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22/07/2021 | FRANCE | N°448066

France | France, Conseil d'État, 4ème - 1ère chambres réunies, 22 juillet 2021, 448066


Vu la procédure suivante :

Mme A... C... a porté plainte contre Mme F... E... devant la chambre disciplinaire de première instance de Champagne-Ardenne de l'ordre des médecins, devenue chambre disciplinaire de première instance du Grand-Est de l'ordre des médecins. Par une décision du 2 octobre 2020, la chambre disciplinaire de première instance a infligé à Mme E... la sanction de l'interdiction d'exercer la médecine pour une durée de trois mois.

Par une ordonnance du 19 novembre 2020, la présidente de la chambre disciplinaire nationale de l'ordre des médecins a re

jeté l'appel formé par Mme E... contre cette décision et décidé que la sa...

Vu la procédure suivante :

Mme A... C... a porté plainte contre Mme F... E... devant la chambre disciplinaire de première instance de Champagne-Ardenne de l'ordre des médecins, devenue chambre disciplinaire de première instance du Grand-Est de l'ordre des médecins. Par une décision du 2 octobre 2020, la chambre disciplinaire de première instance a infligé à Mme E... la sanction de l'interdiction d'exercer la médecine pour une durée de trois mois.

Par une ordonnance du 19 novembre 2020, la présidente de la chambre disciplinaire nationale de l'ordre des médecins a rejeté l'appel formé par Mme E... contre cette décision et décidé que la sanction prendra effet au 1er avril 2021.

Par un pourvoi sommaire et un mémoire complémentaire enregistrés les 22 décembre 2020 et 10 février 2021 au secrétariat du contentieux du Conseil d'Etat, Mme E... demande au Conseil d'Etat :

1°) d'annuler cette ordonnance ;

2°) de mettre à la charge de Mme C... la somme de 3 500 euros au titre de l'article L. 761-1 du code de justice administrative.

Vu les autres pièces du dossier ;

Vu :

- la convention européenne de sauvegarde des droits de l'homme et des libertés fondamentales ;

- le code de la santé publique ;

- le décret n° 2019-1286 du 3 décembre 2019 ;

- le code de justice administrative ;

Après avoir entendu en séance publique :

- le rapport de Mme D... B..., auditrice,

- les conclusions de M. Raphaël Chambon, rapporteur public ;

La parole ayant été donnée, après les conclusions, à Me Le Prado, avocat de Mme E... ;

Considérant ce qui suit :

1. Il ressort des pièces du dossier soumis aux juges du fond que, par une décision du 2 octobre 2020, la chambre disciplinaire de première instance de Champagne-Ardenne de l'ordre des médecins, devenue chambre disciplinaire de première instance du Grand-Est de l'ordre des médecins, a, sur la plainte de Mme C..., infligé à Mme E..., médecin spécialiste qualifiée en médecine générale, la sanction de l'interdiction temporaire d'exercer la profession de médecin pendant trois mois. Par une ordonnance du 19 novembre 2020, contre laquelle Mme E... se pourvoit en cassation, la présidente de la chambre disciplinaire nationale de l'ordre des médecins a rejeté la requête d'appel de Mme E... au motif qu'elle n'était pas accompagnée du nombre de copies requises par l'article R. 4126-11 du code de la santé publique.

2. D'une part, aux termes du premier alinéa de l'article R. 4126-11 du code de la santé publique, dans sa rédaction issue du décret du 3 décembre 2019 portant modification des dispositions relatives à la procédure disciplinaire des ordres des professions médicales et paramédicales : " Les plaintes et requêtes doivent, à peine d'irrecevabilité, être accompagnées de copies, en nombre égal à celui des parties, augmenté de deux ".

3. D'autre part, aux termes de l'article R. 4126-5 du code de la santé publique : " Dans toutes les instances, le président de la chambre disciplinaire de première instance et le président de la chambre disciplinaire nationale peuvent, par ordonnance motivée, sans instruction préalable : / (...) 4° Rejeter les plaintes ou les requêtes manifestement irrecevables, lorsque la juridiction n'est pas tenue d'inviter leur auteur à les régulariser ou qu'elles n'ont pas été régularisées à l'expiration du délai imparti par une demande en ce sens ". Aux termes de l'article R. 4126-15 du même code, dans sa rédaction issue du décret du 3 décembre 2019 : " Lorsque la plainte ou des conclusions sont entachées d'une irrecevabilité susceptible d'être couverte en cours d'instance, la juridiction ne peut les rejeter en relevant d'office cette irrecevabilité qu'après avoir invité leur auteur à les régulariser. Toutefois, la chambre disciplinaire nationale peut rejeter de telles conclusions sans demande de régularisation préalable pour les cas d'irrecevabilité tirés de la méconnaissance d'une obligation mentionnée dans la notification de la décision attaquée. / La demande de régularisation mentionne que, à défaut de régularisation, la plainte ou les conclusions pourront être rejetées comme irrecevables dès l'expiration du délai imparti qui, sauf urgence, ne peut être inférieur à quinze jours. La demande de régularisation tient lieu de l'information prévue à l'article R. 611-7 du code de justice administrative. / S'agissant de l'irrecevabilité prévue au premier alinéa de l'article R. 4126-11, la demande de régularisation peut prendre la forme d'une mise en demeure signée par le président de la formation de jugement, qui mentionne qu'à l'expiration du délai imparti, qui ne peut être inférieur à un mois, cette irrecevabilité n'est plus susceptible d'être couverte en cours d'instance ".

