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05/11/2021 | FRANCE | N°437700

France | France, Conseil d'État, 9ème - 10ème chambres réunies, 05 novembre 2021, 437700


Vu la procédure suivante :

La société Gestion Hôtel Porte de Pantin a demandé au tribunal administratif de Montreuil de prononcer la réduction des cotisations de contribution foncière des entreprises, de taxe spéciale d'équipement et de taxe pour frais de chambre de commerce et d'industrie auxquelles elle a été assujettie au titre de l'année 2015 à raison d'un établissement hôtelier situé avenue Jean Lolive à Pantin (Seine-Saint-Denis). Par un jugement n° 1607395 du 2 novembre 2017, le tribunal administratif de Montreuil a rejeté sa demande.

Par un arrêt n° 1

8VE00017 du 19 novembre 2019, la cour administrative d'appel de Versailles a rej...

Vu la procédure suivante :

La société Gestion Hôtel Porte de Pantin a demandé au tribunal administratif de Montreuil de prononcer la réduction des cotisations de contribution foncière des entreprises, de taxe spéciale d'équipement et de taxe pour frais de chambre de commerce et d'industrie auxquelles elle a été assujettie au titre de l'année 2015 à raison d'un établissement hôtelier situé avenue Jean Lolive à Pantin (Seine-Saint-Denis). Par un jugement n° 1607395 du 2 novembre 2017, le tribunal administratif de Montreuil a rejeté sa demande.

Par un arrêt n° 18VE00017 du 19 novembre 2019, la cour administrative d'appel de Versailles a rejeté l'appel formé par la société contre ce jugement.

Par un pourvoi sommaire et un mémoire complémentaire, enregistrés au secrétariat du contentieux du Conseil d'Etat le 16 janvier et le 16 avril 2020, la société Gestion Hôtel Porte de Pantin demande au Conseil d'Etat :

1°) d'annuler cet arrêt ;

2°) de mettre à la charge de l'Etat la somme de 3 000 euros au titre de l'article L. 761-1 du code de justice administrative.

Vu les autres pièces du dossier ;

Vu :

- le code général des impôts et le livre des procédures fiscales ;

- le code de justice administrative ;

Après avoir entendu en séance publique :

- le rapport de M. Lionel Ferreira, maître des requêtes en service extraordinaire,

- les conclusions de Mme Emilie Bokdam-Tognetti, rapporteure publique ;

La parole ayant été donnée, après les conclusions, au Cabinet Briard, avocat de la société Gestion Hôtel Porte de Pantin ;

Considérant ce qui suit :

1. Il ressort des pièces du dossier soumis aux juges du fond que la société Gestion Hôtel Porte de Pantin exploite, sous l'enseigne " Campanile Paris Est Pantin ", un établissement hôtelier situé sur le territoire de la commune de Pantin (Seine-Saint-Denis), construit en 1989, rénové en 2012, et comptant près de 120 chambres. A raison de cet établissement, elle a été assujettie au titre de l'année 2015 à la contribution foncière des entreprises, à la taxe spéciale d'équipement et à la taxe pour frais de chambre de commerce et d'industrie. Elle se pourvoit en cassation contre l'arrêt du 19 novembre 2019 par lequel la cour administrative d'appel de Versailles a rejeté son appel contre le jugement du 2 novembre 2017 par lequel le tribunal administratif de Montreuil a rejeté sa demande tendant à la réduction de ces impositions.

2. Aux termes de l'article 1498 du code général des impôts, dans sa rédaction applicable au litige : " La valeur locative de tous les biens autres que les locaux visés au I de l'article 1496 et que les établissements industriels visés à l'article 1499 est déterminée au moyen de l'une des méthodes indiquées ci-après : / 1° Pour les biens donnés en location à des conditions de prix normales, la valeur locative est celle qui ressort de cette location ; / 2º a. Pour les biens loués à des conditions de prix anormales ou occupés par leur propriétaire, occupés par un tiers à un autre titre que la location, vacants ou concédés à titre gratuit, la valeur locative est déterminée par comparaison. / Les termes de comparaison sont choisis dans la commune. Ils peuvent être choisis hors de la commune pour procéder à l'évaluation des immeubles d'un caractère particulier ou exceptionnel ; / b. La valeur locative des termes de comparaison est arrêtée : / Soit en partant du bail en cours à la date de référence de la révision lorsque l'immeuble type était loué normalement à cette date, / Soit, dans le cas contraire, par comparaison avec des immeubles similaires situés dans la commune ou dans une localité présentant, du point de vue économique, une situation analogue à celle de la commune en cause et qui faisaient l'objet à cette date de locations consenties à des conditions de prix normales ; / 3° A défaut de ces bases, la valeur locative est déterminée par voie d'appréciation directe ".

