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26/01/2021 | FRANCE | N°439976

France | France, Conseil d'État, 8ème - 3ème chambres réunies, 26 janvier 2021, 439976


Vu la procédure suivante :

M. B... A... a demandé au tribunal administratif de Grenoble de prononcer la décharge des cotisations supplémentaires d'impôt sur le revenu auxquelles il a été assujetti au titre des années 2011 et 2012. Par un jugement n° 1606497 du 23 juillet 2018, ce tribunal a rejeté sa demande.

Par un arrêt n° 18LY03547 du 28 janvier 2020, la cour administrative d'appel de Lyon a rejeté l'appel formé par M. A... contre ce jugement.

Par un pourvoi sommaire, un mémoire complémentaire et un mémoire en réplique, enregistrés les 6 avril, 6 jui

llet et 30 décembre 2020 au secrétariat du contentieux du Conseil d'État, M. A... de...

Vu la procédure suivante :

M. B... A... a demandé au tribunal administratif de Grenoble de prononcer la décharge des cotisations supplémentaires d'impôt sur le revenu auxquelles il a été assujetti au titre des années 2011 et 2012. Par un jugement n° 1606497 du 23 juillet 2018, ce tribunal a rejeté sa demande.

Par un arrêt n° 18LY03547 du 28 janvier 2020, la cour administrative d'appel de Lyon a rejeté l'appel formé par M. A... contre ce jugement.

Par un pourvoi sommaire, un mémoire complémentaire et un mémoire en réplique, enregistrés les 6 avril, 6 juillet et 30 décembre 2020 au secrétariat du contentieux du Conseil d'État, M. A... demande au Conseil d'État :

1°) d'annuler cet arrêt ;

2°) réglant l'affaire au fond, de faire droit à son appel ;

3°) de mettre à la charge de l'État la somme de 5 000 euros au titre de l'article L. 761-1 du code de justice administrative.

Vu les autres pièces du dossier ;

Vu :

- le code général des impôts et le livre des procédures fiscales ;

- le code de justice administrative et le décret n° 2020-1406 du 18 novembre 2020 ;

Après avoir entendu en séance publique :

- le rapport de M. Jonathan Bosredon, conseiller d'Etat,

- les conclusions de M. Romain Victor, rapporteur public ;

La parole ayant été donnée, après les conclusions, à la SCP Waquet, Farge, Hazan, avocat de M. A... ;

Considérant ce qui suit :

1. Il ressort des pièces du dossier soumis aux juges du fond que l'EURL Cougar Invest, qui a pour gérant et associé unique M. A... et relève du régime d'imposition prévu à l'article 8 du code général des impôts, a fait l'objet d'une vérification de comptabilité portant sur la période du 1er janvier 2011 au 31 décembre 2013 à l'issue de laquelle l'administration, après l'avoir mise en demeure de souscrire des déclarations de résultat au titre des exercices clos en 2011, 2012 et 2013, a soumis à l'impôt sur le revenu, entre les mains de M. A..., selon la procédure contradictoire, les bénéfices tirés de l'activité de gestion de patrimoine exercée par cette entreprise. M. A... se pourvoit en cassation contre l'arrêt du 28 janvier 2020 par lequel la cour administrative d'appel de Lyon a rejeté l'appel qu'il avait formé contre le jugement du 23 juillet 2018 du tribunal administratif de Grenoble rejetant sa demande tendant à la décharge des cotisations supplémentaires d'impôt sur le revenu auxquelles il a été assujetti au titre des années 2011 et 2012 et des majorations correspondantes.

2. Aux termes du premier alinéa de l'article L. 59 du livre des procédures fiscales : " Lorsque le désaccord persiste sur les rectifications notifiées, l'administration, si le contribuable le demande, soumet le litige à l'avis (...) de la commission départementale des impôts directs et des taxes sur le chiffre d'affaires prévue à l'article 1651 du code général des impôts (...) ". Aux termes de l'article L. 59 A du même livre : " I. - La commission départementale des impôts directs et des taxes sur le chiffre d'affaires intervient lorsque le désaccord porte : / 1° Sur le montant du résultat industriel et commercial, non commercial, agricole ou du chiffre d'affaires, déterminé selon un mode réel d'imposition (...) ".