4. Il résulte des dispositions citées aux points 2 et 3 que le président de la chambre disciplinaire nationale peut, par ordonnance, rejeter une requête pour défaut de production du nombre de copies requises par l'article R. 4126-11 du code de la santé publique, sans avoir à en demander la régularisation préalable, lorsque l'obligation de cette formalité a été mentionnée dans la notification de la décision attaquée. Il n'en va toutefois pas ainsi lorsque la notification de la décision attaquée se borne à rappeler les dispositions de l'article R. 4126-11 du code de la santé publique, lesquelles ne permettent pas d'identifier aisément le nombre de copies requises, et n'indique pas le nombre de copies devant être produites en l'espèce.

5. Il ressort des pièces du dossier soumis aux juges du fond que la notification de la décision du 2 octobre 2020 de la chambre disciplinaire de première instance du Grand-Est de l'ordre des médecins se bornait à rappeler les dispositions de l'article R. 4126-11 du code de la santé publique et à mentionner que le conseil départemental de l'ordre est toujours partie à l'instance disciplinaire et qu'ainsi elle n'indiquait pas le nombre de copies devant accompagner, en l'espèce, une requête d'appel, ni davantage, au demeurant, le nombre de parties à ce litige. Dans ces conditions, l'ordonnance par laquelle la présidente de la chambre disciplinaire nationale de l'ordre des médecins a rejeté comme irrecevable la requête d'appel de Mme E... au motif qu'elle n'était pas accompagnée du nombre de copies requises -quatre copies de la requête d'appel ayant, en l'espèce, été produites alors que cinq étaient exigées-, est, faute d'avoir été précédée d'une demande de régularisation préalable de la requête, entachée d'irrégularité.

6. Il résulte de tout ce qui précède, sans qu'il soit besoin de se prononcer sur les autres moyens du pourvoi, que Mme E... est fondée à demander l'annulation de l'ordonnance de la présidente de la chambre disciplinaire nationale de l'ordre des médecins qu'elle attaque. Il n'y a pas lieu, dans les circonstances de l'espèce, de faire droit aux conclusions présentées par Mme E... au titre de l'article L. 761-1 du code de justice administrative.

D E C I D E :

--------------

Article 1er : L'ordonnance du 19 novembre 2020 de la présidente de la chambre disciplinaire nationale de l'ordre des médecins est annulée.

Article 2 : L'affaire est renvoyée à la chambre disciplinaire nationale de l'ordre des médecins.

Article 3 : Les conclusions présentées par Mme E... au titre de l'article L. 761-1 du code de justice administrative sont rejetées.

Article 4 : La présente décision sera notifiée à Mme F... E... et à Mme A... C....

Copie en sera adressée au Conseil national de l'ordre des médecins.


Synthèse
Formation : 4ème - 1ère chambres réunies
Numéro d'arrêt : 448066
Date de la décision : 22/07/2021
Type d'affaire : Administrative
Type de recours : Plein contentieux

Analyses

55-04-01-05 PROFESSIONS, CHARGES ET OFFICES. DISCIPLINE PROFESSIONNELLE. PROCÉDURE DEVANT LES JURIDICTIONS ORDINALES. VOIES DE RECOURS. - APPEL - POSSIBILITÉ DE REJETER LA REQUÊTE PAR ORDONNANCE (CSP, ART. R. 4126-5) SANS DEMANDE DE RÉGULARISATION PRÉALABLE (CSP, ART. R. 4126-15) À DÉFAUT POUR LE REQUÉRANT D'AVOIR PRODUIT DES COPIES EN NOMBRE SUFFISANT (CSP, ART. R. 4126-11) - EXCLUSION - CAS DANS LEQUEL LA NOTIFICATION DE LA DÉCISION ATTAQUÉE SE BORNE À RAPPELER LES DISPOSITIONS APPLICABLES.

55-04-01-05 Il résulte, d'une part, du premier alinéa de l'article R. 4126-11 du code de la santé publique (CSP), dans sa rédaction issue du décret n° 2019-1286 du 3 décembre 2019, d'autre part, des articles R. 4126-5 et R. 4121-15 du même code, ce dernier dans sa rédaction issue du même décret, que le président de la chambre disciplinaire nationale de l'ordre des médecins peut, par ordonnance, rejeter une requête pour défaut de production du nombre de copies requises par l'article R. 4126-11 du CSP, sans avoir à en demander la régularisation préalable, lorsque l'obligation de cette formalité a été mentionnée dans la notification de la décision attaquée.,,,Il n'en va toutefois pas ainsi lorsque la notification de la décision attaquée se borne à rappeler les dispositions de l'article R. 4126-11 du CSP, lesquelles ne permettent pas d'identifier aisément le nombre de copies requises, et n'indique pas le nombre de copies devant être produites en l'espèce.


Publications
Proposition de citation : CE, 22 jui. 2021, n° 448066
Mentionné aux tables du recueil Lebon

Composition du Tribunal
Rapporteur ?: Mme Thalia Breton
Rapporteur public ?: M. Raphaël Chambon
Avocat(s) : LE PRADO ; SCP MATUCHANSKY, POUPOT, VALDELIEVRE

Origine de la décision
Date de l'import : 03/08/2021
Fonds documentaire ?: Legifrance
Identifiant ECLI : ECLI:FR:CE:2021:448066.20210722
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