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04/10/2021 | FRANCE | N°446953

France | France, Conseil d'État, 6ème - 5ème chambres réunies, 04 octobre 2021, 446953


Vu la procédure suivante :

Mme K... L... a demandé au tribunal administratif de Nice, d'une part, d'ordonner une enquête portant sur les listes électorales de la commune de Saint-Paul-de-Vence (Alpes-Maritimes), d'autre part, d'annuler les opérations électorales qui se sont déroulées les 15 mars et 28 juin 2020 pour l'élection des conseillers municipaux et communautaires de cette commune, enfin, d'annuler l'élection de Mme P... O... et de la déclarer inéligible.

Par un jugement n° 2002517 du 28 octobre 2020, le tribunal administratif de Nice a annulé les opération

s électorales des 15 mars et 28 juin 2020 et rejeté le surplus des conclus...

Vu la procédure suivante :

Mme K... L... a demandé au tribunal administratif de Nice, d'une part, d'ordonner une enquête portant sur les listes électorales de la commune de Saint-Paul-de-Vence (Alpes-Maritimes), d'autre part, d'annuler les opérations électorales qui se sont déroulées les 15 mars et 28 juin 2020 pour l'élection des conseillers municipaux et communautaires de cette commune, enfin, d'annuler l'élection de Mme P... O... et de la déclarer inéligible.

Par un jugement n° 2002517 du 28 octobre 2020, le tribunal administratif de Nice a annulé les opérations électorales des 15 mars et 28 juin 2020 et rejeté le surplus des conclusions de la protestation.

Par une requête et un mémoire en réplique, enregistrés le 27 novembre 2020 et le 2 mars 2021 au secrétariat du contentieux du Conseil d'Etat, M. J..., Mme T..., Mme O..., Mme H..., Mme B..., M. A..., Mme E..., M. S..., M. R..., Mme C..., M. M..., M. U..., Mme F..., M. Q..., M. G..., Mme N..., Mme D... et M. I... demandent au Conseil d'Etat :

1°) d'annuler ce jugement en tant qu'il annule les opérations électorales des 15 mars et 28 juin 2020 ;

2°) de rejeter la protestation de Mme L... et de valider les opérations électorales des 15 mars et 28 juin 2020 ;

3°) de mettre à la charge de Mme L... la somme de 6 000 euros au titre de l'article L. 761-1 du code de justice administrative.

Vu les autres pièces du dossier ;

Vu :

- le code électoral ;

- l'ordonnance n° 2020-306 du 25 mars 2020 ;

- le code de justice administrative.

Après avoir entendu en séance publique :

- le rapport de Mme Catherine Moreau, conseillère d'Etat en service extraordinaire,

- les conclusions de M. Stéphane Hoynck, rapporteur public ;

La parole ayant été donnée, après les conclusions, à la SCP Lesourd, avocat de M. J... et autres et à la SCP Marlange, de la Burgade, avocat de Mme L... ;

Vu la note en délibéré, enregistrée le 17 septembre 2021, présentée par Mme L....

Vu la note en délibéré, enregistrée le 22 septembre 2021, présentée par M. J... et autres.

Considérant ce qui suit :

1. A l'issue des opérations électorales qui se sont déroulées le 28 juin 2020 pour le second tour des élections municipales et communautaires de la commune de Saint-Paul-de-Vence (Alpes-Maritimes), la liste " CAP pour Saint-Paul-de-Vence " conduite par M. V... J... a obtenu 780 voix alors que la liste " Saint-Paul à cœur " conduite par Mme K... L... en a obtenu 772. M. J... relève appel du jugement du 28 octobre 2020 par lequel le tribunal administratif de Nice a annulé ces opérations électorales à la demande de Mme L... au motif que dix émargements ne pouvaient être regardés comme attestant le vote des électeurs en cause dans les conditions fixées par les dispositions des articles L. 62-1 et L. 64 du code électoral.