3. Si l'administration peut, à tout moment de la procédure, invoquer un nouveau motif de droit propre à justifier l'imposition, une telle substitution de base légale ne saurait avoir pour effet de priver le contribuable des garanties de procédure prévues par la loi compte tenu de la base légale substituée et notamment de la faculté, prévue par les articles L. 59 et L. 59 A du livre des procédures fiscales, de demander la saisine de la commission départementale des impôts directs et des taxes sur le chiffre d'affaires, lorsque celle-ci est compétente pour connaître du différend.

4. En se fondant, pour juger que la substitution, comme base légale des impositions supplémentaires en litige, des dispositions relatives aux bénéfices non commerciaux aux dispositions, initialement retenues par l'administration au cours de la procédure d'établissement de ces impositions, relatives aux bénéfices industriels et commerciaux, n'avait pas eu pour effet de priver l'EURL Cougar Invest de la garantie tenant à la possibilité de demander que le différend l'opposant à l'administration fiscale soit soumis à l'avis de la commission départementale des impôts directs et des taxes sur le chiffre d'affaires, sur la seule circonstance que les courriers que l'administration fiscale avait adressés à M. A..., en sa qualité de gérant de l'EURL Cougar Invest, en réponse aux observations de celle-ci, mentionnaient expressément la faculté pour la contribuable de demander la saisine de cette commission dans un délai de trente jours, sans rechercher si, eu égard à la nature du différend qui persistait entre la contribuable et l'administration, l'application de règles différentes de détermination du bénéfice taxable soulevait des questions nouvelles entrant dans le champ de compétence de la commission, la cour administrative d'appel a entaché son arrêt d'une erreur de droit.

5. Par suite, et sans qu'il soit besoin de se prononcer sur les autres moyens du pourvoi, M. A... est fondé à demander l'annulation de l'arrêt qu'il attaque.

6. Il y a lieu, dans les circonstances de l'espèce, de régler l'affaire au fond en application des dispositions de l'article L. 821-2 du code de justice administrative.

Sur la régularité du jugement attaqué :

7. M. A... soutient que le jugement attaqué est irrégulier au motif que les premiers juges ont omis de soulever d'office le moyen d'ordre public tiré de l'erreur sur la catégorie d'imposition des bénéfices de l'EURL Cougar Invest. Toutefois, l'omission qu'aurait ainsi commise le tribunal administratif, à la supposer établie, a trait au bien-fondé du jugement attaqué et demeure, par suite, sans incidence sur sa régularité.

Sur la régularité de la procédure d'imposition :

8. Aux termes de l'article L. 76 B du livre des procédures fiscales : " L'administration est tenue d'informer le contribuable de la teneur et de l'origine des renseignements et documents obtenus de tiers sur lesquels elle s'est fondée pour établir l'imposition faisant l'objet de la proposition prévue au premier alinéa de l'article L. 57 ou de la notification prévue à l'article L. 76. Elle communique, avant la mise en recouvrement, une copie des documents susmentionnés au contribuable qui en fait la demande ".

9. Il résulte de ces dispositions qu'il incombe à l'administration, quelle que soit la procédure d'imposition mise en oeuvre, et au plus tard avant la mise en recouvrement, d'informer le contribuable dont elle envisage soit de rehausser, soit d'arrêter d'office les bases d'imposition, de l'origine et de la teneur des documents et renseignements obtenus auprès de tiers, qu'elle a utilisés pour fonder les impositions, avec une précision suffisante pour mettre à même l'intéressé d'y avoir accès avant la mise en recouvrement des impositions qui en procèdent. Lorsque le contribuable lui en fait la demande, l'administration est, en principe, tenue de lui communiquer, alors même qu'il en aurait eu connaissance, les renseignements, documents ou copies de documents obtenus auprès de tiers qui lui sont opposés, afin de lui permettre d'en vérifier l'authenticité ou d'en discuter la teneur ou la portée. Il en va autrement s'agissant des documents et renseignements qui, à la date de la demande de communication, sont directement et effectivement accessibles au contribuable dans les mêmes conditions qu'à l'administration. Dans cette dernière hypothèse, si le contribuable établit qu'il ne peut avoir effectivement accès aux mêmes documents et renseignements que ceux que détient l'administration, celle-ci est tenue de les lui communiquer.

