 2010.

Article 3 : Le jugement du tribunal administratif de Montreuil du 26 décembre 2017 est réformé en ce qu'il est contraire à la présente décision.

Article 4 : L'Etat versera à M. et Mme A... la somme de 2 000 euros au titre de l'article L. 761-1 du code de justice administrative.

Article 5 : La présente décision sera notifiée à M. et Mme B... A... et au ministre de l'économie, des finances et de la relance.

Délibéré à l'issue de la séance du 13 décembre 2021 où siégeaient : M. Thomas Andrieu, conseiller d'Etat, présidant ; Mme Anne Egerszegi, conseillère d'Etat et M. Cyril Martin de Lagarde, maître des requêtes en service extraordinaire-rapporteur.

Rendu le 21 décembre 2021.

Le président :

Signé : M. Thomas Andrieu

Le rapporteur :

Signé : M. Cyril Martin de Lagarde

La secrétaire :

Signé : Mme C... D...


Synthèse
Formation : 9ème chambre
Numéro d'arrêt : 436462
Date de la décision : 21/12/2021
Type d'affaire : Administrative
Type de recours : Plein contentieux

Publications
Proposition de citation : CE, 21 déc. 2021, n° 436462
Inédit au recueil Lebon

Composition du Tribunal
Rapporteur ?: M. Cyril Martin de Lagarde
Rapporteur public ?: Mme Emilie Bokdam-Tognetti
Avocat(s) : CABINET BRIARD

Origine de la décision
Date de l'import : 23/12/2021
Fonds documentaire ?: Legifrance
Identifiant ECLI : ECLI:FR:CE:2021:436462.20211221
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