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27/04/2021 | FRANCE | N°422818

France | France, Conseil d'État, 5ème chambre, 27 avril 2021, 422818


Vu la procédure suivante :

Mme E... C... épouse B... a demandé au tribunal administratif de Strasbourg d'annuler la décision référencée " 48 M " du 23 juin 2017 par laquelle le ministre de l'intérieur lui a notifié un retrait de quatre points à la suite d'une infraction relevée le 9 août 2016, et d'enjoindre au ministre de l'intérieur de restituer quatre points sur son permis et de créditer ce dernier de douze points. Par un jugement n° 1705595 du 18 mai 2018, le tribunal administratif a rejeté sa demande.

Par une ordonnance n° 18NC02035 du 31 juillet 2018, enreg

istrée le même jour au secrétariat du contentieux du Conseil d'Etat, la prés...

Vu la procédure suivante :

Mme E... C... épouse B... a demandé au tribunal administratif de Strasbourg d'annuler la décision référencée " 48 M " du 23 juin 2017 par laquelle le ministre de l'intérieur lui a notifié un retrait de quatre points à la suite d'une infraction relevée le 9 août 2016, et d'enjoindre au ministre de l'intérieur de restituer quatre points sur son permis et de créditer ce dernier de douze points. Par un jugement n° 1705595 du 18 mai 2018, le tribunal administratif a rejeté sa demande.

Par une ordonnance n° 18NC02035 du 31 juillet 2018, enregistrée le même jour au secrétariat du contentieux du Conseil d'Etat, la présidente de la cour administrative d'appel de Nancy a transmis au Conseil d'Etat, en application de l'article R. 351-2 du code de justice administrative, le pourvoi, enregistré le 17 juillet 2018 au greffe de cette cour, présenté par Mme C.... Par ce pourvoi et un mémoire en réplique, enregistré au secrétariat du contentieux du Conseil d'Etat le 29 mars 2021, Mme C... demande au Conseil d'Etat :

1°) d'annuler ce jugement ;

2°) réglant l'affaire au fond, de faire droit à sa demande ;

3°) de mettre à la charge de l'Etat la somme de 2 500 euros au titre de l'article L. 761-1 du code de justice administrative.

Vu les autres pièces du dossier ;

Vu :

- la convention européenne de sauvegarde des droits de l'homme et des libertés fondamentales ;

- le code de la route ;

- le code de procédure pénale ;

- le code des relations entre le public et l'administration ;

- la loi n° 89-469 du 10 juillet 1989 ;

- le code de justice administrative et le décret n° 2020-1406 du 18 novembre 2020 ;

Après avoir entendu en séance publique :

- le rapport de M. François Charmont, maître des requêtes,

- les conclusions de M. Nicolas Polge, rapporteur public ;

La parole ayant été donnée, après les conclusions, à la SCP Gaschignard, avocat de Mme B... ;

Considérant ce qui suit :

1. Il ressort des pièces du dossier soumis au juge du fond que Mme C... a commis le 9 août 2016 une infraction ayant entraîné le retrait de quatre points de son permis de conduire. Par une décision référencée " 48 M " du 23 juin 2017, le ministre de l'intérieur lui a notifié ce retrait de points et l'a informée que le solde de ses points était inférieur à la moitié du nombre maximal de points. Mme C... se pourvoit en cassation contre le jugement du 18 mai 2018 par lequel le tribunal administratif de Strasbourg a rejeté sa requête tendant à l'annulation de cette décision et à ce qu'il soit enjoint au ministre de l'intérieur de restituer quatre points au solde de son permis et de créditer ce solde de douze points.

En ce qui concerne la régularité du jugement :

2. En relevant, pour écarter le moyen tiré de l'incompétence du signataire de la décision attaquée, que M. A... D..., chef du bureau national des droits à conduire, avait reçu délégation de signature du ministre de l'intérieur et qu'étaient apposés, sur la décision attaquée, par l'Imprimerie nationale, le nom, le prénom, la qualité et la signature, sous forme de fac-similé, de M. A... D..., le tribunal administratif a suffisamment motivé son jugement.

En ce qui concerne le rejet de la demande de reconstitution du solde maximal de points du permis de conduire :

3. Aux termes de l'article L. 223-1 du code de la route : " Le permis de conduire est affecté d'un nombre de points. Celui-ci est réduit de plein droit si le titulaire du permis a commis une infraction pour laquelle cette réduction est prévue. / (...) / Lorsque le nombre de points est nul, le permis perd sa validité. / La réalité d'une infraction entraînant retrait de points est établie par le paiement d'une amende forfaitaire ou l'émission du titre exécutoire de l'amende forfaitaire majorée, l'exécution d'une composition pénale ou par une condamnation définitive. / (...) ". Aux termes de l'article L. 223-6 du même code : " Si le titulaire du permis de conduire n'a pas commis, dans le délai de deux ans à compter de la date du paiement de la dernière amende forfaitaire, de l'émission du titre exécutoire de la dernière amende forfaitaire majorée, de l'exécution de la dernière composition pénale ou de la dernière condamnation définitive, une nouvelle infraction ayant donné lieu au retrait de points, son permis est affecté du nombre maximal de points. / Le délai de deux ans mentionné au premier alinéa est porté à trois ans si l'une des infractions ayant entraîné un retrait de points est un délit ou une contravention de la quatrième ou de la cinquième classe (...) ". Il résulte de ces dispositions que si, au cours d'une période de deux ans à compter de la date du paiement de l'amende forfaitaire, de l'émission du titre exécutoire de l'amende forfaitaire majorée, de l'exécution de la composition pénale ou de la condamnation définitive qui a établi la réalité d'une infraction, le titulaire d'un permis de conduire n'a pas commis d'infraction entraînant retrait de points, son permis de conduire est affecté du nombre maximal de points. Ce délai est porté à trois ans si l'infraction est un délit ou une contravention de quatrième ou cinquième classe.

