Vu la procédure suivante :
M. A... B... a présenté une demande d'asile à l'Office français de protection des réfugiés et apatrides (OFPRA), qui a rejeté sa demande par une décision du 30 novembre 2015.
M. B... a formé un recours devant la Cour nationale du droit d'asile qui a annulé cette décision et lui a reconnu la qualité de réfugié par une décision n° 16001211 du 24 juin 2016.
Par un recours du 7 mars 2019, le directeur général de l'OFPRA a demandé la révision de cette décision à la Cour nationale du droit d'asile.
Par une décision n° 19010809 du 14 octobre 2019 la Cour nationale du droit d'asile a, d'une part, admis le recours en révision du directeur général de l'OFPRA et déclaré nulle et non avenue la décision du 24 juin 2016 reconnaissant à M. B... la qualité de réfugié et, d'autre part, rejeté son recours tendant à ce que lui soit reconnue la qualité de réfugié.
Par un pourvoi sommaire et un mémoire complémentaire enregistrés les 25 février et le 10 juin 2020 au secrétariat du contentieux du Conseil d'Etat M. B... demande au Conseil d'Etat :
1°) d'annuler la décision n° 19010809 du 14 octobre 2019 de la Cour nationale du droit d'asile ;
2°) de renvoyer l'affaire devant la Cour nationale du droit d'asile ;
3°) de mettre à la charge de l'OFPRA la somme de 4 000 euros à verser à son avocat, la SCP Matuchansky, Poupot, Valdelièvre, au titre des articles L. 761-1 du code de justice administrative et 37 de la loi n° 91-647 du 10 juillet 1991.
Vu les autres pièces du dossier ;
Vu :
- le code de l'entrée et du séjour des étrangers et du droit d'asile ;
- la loi n° 91-647 du 10 juillet 1991 ;
- le code de justice administrative ;
Après avoir entendu en séance publique :
- le rapport de M. Bertrand Mathieu, conseiller d'Etat en service extraordinaire,
- les conclusions de M. Philippe Ranquet, rapporteur public,
La parole ayant été donnée, après les conclusions, à la SCP Matuchansky, Poupot, Valdelièvre, avocat de M. B..., et à la SCP Foussard, Froger, avocat de l'Office français de protection des réfugiés et apatrides ;
Considérant ce qui suit :
1. Il ressort des pièces du dossier soumis à la Cour nationale du droit d'asile que l'Office français de protection des réfugiés et apatrides (OFPRA) a, le 7 mars 2019, saisi la Cour, sur le fondement des articles L. 711-4, L. 711-5 et R. 733-36 du code de l'entrée et du séjour des étrangers et du droit d'asile, alors applicables, d'un recours en révision pour fraude de la décision du 24 juin 2016 par laquelle elle avait reconnu à M. B... la qualité de réfugié. M. B... se pourvoit en cassation contre la décision du 14 octobre 2019 par laquelle la Cour nationale du droit d'asile a fait droit au recours de l'OFPRA.
2. En vertu de l'article L. 711-5 du code de l'entrée et du séjour des étrangers et du droit d'asile, dans sa rédaction alors applicable, lorsque la reconnaissance de la qualité de réfugié résulte d'une décision de la Cour nationale du droit d'asile, l'OFPRA peut la saisir d'un recours dirigé contre cette décision s'il apparaît qu'elle a été obtenue par fraude. Aux termes de l'article R. 733-36 du même code, ce recours en révision " est exercé dans le délai de deux mois après la constatation des faits de nature à (...) caractériser une fraude. ".
3. Il ressort des pièces du dossier soumis à la Cour nationale du droit d'asile que la préfecture de la Côte d'Or a envoyé les 1er et 30 mars 2018 deux courriels à la division de la protection de l'OFPRA comportant des informations sur une suspicion de fraude par M. B..., puis que la même préfecture a envoyé un autre courriel à ce même sujet le 7 janvier 2019, en l'adressant cette fois à la division de la protection et à la division des affaires juridiques européennes et internationales de l'OFPRA.
4. Quel que soit le service chargé, au sein de l'OFPRA, de constater une fraude, d'engager une procédure de fin de protection et d'exercer un recours en révision devant la Cour, ces actions sont exercées au nom de l'Office. Par suite, en jugeant que la computation du délai dans lequel devait être introduit un recours en révision avait commencé à courir à la date à laquelle la division des affaires juridiques européennes et internationales avait reçu le courriel la préfecture de la Côte d'Or, au motif que cette division était " le seul service de l'Office compétent pour caractériser une fraude ", la cour a entaché sa décision d'erreur de droit.
5. Il résulte de ce qui précède, et sans qu'il soit besoin de se prononcer sur les autres moyens du pourvoi, que M. B... est fondé à demander l'annulation de la décision de la Cour nationale du droit d'asile du 14 octobre 2019.
6. M. B... a obtenu le bénéfice de l'aide juridictionnelle. Par suite, son avocat peut se prévaloir des dispositions des articles L. 761-1 du code de justice administrative et 37 de la loi du 10 juillet 1991. Il y a lieu, dans les circonstances de l'espèce, et sous réserve que la SCP Matuchansky, Poupot, Valdelièvre, avocat de M. B..., renonce à percevoir la somme correspondant à la part contributive de l'Etat, de mettre à la charge de l'Office français de protection des réfugiés et apatrides la somme de 3 000 euros à verser à cette société.
D E C I D E :
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Article 1er : La décision de la Cour nationale du droit d'asile du 14 octobre 2019 est annulée.
Article 2 : L'affaire est renvoyée à la Cour nationale du droit d'asile.
Article 3 : L'Office français de protection des réfugiés et apatrides versera la somme de 3 000 euros à la SCP Matuchansky, Poupot, Valdelièvre, avocat de M. B..., au titre des articles L. 761-1 du code de justice administrative et 37 de la loi du 10 juillet 1991, sous réserve que cette société renonce à percevoir la somme correspondant à la part contributive de l'Etat.
Article 4 : La présente décision sera notifiée à M. A... B... et à l'Office français de protection des réfugiés et apatrides.