2. Aux termes du troisième alinéa de l'article L. 62-1 du code électoral : " Le vote de chaque électeur est constaté par sa signature apposée à l'encre en face de son nom sur la liste d'émargement " et aux termes du second alinéa de l'article L. 64 du même code : " Lorsqu'un électeur se trouve dans l'impossibilité de signer, l'émargement prévu par le troisième alinéa de l'article L. 62-1 est apposé par un électeur de son choix qui fait suivre sa signature de la mention suivante : l'électeur ne peut signer lui-même ". Il résulte de ces dispositions, destinées à assurer la sincérité des opérations électorales, que seule la signature personnelle, à l'encre, d'un électeur est de nature à apporter la preuve de sa participation au scrutin, sauf cas d'impossibilité dûment reportée sur la liste d'émargement.

3. Il résulte de l'instruction que, contrairement à ce qu'a jugé le tribunal administratif, il n'existe pas de différence significative d'un tour de scrutin à l'autre entre les signatures de l'électrice inscrite sous le n° 20 dans le bureau de vote n° 1. Si les signatures des électrices inscrites sous le n° 12 dans le bureau de vote n° 1, sous le n° 700 dans le bureau de vote n° 2 et sous le n° 718 dans le bureau de vote n° 3 présentent des différences, celles-ci s'expliquent par l'utilisation successive d'un nom d'épouse et d'un nom de jeune fille et sont justifiées par les attestations et les documents d'identité produits. Les différences significatives que présentent entre les deux tours les signatures des électeurs ayant voté sous le n° 821 dans le bureau de vote n° 2 et sous les nos 389 et 545 dans le bureau de vote n° 3 s'expliquent quant à elles par l'utilisation successive d'un paraphe et de la signature complète et pour l'électrice ayant voté sous le n° 672 dans le bureau de vote n° 3, par l'utilisation de deux signatures et sont également justifiées par les attestations et documents produits. Par suite, il y a lieu de regarder les huit émargements en cause comme attestant le vote des électeurs concernés dans les conditions fixées par les dispositions des articles L. 62-1 et L. 64 du code électoral.

4. En revanche, c'est à bon droit que le tribunal administratif a regardé comme irréguliers les émargements de l'électeur ayant voté sous le n° 587 dans le bureau de vote n° 3, la constatation d'un vote par l'apposition d'une croix sur la liste d'émargement ne pouvant être regardée comme garantissant l'authenticité de ce vote, sans que la production a posteriori d'une attestation établie par l'électeur destinée à démontrer sa participation effective au scrutin ait une influence à cet égard. Le tribunal administratif a également pu, à bon droit, regarder comme irrégulier le suffrage de l'électeur ayant voté sous le n° 958 dans le bureau de vote n° 2, compte tenu des différences significatives existant entre les signatures d'un tour de scrutin à l'autre qui ne sont justifiées par aucun document d'identité produit à l'appui d'une attestation établie par l'intéressé.

5. Il résulte de ce qui précède que seuls deux émargements, parmi les dix retenus par le tribunal, ne peuvent être regardés comme attestant du vote des électeurs concernés dans les conditions fixées par les dispositions des articles L. 62-1 et L. 64 du code électoral. Dès lors, ces deux suffrages irrégulièrement exprimés doivent être retranchés du nombre de suffrages exprimés ainsi que du nombre de voix obtenues par la liste " CAP pour Saint-Paul-de-Vence " conduite par M. J... qui est arrivée en tête. M. J... est dès lors fondé à soutenir que, compte tenu de l'écart de six voix séparant les deux listes présentes au second tour de scrutin, donnant à sa liste la majorité des suffrages exprimés, c'est à tort que, par le jugement qu'il attaque, le tribunal administratif de Nice a annulé les opérations électorales qui se sont déroulées dans la commune de Saint-Paul-de-Vence le 28 juin 2020, au motif que sa liste n'aurait pas obtenu cette majorité eu égard au nombre de dix suffrages irrégulièrement émis.

6. Il appartient au Conseil d'Etat, saisi de l'ensemble du litige par l'effet dévolutif de l'appel, d'examiner les autres griefs soulevés par Mme L... à l'appui de sa protestation électorale.

