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12/05/2021 | FRANCE | N°445041

France | France, Conseil d'État, 5ème - 6ème chambres réunies, 12 mai 2021, 445041


Vu la procédure suivante :

Par une requête, enregistrée le 2 octobre 2020 au secrétariat du contentieux du Conseil d'Etat, l'association SOS Praticiens à diplôme hors Union européenne de France, Mme E... D..., Mme F... B..., Mme C... H... et M. G... A... demandent au Conseil d'Etat :

1°) d'annuler pour excès de pouvoir le décret n° 2020-1017 du 7 août 2020 portant application du IV et du V de l'article 83 de la loi n° 2006-1640 du 21 décembre 2006 de financement de la sécurité sociale pour 2007 et relatif à l'exercice des professions de médecin, chirurgien-denti

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Vu la procédure suivante :

Par une requête, enregistrée le 2 octobre 2020 au secrétariat du contentieux du Conseil d'Etat, l'association SOS Praticiens à diplôme hors Union européenne de France, Mme E... D..., Mme F... B..., Mme C... H... et M. G... A... demandent au Conseil d'Etat :

1°) d'annuler pour excès de pouvoir le décret n° 2020-1017 du 7 août 2020 portant application du IV et du V de l'article 83 de la loi n° 2006-1640 du 21 décembre 2006 de financement de la sécurité sociale pour 2007 et relatif à l'exercice des professions de médecin, chirurgien-dentiste, sage-femme et pharmacien par les titulaires de diplômes obtenus hors de l'Union européenne et de l'Espace économique européen ;

2°) de mettre à la charge de l'Etat la somme de 5 000 euros au titre de l'article L. 761-1 du code de justice administrative.

Vu les autres pièces du dossier ;

Vu :

- la Constitution, notamment son article 62 ;

- le code de la santé publique ;

- la loi n° 2006-1640 du 21 décembre 2006 ;

- le décret n° 2020-1017 du 7 août 2020 ;

- la décision n° 2020-890 QPC du 19 mars 2021 du Conseil constitutionnel statuant sur la question prioritaire de constitutionnalité soulevée par l'association SOS Praticiens à diplôme hors Union européenne de France et autres ;

- le code de justice administrative et le décret n° 2020-1406 du 18 novembre 2020 ;

Après avoir entendu en séance publique :

- le rapport de M. Joachim Bendavid, auditeur,

- les conclusions de M. Nicolas Polge, rapporteur public ;

La parole ayant été donnée, après les conclusions, à la SCP Rocheteau, Uzan-Sarano, avocat de l'association SOS Praticiens à diplôme hors Union européenne de France et autres ;

Considérant ce qui suit :

1. L'association SOS Praticiens à diplôme hors Union européenne de France et autres demandent l'annulation pour excès de pouvoir du décret du 7 août 2020 portant application du IV et du V de l'article 83 de la loi du 21 décembre 2006 de financement de la sécurité sociale pour 2007 et relatif à l'exercice des professions de médecin, chirurgien-dentiste, sage-femme et pharmacien par les titulaires de diplômes obtenus hors de l'Union européenne et de l'Espace économique européen. Eu égard aux moyens qu'ils invoquent, les requérants doivent être regardés comme demandant l'annulation de ce décret en tant seulement qu'il réserve l'accès aux professions médicales et pharmaceutiques aux seuls praticiens à diplôme étranger ayant exercé des fonctions de professionnel de santé au sein d'établissements de santé, c'est-à-dire celles qui, au cinquième alinéa de son article 1er, prévoient que le dossier de demande d'autorisation d'exercice ne peut être déposé que par des personnes ayant exercé des fonctions de professionnel de santé dans un établissement de santé public, privé d'intérêt collectif ou privé.