4. Il résulte de ce qui précède que le délai de trois ans prévu par les dispositions précitées, qui avait commencé à courir à compter de la date à laquelle était devenue définitive, le 5 août 2014, l'infraction de quatrième classe que Mme C... avait commise le 9 mai 2014, a été interrompu par la commission d'une nouvelle infraction entraînant retrait de points le 9 août 2016, faisant dès lors obstacle à la reconstitution du solde maximal de points de ce permis sur le fondement de l'article L. 223-6 du code de la route. Il y a lieu de substituer ce motif, qui résulte de faits constants et qui justifie sur ce point le dispositif du jugement attaqué, au motif par lequel le tribunal administratif a écarté le moyen tiré de ce que Mme C... devait bénéficier d'une reconstitution totale des points de son permis. Il résulte de cette substitution de motif que le moyen d'erreur de droit que la requérante soulève quant à la portée de l'opposition qu'elle a formée à l'ordonnance pénale prononcée à son encontre au titre de l'infraction du 9 août 2016 doit être écarté comme inopérant.

En ce qui concerne la motivation de la décision " 48 M " du 23 juin 2017 :

5. Aux termes de l'article L. 211-2 du code des relations entre le public et l'administration : " Les personnes physiques ou morales ont le droit d'être informées sans délai des motifs des décisions administratives individuelles défavorables qui les concernent./ A cet effet, doivent être motivées les décisions qui :/ 1° Restreignent l'exercice des libertés publiques ou, de manière générale, constituent une mesure de police (...) ". Aux termes de l'article 211-5 du même code : " La motivation exigée par le présent chapitre doit être écrite et comporter l'énoncé des considérations de droit et de fait qui constituent le fondement de la décision ".

6. En estimant, pour écarter le moyen tiré de l'insuffisance de motivation de la décision " 48 M " contestée par Mme C..., que cette décision comportait l'énoncé des considérations de droit et de fait qui en constituaient le fondement, conformément aux exigences des dispositions citées au point 5, le tribunal administratif s'est livré à une appréciation souveraine exempte de dénaturation.

En ce qui concerne l'information préalable au retrait de points consécutif à l'infraction du 9 août 2016 et l'exception d'illégalité de l'article R. 223-3 du code de la route :

7. Si Mme C... soutient que le tribunal administratif, en jugeant que le moyen d'erreur de droit tiré de ce qu'elle n'aurait pas bénéficié de l'information préalable requise par les articles L. 223-3 et R. 223-3 du code de la route à l'occasion de l'infraction qu'elle a commise le 9 août 2016 était inopérant, a commis une erreur de droit, elle n'assortit son moyen d'aucune précision permettant au juge de cassation d'en apprécier le bien-fondé. Il en va de même des moyens tirés de ce que le tribunal administratif aurait entaché son jugement d'erreur de droit en jugeant que ses moyens tirés de ce que les dispositions de l'article R. 223-3 du code de la route serait contraire aux articles 6-1 et 13 de la convention européenne de sauvegarde des droits de l'homme et des libertés fondamentales et à la loi du 10 juillet 1989 relative à diverses dispositions en matière de sécurité routière et en matière de contraventions étaient inopérants.

8. Il résulte de tout ce qui précède que le pourvoi de Mme C... doit être rejeté, y compris, par voie de conséquence, les conclusions qu'elle présente au titre de l'article L. 761-1 du code de justice administrative.

D E C I D E :

--------------

Article 1er : Le pourvoi de Mme C... est rejeté.

Article 2 : La présente décision sera notifiée à Mme E... C... épouse B... et au ministre de l'intérieur.


Synthèse
Formation : 5ème chambre
Numéro d'arrêt : 422818
Date de la décision : 27/04/2021
Type d'affaire : Administrative
Type de recours : Excès de pouvoir

Publications
Proposition de citation : CE, 27 avr. 2021, n° 422818
Inédit au recueil Lebon

Composition du Tribunal
Rapporteur ?: M. François Charmont
Rapporteur public ?: M. Nicolas Polge
Avocat(s) : SCP GASCHIGNARD

Origine de la décision
Date de l'import : 04/05/2021
Fonds documentaire ?: Legifrance
Identifiant ECLI : ECLI:FR:CE:2021:422818.20210427
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