10. Il résulte de l'instruction que, dans les propositions de rectification adressées à M. A... le 11 décembre 2014 et le 26 mars 2015, l'administration a précisé de manière détaillée l'origine et la teneur des éléments obtenus de tiers dans le cadre du droit de communication qu'elle a exercé auprès des fournisseurs et des clients de l'EURL Cougar Invest. Les documents recueillis ont été communiqués à M. A..., à sa demande, le 26 juin 2015, soit avant la mise en recouvrement des impositions. Si l'administration a par ailleurs relevé, dans la proposition de rectification du 26 mars 2015, que des commissions versées par les sociétés clientes de l'EURL avaient été créditées en 2012, pour un montant de 158 748 euros, sur un compte bancaire personnel détenu par le requérant auprès d'un établissement de la Banque Postale de Lyon, il résulte des mentions de la proposition de rectification que ces renseignements proviennent de M. A... lui-même, lequel a, au cours de la vérification de comptabilité de l'EURL Cougar Invest, informé l'administration, par un courrier du 6 novembre 2014, de l'existence de ce compte bancaire et de son utilisation exclusive en tant que compte professionnel aux fins, notamment, d'encaisser les recettes professionnelles de la société. Le requérant ne conteste pas avoir été en mesure d'accéder directement et effectivement à ce courrier qu'il a lui-même remis à l'administration au cours de la vérification de comptabilité. Par suite, le moyen tiré de la méconnaissance de l'article L. 76 B du livre des procédures fiscales doit être écarté.

Sur le bien-fondé des impositions :

En ce qui concerne l'imposition dans la catégorie des bénéfices industriels et commerciaux :

11. Aux termes du 1 de l'article 92 du code général des impôts : " Sont considérés comme provenant de l'exercice d'une profession non commerciale ou comme revenus assimilés aux bénéfices non commerciaux, les bénéfices des professions libérales, des charges et offices dont les titulaires n'ont pas la qualité de commerçants et de toutes occupations, exploitations lucratives et sources de profits ne se rattachant pas à une autre catégorie de bénéfices ou de revenus ".

12. M. A... soutient que les bénéfices réalisés par l'EURL Cougar Invest au titre des exercices clos en 2011, 2012 et 2013 à raison de son activité de gestion de patrimoine relevaient de la catégorie des bénéfices non commerciaux et non de celle des bénéfices industriels et commerciaux.

13. Il résulte de l'instruction que l'EURL Cougar Invest a conclu, le 1er avril 2010, avec les sociétés NFMDA, Oddo Asset Management et Oddo et Compagnie Entreprise d'Investissement, un contrat dit " mandat de démarchage bancaire et financier " lui permettant de proposer à ses clients différents produits et services bancaires et financiers commercialisés par ses mandants, tels, notamment, que des parts d'organismes de placement collectif en valeurs mobilières (OPCVM). En rémunération de ces prestations, l'EURL Cougar Invest a bénéficié de commissions sur les droits d'entrée perçus lors de la souscription de parts des OPCVM et des commissions calculées en pourcentage des sommes placées. Une telle activité, qui s'analyse comme une activité d'intermédiaire pour le placement de produits financiers, présente un caractère non commercial. Par suite, comme le soutient à bon droit le requérant, c'est à tort que les bénéfices résultant de cette activité ont été imposés dans la catégorie des bénéfices industriels et commerciaux.

En ce qui concerne la demande de substitution de base légale présentée par l'administration :

14. Le ministre de l'action et des comptes publics demande que les bénéfices réalisés par l'EURL Cougar Invest, initialement imposés entre les mains de M. A... dans la catégorie des bénéfices industriels et commerciaux, soient imposés dans la catégorie des bénéfices non commerciaux.

15. L'administration est en droit, à tout moment de la procédure contentieuse, de justifier l'imposition en substituant une base légale à une autre, sous réserve que le contribuable ne soit pas privé des garanties de procédure qui lui sont données par la loi compte tenu de la base légale substituée.

16. D'une part, M. A... soutient qu'il n'a pas été informé de l'origine et de la teneur des renseignements utilisés par l'administration pour fonder l'imposition dans la catégorie des bénéfices non commerciaux.

