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05/03/2021 | FRANCE | N°445826

France | France, Conseil d'État, 7ème chambre, 05 mars 2021, 445826


Vu la procédure suivante :

M. A... B... et ses colistiers ont demandé au tribunal administratif de Melun, à titre principal, d'annuler les opérations électorales qui se sont déroulées le 15 mars 2020 en vue de l'élection des conseillers municipaux et communautaires de la commune de Saint-Thibault-des-Vignes (Seine-et-Marne), et à titre subsidiaire, de réviser le décompte des voix et de modifier les résultats de l'élection.

Par un jugement n° 2002787 du 30 septembre 2020, le tribunal administratif de Melun a rejeté cette protestation.

Par une requête et un

mémoire en réplique, enregistrés les 30 octobre 2020 et 7 janvier 2021 au secrét...

Vu la procédure suivante :

M. A... B... et ses colistiers ont demandé au tribunal administratif de Melun, à titre principal, d'annuler les opérations électorales qui se sont déroulées le 15 mars 2020 en vue de l'élection des conseillers municipaux et communautaires de la commune de Saint-Thibault-des-Vignes (Seine-et-Marne), et à titre subsidiaire, de réviser le décompte des voix et de modifier les résultats de l'élection.

Par un jugement n° 2002787 du 30 septembre 2020, le tribunal administratif de Melun a rejeté cette protestation.

Par une requête et un mémoire en réplique, enregistrés les 30 octobre 2020 et 7 janvier 2021 au secrétariat du contentieux du Conseil d'Etat, M. B... demande au Conseil d'Etat :

1°) d'annuler ce jugement ;

2°) de faire droit à sa protestation ;

3°) de mettre à la charge de M. D... C... la somme de 4 000 euros au titre de l'article L. 761-1 du code de justice administrative.

Vu les autres pièces du dossier ;

Vu :

- le code électoral ;

- le code des relations entre le public et l'administration ;

- le code de justice administrative et le décret n° 2020-1406 du 18 novembre 2020 ;

Après avoir entendu en séance publique :

- le rapport de M. Didier Ribes, maître des requêtes,

- les conclusions de M. Marc Pichon de Vendeuil, rapporteur public ;

La parole ayant été donnée, après les conclusions, à la SCP Gouz-Fitoussi, avocat de M. B... et à Me Le Prado, avocat de M. C... ;

Considérant ce qui suit :

1. A l'issue des opérations électorales organisées le 15 mars 2020 dans la commune de Saint-Thibault-des-Vignes (Seine-et-Marne) en vue de la désignation des conseillers municipaux et communautaires, la liste " Avec vous pour l'avenir de Saint-Thibault-des-Vignes " menée par M. C..., maire sortant, a obtenu 22 sièges au conseil municipal, avec 909 voix, tandis que la liste conduite par M. B... a obtenu 7 sièges avec 891 voix. M. B... relève appel du jugement du 30 septembre 2020 par lequel le tribunal administratif de Melun a rejeté sa protestation tendant à annuler ces élections municipales.

Sur la régularité du jugement attaqué :

2. En premier lieu, il résulte de l'instruction que si le requérant soutenait devant le tribunal administratif que le maire sortant avait utilisé dans le tract intitulé " Quelques informations sur M. B... " des documents officiels non communicables à des tiers, cette argumentation était présentée au soutien de son grief tiré de l'irrégularité de la diffusion de ce tract. Le tribunal administratif, qui a répondu à ce grief en relevant que M. B... n'avait pas eu la possibilité, compte tenu de la date de diffusion de ce tract, de répondre aux attaques concernant l'utilisation de moyens de la commune à des fins personnelles dans l'évacuation des déchets de son restaurant, ainsi qu'à son intention de céder sa propriété à un promoteur immobilier, n'était pas tenu, pour ce faire, de se prononcer sur tous les arguments avancés par le protestataire.

3. En deuxième lieu, il résulte de l'instruction que si le requérant soutenait devant le tribunal administratif que M. C... avait relayé ses tracts sur les réseaux sociaux, cette argumentation était présentée au soutien de son grief tiré de ce que les tracts litigieux avaient été diffusés massivement. Le tribunal administratif, qui a répondu à ce grief en relevant que ces deux tracts avaient été distribués le vendredi 13 mars 2020 dans les boîtes aux lettres des électeurs, n'était pas davantage tenu de se prononcer sur tous les arguments avancés par le protestataire.

