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26/10/2021 | FRANCE | N°436983

France | France, Conseil d'État, 9ème chambre, 26 octobre 2021, 436983


Vu la procédure suivante :

M. B... D... a demandé au tribunal administratif de Bordeaux de prononcer la décharge de la cotisation supplémentaire d'impôt sur le revenu à laquelle il a été assujetti au titre de l'année 2014. Par un jugement no 1505631 du 25 octobre 2017, le tribunal administratif de Bordeaux a rejeté sa demande.

Par un arrêt n° 17BX04090 du 17 octobre 2019, la cour administrative d'appel de Bordeaux a annulé ce jugement et fait droit à la demande de M. D....

Par un pourvoi et un mémoire en réplique, enregistrés les 23 décembre 2019 et 15 f

évrier 2021 au secrétariat du contentieux du Conseil d'Etat, le ministre de l'actio...

Vu la procédure suivante :

M. B... D... a demandé au tribunal administratif de Bordeaux de prononcer la décharge de la cotisation supplémentaire d'impôt sur le revenu à laquelle il a été assujetti au titre de l'année 2014. Par un jugement no 1505631 du 25 octobre 2017, le tribunal administratif de Bordeaux a rejeté sa demande.

Par un arrêt n° 17BX04090 du 17 octobre 2019, la cour administrative d'appel de Bordeaux a annulé ce jugement et fait droit à la demande de M. D....

Par un pourvoi et un mémoire en réplique, enregistrés les 23 décembre 2019 et 15 février 2021 au secrétariat du contentieux du Conseil d'Etat, le ministre de l'action et des comptes publics demande au Conseil d'Etat d'annuler cet arrêt.

Vu les autres pièces du dossier ;

Vu :

- le code général des impôts et le livre des procédures fiscales ;

- le code du travail ;

- le code de justice administrative ;

Après avoir entendu en séance publique :

- le rapport de M. Cyril Martin de Lagarde, maître des requêtes en service extraordinaire,

- les conclusions de Mme Céline Guibé, rapporteure publique ;

La parole ayant été donnée, après les conclusions, à la SCP Le Bret-Desaché, avocat de M. D... ;

Considérant ce qui suit :

1. Il ressort des pièces du dossier soumis aux juges du fond qu'après avoir fait l'objet le 3 mars 2014 d'une procédure de licenciement, M. D... a signé le 15 juillet suivant un protocole transactionnel par lequel son employeur s'engageait à lui verser une indemnité. Le ministre de l'action et des comptes publics se pourvoit en cassation contre l'arrêt du 17 octobre 2019 par lequel la cour administrative d'appel de Bordeaux a annulé le jugement du 25 octobre 2017 du tribunal administratif de Bordeaux et déchargé M. D... E... la cotisation supplémentaire d'impôt sur le revenu à laquelle il a été assujetti au titre de l'année 2014 du fait de l'imposition de cette indemnité transactionnelle qu'il avait déclarée.

2. Aux termes du 1 de l'article 80 duodecies du code général des impôts, dans sa rédaction applicable à l'année 2014 : " Toute indemnité versée à l'occasion de la rupture du contrat de travail constitue une rémunération imposable, sous réserve des dispositions suivantes. / Ne constituent pas une rémunération imposable : / 1º Les indemnités mentionnées aux articles L. 1235-2, L. 1235-3 et L. 1235-11 à L. 1235-13 du Code du travail'; (...) ". Aux termes de l'article L. 1235-3 du code du travail : " Si le licenciement d'un salarié survient pour une cause qui n'est pas réelle et sérieuse, le juge peut proposer la réintégration du salarié dans l'entreprise, avec maintien de ses avantages acquis. / Si l'une ou l'autre des parties refuse, le juge octroie une indemnité au salarié. Cette indemnité, à la charge de l'employeur, ne peut être inférieure aux salaires des six derniers mois. Elle est due sans préjudice, le cas échéant, de l'indemnité de licenciement prévue à l'article L 1234-9 ".

