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28/04/2021 | FRANCE | N°439357

France | France, Conseil d'État, 6ème chambre, 28 avril 2021, 439357


Vu la procédure suivante :

La société par actions simplifiée (SAS) Free Mobile a demandé au juge des référés du tribunal administratif de Melun, statuant sur le fondement de l'article L. 521-1 du code de justice administrative, d'une part, de suspendre l'exécution de l'arrêté du 10 novembre 2019 par lequel la maire de Recloses a rejeté sa demande de déclaration préalable de travaux portant sur l'installation d'une station relais de téléphonie mobile et, d'autre part, d'enjoindre au maire de Recloses de procéder à une nouvelle instruction de sa demande jusqu'à ce qu'il

soit statué au fond sur la légalité de cette décision. Par une ordonnan...

Vu la procédure suivante :

La société par actions simplifiée (SAS) Free Mobile a demandé au juge des référés du tribunal administratif de Melun, statuant sur le fondement de l'article L. 521-1 du code de justice administrative, d'une part, de suspendre l'exécution de l'arrêté du 10 novembre 2019 par lequel la maire de Recloses a rejeté sa demande de déclaration préalable de travaux portant sur l'installation d'une station relais de téléphonie mobile et, d'autre part, d'enjoindre au maire de Recloses de procéder à une nouvelle instruction de sa demande jusqu'à ce qu'il soit statué au fond sur la légalité de cette décision. Par une ordonnance n° 2000982 du 18 février 2020, le juge des référés du tribunal administratif a rejeté cette demande.

Par un pourvoi sommaire et un mémoire complémentaire, enregistrés au secrétariat du contentieux du Conseil d'État le 6 mars et le 18 mai 2020, la SAS Free Mobile demande au Conseil d'État :

1°) d'annuler cette ordonnance ;

2°) statuant en référé, de faire droit à ses demandes ;

3°) de mettre à la charge de la commune de Recloses une somme de 4 000 euros au titre de l'article L. 761-1 du code de justice administrative.

Vu les autres pièces du dossier ;

Vu :

- le code des postes et des communications électroniques ;

- le code de l'environnement ;

- le code de l'urbanisme ;

- la loi n° 2015-136 du 9 février 2015 ;

- le décret n° 2011-465 du 27 avril 2011 ;

- le décret n° 2016-1106 du 11 août 2016 ;

- le code de justice administrative et le décret n° 2020-1406 du 18 novembre 2020 ;

Après avoir entendu en séance publique :

- le rapport de M. Bruno Bachini, maître des requêtes,

- les conclusions de M. Stéphane Hoynck, rapporteur public ;

La parole ayant été donnée, après les conclusions, à la SCP Spinosi, avocat de la société Free Mobile et à la SCP Marlange, de la Burgade, avocat de la commune de Recloses ;

Considérant ce qui suit :

1. Aux termes du premier alinéa de l'article L. 521-1 du code de justice administrative : " Quand une décision administrative, même de rejet, fait l'objet d'une requête en annulation ou en réformation, le juge des référés, saisi d'une demande en ce sens, peut ordonner la suspension de l'exécution de cette décision, ou de certains de ses effets, lorsque l'urgence le justifie et qu'il est fait état d'un moyen propre à créer, en l'état de l'instruction, un doute sérieux quant à la légalité de la décision. " L'urgence justifie la suspension de l'exécution d'un acte administratif lorsque celle-ci porte atteinte, de manière suffisamment grave et immédiate, à un intérêt public, à la situation du requérant ou aux intérêts qu'il entend défendre. Il appartient au juge des référés d'apprécier concrètement, compte tenu des justifications fournies par le requérant, si les effets de l'acte contesté sont de nature à caractériser une urgence justifiant que, sans attendre le jugement de la requête au fond, l'exécution de la décision soit suspendue.

2. Il ressort des pièces du dossier soumis au juge des référés que, par un arrêté du 10 novembre 2019, le maire de Recloses (Seine-et-Marne) a fait opposition à la demande de déclaration préalable de la société Free Mobile tendant à la construction d'une station relais de radiotéléphonie mobile Chemin du Noyer Charron. La société Free Mobile a saisi le juge des référés du tribunal administratif de Melun, sur le fondement de l'article L. 521-1 du code de justice administrative, d'une demande tendant à la suspension de l'exécution de cet arrêté. Elle se pourvoit en cassation contre l'ordonnance par laquelle le juge des référés a rejeté sa demande au motif que la condition d'urgence n'était pas remplie en l'espèce.

