La jurisprudence francophone des Cours suprêmes


recherche avancée

03/02/2021 | FRANCE | N°429004

France | France, Conseil d'État, 9ème - 10ème chambres réunies, 03 février 2021, 429004


Vu la procédure suivante :

Mme C... A... a demandé au tribunal administratif de Versailles de lui accorder la restitution de la taxe foncière sur les propriétés bâties à laquelle elle a été assujettie au titre de l'année 2016 à raison de sa résidence principale située à Trappes (Yvelines). Par un jugement n° 1700838 du 22 janvier 2019, le tribunal administratif de Versailles a fait droit à sa demande.

Par un pourvoi et un mémoire en réplique, enregistrés les 20 mars 2019 et 9 mars 2020 au secrétariat du contentieux du Conseil d'Etat, le ministre de l'action et

des comptes publics demande au Conseil d'Etat :

1°) d'annuler ce jugement ;

...

Vu la procédure suivante :

Mme C... A... a demandé au tribunal administratif de Versailles de lui accorder la restitution de la taxe foncière sur les propriétés bâties à laquelle elle a été assujettie au titre de l'année 2016 à raison de sa résidence principale située à Trappes (Yvelines). Par un jugement n° 1700838 du 22 janvier 2019, le tribunal administratif de Versailles a fait droit à sa demande.

Par un pourvoi et un mémoire en réplique, enregistrés les 20 mars 2019 et 9 mars 2020 au secrétariat du contentieux du Conseil d'Etat, le ministre de l'action et des comptes publics demande au Conseil d'Etat :

1°) d'annuler ce jugement ;

2°) réglant l'affaire au fond, de rejeter la demande de Mme A....

Vu les autres pièces du dossier ;

Vu :

- le code de la construction et de l'habitation ;

- le code général des impôts ;

- la loi n° 95-1346 du 30 décembre 1995 de finances pour 1996 ;

- le code de justice administrative et le décret n° 2020-1406 du 18 novembre 2020 ;

Après avoir entendu en séance publique :

- le rapport de M. Olivier Guiard, maître des requêtes,

- les conclusions de Mme B... D..., rapporteure publique ;

La parole ayant été donnée, après les conclusions, à la SCP Rousseau, Tapie, avocat de Mme C... A... ;

Considérant ce qui suit :

1. Il ressort des pièces du dossier soumis aux juges du fond que Mme A... a acquis en 2015 un logement lui servant d'habitation principale grâce à un apport personnel, à un prêt ne portant pas intérêt correspondant à 26 % du financement et à un prêt à l'accession sociale correspondant à 54 % de celui-ci. Elle a demandé, par réclamation à l'administration fiscale le bénéfice de l'exonération de taxe foncière sur les propriétés bâties prévue par le I de l'article 1384 A du code général des impôts pour ce logement au titre de 2016. Le ministre de l'action et des comptes publics se pourvoit en cassation contre le jugement du 22 janvier 2019 par lequel le tribunal administratif de Versailles a accordé à Mme A... l'exonération que l'administration lui avait refusée.

2. Aux termes du I de l'article 1384 A du code général des impôts : " Les constructions neuves affectées à l'habitation principale et financées à concurrence de plus de 50 % au moyen des prêts aidés par l'Etat, prévus aux articles L. 301-1 et suivants du code de la construction et de l'habitation, sont exonérées de la taxe foncière sur les propriétés bâties pendant une durée de quinze ans à compter de l'année qui suit celle de leur achèvement. / (...) Cette exonération ne s'applique pas aux logements financés au moyen de l'avance remboursable ne portant pas intérêt prévue par l'article R. 317-1 du code de la construction et de l'habitation. " Aux termes de l'article R. 317-1 du code de la construction et de l'habitation, alors applicable et devenu l'article D. 317-1 du même code : " Il est créé une aide pour l'accession à la propriété destinée aux personnes physiques qui acquièrent un logement en vue de l'occuper à titre de résidence principale et qui n'ont pas été propriétaires de leur résidence principale au cours des deux dernières années précédant l'offre de prêt. (...). Cette aide est mise en place par les établissements de crédit conventionnés à cet effet sous forme d'avance remboursable ne portant pas intérêt. L'Etat verse une subvention aux établissements de crédit destinée à compenser l'absence d'intérêt. "

3. Il résulte des dispositions combinées citées au point 2 ci-dessus, éclairées par les travaux préparatoires de la loi de finances pour 1996 du 30 décembre 1995 dont est issu le dernier alinéa du I de l'article 1384 A du code général des impôts, que si les constructions neuves affectées à l'habitation principale dont l'acquisition est financée à plus de 50 % au moyen de prêts aidés par l'Etat, prévus aux articles L. 301-1 et suivants du code de la construction et de l'habitation, bénéficient en principe, en vertu du premier alinéa du I de l'article 1384 A du code général des impôts, de l'exonération prévue par ces dispositions, cette dernière ne s'applique pas aux logements dont le financement a été partiellement assuré au moyen de l'avance remboursable ne portant pas intérêt prévue par l'article R. 317-1 du code de la construction et de l'habitation, alors même que ce financement aurait été assuré, pour un montant supérieur à 50 % du coût de l'opération, par un ou plusieurs prêts aidés par l'Etat.

4. Dès lors, en jugeant que la circonstance qu'une opération financée à plus de 50 % par des prêts aidés par l'Etat, prévus aux articles L. 301-1 et suivants du code de la construction et de l'habitation, ait été en outre partiellement financée au moyen de l'avance remboursable prévue à l'article R. 317-1 du même code ne faisait pas perdre le bénéfice de l'exonération instituée au I de l'article 1384 A du code général des impôts, le tribunal a commis une erreur de droit. Par suite, le ministre est fondé à demander l'annulation du jugement qu'il attaque.