3. En premier lieu, pour écarter le local-type n° 6 du procès-verbal des opérations de révision foncière de la commune de Sète, que la société proposait de retenir comme terme de comparaison, la cour a relevé que cette commune ne présentait pas, du point de vue économique, une situation analogue à celle de Pantin dès lors que cette dernière, limitrophe de Paris et raccordée au réseau de transports parisiens, relevait d'une situation particulière. En statuant ainsi, la cour, dont l'arrêt est suffisamment motivé, n'a ni dénaturé les faits de l'espèce ni commis d'erreur de droit.

4. En deuxième lieu, la cour n'a pas davantage dénaturé les faits de l'espèce ou commis d'erreur de droit en relevant, pour l'écarter, que le local-type n° 32 du procès-verbal de la commune de Champigny-sur-Marne, correspondait à un hôtel construit en 1910 d'une capacité d'à peine seize chambres qui n'était pas comparable à un hôtel de chaîne de conception moderne.

5. En troisième lieu, d'une part, aux termes des dispositions alors en vigueur de l'article 324 AA de l'annexe III au code général des impôts, applicables en cas de mise en œuvre de la méthode d'évaluation de la valeur locative des locaux commerciaux et biens divers prévue au 2° de l'article 1498 du même code: " La valeur locative cadastrale des biens loués à des conditions anormales ou occupés par leur propriétaire, occupés par un tiers à un titre autre que celui de locataire, vacants ou concédés à titre gratuit est obtenue en appliquant aux données relatives à leur consistance - telles que superficie réelle, nombre d'éléments - les valeurs unitaires arrêtées pour le type de la catégorie correspondante. Cette valeur est ensuite ajustée pour tenir compte des différences qui peuvent exister entre le type considéré et l'immeuble à évaluer, notamment du point de vue de la situation, de la nature de la construction, de son état d'entretien, de son aménagement, ainsi que de l'importance plus ou moins grande de ses dépendances bâties et non bâties si ces éléments n'ont pas été pris en considération lors de l'appréciation de la consistance ".

6. D'autre part, aux termes des dispositions alors en vigueur de l'article 324 AB, de la même annexe: " Lorsque les autres moyens font défaut, il est procédé à l'évaluation directe de l'immeuble en appliquant un taux d'intérêt à sa valeur vénale, telle qu'elle serait constatée à la date de référence si l'immeuble était libre de toute location ou occupation. / Le taux d'intérêt susvisé est fixé en fonction du taux des placements immobiliers constatés dans la région à la date de référence pour des immeubles similaires. " Aux termes des dispositions alors en vigueur de l'article 324 AC de la même annexe : " En l'absence d'acte et de toute autre donnée récente faisant apparaître une estimation de l'immeuble à évaluer susceptible d'être retenue, sa valeur vénale à la date de référence est appréciée d'après la valeur vénale d'autres immeubles d'une nature comparable ayant fait l'objet de transactions récentes situés dans la commune même ou dans une localité présentant du point de vue économique une situation analogue à celle de la commune en cause . / La valeur vénale d'un immeuble peut également être obtenue en ajoutant à la valeur vénale du terrain, estimée par comparaison avec celle qui ressort de transactions récentes relatives à des terrains à bâtir situés dans une zone comparable, la valeur de reconstruction au 1er janvier 1970 dudit immeuble, réduite pour tenir compte, d'une part, de la dépréciation immédiate et, d'autre part, du degré de vétusté de l'immeuble et de son état d'entretien, ainsi que de la nature, de l'importance, de l'affectation et de la situation de ce bien. "

7. En vertu des articles précités de l'annexe III au code général des impôts, la valeur vénale des immeubles évalués par voie d'appréciation directe doit d'abord être déterminée en utilisant les données figurant dans les différents actes constituant l'origine de la propriété de l'immeuble si ces données, qui peuvent résulter notamment d'actes de cession, de déclarations de succession, d'apport en société ou, s'agissant d'immeubles qui n'étaient pas construits en 1970, de leur valeur lors de leur première inscription au bilan, ont une date la plus proche possible de la date de référence du 1er janvier 1970. Si ces données ne peuvent être regardées comme pertinentes du fait qu'elles présenteraient une trop grande antériorité ou postériorité par rapport à cette date, il incombe à l'administration fiscale de proposer des évaluations fondées sur les deux autres méthodes comparatives prévues à l'article 324 AC de la même annexe, en retenant des transactions qui peuvent être postérieures ou antérieures aux actes ou au bilan mentionnés ci-dessus dès lors qu'elles ont été conclues à une date plus proche du 1er janvier 1970. Ce n'est que si l'administration n'est pas à même de proposer des éléments de calcul fondés sur l'une ou l'autre de ces méthodes et si le contribuable n'est pas davantage en mesure de fournir ces éléments de comparaison qu'il y a lieu de retenir, pour le calcul de la valeur locative, les données figurant dans les actes constituant l'origine de la propriété du bien ou, le cas échéant, dans son bilan.

