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22/11/2021 | FRANCE | N°437180

France | France, Conseil d'État, 8ème chambre, 22 novembre 2021, 437180


Vu la procédure suivante :

La société par actions simplifiée (SAS) Carrefour Hypermarchés a demandé au tribunal administratif de Bordeaux de prononcer la décharge des cotisations de taxes foncières sur les propriétés bâties auxquelles elle a été assujettie au titre des années 2013 et 2014 dans les rôles de la commune de Bègles (Gironde), à raison d'un local à usage de supermarché situé " Les Rives d'Arcins ". Par un jugement n° 1600448 du 21 septembre 2017, ce tribunal a rejeté cette demande.

Par une décision n° 415893 du 17 octobre 2018, le Conseil d'Eta

t, statuant au contentieux a annulé ce jugement et renvoyé l'affaire au tribunal ad...

Vu la procédure suivante :

La société par actions simplifiée (SAS) Carrefour Hypermarchés a demandé au tribunal administratif de Bordeaux de prononcer la décharge des cotisations de taxes foncières sur les propriétés bâties auxquelles elle a été assujettie au titre des années 2013 et 2014 dans les rôles de la commune de Bègles (Gironde), à raison d'un local à usage de supermarché situé " Les Rives d'Arcins ". Par un jugement n° 1600448 du 21 septembre 2017, ce tribunal a rejeté cette demande.

Par une décision n° 415893 du 17 octobre 2018, le Conseil d'Etat, statuant au contentieux a annulé ce jugement et renvoyé l'affaire au tribunal administratif de Bordeaux.

Par un jugement n° 1900322 du 31 octobre 2019, ce tribunal a rejeté la demande présentée par la société Carrefour Hypermarchés.

Par une décision du 22 mars 2021, le Conseil d'Etat, statuant au contentieux a fait droit aux conclusions du pourvoi de la société Carrefour Hypermarchés tendant à l'annulation de ce jugement, et, avant de statuer sur la demande de la société relative aux années 2013 et 2014, a ordonné un supplément d'instruction aux fins d'inviter l'administration à produire, contradictoirement avec la société requérante, un terme de comparaison adéquat ou, à défaut, les éléments permettant de procéder à l'évaluation directe de l'immeuble en litige en application des dispositions du 3° de l'article 1498 du code général des impôts, dont les modalités d'application sont précisées aux articles 324 AB et 324 AC de l'annexe III à ce code.

Par deux mémoires, enregistrés les 18 mai et 19 octobre 2021 au secrétariat du contentieux du Conseil d'Etat, la société Carrefour Hypermarchés a produit trois procès-verbaux de locaux-types à titre de termes de comparaison pour la détermination de la valeur locative de l'immeuble en litige, et contesté le bien fondé du terme de comparaison et des éléments d'appréciation directe produits par le ministre.

Vu les autres pièces du dossier, y compris celles visées par la décision du Conseil d'État du 22 mars 2021 ;

Vu :

- le code général des impôts et le livre des procédures fiscales ;

- le code de justice administrative ;

Après avoir entendu en séance publique :

- le rapport de M. François-René Burnod, auditeur,

- les conclusions de M. Romain Victor, rapporteur public ;

La parole ayant été donnée, après les conclusions, à la SCP Nicolaÿ, de Lanouvelle, Hannotin, avocat de la société Carrefour Hypermarchés ;

Considérant ce qui suit :

1. Par décision du 22 mars 2021, le Conseil d'Etat, statuant au contentieux, réglant l'affaire au fond après avoir annulé le jugement du 31 octobre 2019 du tribunal administratif de Bordeaux, a écarté comme non pertinents pour la détermination de la valeur locative du bien en litige les deux locaux-types proposés par la société et celui proposé par l'administration comme termes de comparaison, puis a ordonné, avant dire droit sur la demande, un supplément d'instruction aux fins que l'administration produise, contradictoirement avec la société requérante, un terme de comparaison adéquat ou, à défaut, les éléments permettant de procéder à l'évaluation directe de l'immeuble en litige en application des dispositions du 3° de l'article 1498 du code général des impôts. La société Carrefour Hypermarchés a produit trois procès-verbaux de locaux-types qu'elle estime pouvoir être retenus comme termes de comparaison. Le ministre a produit un procès-verbal de local-type, et, à titre subsidiaire, des éléments permettant de déterminer par voie d'appréciation directe la valeur locative de l'immeuble.

