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13/10/2021 | FRANCE | N°450996

France | France, Conseil d'État, 4ème chambre, 13 octobre 2021, 450996


Vu les procédures suivantes :

M. AR... L..., Mme W... Imbert, M. BW... AX..., Mme V... AZ... épouse BB..., M. BF... D..., Mme AN... E... épouse AB..., M. AE... AC..., Mme B... BU..., M. F... AQ..., Mme BT... BA... épouse AI..., M. BH... S..., Mme BL... A... épouse R..., M. AQ... BO..., Mme BG... BM..., M. BK... C..., Mme BQ... AD... épouse X..., M. U... T..., Mme AU... Y..., M. N... AO..., Mme AY... K..., M. M... AV..., Mme BE... BV..., M. AP... I..., Mme AW... AM... épouse AL..., M. BD... BI..., M. AJ... BN..., Mme AT... G... épouse H..., M. BK... BP..., Mme Q... Z..., M. BS...

BC..., Mme AF... AK... épouse BR..., M. BF... O..., Mme AG.....

Vu les procédures suivantes :

M. AR... L..., Mme W... Imbert, M. BW... AX..., Mme V... AZ... épouse BB..., M. BF... D..., Mme AN... E... épouse AB..., M. AE... AC..., Mme B... BU..., M. F... AQ..., Mme BT... BA... épouse AI..., M. BH... S..., Mme BL... A... épouse R..., M. AQ... BO..., Mme BG... BM..., M. BK... C..., Mme BQ... AD... épouse X..., M. U... T..., Mme AU... Y..., M. N... AO..., Mme AY... K..., M. M... AV..., Mme BE... BV..., M. AP... I..., Mme AW... AM... épouse AL..., M. BD... BI..., M. AJ... BN..., Mme AT... G... épouse H..., M. BK... BP..., Mme Q... Z..., M. BS... BC..., Mme AF... AK... épouse BR..., M. BF... O..., Mme AG... AH... épouse AS... et M. J... BJ... ont demandé au tribunal administratif de Montpellier, d'une part, d'annuler les opérations électorales qui se sont déroulées le 28 juin 2020 pour l'élection des conseillers municipaux et communautaires dans la commune de Mèze (Hérault) et, d'autre part, de déclarer inéligible M. P... AA.... Par un jugement n° 2002615 du 23 février 2021, le tribunal administratif a annulé ces opérations électorales et rejeté le surplus des conclusions de la protestation.

Par une requête, un mémoire complémentaire et un mémoire en réplique, enregistrés les 23 mars, 16 avril et 9 juin 2021 au secrétariat du contentieux du Conseil d'État, M. AA... demande au Conseil d'État :

1°) d'annuler ce jugement en tant qu'il a annulé les opérations électorales du 28 juin 2020 ;

2°) de rejeter les conclusions de M. L... et autres ;

3°) de mettre à la charge de M. L... et autres la somme de 5 000 euros au titre de l'article L. 761-1 du code de justice administrative.

Vu les autres pièces du dossier ;

Vu :

- le code électoral ;

- le code de justice administrative ;

Après avoir entendu en séance publique :

- le rapport de Mme Dorothée Pradines, maître des requêtes,

- les conclusions de M. Frédéric Dieu, rapporteur public ;

La parole ayant été donnée, après les conclusions, à la SCP Spinosi, avocat de M. AA... ;

Considérant ce qui suit :

1. À l'issue des opérations électorales qui se sont déroulées le 28 juin 2020 pour le renouvellement des conseillers municipaux et communautaires dans la commune de Mèze (Hérault), les trente-trois sièges de conseillers municipaux et les cinq sièges de conseillers communautaires ont été pourvus. Vingt-cinq sièges de conseillers municipaux et quatre sièges de conseillers communautaires ont été attribués à des candidats de la liste " Ensemble vers 2026 " conduite par M. P... AA..., qui a obtenu 48,12 % des suffrages exprimés. Huit sièges de conseillers municipaux et un siège de conseiller communautaire ont été attribués à des candidats de la liste " Agir pour Mèze autour de Thierry L... " conduite par M. AR... L..., qui a obtenu 46,35 % des suffrages exprimés. M. AA... relève appel du jugement du 23 février 2021 du tribunal administratif de Montpellier en tant qu'il a annulé ces opérations électorales.

2. Aux termes de l'article L. 48-2 du code électoral : " Il est interdit à tout candidat de porter à la connaissance du public un élément nouveau de polémique électorale à un moment tel que ses adversaires n'aient pas la possibilité d'y répondre utilement avant la fin de la campagne électorale ".