17. Dans le cas où l'administration a utilisé des documents ou des renseignements obtenus de tiers pour fonder le redressement au titre de la nouvelle base légale dont elle se prévaut au cours de la procédure contentieuse, il lui appartient d'informer le contribuable, avec une précision suffisante, de l'origine et de la teneur de ces documents ou de ces renseignements, dans des délais permettant à l'intéressé d'en demander, le cas échéant, la communication et le mettant à même, après celle-ci, de présenter utilement ses observations.

18. Il résulte de l'instruction que, pour justifier l'imposition des bénéfices réalisés par l'EURL Cougar Invest dans la catégorie des bénéfices non commerciaux, l'administration s'est fondée sur les éléments issus de la vérification de comptabilité de la société, notamment sur la copie des contrats conclus par la société avec des mandataires financiers ainsi que sur les extraits des comptes bancaires ouverts au nom de M. A... auprès de la Banque Postale et de la Caisse d'Epargne Rhône-Alpes dont elle a obtenu copie dans le cadre de son droit de communication, lesquels ont été utilisés comme comptes professionnels par l'EURL Cougar Invest pour encaisser ses recettes et effectuer ses dépenses. L'administration a indiqué, dans les mémoires présentés devant la cour administrative d'appel, l'origine et la teneur des renseignements qu'elle a ainsi obtenus. A la suite des conclusions de M. A... demandant à cette cour d'ordonner à l'administration de communiquer les éléments sur lesquels elle s'est fondée pour procéder aux redressements, l'administration fiscale a produit, à l'appui de son mémoire du 18 novembre 2019, la copie des extraits de comptes bancaires ouverts au nom de M. A... auprès de la Banque Postale et de la Caisse d'Epargne Rhône-Alpes. En outre, le requérant ne conteste pas que les éléments provenant de la vérification de comptabilité de l'EURL Cougar Invest, dont il est le gérant et l'associé unique, lui sont directement et effectivement accessibles dans les mêmes conditions qu'à l'administration. Par suite, M. A... a été informé, avec une précision suffisante, de l'origine et de la teneur des documents provenant de tiers utilisés par l'administration pour fonder les impositions dans la catégorie des bénéfices non commerciaux. Il a de même pu obtenir la communication de ces éléments, sur lesquels il été mis à même de présenter utilement ses observations au cours de l'instance juridictionnelle.

19. D'autre part, M. A... soutient que la substitution de base légale demandée par l'administration le prive de la garantie tenant à la possibilité de saisine de la commission départementale des impôts directs et des taxes sur le chiffre d'affaires prévue par les articles L. 59 et L. 59 A du livre des procédures fiscales. Toutefois, il résulte des réponses aux observations du contribuable que le désaccord qui persistait, à ce stade de la procédure, avec l'administration fiscale tenait, d'une part, au refus de l'administration d'admettre la déduction de diverses charges dont la réalité ou le lien avec l'activité de l'entreprise n'était pas établi et, d'autre part, au refus de l'administration de regarder une somme de 63 432 euros encaissée au cours de l'année 2012 comme un produit constaté d'avance. Eu égard à la nature de ce différend, la substitution, pour déterminer le montant du bénéfice de l'EURL Cougar Invest au titre des exercices correspondant aux années 2011 et 2012, des règles relatives aux bénéfices non commerciaux aux règles relatives aux bénéfices industriels et commerciaux ne soulève aucune question que la contribuable n'aurait pas été en mesure de soumettre à l'avis de la commission départementale des impôts directs et des taxes sur le chiffre d'affaires au cours de la procédure suivie à son égard, ainsi que les réponses de l'administration aux observations qu'elle avait formulées à la suite de la notification des propositions de rectification du 11 décembre 2014 et du 26 mars 2015 lui en rappelaient expressément la possibilité. Dans ces conditions, la société n'a pas été privée d'une garantie attachée à la procédure contradictoire alors même qu'elle n'a pas usé de la faculté qui lui était ouverte de saisir cette commission.

20. Il résulte de ce qui précède que la demande de substitution de base légale présentée par l'administration, qui ne prive le contribuable d'aucune garantie en matière de procédure d'imposition, doit être accueillie.

En ce qui concerne le montant des bénéfices non commerciaux :

21. Aux termes du 1 de l'article 93 du code général des impôts : " Le bénéfice à retenir dans les bases de l'impôt sur le revenu est constitué par l'excédent des recettes totales sur les dépenses nécessitées par l'exercice de la profession (...) ".

