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05/05/2021 | FRANCE | N°439497

France | France, Conseil d'État, 8ème chambre, 05 mai 2021, 439497


Vu la procédure suivante :

La société anonyme (SA) CM-CIC Lease a demandé au tribunal administratif de Rouen de prononcer la réduction des cotisations de taxe foncière sur les propriétés bâties auxquelles elle a été assujettie au titre des années 2016 et 2017 à raison de locaux situés à Barentin (Seine-Maritime). Par un jugement n° 1803245 du 14 janvier 2020, le magistrat désigné par le président de ce tribunal a prononcé la décharge sollicitée à hauteur des demandes formulées dans la réclamation préalable soit, respectivement, 18 666 euros et 20 069 euros.


Par un pourvoi enregistré le 11 mars 2020 au secrétariat du contentieux du Consei...

Vu la procédure suivante :

La société anonyme (SA) CM-CIC Lease a demandé au tribunal administratif de Rouen de prononcer la réduction des cotisations de taxe foncière sur les propriétés bâties auxquelles elle a été assujettie au titre des années 2016 et 2017 à raison de locaux situés à Barentin (Seine-Maritime). Par un jugement n° 1803245 du 14 janvier 2020, le magistrat désigné par le président de ce tribunal a prononcé la décharge sollicitée à hauteur des demandes formulées dans la réclamation préalable soit, respectivement, 18 666 euros et 20 069 euros.

Par un pourvoi enregistré le 11 mars 2020 au secrétariat du contentieux du Conseil d'État, le ministre de l'action et des comptes publics demande au Conseil d'État d'annuler l'article 1er de ce jugement.

Vu les autres pièces du dossier ;

Vu :

- le code général des impôts et le livre des procédures fiscales ;

- le code de justice administrative et le décret n° 2020-1406 du 14 novembre 2020 ;

Après avoir entendu en séance publique :

- le rapport de M. Charles-Emmanuel Airy, auditeur,

- les conclusions de M. Romain Victor, rapporteur public ;

La parole ayant été donnée, après les conclusions, à la SCP Baraduc, Duhamel, Rameix, avocat de la société CM-CIC Lease ;

Considérant ce qui suit :

1. Il ressort des pièces du dossier soumis aux juges du fond que la société CM-CIC Lease, devenue la société Crédit Mutuel Real Estate Lease, est propriétaire d'un ensemble immobilier sis à Barentin (Seine-Maritime) qu'elle a donné en crédit-bail immobilier à la société immobilière AMM Barentin. A raison de ces locaux, occupés par des commerces de détail et de restauration, elle a été assujettie à la taxe foncière sur les propriétés bâties à hauteur des sommes de 45 889 euros au titre de l'année 2016 et 74 690 euros au titre de l'année 2017. Le ministre de l'action et des comptes publics se pourvoit en cassation contre l'article 1er du jugement du 14 janvier 2020 par lequel le magistrat désigné par le président du tribunal administratif de Rouen a prononcé la réduction de ces impositions à concurrence, respectivement, des sommes de 18 666 euros et 20 069 euros.

2. Aux termes de l'article 1498 du code général des impôts, dans sa rédaction en vigueur pendant les années d'imposition en litige : " La valeur locative de tous les biens autres que les locaux d'habitation ou à usage professionnel visés au I de l'article 1496 et que les établissements industriels visés à l'article 1499 est déterminée au moyen de l'une des méthodes indiquées ci-après : / (...) 2° a. Pour les biens loués à des conditions de prix anormales ou occupés par leur propriétaire, occupés par un tiers à un autre titre que la location, vacants ou concédés à titre gratuit, la valeur locative est déterminée par comparaison. / Les termes de comparaison sont choisis dans la commune. Ils peuvent être choisis hors de la commune pour procéder à l'évaluation des immeubles d'un caractère particulier ou exceptionnel ; / b. La valeur locative des termes de comparaison est arrêtée : / Soit en partant du bail en cours à la date de référence de la révision lorsque l'immeuble type était loué normalement à cette date, / Soit, dans le cas contraire, par comparaison avec des immeubles similaires situés dans la commune ou dans une localité présentant, du point de vue économique, une situation analogue à celle de la commune en cause et qui faisaient l'objet à cette date de locations consenties à des conditions de prix normales ; / 3° À défaut de ces bases, la valeur locative est déterminée par voie d'appréciation directe ". Il résulte de ces dispositions que le juge de l'impôt, saisi de la contestation d'une cotisation de taxe foncière sur les propriétés bâties établie sur la base d'une valeur locative déterminée par voie de comparaison en application des dispositions du 2° de l'article 1498, ne peut, au seul motif qu'il estime devoir écarter le terme de comparaison sur lequel l'administration s'est fondée, substituer à la valeur locative retenue par l'administration celle proposée par le contribuable et déterminée par voie d'appréciation directe, pour prononcer la réduction de cotisation correspondante. Il doit, au vu des éléments dont il dispose au dossier ou qu'il sollicite par un supplément d'instruction, rechercher un terme de comparaison qu'il estime, par une appréciation souveraine, pertinent et dont il vérifie la régularité et, seulement à défaut de terme de comparaison pertinent, déterminer la valeur locative par voie d'appréciation directe.