Sur la régularité des autres suffrages exprimés :

7. Il résulte de de l'examen des listes d'émargement que les signatures des électeurs ayant voté sous les nos 462 et 859 dans bureau de vote n° 1, sous les nos 401 et 912 dans le bureau de vote n° 2 et sous les nos 50, 78, 134, 283, 362, 748, 956 et 989 dans le bureau de vote n° 3 ne présentent pas de différences significatives d'un tour de scrutin à l'autre. Si les signatures des électrices ayant voté sous les nos 267 et 365 dans le bureau de vote n° 3 présentent de telles différences, celles-ci s'expliquent par l'utilisation successive d'un nom d'épouse et d'un nom de jeune fille et sont justifiées par les attestations et les documents d'identité produits. De même, la différence significative que présentent les signatures de l'électeur ayant voté sous le n° 313 dans le bureau de vote n° 3 s'explique par l'utilisation successive de sa main droite et de sa main gauche, en raison d'une fracture au bras droit qui l'a empêché de signer avec sa main gauche au second tour et est justifiée par l'attestation et le document d'identité produits. Enfin, si Mme L... soutient que l'apposition d'une croix au premier tour du scrutin par l'électeur ayant voté sous le n° 64 dans le bureau de vote n° 3 rend son vote irrégulier, ce grief est inopérant à l'appui d'une contestation des opérations de vote du second tour.

8. En revanche, les signatures de l'électeur ayant voté sous le n° 226 dans le bureau de vote n° 3 présentent une différence significative entre les deux tours de scrutin, sans que cette différence soit justifiée par une mention portée sur la liste d'émargement et alors qu'aucune attestation de cet électeur accompagnée d'un document d'identité n'a pas été produite pour justifier de l'authenticité des signatures apposées sur la liste d'émargement. Ce suffrage irrégulièrement exprimé doit être retranché du nombre de suffrages exprimés ainsi que du nombre de voix obtenues par la liste " CAP pour Saint-Paul-de-Vence " conduite par M. J... qui est arrivée en tête. Par suite, compte tenu de ce qui a été dit au point 5, l'écart de voix entre les deux listes à l'issue du second tour des élections s'établit à cinq voix.

Sur les griefs portant sur le déroulement de la campagne électorale :

En ce qui concerne le grief tiré des promesses et libéralités ayant influencé le vote des électeurs :

9. Il ne résulte pas de l'instruction que l'arrêté du 4 juin 2020 par lequel le maire de la commune a réservé des places de stationnement pour des bars ou des restaurants, afin de leur permettre d'occuper gratuitement une partie de l'espace public et de respecter ainsi le protocole sanitaire qui leur était imposé dans le cadre de la lutte contre l'épidémie de covid-19, aurait été mis en œuvre de manière discriminatoire ni aurait revêtu la nature de dons de nature à altérer la sincérité du scrutin. Ni la distribution de bouquets de muguet aux personnes âgées le 1er mai, alors que la date du second tour de scrutin, jusqu'alors incertaine compte tenu de la situation sanitaire qui prévalait, n'a été fixée que le 27 mai 2020, ni la délivrance d'autorisations d'urbanisme entre les deux tours des élections, dans une proportion dont Mme L... soutient qu'elle aurait été supérieure à ce qui est habituellement le cas en mettant en avant les nombreux affichages sur les panneaux réservés à cet effet, alors qu'en raison de la suspension des délais d'affichage entre le 12 mars et le 24 mai 2020 par l'article 12 bis de l'ordonnance du 25 mars 2020 relative à la prorogation des délais échus pendant la période d'urgence sanitaire et à l'adaptation des procédures pendant cette même période, les autorisation délivrées entre les mois de février et juin 2020 ont toutes été affichées après le 24 mai, ne peuvent être regardées comme des pressions exercées sur les électeurs de nature à avoir altéré la sincérité du scrutin.