2. Ces dispositions ont été prises sur le fondement de l'article 83 de la loi du 21 décembre 2006 de financement de la sécurité sociale pour 2007, dont le B du IV prévoit un dispositif spécifique d'accès à la profession de médecin dans les termes suivants : " (...) les médecins titulaires d'un diplôme, certificat ou autre titre obtenu dans un Etat non membre de l'Union européenne ou non partie à l'accord sur l'Espace économique européen et permettant l'exercice de la profession dans le pays d'obtention de ce diplôme, certificat ou titre, présents dans un établissement de santé mentionné à l'article L. 6111-1 du code de la santé publique entre le 1er octobre 2018 et le 30 juin 2019 et ayant exercé des fonctions rémunérées, en tant que professionnel de santé, pendant au moins deux ans en équivalent temps plein depuis le 1er janvier 2015 se voient délivrer une attestation permettant un exercice temporaire, sous réserve du dépôt d'un dossier de demande d'autorisation d'exercice avant le 30 juin 2021 (...) " et dont le V prévoit des règles analogues pour l'accès aux professions de chirurgien-dentiste, sage-femme et pharmacien, dans les termes suivants : " Les chirurgiens-dentistes, sages-femmes et pharmaciens titulaires d'un diplôme, certificat ou autre titre obtenu dans un Etat non membre de l'Union européenne ou non partie à l'accord sur l'Espace économique européen et permettant l'exercice de la profession dans le pays d'obtention de ce diplôme, certificat ou titre, présents dans un établissement de santé mentionné à l'article L. 6111-1 du code de la santé publique entre le 1er octobre 2018 et le 30 juin 2019 et ayant exercé des fonctions rémunérées, en tant que professionnel de santé, pendant au moins deux ans en équivalent temps plein depuis le 1er janvier 2015 se voient délivrer une attestation permettant un exercice temporaire, sous réserve du dépôt avant le 30 juin 2021 (...) d'un dossier de demande d'autorisation d'exercice auprès de la commission nationale d'autorisation d'exercice (...) ".

3. Par sa décision n° 2020-890 QPC du 19 mars 2021, le Conseil constitutionnel a déclaré contraires à la Constitution les mots " de santé mentionné à l'article L. 6111-1 du code de la santé publique " figurant au premier alinéa du B du IV et au premier alinéa du V de l'article 83 de la loi du 21 décembre 2006 de financement de la sécurité sociale pour 2007 pour méconnaissance du principe d'égalité devant la loi, au motif que, au regard de la diversité des professions de santé dont l'exercice est requis pour bénéficier du dispositif prévu par la loi, la circonstance que l'une de ces professions soit exercée au sein d'un établissement de santé ou au sein d'un établissement social ou médico-social ne permet pas de rendre compte d'une différence de situation pertinente au regard de l'objet de la loi. Il résulte du point 13 de cette décision du Conseil constitutionnel que la déclaration d'inconstitutionnalité qu'elle prononce a pris effet à la date de sa publication, soit le 19 mars 2021 et qu'elle est applicable à toutes les affaires non jugées définitivement à cette date.

4. Les dispositions du cinquième alinéa de l'article 1er du décret attaqué, selon lesquelles : " Ces fonctions doivent avoir été exercées dans un établissement de santé public, privé d'intérêt collectif ou privé ", ne visent que des fonctions exercées dans des établissements de santé. Prises pour l'application des dispositions qui ont été déclarées contraires à la Constitution par le Conseil constitutionnel, elles sont entachées d'illégalité. Il en résulte, sans qu'il soit besoin de se prononcer sur les autres moyens de leur requête, que l'association SOS Praticiens à diplôme hors Union européenne de France et autres sont fondés à en demander l'annulation pour excès de pouvoir.

5. Il y a lieu, dans les circonstances de l'espèce, de mettre à la charge de l'Etat le versement à l'association SOS Praticiens à diplôme hors Union européenne de France, à Mme D..., à Mme B..., à Mme H... et à M. A... de la somme de 600 euros chacun au titre de l'article L. 761-1 du code de justice administrative.

D E C I D E :

--------------

Article 1er : Les dispositions du cinquième alinéa de l'article 1er du décret du 7 août 2020 portant application du IV et du V de l'article 83 de la loi n° 2006-1640 du 21 décembre 2006 de financement de la sécurité sociale pour 2007 et relatif à l'exercice des professions de médecin, chirurgien-dentiste, sage-femme et pharmacien par les titulaires de diplômes obtenus hors de l'Union européenne et de l'Espace économique européen sont annulées.

Article 2 : L'Etat versera à l'association SOS Praticiens à diplôme hors Union européenne de France, à Mme D..., à Mme B..., à Mme H... et à M. A... la somme de 600 euros chacun au titre de l'article L. 761-1 du code de justice administrative.

Article 3 : La présente décision sera notifiée à Mme E... D..., représentante désignée pour l'ensemble des requérants, au Premier ministre et au ministre des solidarités et de la santé.


Synthèse
Formation : 5ème - 6ème chambres réunies
Numéro d'arrêt : 445041
Date de la décision : 12/05/2021
Type d'affaire : Administrative
Type de recours : Excès de pouvoir

Publications
Proposition de citation : CE, 12 mai. 2021, n° 445041
Inédit au recueil Lebon

Composition du Tribunal
Rapporteur ?: M. Joachim Bendavid
Rapporteur public ?: M. Nicolas Polge
Avocat(s) : SCP ROCHETEAU, UZAN-SARANO

Origine de la décision
Date de l'import : 08/06/2021
Fonds documentaire ?: Legifrance
Identifiant ECLI : ECLI:FR:CE:2021:445041.20210512
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