3. En se fondant sur l'éventualité d'une solution alternative que la société requérante n'entendait pas retenir alors que cette dernière demandait que soit suspendue l'exécution de la décision s'opposant à la déclaration de travaux qu'elle avait déposée pour réaliser le projet qu'elle avait arrêté et entendait poursuivre, le juge des référés, eu égard à l'intérêt public qui s'attache à la couverture du territoire national par le réseau de téléphonie mobile ainsi qu'aux intérêts propres que faisait valoir la société Free Mobile, a commis une erreur de droit. Par suite, et sans qu'il soit besoin d'examiner les autres moyens du pourvoi, la société requérante est fondée à demander l'annulation de l'ordonnance qu'elle attaque.

4. Il y a lieu, dans les circonstances de l'espèce, de statuer sur la demande de suspension en application des dispositions de l'article L. 821-2 du code de justice administrative.

5. En premier lieu, eu égard à l'intérêt public qui s'attache à la couverture du territoire national par les réseaux de téléphonie mobile et aux intérêts propres de la société requérante, qui a pris des engagements vis-à-vis de l'Etat quant à la couverture du territoire par son réseau, et à la circonstance, non contestée, que le territoire de la commune de Recloses n'est pas couvert par le réseau de téléphonie mobile de la société requérante, la condition d'urgence exigée par l'article L. 521-1 du code de justice administrative doit être, en l'espèce, regardée comme remplie.

6. En second lieu, en l'état de l'instruction, est de nature à faire naître un doute sérieux quant à la légalité de la décision contestée le moyen tiré de ce que le maire de Recloses ne pouvait s'opposer à la déclaration de travaux au motif que la construction d'une station relais méconnaissait les engagements pris par la commune au titre de la charte du parc régional du Gâtinais alors que cette construction ne méconnaissait pas les dispositions du règlement du plan d'occupation des sols applicables à la zone NC d'implantation du projet.

7. Pour l'application de l'article L. 600-4-1 du code de l'urbanisme, en l'état du dossier soumis au Conseil d'Etat, aucun autre moyen n'est susceptible d'entraîner la suspension de la décision attaquée.

8. Il résulte de ce qui précède qu'il y a lieu de prononcer la suspension demandée.

9. Il y a lieu d'enjoindre au maire de Recloses de procéder à l'instruction de la déclaration préalable de travaux de la société Free Mobile et de prendre une nouvelle décision dans un délai de quinze jours à compter de la notification de la présente décision.

10. Il n'y a pas lieu, dans les circonstances de l'espèce, de faire droit aux conclusions présentées par la société Free Mobile au titre des dispositions de l'article L. 761-1 du code de justice administrative. Ces mêmes dispositions font, par ailleurs, obstacle à ce qu'une somme soit mise, à ce titre, à la charge de cette dernière qui n'est pas, dans la présente instance, la partie perdante.

D E C I D E :

--------------

Article 1er : L'ordonnance du juge des référés du tribunal administratif de Melun du 18 février 2020 est annulée.

Article 2 : L'exécution de l'arrêté du maire de Recloses du 10 novembre 2019 portant opposition aux travaux de la société Free Mobile est suspendue.

Article 3 : Il est enjoint au maire de Recloses de reprendre l'instruction de la déclaration préalable de travaux déposée par la société Free Mobile et de prendre une nouvelle décision dans un délai de quinze jours à compter de la présente décision.

Article 4: Les conclusions présentées par la société Free Mobile et la commune de Recloses au titre de l'article L. 761-1 du code de justice administrative sont rejetées.

Article 5 : La présente décision sera notifiée à la société Free Mobile et à la commune de Recloses.


Synthèse
Formation : 6ème chambre
Numéro d'arrêt : 439357
Date de la décision : 28/04/2021
Type d'affaire : Administrative
Type de recours : Excès de pouvoir

Publications
Proposition de citation : CE, 28 avr. 2021, n° 439357
Inédit au recueil Lebon

Composition du Tribunal
Rapporteur ?: M. Bruno Bachini
Rapporteur public ?: M. Stéphane Hoynck
Avocat(s) : SCP SPINOSI ; SCP MARLANGE, DE LA BURGADE

Origine de la décision
Date de l'import : 04/05/2021
Fonds documentaire ?: Legifrance
Identifiant ECLI : ECLI:FR:CE:2021:439357.20210428
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