3. Il résulte de l'instruction qu'un tract émanant de la liste " Ensemble vers 2026 " conduite par M. AA... a été largement diffusé dans les boîtes aux lettres des habitants de la commune le jeudi 25 et le vendredi 26 juin 2020. Ce tract, en premier lieu, accusait M. AX..., ancien directeur des services de la commune, d'être responsable de l'urbanisation de terres agricoles et naturelles ayant défiguré le littoral, en posant la question " C'est qui les rois du béton ' ". En deuxième lieu, le tract présentait M. L... comme " l' instrument " du Parti socialiste départemental et comme un candidat " aux ordres " de ce parti, alors que sa liste se présentait sans étiquette. En troisième lieu, sous l'intitulé " le scandale des masques de protection ", le tract accusait Mme Imbert, conseillère départementale et candidate sur la liste de M. L..., d'avoir " détourné " à de pures fins de propagande électorale les masques commandés par la commune auprès du département et indiquait, sans plus de précision, que " le dossier est entre les mains de la justice ".

4. Il résulte de l'instruction que le soutien apporté par la présidente du conseil régional d'Occitanie et le président du conseil départemental de l'Hérault à la liste de M. L... était déjà présent dans le débat électoral. Les éléments relatifs à ces questions contenus dans le tract diffusé les 25 et 26 juin ne constituaient donc pas des éléments nouveaux de polémique électorale et ne peuvent par ailleurs être regardés comme excédant les limites de la polémique électorale, contrairement à ce qu'a jugé le tribunal administratif de Nîmes. En revanche, en premier lieu, si la question de la distribution des masques aux habitants de la commune de Mèze par Mme Imbert avait déjà donné lieu à des articles parus dans la presse locale, relayant notamment l'accusation d'instrumentalisation émise à son encontre par M. AA..., il ne résulte pas de l'instruction que la plainte déposée par M. AA... le 23 juin 2020 auprès du procureur de la République aurait été rendue publique préalablement à la distribution du tract litigieux. Celui-ci contenait ainsi des éléments nouveaux de polémique électorale relatifs à la distribution des masques par Mme Imbert, formulés en des termes imprécis visant à mettre en doute la probité de cette candidate qui figurait en deuxième position sur la liste de M. L.... M. L..., s'il a publié une vidéo sur la page " Facebook " de la liste qu'il conduisait, n'a pu répondre utilement à ces éléments nouveaux avant la fin de la campagne électorale. En second lieu, si la question de la limitation de l'urbanisation et la protection des espaces naturels et agricoles avait constitué un thème de polémique électorale avant la diffusion de ce tract, celui-ci tend pour la première fois à discréditer volontairement l'un des candidats de la liste menée par M. L... et, à travers ce candidat et eu égard à la position qui était la sienne dans cette liste, l'ensemble de celle-ci, sous le titre " C'est qui les rois du béton ' ". Il contient ainsi, à ce titre également, des éléments nouveaux de polémique électorale auxquels M. L... n'a pu utilement répondre avant la fin de la campagne électorale. Dans ces conditions, et compte tenu du faible écart des voix séparant les listes en présence, la diffusion de ce tract a été de nature à altérer la sincérité du scrutin.

5. Il résulte de tout ce qui précède que M. AA... n'est pas fondé à se plaindre de ce que, par le jugement attaqué, le tribunal administratif de Montpellier a annulé les opérations électorales qui se sont déroulées le 28 juin 2020 dans la commune de Mèze.

6. Aucun candidat n'ayant été proclamé élu à l'issue du premier tour, l'annulation des opérations électorales du second tour de scrutin doit, par voie de conséquence, entraîner l'annulation d'office des opérations électorales du premier tour de scrutin qui se sont déroulées le 15 mars 2020, alors même que les protestataires n'ont pas présenté de conclusions expresses en ce sens et que les premiers juges ont omis d'y procéder. Par suite, le jugement doit être réformé sur ce point.

7. Il n'y a pas lieu, dans les circonstances de l'espèce, de faire droit aux conclusions présentées par M. L... et autres au titre de l'article L. 761-1 du code de justice administrative. Ces mêmes dispositions font obstacle à ce qu'une somme soit mise à la charge de M. L... et autres, qui ne sont pas la partie perdante.

D E C I D E :

--------------

Article 1er : La requête de M. AA... est rejetée.

Article 2 : Les opérations électorales qui ont se sont déroulées le 15 mars 2020 dans la commune de Mèze (Hérault) sont annulées. Le jugement du 23 février 2021 du tribunal administratif de Montpellier est réformé en tant qu'il n'a pas annulé ces opérations électorales.

Article 3 : Les conclusions présentées par M. L... et autres au titre des dispositions de l'article L. 761-1 du code de justice administrative sont rejetées

Article 4 : La présente décision sera notifiée à M. P... AA..., à M. AR... L..., premier défendeur dénommé, et au ministre de l'intérieur.


Synthèse
Formation : 4ème chambre
Numéro d'arrêt : 450996
Date de la décision : 13/10/2021
Type d'affaire : Administrative
Type de recours : Plein contentieux

Publications
Proposition de citation : CE, 13 oct. 2021, n° 450996
Inédit au recueil Lebon

Composition du Tribunal
Rapporteur ?: Mme Dorothée Pradines
Rapporteur public ?: M. Frédéric Dieu
Avocat(s) : SCP SPINOSI

Origine de la décision
Date de l'import : 19/10/2021
Fonds documentaire ?: Legifrance
Identifiant ECLI : ECLI:FR:CE:2021:450996.20211013
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