8. Les dispositions précitées de l'article 324 AC de l'annexe III au code général des impôts ne font pas obstacle à ce que la superficie de l'immeuble évalué par appréciation directe fasse l'objet d'une pondération de la surface des différents éléments qui le composent, afin de tenir compte des différences de commercialité de ces éléments en fonction de leur affectation et de leur emplacement. Elles ne font pas plus obstacle à ce que la valeur locative soit ajustée pour tenir compte des différences qui peuvent exister entre les immeubles d'une nature comparable considérés et l'immeuble à évaluer, notamment du point de vue de la situation, de la nature de la construction, de son état d'entretien.

9. Pour écarter le moyen tiré de ce que la surface des salles de réunion, le hall, le bar et la réception de l'établissement hôtelier devaient se voir attribuer un coefficient de pondération de 0,5, la cour administrative d'appel de Bordeaux a relevé, sans dénaturer les faits qui lui étaient soumis, que ces espaces se rattachaient directement à l'activité de ce dernier et contribuaient à la qualité du service fourni à sa clientèle.

10. En revanche, en se fondant sur les disposition de l'article 324 AA de l'annexe III au code général des impôts pour juger que l'administration fiscale avait pu assigner aux surfaces de ces espaces des coefficients de pondération, alors qu'il ressort des énonciations non contestées de l'arrêt attaqué que l'administration fiscale a recouru à la méthode d'évaluation directe prévue au 3° de l'article 1498 du code général des impôts pour déterminer la valeur locative de l'établissement hôtelier, et non à la méthode par comparaison prévue au 2° du même article, la cour a commis une erreur de droit.

11. Toutefois, il résulte de ce qui a été au point 8 que l'administration fiscale, qui au demeurant n'invoquait pas les dispositions de l'article 324 AA de l'annexe III au code général des impôts devant les juges du fond, a pu, pour la mise en œuvre de l'article 324 AC de la même annexe, appliquer des coefficients de pondération afin de tenir compte des différences de commercialité des éléments composant l'hôtel litigieux en fonction de leur affectation et de leur emplacement par rapport aux immeubles comparables dont la valeur vénale était prise en compte dans le cadre de la méthode d'évaluation directe. Il convient de substituer ce motif, qui n'implique aucune appréciation de fait nouvelle, à celui, erroné, retenu par la cour.

12. Il résulte de tout ce qui précède que le pourvoi de la société Gestion Hôtel Porte de Pantin doit être rejeté, y compris ses conclusions présentées au titre de l'article L. 761-1 du code de justice administrative.

D E C I D E :

--------------

Article 1er : Le pourvoi de la société Gestion Hôtel Porte de Pantin est rejeté.

Article 2 : La présente décision sera notifiée à la société Gestion Hôtel Porte de Pantin et au ministre de l'économie, des finances et de la relance.

Délibéré à l'issue de la séance du 18 octobre 2021 où siégeaient : M. Jacques-Henri Stahl, président adjoint de la Section du contentieux, présidant ; M. J... I..., M. Frédéric Aladjidi, présidents de chambre; Mme A... M..., M. F... H..., Mme K... C..., M. L... D..., M. Alain Seban, conseillers d'Etat et M. Lionel Ferreira, maître des requêtes en service extraordinaire.

Rendu le 5 novembre 2021.

Le président :

Signé : M. N... B...

Le rapporteur :

Signé : M. Lionel Ferreira

La secrétaire :

Signé : Mme E... G...


Synthèse
Formation : 9ème - 10ème chambres réunies
Numéro d'arrêt : 437700
Date de la décision : 05/11/2021
Type d'affaire : Administrative
Type de recours : Plein contentieux

Publications
Proposition de citation : CE, 05 nov. 2021, n° 437700
Inédit au recueil Lebon

Composition du Tribunal
Rapporteur ?: M. Lionel Ferreira
Rapporteur public ?: Mme Emilie Bokdam-Tognetti
Avocat(s) : CABINET BRIARD

Origine de la décision
Date de l'import : 09/11/2021
Fonds documentaire ?: Legifrance
Identifiant ECLI : ECLI:FR:CE:2021:437700.20211105
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