En ce qui concerne le grief tiré de la méconnaissance de l'article L. 52-8 du code électoral :

10. Aux termes de l'article L. 52-8 : " Les personnes morales, à l'exception des partis ou groupements politiques, ne peuvent participer au financement de la campagne électorale d'un candidat, ni en lui consentant des dons sous quelque forme que ce soit, ni en lui fournissant des biens, services ou autres avantages directs ou indirects à des prix inférieurs à ceux qui sont habituellement pratiqués ".

11. Si Mme L... reproche à M. J... d'avoir utilisé l'auditorium communal pour y organiser une réunion politique ou la collection d'œuvres d'art de la commune pour le tournage de vidéos figurant sur son site internet, il ne résulte pas de l'instruction que les autres candidats n'auraient pas également pu accéder à ces biens communaux.

En ce qui concerne le grief tiré de l'inégalité de traitement entre les candidats :

12. Si Mme L... soutient que la démission entre les deux tours des élections, pour des raisons de santé, de M. W..., maire de la commune depuis 2014, a, en permettant à M. J..., qui était premier adjoint et dont la liste était arrivée en tête au premier tour de scrutin, de devenir maire par intérim avant le second tour, été de nature à rompre l'égalité entre les candidats, ces seules allégations n'établissent pas que de telles circonstances auraient eu une influence sur les résultats du scrutin.

En ce qui concerne le grief tiré de la méconnaissance de l'article L. 52-1 du code électoral :

13. Aux termes du second alinéa de l'article L. 52-1 du code électoral : " A compter du premier jour du sixième mois précédant le mois au cours duquel il doit être procédé à des élections générales, aucune campagne de promotion publicitaire des réalisations ou de la gestion d'une collectivité ne peut être organisée sur le territoire des collectivités intéressées par le scrutin. Sans préjudice des dispositions du présent chapitre, cette interdiction ne s'applique pas à la présentation, par un candidat ou pour son compte, dans le cadre de l'organisation de sa campagne, du bilan de la gestion des mandats qu'il détient ou qu'il a détenus. Les dépenses afférentes sont soumises aux dispositions relatives au financement et au plafonnement des dépenses électorales contenues au chapitre V bis du présent titre. ".

14. Il résulte de l'instruction que le site internet officiel de la campagne de M. J... a diffusé des vidéos présentant des événements culturels organisés par la commune et promouvant un certain nombre de réalisations de l'équipe municipale sortante portant notamment sur l'approvisionnement de la cantine municipale en produits biologiques ou la réalisation de l'éclairage public avec des leds. De telles diffusions, réalisées dans le cadre de la campagne électorale de la liste candidate, ne peuvent être regardées comme présentant le caractère d'une campagne de promotion publicitaire prohibée par l'article L. 52-1 du code électoral.

En ce qui concerne la méconnaissance de l'article L. 49 du code électoral :

15. aux termes de l'article L. 49 du code électoral : " A partir de la veille du scrutin à zéro heure, il est interdit de distribuer ou faire distribuer des bulletins, circulaires et autres documents. A partir de la veille à zéro heure, il est également interdit de diffuser ou de faire diffuser par tout moyen de communication au public par voie électronique tout message ayant le caractère de propagande électorale ". Il résulte de ces dispositions que, pour le second tour des élections municipales et communautaires du 28 juin 2020, la distribution ou la diffusion de documents ou de messages de propagande électorale était interdite à compter du samedi 27 juin 2020 zéro heure.

16. La parution le 28 juin, dans le journal Nice-Matin, dans une rubrique intitulée " états d'âme ", d'un article consacré aux anciens maires de trois communes parmi lesquelles la commune de Saint-Paul-de-Vence et comportant une interview de M. W..., dans laquelle il se bornait à faire part de son expérience et de ses sentiments sur l'exercice de la fonction de maire, ne peut être regardée comme constituant un acte prohibé de diffusion de propagande électorale.