2. Aux termes de l'article 1498 du code général des impôts : " La valeur locative de tous les biens autres que les locaux d'habitation ou à usage professionnel visés au I de l'article 1496 et que les établissements industriels visés à l'article 1499 est déterminée au moyen de l'une des méthodes indiquées ci-après : / (...) 2° a. Pour les biens loués à des conditions de prix anormales ou occupés par leur propriétaire, occupés par un tiers à un autre titre que la location, vacants ou concédés à titre gratuit, la valeur locative est déterminée par comparaison. / Les termes de comparaison sont choisis dans la commune. Ils peuvent être choisis hors de la commune pour procéder à l'évaluation des immeubles d'un caractère particulier ou exceptionnel ; / b. La valeur locative des termes de comparaison est arrêtée : / Soit en partant du bail en cours à la date de référence de la révision lorsque l'immeuble type était loué normalement à cette date, / Soit, dans le cas contraire, par comparaison avec des immeubles similaires situés dans la commune ou dans une localité présentant, du point de vue économique, une situation analogue à celle de la commune en cause et qui faisaient l'objet à cette date de locations consenties à des conditions de prix normales ; (...) ". Aux termes de l'article 324 Z de l'annexe III au même code : " I. L'évaluation par comparaison consiste à attribuer à un immeuble ou à un local donné une valeur locative proportionnelle à celle qui a été adoptée pour d'autres biens de même nature pris comme types. (...) "

3. Il résulte de l'instruction que les situations, sur le plan économique, de la commune de Bègles, d'une part, qui se caractérise par son implantation en périphérie immédiate de la métropole de Bordeaux, et des communes de Brest, de Nîmes et de Chelles, d'autre part, ne sont pas suffisamment comparables au regard de l'activité des entreprises qui y sont installées et des différences existant en termes de population. Dans ces conditions, eu égard à leur zone d'implantation et à leur clientèle potentielle, les locaux de référence proposés par la requérante dans les communes de Brest et de Nîmes, ainsi que le local type proposé par le ministre dans la commune de Chelles, ne peuvent être regardés comme des termes de comparaison pertinents pour l'application des dispositions citées ci-dessus.

4. En revanche, il résulte de l'instruction que le local-type n° 34 inscrit sur le procès-verbal " ME " (maisons exceptionnelles) de la commune de Toulouse, proposé par la requérante, correspond à un hypermarché situé sur la commune de Balma, en périphérie de l'agglomération de Toulouse, dans une aire urbaine présentant une situation économique analogue à celle dans laquelle est située la commune de Bègles. La taille de la population des deux métropoles est par ailleurs similaire. Ce terme de comparaison présente en outre des caractéristiques propres similaires à celles de l'établissement à évaluer, en particulier une surface équivalente, la présence d'importants espaces de stationnement et de " drive " ainsi que l'inclusion au sein d'une galerie marchande d'égale importance, comportant respectivement environ 120 et 150 commerces. En outre, il ressort du procès-verbal des évaluations foncières que, contrairement à ce que soutient le ministre, ce local de référence a été régulièrement évalué à partir du loyer du bail dont il faisait l'objet au 1er janvier 1970. Par suite, il y a lieu de fixer, par comparaison avec ce local-type, la valeur locative de l'immeuble en litige à 13,87 euros le mètre carré (91 francs) et de prononcer la décharge de la taxe foncière sur les propriétés bâties acquittée par la société Carrefour Hypermarchés au titre des années 2013 et 2014 à concurrence de la différence résultant de l'écart entre le tarif de 15, 24 euros par mètre carré appliqué par l'administration fiscale et celui qui résulte de l'application de la valeur locative mentionnée plus haut.

5. Il y a lieu dans les circonstances de l'espèce, de mettre à la charge de l'Etat une somme de 3 000 euros à verser à la SAS Carrefour Hypermarchés au titre de l'article L. 761-1 du code de justice administrative.

D E C I D E :

--------------

Article 1er : Pour la détermination de la base de la taxe foncière sur les propriétés bâties assignée à la société Carrefour Hypermarchés au titre des années 2013 et 2014, la valeur locative de l'établissement situé " Les Rives d'Arcins " à Bègles (Gironde) est fixée à 13,87 euros par m².

Article 2 : La société Carrefour Hypermarchés est déchargée de la différence entre le montant de la taxe foncière sur les propriétés bâties à laquelle elle a été assujettie au titre des années 2013 et 2014 et celui qui résulte des bases de calcul indiquées à l'article précédent.

Article 3 : L'Etat versera à la société Carrefour Hypermarchés la somme de 3 000 euros au titre de l'article L 761-1 du code de justice administrative.

Article 4 : La présente décision sera notifiée à la société par actions simplifiée Carrefour Hypermarchés et au ministre de l'économie, des finances et de la relance.


Synthèse
Formation : 8ème chambre
Numéro d'arrêt : 437180
Date de la décision : 22/11/2021
Type d'affaire : Administrative
Type de recours : Plein contentieux

Publications
Proposition de citation : CE, 22 nov. 2021, n° 437180
Inédit au recueil Lebon

Composition du Tribunal
Rapporteur ?: M. François-René Burnod
Rapporteur public ?: M. Romain Victor
Avocat(s) : SCP NICOLAY, DE LANOUVELLE, HANNOTIN

Origine de la décision
Date de l'import : 24/11/2021
Fonds documentaire ?: Legifrance
Identifiant ECLI : ECLI:FR:CE:2021:437180.20211122
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