5. Il y a lieu, dans les circonstances de l'espèce, de régler l'affaire au fond sur le fondement de l'article L. 821-2 du code de justice administrative.

6. Il résulte de l'instruction que le prêt à taux zéro dont a bénéficié en 2015 Mme A... n'a pas été octroyé sur le fondement des dispositions des articles R. 317-1 et suivants du code de la construction et de l'habitation, mais constitue un prêt ne portant pas intérêt accordé sur le fondement des dispositions des articles L. 31-10-1 et suivants et des articles R. 31-10-1 et suivants de ce code. Par suite, le logement acquis par Mme A... n'ayant pas été financé au moyen de l'avance remboursable ne portant pas intérêt prévue par l'article R. 317-1 du code de la construction et de l'habitation, c'est à tort que l'administration fiscale a opposé à sa demande l'exclusion prévue au dernier alinéa de l'article 1384 A du code général des impôts.

7. Il résulte de ce qui précède, sans qu'il soit besoin de se prononcer sur les autres moyens de la requête, que Mme A... est fondée à demander la décharge de l'imposition en litige.

8. Il y a lieu dans les circonstances de l'espèce de mettre à la charge de l'Etat la somme de 3 000 euros à verser à Mme A... au titre de l'article L. 761-1 du code de justice administrative.

D E C I D E :

--------------

Article 1er : Le jugement du 22 janvier 2019 du tribunal administratif de Versailles est annulé.

Article 2 : Mme C... A... est déchargée de la taxe foncière sur les propriétés bâties à laquelle elle a été assujettie au titre de l'année 2016 pour sa résidence principale sise A24, 40 rue de l'Observatoire à Trappes (Yvelines).

Article 3 : L'Etat versera à Mme A... la somme de 3 000 euros au titre de l'article L. 761-1 du code de justice administrative

Article 4 : La présente décision sera notifiée au ministre de l'économie, des finances et de la relance et à Mme C... A....


Synthèse
Formation : 9ème - 10ème chambres réunies
Numéro d'arrêt : 429004
Date de la décision : 03/02/2021
Type d'affaire : Administrative
Type de recours : Plein contentieux

Analyses

19-03-03-01-04 CONTRIBUTIONS ET TAXES. IMPOSITIONS LOCALES AINSI QUE TAXES ASSIMILÉES ET REDEVANCES. TAXES FONCIÈRES. TAXE FONCIÈRE SUR LES PROPRIÉTÉS BÂTIES. - CONSTRUCTIONS NEUVES D'HABITATION FINANCÉES À PLUS DE 50 % AU MOYEN DE PRÊTS AIDÉS PAR L'ETAT (I DE L'ART. 1384 A DU CGI) - 1) EXCLUSION - LOGEMENTS AYANT AUSSI ÉTÉ PARTIELLEMENT FINANCÉS PAR L'AVANCE REMBOURSABLE NE PORTANT PAS INTÉRÊT (ART. R. 317-1 DU CCH) - 2) ESPÈCE.

19-03-03-01-04 1) Il résulte de la combinaison du I de l'article 1384 A du code général des impôts (CGI) et de l'article R. 317-1 du code de la construction et de l'habitation (CCH), devenu l'article D. 317-1 du même code, éclairés par les travaux préparatoires de la loi n° 95-1346 du 30 décembre 1995 dont est issu le dernier alinéa du I de l'article 1384 A, que si les constructions neuves affectées à l'habitation principale dont l'acquisition est financée à plus de 50 % au moyen de prêts aidés par l'Etat, prévus aux articles L. 301-1 et suivants du CCH, bénéficient en principe, en vertu du premier alinéa du I de l'article 1384 A du CGI, de l'exonération prévue par ces dispositions, cette dernière ne s'applique pas aux logements dont le financement a été partiellement assuré au moyen de l'avance remboursable ne portant pas intérêt prévue par l'article R. 317-1 du CCH, alors même que ce financement aurait été assuré, pour un montant supérieur à 50 % du coût de l'opération, par un ou plusieurs prêts aidés par l'Etat.,,,2) Prêt à taux zéro dont a bénéficié un contribuable n'ayant pas été octroyé sur le fondement des articles R. 317-1 et suivants du CCH, mais constituant un prêt ne portant pas intérêt accordé sur le fondement des articles L. 31-10-1 et suivants et des articles R. 31-10-1 et suivants de ce code. Par suite, le logement acquis par l'intéressé n'a pas été financé au moyen de l'avance remboursable ne portant pas intérêt prévue par l'article R. 317-1 du CCH. Dès lors, l'exclusion prévue au dernier alinéa de l'article 1384 A du CGI ne lui est pas opposable.


Publications
Proposition de citation : CE, 03 fév. 2021, n° 429004
Mentionné aux tables du recueil Lebon

Composition du Tribunal
Rapporteur ?: M. Olivier Guiard
Rapporteur public ?: Mme Emilie Bokdam-Tognetti
Avocat(s) : SCP ROUSSEAU, TAPIE

Origine de la décision
Date de l'import : 20/02/2021
Fonds documentaire ?: Legifrance
Identifiant ECLI : ECLI:FR:CE:2021:429004.20210203
Association des cours judiciaires suprmes francophones
Organisation internationale de la francophonie
Juricaf est un projet de l'AHJUCAF, l'association des Cours suprêmes judiciaires francophones. Il est soutenu par l'Organisation Internationale de la Francophonie. Juricaf est un projet de l'AHJUCAF, l'association des Cours suprêmes judiciaires francophones. Il est soutenu par l'Organisation Internationale de la Francophonie.
Logo iall 2012 website award