En ce qui concerne les propos excessifs et le climat de violence et d'intimidation :

17. D'une part, si Mme L... fait état de propos diffusés sur le site internet de la liste conduite par M. J... et sur un tract dénonçant l'opportunisme des listes arrivées en deuxième et troisième positions lors du premier tour de scrutin qui ont décidé de fusionner pour le second tour, alors qu'elles s'étaient mutuellement dénigrées durant la campagne précédant le premier tour, de tels propos n'ont pas dépassé par leur contenu ou les termes employés les limités de la polémique électorale.

18. D'autre part, il résulte de l'instruction que les propos déplacés dont Mme L... se plaint d'avoir fait l'objet de la part d'un proche de M. J... portaient sur un différend qui les opposait en raison de leurs fonctions respectives dans une autre commune.

19. Enfin, si des propos injurieux à l'égard de Mme L... diffusés sur le compte Facebook d'une autre personne dépassent les limites de la polémique électorale, il ne résulte pas de l'instruction que les messages postés par cette personne sur son compte Facebook, pour regrettables qu'ils soient, aient eu une influence sur l'issue du scrutin.

Sur les opérations électorales :

En ce qui concerne la mise à jour des listes électorales :

20. Aux termes du I de l'article L. 11 du code électoral : " I.- Sont inscrits sur la liste électorale de la commune, sur leur demande : / 1° Tous les électeurs qui ont leur domicile réel dans la commune ou y habitent depuis six mois au moins et leurs enfants de moins de 26 ans ; / 2° Ceux qui figurent pour la deuxième fois sans interruption, l'année de la demande d'inscription, au rôle d'une des contributions directes communales et, s'ils ne résident pas dans la commune, ont déclaré vouloir y exercer leurs droits électoraux. Tout électeur ou toute électrice peut être inscrit sur la même liste que son conjoint au titre de la présente disposition (...) ". Aux termes de l'article L. 228 du même code : " Sont éligibles au conseil municipal tous les électeurs de la commune et les citoyens inscrits au rôle des contributions directes ou justifiant qu'ils devaient y être inscrits au 1er janvier de l'année de l'élection ".

21. Il n'appartient pas au juge de l'élection, en l'absence de manœuvre de nature à fausser les résultats du scrutin, d'apprécier si un électeur inscrit sur les listes électorales remplit effectivement les conditions exigées par l'article L. 11 du code électoral.

22. D'une part, si Mme L... soutient que plusieurs électeurs ne remplissaient pas les conditions pour rester inscrits sur les listes électorales de la commune, ses allégations selon lesquelles la plupart de ces personnes sont liées à des membres de la liste conduite par M. J... ne suffisent pas pour révéler l'existence de manœuvres dans l'établissement de la liste électorale ayant été de nature à altérer la sincérité du scrutin.

23. D'autre part, il résulte de l'instruction que Mme O..., colistière de M. J..., a produit des documents indiquant qu'elle résidait dans la commune au 1er janvier 2020. Mme L... n'est donc pas fondée à contester son éligibilité sur le fondement de l'article L. 228 du code électoral.

Sur les procurations :

24. Aux termes de l'article R. 76 du code électoral : " A la réception d'une procuration dont la validité n'est pas limitée à un seul scrutin, le maire inscrit sur la liste électorale, à l'encre rouge, à côté du nom du mandant, celui du mandataire. Mention de la procuration est également portée à l'encre rouge à côté du nom du mandataire. / Les indications portées à l'encre rouge sur la liste électorale sont reproduites sur la liste d'émargement (...) ". Aux termes de l'article R. 76-1 du même code : " Au fur et à mesure de la réception des procurations, le maire inscrit sur un registre ouvert à cet effet les noms et prénoms du mandant et du mandataire, le nom et la qualité de l'autorité qui a dressé l'acte de procuration et la date de son établissement ainsi que la durée de validité de la procuration. Le registre est tenu à la disposition de tout électeur, y compris le jour du scrutin. Dans chaque bureau de vote, un extrait du registre comportant les mentions relatives aux électeurs du bureau est tenu à la disposition des électeurs le jour du scrutin. "

25. Mme L... soutient que ces dispositions ont été méconnues au motif que, dans chacun des trois bureaux de vote de la commune, le nombre de procurations figurant sur le registre qui les recense ne correspondait pas au nombre mentionné à la dernière page de ce registre. Toutefois, cette erreur n'est pas à elle seule de nature à conduire à regarder les votes par procuration figurant sur les listes d'émargement comme irréguliers.