22. En premier lieu, il résulte de ces dispositions que le montant des recettes à retenir pour la détermination du bénéfice imposable des contribuables titulaires de bénéfices non commerciaux est le montant total des recettes que ceux-ci ont perçues du fait de leur activité professionnelle ou de l'occupation ou exploitation lucrative ou de la source de profits dont ils tirent parti.

23. M. A... soutient que les recettes à retenir pour la détermination du bénéfice non commercial de l'EURL Cougar Invest sont inexistantes, ainsi qu'en atteste la circonstance qu'aucune somme n'a été créditée sur les comptes bancaires ouverts au nom de cette société au titre de la période vérifiée. Toutefois, il résulte de l'instruction et n'est d'ailleurs pas contesté qu'au cours de la vérification de comptabilité de la société, M. A..., en sa qualité de représentant de l'EURL Cougar Invest, a, d'une part, reconnu que la société avait effectué, dans le cadre d'un mandat de démarchage bancaire et financier conclu le 1er avril 2010 avec les sociétés NFMDA, Oddo Asset Management et Oddo et Compagnie Entreprise d'Investissement, une activité de gestion de patrimoine rémunérée en pourcentage des sommes placées et, d'autre part, admis, lors des interventions du vérificateur du 6 novembre 2014 et du 10 décembre 2014, que les recettes réalisées par la société dans le cadre de cette activité avaient été encaissées sur les comptes bancaires ouverts à son nom auprès d'établissements de la Banque Postale et de la Caisse d'Epargne. Dans ces conditions, le requérant n'est pas fondé à soutenir que la société n'avait réalisé aucune recette.

24. En second lieu, quelle que soit la procédure d'imposition suivie à l'encontre du contribuable, il lui appartient de justifier que les sommes qu'il a déduites de son bénéfice non commercial ont constitué des dépenses nécessitées par l'exercice de sa profession.

25. Au cours de la vérification de comptabilité, l'administration a relevé que l'EURL Cougar Invest avait déduit des frais, d'un montant de 45 265 euros au titre de l'exercice clos en 2011 et 30 004 euros au titre de l'exercice clos en 2012, comptabilisés respectivement aux comptes " réception " et " mission ". L'administration a constaté que les factures présentées pour justifier la déduction de ces frais de restauration, engagés notamment lors de la période de Noël, correspondaient fréquemment à un nombre de convives compris entre 20 et 25 personnes et faisaient état de dépenses d'achat de champagne, vin et paniers de fruits. Elle a également relevé que les factures, qui pour certaines présentaient diverses anomalies et incohérences, avaient été établies a posteriori par M. A... lui-même et que plusieurs des fournisseurs de la société, interrogés dans le cadre de l'exercice du droit de communication, avaient expliqué que les factures produites avaient été falsifiées ou obtenues frauduleusement et ne correspondaient pas à des prestations réelles. A l'appui de sa requête, M. A..., qui se borne à soutenir que les titulaires de bénéfices non commerciaux peuvent justifier les dépenses exposées par tous moyens, sans avoir besoin de produire des factures régulières, n'apporte aucun élément de nature à établir la réalité et le caractère professionnel des charges déduites par l'EURL Cougar Invest. Dans ces conditions, c'est à bon droit que l'administration a remis en cause les frais de restauration et de réception déduits par l'EURL Cougar Invest au titre de la période en litige.

26. Il résulte de ce qui précède que M. A... n'est pas fondé à soutenir que c'est à tort que, par le jugement attaqué, le tribunal administratif de Grenoble a rejeté sa demande.

27. Les dispositions de l'article L. 761-1 du code de justice administrative font obstacle à ce qu'une somme soit mise à la charge de l'État qui n'est pas, dans la présente instance, la partie perdante.

D E C I D E :

--------------

Article 1er : L'arrêt de la cour administrative d'appel de Lyon du 28 janvier 2020 est annulé.

Article 2 : La requête d'appel de M. A... est rejetée.

Article 3 : Les conclusions de M. A... présentées au titre de l'article L. 761-1 du code de justice administrative sont rejetées.

Article 4 : La présente décision sera notifiée à M. B... A... et au ministre de l'économie, des finances et de la relance.