4. En dernier lieu, contrairement à ce que soutient le requérant, le tribunal, qui a jugé que " le contrôle des bulletins de vote des trois autres bureaux de vote ne modifierait pas le décompte des voix en ajoutant deux voix à chacun des candidats pour le même motif ", a ainsi répondu au grief tiré de ce que deux bulletins de vote en sa faveur n'auraient pas été comptabilisés au motif que son nom aurait été entouré.

Sur le déroulement de la campagne électorale :

5. Aux termes de l'article L. 48-2 du code électoral : " Il est interdit à tout candidat de porter à la connaissance du public un élément nouveau de polémique électorale à un moment tel que ses adversaires n'aient pas la possibilité d'y répondre utilement avant la fin de la campagne électorale ". Aux termes de l'article 49 du même code : " A partir de la veille du scrutin à zéro heure, il est interdit de : / 1° Distribuer ou faire distribuer des bulletins, circulaires et autres documents ; / 2° Diffuser ou faire diffuser par tout moyen de communication au public par voie électronique tout message ayant le caractère de propagande électorale ; / 3° Procéder, par un système automatisé ou non, à l'appel téléphonique en série des électeurs afin de les inciter à voter pour un candidat ; / 4° Tenir une réunion électorale ".

6. En premier lieu, il resulte de l'instruction que si le tract intitulé " Lettre aux Théobaldiennes et Théobaldiens ", diffusé le vendredi 13 mars 2020 par le maire sortant, indiquait que le requérant avait " commandé " un article de presse pour le discréditer, cette formulation, pour regrettable qu'elle soit, n'a pas excédé les limites de la polémique électorale.

7. En deuxième lieu, il résulte de l'instruction que les propos tenus par le maire sortant dans le tract intitulé " Quelques informations sur M. B... " sur la gestion par ce dernier de son restaurant, notamment en ce qui concerne le dépôt de ses déchets, et les avis de clients recueillis sur un site internet public accessible aux tiers, n'ont pas excédé les limites de la polémique électorale. La circonstance que ces documents ne présentaient pas un caractère public n'est pas, à elle seule, de nature à entacher la sincérité du scrutin.

8. En troisième lieu, il appartient au juge de l'élection, pour apprécier la portée sur la sincérité du scrutin des éléments de polémique électorale diffusés par un candidat, de tenir compte des éléments de polémique électorale diffusés par les autres candidats. Le requérant n'est donc pas fondé à soutenir que le tribunal se serait fondé sur des éléments inopérants en relevant que la liste qu'il conduisait avait diffusé un tract qui compensait, tant par son contenu que par le moment auquel il avait été diffusé, les éléments de polémique électorale figurant dans les tracts de la liste adverse. Il n'est pas davantage fondé à soutenir que le tribunal aurait inexactement considéré que le tract intitulé " Halte à la démagogie et aux mensonges " diffusé le vendredi 13 mars 2020 par la liste qu'il conduisait " comportait des insinuations relatives au cumul des mandats et au montant des indemnités perçues par M. C... ".

9. Il résulte de tout ce qui précède que M. B... n'est pas fondé à soutenir que c'est à tort que, par le jugement attaqué, le tribunal administratif de Melun a rejeté sa protestation tendant à l'annulation des opérations électorales auxquelles il a été procédé, le 15 mars 2020, pour l'élection des conseillers municipaux et communautaires de la commune de Saint-Thibault-des-Vignes. Sa requête doit, par suite, être rejetée, y compris ses conclusions au titre de l'article L. 761-1 du code de justice administrative. Il n'y a pas lieu, dans les circonstances de l'espèce, de faire droit aux conclusions présentées par M. C... au titre des mêmes dispositions.

D E C I D E :

--------------

Article 1er : La requête de M. B... est rejetée.

Article 2 : Les conclusions de M. C... tendant à l'application de l'article L. 7611 du code de justice administrative sont rejetées.

Article 3 : La présente décision sera notifiée à M. A... B..., à M. D... C... et au ministre de l'intérieur.


Type d'affaire : Administrative
Type de recours : Plein contentieux

Références :

Publications
Proposition de citation: CE, 05 mar. 2021, n° 445826
Inédit au recueil Lebon
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Composition du Tribunal
Rapporteur ?: M. Didier Ribes
Rapporteur public ?: M. Marc Pichon de Vendeuil
Avocat(s) : SCP GOUZ-FITOUSSI ; LE PRADO

Origine de la décision
Formation : 7ème chambre
Date de la décision : 05/03/2021
Date de l'import : 16/03/2021

Fonds documentaire ?: Legifrance


Numérotation
Numéro d'arrêt : 445826
Numéro NOR : CETATEXT000043246449 ?
Identifiant URN:LEX : urn:lex;fr;conseil.etat;arret;2021-03-05;445826 ?
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