En ce qui concerne le déroulement du scrutin :

26. Aux termes de l'article L. 62 du code électoral : " A son entrée dans la salle du scrutin, l'électeur, après avoir fait constater son identité suivant les règles et usages établis ou après avoir fait la preuve de son droit de voter par la production d'une décision du juge du tribunal judiciaire ordonnant son inscription ou d'un arrêt de la Cour de cassation annulant un jugement qui aurait prononcé sa radiation, prend, lui-même, une enveloppe. Sans quitter la salle du scrutin, il doit se rendre isolément dans la partie de la salle aménagée pour le soustraire aux regards pendant qu'il met son bulletin dans l'enveloppe ; il fait ensuite constater au président qu'il n'est porteur que d'une seule enveloppe ; le président le constate sans toucher l'enveloppe, que l'électeur introduit lui-même dans l'urne ".

27. Il résulte de l'instruction, notamment des témoignages produits par Mme L..., que M. W..., qui avait démissionné de son mandat de maire entre les deux tours des élections, s'est présenté dans les trois bureaux de vote dans l'heure précédant la clôture du scrutin et a discuté avec les électeurs alors présents dans ces bureaux. Toutefois, il ne résulte pas de l'instruction, et au regard de la lettre d'observations du préfet des Alpes-Maritimes selon laquelle l'examen des procès-verbaux des bureaux de vote n'a fait ressortir aucune irrégularité, que cette visite de M. W..., qui, au demeurant, n'avait pas pris part à la campagne électorale de M. J..., aurait été de nature à exercer une influence sur les électeurs et à altérer la sincérité du scrutin.

28. Il résulte de tout ce qui précède que Mme L... n'est pas fondée à demander l'annulation des opérations électorales qui sont déroulées le 28 juin 2020 pour l'élection des conseillers municipaux et communautaires de Saint-Paul-de-Vence. Par suite, sa protestation doit être rejetée, ensemble ses conclusions présentées au titre des dispositions de l'article L. 761-1 du code de justice administrative.

29. Il n'y a pas lieu, dans les circonstances de l'espèce, de mettre une somme à la charge de Mme L... au titre des dispositions de l'article L. 761-1 du code de justice administrative

D E C I D E :

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Article 1er : Le jugement du tribunal administratif de Nice du 28 octobre 2020 est annulé.

Article 2 : Les opérations électorales qui se sont déroulées le 28 juin 2020 dans la commune de Saint-Paul-de-Vence pour l'élection des conseillers municipaux et communautaires sont validées.

Article 3 : La protestation de Mme L... et ses conclusions présentées au titre de l'article L. 761-1 du code de justice administrative sont rejetées.

Article 4 : Les conclusions de M. J... présentées au titre de l'article L. 761-1 du code de justice administrative sont rejetées.

Article 5 : La présente décision sera notifiée à M. V... J..., premier dénommé pour l'ensemble des requérants, à Mme K... L... et au ministre de l'intérieur.

Copie en sera adressée au préfet des Alpes-Maritimes.


Synthèse
Formation : 6ème - 5ème chambres réunies
Numéro d'arrêt : 446953
Date de la décision : 04/10/2021
Type d'affaire : Administrative
Type de recours : Plein contentieux

Publications
Proposition de citation : CE, 04 oct. 2021, n° 446953
Inédit au recueil Lebon

Composition du Tribunal
Rapporteur ?: Mme Catherine Moreau
Rapporteur public ?: M. Stéphane Hoynck
Avocat(s) : SCP MARLANGE, DE LA BURGADE ; SCP LESOURD

Origine de la décision
Date de l'import : 26/10/2021
Fonds documentaire ?: Legifrance
Identifiant ECLI : ECLI:FR:CE:2021:446953.20211004
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