Synthèse
Formation : 8ème - 3ème chambres réunies
Numéro d'arrêt : 439976
Date de la décision : 26/01/2021
Type d'affaire : Administrative
Type de recours : Plein contentieux

Analyses

19-02-01-02-06 CONTRIBUTIONS ET TAXES. RÈGLES DE PROCÉDURE CONTENTIEUSE SPÉCIALES. QUESTIONS COMMUNES. POUVOIRS DU JUGE FISCAL. - CONDITION TENANT AU MAINTIEN AU CONTRIBUABLE DES GARANTIES DE PROCÉDURE PRÉVUES PAR LA LOI - 1) PRINCIPE [RJ1] - 2) CAS OÙ, COMPTE TENU DU MOTIF DE DROIT SUBSTITUÉ, LA CDI EST COMPÉTENTE POUR CONNAÎTRE DU DIFFÉREND - A) IMPOSSIBILITÉ DE PRIVER LE CONTRIBUABLE DE CETTE GARANTIE - B) OFFICE DU JUGE [RJ2] - C) ESPÈCE - SUBSTITUTION DES DISPOSITIONS RELATIVES AUX BNC AUX DISPOSITIONS, INITIALEMENT RETENUES, RELATIVES AUX BIC.

19-02-01-02-06 1) Si l'administration peut, à tout moment de la procédure, invoquer un nouveau motif de droit propre à justifier l'imposition, une telle substitution de base légale ne saurait avoir pour effet de priver le contribuable des garanties de procédure prévues par la loi compte tenu de la base légale substituée.,,,2) a) Elle ne saurait notamment le priver de la faculté, prévue par les articles L. 59 et L. 59 A du livre des procédures fiscales (LPF), de demander la saisine de la commission départementale des impôts directs et des taxes sur le chiffre d'affaires (CDI), lorsque celle-ci est compétente pour connaître du différend.... ,,b) Il appartient au juge de l'impôt de rechercher si, eu égard à la nature du différend qui persiste entre le contribuable et l'administration, l'application de règles différentes de détermination du bénéfice taxable soulève des questions nouvelles entrant dans le champ de compétence de la CDI.,,,c) Dès lors, la seule circonstance que les courriers que l'administration fiscale a adressés au contribuable, en réponse aux observations de celui-ci, mentionnent expressément la faculté pour ce contribuable de demander la saisine de cette CDI dans un délai de trente jours ne suffit pas au juge de l'impôt pour juger que la substitution, comme base légale d'impositions supplémentaires, des dispositions relatives aux bénéfices non commerciaux (BNC) aux dispositions, initialement retenues par l'administration au cours de la procédure d'établissement de ces impositions, relatives aux bénéfices industriels et commerciaux (BIC), n'a pas eu pour effet de priver le contribuable de la garantie tenant à la possibilité de demander que le différend l'opposant à l'administration fiscale soit soumis à l'avis de la CDI.


Références :

[RJ1]

Cf. CE, 22 février 1984, Ministre c/,, n° 27886, p. 77 ;

CE, 7 octobre 1987,,, n°s 53090 71611, T. p. 892 ;

CE, 1er décembre 2004, Ministre c/ Sté Vecteur, n° 259104, inédite au Recueil ;

CE, 20 juin 2007, Ministre c/ SA Ferette, n° 290554, T. pp. 788-1040.,,

[RJ2]

Rappr., s'agissant de la substitution du motif tiré de ce que le montant d'une charge est trop élevé, qui soulève une question de fait, au motif, initialement retenu, tiré de ce que la charge est la contrepartie de l'acquisition d'un élément d'actif, qui soulève une question de qualification juridique, CE, 1er décembre 2004, Ministre c/ Sté Vecteur, n° 259104, inédite au Recueil.


Publications
Proposition de citation : CE, 26 jan. 2021, n° 439976
Mentionné aux tables du recueil Lebon

Composition du Tribunal
Rapporteur ?: M. Jonathan Bosredon
Rapporteur public ?: M. Romain Victor
Avocat(s) : SCP WAQUET, FARGE, HAZAN

Origine de la décision
Date de l'import : 09/02/2021
Fonds documentaire ?: Legifrance
Identifiant ECLI : ECLI:FR:CE:2021:439976.20210126
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