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07/10/2021 | FRANCE | N°434276

France | France, Conseil d'État, 9ème chambre, 07 octobre 2021, 434276


Vu la procédure suivante :

La société Sokoa a demandé au tribunal administratif de Pau de prononcer la réduction de la taxe professionnelle à laquelle elle a été assujettie au titre de l'année 2009 et de la cotisation foncière des entreprises à laquelle elle a été assujettie au titre de l'année 2010. Par un jugement no 1500506 du 15 décembre 2016, le tribunal administratif, après avoir constaté qu'il n'y avait plus lieu à statuer sur les conclusions de la société à concurrence du dégrèvement auquel l'administration fiscale avait procédé en cours d'instance, l'a

partiellement déchargée des impositions en litige, puis rejeté le surplus des ...

Vu la procédure suivante :

La société Sokoa a demandé au tribunal administratif de Pau de prononcer la réduction de la taxe professionnelle à laquelle elle a été assujettie au titre de l'année 2009 et de la cotisation foncière des entreprises à laquelle elle a été assujettie au titre de l'année 2010. Par un jugement no 1500506 du 15 décembre 2016, le tribunal administratif, après avoir constaté qu'il n'y avait plus lieu à statuer sur les conclusions de la société à concurrence du dégrèvement auquel l'administration fiscale avait procédé en cours d'instance, l'a partiellement déchargée des impositions en litige, puis rejeté le surplus des conclusions de sa demande.

Par un arrêt n° 17BX00461 du 5 juillet 2019, la cour administrative d'appel de Bordeaux a rejeté l'appel formé par la société Sokoa contre ce jugement.

Par un pourvoi sommaire, un mémoire complémentaire et un mémoire en réplique, enregistrés les 5 septembre et 4 décembre 2019 et 16 octobre 2020 au secrétariat du contentieux du Conseil d'Etat, la société Sokoa demande au Conseil d'Etat :

1°) d'annuler cet arrêt ;

2°) réglant l'affaire au fond, de faire droit à son appel ;

3°) de mettre à la charge de l'Etat la somme de 5 000 euros au titre de l'article L. 761-1 du code de justice administrative.

Vu les autres pièces du dossier ;

Vu :

- le code général des impôts et le livre des procédures fiscales ;

- le code de justice administrative ;

Après avoir entendu en séance publique :

- le rapport de M. Lionel Ferreira, maître des requêtes en service extraordinaire,

- les conclusions de Mme Emilie Bokdam-Tognetti, rapporteure publique ;

La parole ayant été donnée, après les conclusions, à la SCP Piwnica, Molinié, avocat de la société Sokoa ;

Considérant ce qui suit :

1. Il ressort des pièces du dossier soumis aux juges du fond que la société Sokoa, qui est spécialisée dans la fabrication de fauteuils de bureau, est locataire des bâtiments au titre d'un contrat de crédit-bail conclu avec les sociétés Auxicomi et Slibail, propriétaires. A l'issue d'une vérification de sa comptabilité, l'administration fiscale a réévalué ses bases d'imposition à la taxe professionnelle au titre de l'année 2009 et à la cotisation foncière des entreprises au titre de l'année 2010, en estimant qu'elles devaient être déterminées, en application de la méthode comptable prévue par l'article 1499 du code général des impôts, à partir du prix de revient d'origine du bien pour le crédit bailleur, tel que mentionné au contrat de bail. La société Sokoa se pourvoit en cassation contre l'arrêt du 5 juillet 2019 par lequel la cour administrative d'appel de Bordeaux a rejeté l'appel qu'elle avait formé contre le jugement du 15 décembre 2016 du tribunal administratif de Pau en tant qu'il n'a que partiellement fait droit à sa demande en décharge.