3. Après avoir relevé que le local-type n° 177 de la commune de Barentin, qui avait en l'espèce servi de terme de comparaison pour déterminer la valeur locative des locaux en litige, avait été ajouté au procès-verbal des locaux commerciaux de la commune de Barentin par un procès-verbal complémentaire établi à l'issue d'une séance de la commission communale où ne siégeaient que quatre membres, en méconnaissance des dispositions de l'article 345 de l'annexe III au code général des impôts, et estimé que ce local devait, pour ce motif, être écarté, le tribunal administratif a jugé que la valeur locative de l'immeuble en litige n'avait pas été fixée conformément aux dispositions de l'article 1498 du code général des impôts et qu'il en résultait, sans qu'il soit besoin d'examiner les autres moyens de la requête, que la société CM-CIC Lease était fondée à demander la réduction des cotisations de taxe foncière sur les propriétés bâties en litige, dans les limites des demandes formulées dans sa réclamation préalable, fondées sur une détermination par voie d'appréciation directe de la valeur locative du local taxé. En déduisant ainsi de la seule irrégularité affectant le local-type n° 177 qu'il y avait lieu de prononcer la réduction de l'imposition sollicitée, le tribunal administratif, qui n'a pas préalablement recherché s'il existait un autre terme de comparaison pertinent, alors en particulier que l'administration proposait comme alternatives le local-type n° 65 du procès-verbal complémentaire de la commune de Blois, situé à Vineuil, et le local-type n° 207 du procès-verbal complémentaire de la commune de Vannes, ni, au cas où cette méthode se serait révélée inapplicable, procédé lui-même à l'appréciation directe de la valeur locative en cause, a commis une erreur de droit.

4. Le ministre de l'action et des comptes publics est par suite fondé, sans qu'il soit besoin d'examiner l'autre moyen de son pourvoi, à demander l'annulation de l'article 1er du jugement qu'il attaque.

5. Les dispositions de l'article L. 761-1 du code de justice administrative font obstacle à ce qu'une somme soit mise à ce titre à la charge de l'Etat qui n'est pas, dans la présente instance, la partie perdante.

D E C I D E :

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Article 1er : L'article 1er du jugement du 14 janvier 2020 du tribunal administratif de Rouen est annulé.

Article 2 : L'affaire est renvoyée, dans cette mesure, au tribunal administratif de Rouen.

Article 3 : Les conclusions présentées par la société Crédit Mutuel Real Estate Lease au titre des dispositions de l'article L. 761-1 du code de justice administrative sont rejetées.

Article 4 : La présente décision sera notifiée au ministre de l'économie, des finances et de la relance et à la société anonyme Crédit Mutuel Real Estate Lease.


Synthèse
Formation : 8ème chambre
Numéro d'arrêt : 439497
Date de la décision : 05/05/2021
Type d'affaire : Administrative
Type de recours : Plein contentieux

Publications
Proposition de citation : CE, 05 mai. 2021, n° 439497
Inédit au recueil Lebon

Composition du Tribunal
Rapporteur ?: M. Charles-Emmanuel Airy
Rapporteur public ?: M. Romain Victor
Avocat(s) : SCP BARADUC, DUHAMEL, RAMEIX

Origine de la décision
Date de l'import : 11/05/2021
Fonds documentaire ?: Legifrance
Identifiant ECLI : ECLI:FR:CE:2021:439497.20210505
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