3. Pour déterminer si une indemnité versée en exécution d'une transaction conclue à l'occasion de la rupture d'un contrat de travail est imposable, il appartient à l'administration et, lorsqu'il est saisi, au juge de l'impôt, de rechercher la qualification à donner aux sommes qui font l'objet de la transaction. Ces dernières ne sont susceptibles d'être regardées comme une indemnité pour licenciement sans cause réelle et sérieuse mentionnée à l'article L. 1235-3 du code du travail que s'il résulte de l'instruction que la rupture des relations de travail est assimilable à un tel licenciement. Dans ce cas, les indemnités accordées au titre d'un licenciement sans cause réelle et sérieuse sont exonérées. Il appartient à l'administration et, lorsqu'il est saisi, au juge de l'impôt, au vu de l'instruction, de rechercher la qualification à donner aux sommes objet de la transaction, en recherchant notamment si elles ont entendu couvrir, au-delà des indemnités accordées au titre du licenciement, la réparation de préjudices distincts, afin de déterminer dans quelle proportion ces sommes sont susceptibles d'être exonérées.

4. Pour juger le licenciement de M. D... sans cause réelle et sérieuse, la cour a relevé une incohérence entre, d'une part, l'invocation, dans la lettre de licenciement du 3 mars 2014, de l'insuffisance professionnelle depuis plus de deux ans de l'intéressé, et d'autre part la qualité des évaluations professionnelles de M. D... au titre des années 2012 et 2013 ainsi que la perception par ce dernier, au titre de ces deux années, de primes d'intéressement semestrielles correspondant à la réalisation de 100% des objectifs qui lui avaient été fixés. En statuant ainsi, la cour a dénaturé les pièces du dossier, desquelles il ne ressortait pas d'éléments relatifs à l'évaluation professionnelle de M. D... au titre de l'année 2013 et à la perception par ce dernier, en 2012 et 2013, de primes correspondant à la réalisation de la totalité des objectifs qui lui avaient été fixés. Par suite, sans qu'il soit besoin d'examiner les autres moyens du pourvoi, le ministre est fondé à demander l'annulation de l'arrêt qu'il attaque.

5. Les dispositions de l'article L. 761-1 du code de justice administrative font obstacle à ce qu'une somme soit mise à ce titre à la charge de l'Etat, qui n'est pas, dans la présente instance, la partie perdante.

D E C I D E :

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Article 1er : L'arrêt de la cour administrative d'appel de Bordeaux du 17 octobre 2019 est annulé.

Article 2 : L'affaire est renvoyée à la cour administrative d'appel de Bordeaux.

Article 3 : Les conclusions présentées par M. D... au titre de l'article L. 761-1 du code de justice administrative sont rejetées.

Article 4 : La présente décision sera notifiée au ministre de l'économie, des finances et de la relance et à M. B... D....

Délibéré à l'issue de la séance du 12 octobre 2021 où siégeaient : Mme Anne Egerszegi, conseillère d'Etat, présidant ; M. Thomas Andrieu, conseiller d'Etat et M. Cyril Martin de Lagarde, maître des requêtes en service extraordinaire-rapporteur.

Rendu le 26 octobre 2021.

La présidente :

Signé : Mme Anne Egerszegi

Le rapporteur :

Signé : M. Cyril Martin de Lagarde

La secrétaire :

Signé : Mme A... C...


Synthèse
Formation : 9ème chambre
Numéro d'arrêt : 436983
Date de la décision : 26/10/2021
Type d'affaire : Administrative
Type de recours : Plein contentieux

Publications
Proposition de citation : CE, 26 oct. 2021, n° 436983
Inédit au recueil Lebon

Composition du Tribunal
Rapporteur ?: M. Cyril Martin de Lagarde
Rapporteur public ?: Mme Céline Guibé
Avocat(s) : SCP LE BRET-DESACHE

Origine de la décision
Date de l'import : 28/10/2021
Fonds documentaire ?: Legifrance
Identifiant ECLI : ECLI:FR:CE:2021:436983.20211026
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