2. Aux termes de l'article 1467 du code général des impôts, dans sa rédaction applicable aux impositions en litige au titre de l'année 2010 : " La cotisation foncière des entreprises a pour base la valeur locative des biens passibles d'une taxe foncière situés en France, à l'exclusion des biens exonérés de taxe foncière sur les propriétés bâties en vertu des 11° et 12° de l'article 1382, dont le redevable a disposé pour les besoins de son activité professionnelle pendant la période de référence définie aux articles 1467 A et 1478, à l'exception de ceux qui ont été détruits ou cédés au cours de la même période. (...) La valeur locative des biens passibles d'une taxe foncière est calculée suivant les règles fixées pour l'établissement de cette taxe (...) ". Aux termes de l'article 1499 du même code : " La valeur locative des immobilisations industrielles passibles de la taxe foncière sur les propriétés bâties est déterminée en appliquant au prix de revient de leurs différents éléments, revalorisé à l'aide des coefficients qui avaient été prévus pour la révision des bilans, des taux d'intérêt fixés par décret en Conseil d'Etat ". Aux termes de l'article 324 AE de l'annexe III à ce même code : " Le prix de revient visé à l'article 1499 du code général des impôts s'entend de la valeur d'origine pour laquelle les immobilisations doivent être inscrites au bilan en conformité de l'article 38 quinquies de la présente annexe ". Aux termes de l'article 38 quinquies de la même annexe : " 1. Les immobilisations sont inscrites au bilan pour leur valeur d'origine. / Cette valeur d'origine s'entend : (...) / Pour les biens acquis en échange d'un ou plusieurs biens, le prix d'achat s'entend de la valeur vénale ". L'article 324 AF de la même annexe dispose que : " Lorsqu'il ne résulte pas des énonciations du bilan, le prix de revient est déterminé, en tant que de besoin, à partir de tous documents comptables ou autres pièces justificatives et à défaut par voie d'évaluation sous réserve du droit de contrôle de l'administration ". Il résulte de l'ensemble de ces dispositions que, pour établir les bases d'imposition à la cotisation foncière des entreprises comme à la taxe professionnelle, d'un bien relevant de la méthode comptable prévue par l'article 1499 du code général des impôts, le prix de revient d'un tel bien, acquis en échange d'un ou plusieurs biens, est égal à sa valeur vénale, y compris lorsque ce bien faisait l'objet, avant même l'échange, d'un contrat de crédit-bail.

3. Il ressort des pièces du dossier soumis aux juges du fond que par acte du 30 mai 2002, les sociétés Auxicomi et Slibail, avec lesquelles la société Sokoa avait conclu des contrats de crédit-bail, avaient procédé à une cession partielle de leurs propriétés respectives par voie d'échange. Pour juger que l'administration n'avait pas à se fonder sur la valeur d'échange, fixée à 578 282,15 euros, la cour a relevé qu'il n'était pas contesté que la société Sokoa n'avait pas acquis les biens en litige par voie d'échange mais par crédit-bail et, en a déduit que la valeur d'acquisition à prendre en compte était celle stipulée dans les contrats de crédit-bail. En statuant ainsi, alors qu'au cours des années d'impositions en litige, la société Sokoa était locataire au titre des contrats de crédit-bail des biens en litige et que ces derniers avaient fait l'objet d'un échange entre les deux sociétés propriétaires de sorte qu'en application des dispositions citées au point 2, le prix d'achat s'entendait de la valeur vénale, la cour a dénaturé les pièces du dossier et commis une erreur de droit. Par suite, et sans qu'il soit besoin de se prononcer sur l'autre moyen du pourvoi, la société Sokoa est fondée à demander l'annulation de l'arrêt qu'elle attaque.

4. Il y a lieu, dans les circonstances de l'espèce, de mettre à la charge de l'Etat une somme de 3 000 euros au titre de l'article L. 761-1 du code de justice administrative.

D E C I D E :

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Article 1er : L'arrêt de la cour administrative d'appel de Bordeaux du 5 juillet 2019 est annulé.

Article 2 : L'affaire est renvoyée à la cour administrative d'appel de Bordeaux.

Article 3 : L'Etat versera à la société Sokoa la somme de 3 000 euros au titre de l'article L. 761-1 du code de justice administrative.

Article 4 : La présente décision sera notifiée à la société Sokoa et au ministre de l'économie, des finances et de la relance.


Synthèse
Formation : 9ème chambre
Numéro d'arrêt : 434276
Date de la décision : 07/10/2021
Type d'affaire : Administrative
Type de recours : Plein contentieux

Publications
Proposition de citation : CE, 07 oct. 2021, n° 434276
Inédit au recueil Lebon

Composition du Tribunal
Rapporteur ?: M. Lionel Ferreira
Rapporteur public ?: Mme Emilie Bokdam-Tognetti
Avocat(s) : SCP PIWNICA, MOLINIE

Origine de la décision
Date de l'import : 12/10/2021
Fonds documentaire ?: Legifrance
Identifiant ECLI : ECLI:FR:CE:2021:434276.20211007
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