Vu la procédure suivante :
Par une décision du 14 juin 2019, le Conseil d'Etat, statuant au contentieux, a prononcé l'admission des conclusions du pourvoi de M. A... B... dirigées contre le jugement du tribunal administratif de Nîmes n° 1702572 du 24 janvier 2018, rectifié le 4 octobre 2018, en tant seulement que ce jugement se prononce sur l'indu de revenu de solidarité active d'activité et de prime d'activité dont le directeur de la caisse commune de sécurité sociale de la Lozère a confirmé la récupération le 9 juin 2017.
Vu les autres pièces du dossier ;
Vu :
- le code de l'action sociale et des familles ;
- le code des relations entre le public et l'administration ;
- le code de la sécurité sociale ;
- le code de justice administrative et le décret n° 2020-1406 du 18 novembre 2020 ;
Après avoir entendu en séance publique :
- le rapport de M. Thibaut Félix, auditeur,
- les conclusions de M. Vincent Villette, rapporteur public ;
La parole ayant été donnée, après les conclusions, à la SCP Rousseau, Tapie, avocat de M. B... ;
Considérant ce qui suit :
1. Il ressort des pièces du dossier soumis au juge du fond que, les 6 et 18 janvier 2017, la caisse commune de sécurité sociale de la Lozère, créée sur le fondement de l'article L. 216-4 du code de la sécurité sociale et exerçant les missions de la caisse d'allocations familiales, a réclamé à M. B... le remboursement de plusieurs prestations indues qu'elle lui avait servies, dont un indu de revenu de solidarité active dit " activité ", alloué au titre de la fraction des revenus professionnels mentionnée au 1° de l'article L. 262-2 du code de l'action sociale et des familles, de 1 977,92 euros, pour la période de novembre 2014 à décembre 2015, et un indu de prime d'activité d'un montant de 822,54 euros pour la période de janvier à décembre 2016. Par un courrier du 9 juin 2017, le directeur de la caisse a notifié à M. B... le rejet de son recours gracieux, portant notamment sur ces deux prestations, soumis à la commission de recours amiable du conseil d'administration de cette caisse lors de sa séance du 22 mai 2017. Par un pourvoi en cassation admis dans cette seule mesure, M. B... demande l'annulation du jugement du 28 septembre 2018 par lequel le tribunal administratif de Nîmes a rejeté sa demande tendant à l'annulation de la décision notifiée le 9 juin 2017.
Sur l'indu de revenu de solidarité active " activité " :
2. La contestation devant le juge administratif d'une décision, prise au nom de l'Etat par l'organisme chargé du service du revenu de solidarité active, de récupération de sommes indûment perçues au titre du revenu de solidarité active " activité " n'est subordonnée par aucun texte à l'exercice préalable d'un recours administratif. Il en résulte que la décision rejetant un tel recours, exercé dans les conditions du droit commun, ne se substitue pas à la décision initiale de récupération. Par suite, s'il appartient au juge administratif, saisi d'un recours contre ces deux décisions, d'annuler, le cas échéant, celle rejetant le recours administratif par voie de conséquence de l'annulation de la décision de récupération de l'indu, des moyens critiquant les vices propres dont serait entachée la décision rejetant le recours administratif ne peuvent être utilement invoqués au soutien des conclusions dirigées contre la décision de récupération. Partant, M. B... ne pouvait utilement faire valoir, à l'appui de sa contestation du bien-fondé de la décision de récupération litigieuse, que la signature de la décision rejetant son recours gracieux contre cette décision de récupération n'était pas conforme à l'article L. 212-1 du code des relations entre le public et l'administration.
3. Ce motif, dont l'examen n'implique l'appréciation d'aucune circonstance de fait et qui justifie le dispositif du jugement attaqué en ce qui concerne l'indu de revenu de solidarité active " activité ", doit être substitué aux motifs retenus par le tribunal administratif pour écarter, dans cette mesure, ce moyen qui était soulevé devant lui.
Sur l'indu de prime d'activité :
4. Aux termes de l'article L. 843-1 du code de la sécurité sociale : " La prime d'activité est attribuée, servie et contrôlée, pour le compte de l'Etat, par les caisses d'allocations familiales et par les caisses de mutualité sociale agricole pour leurs ressortissants ". Aux termes de l'article L. 845-2 de ce code : " Toute réclamation dirigée contre une décision relative à la prime d'activité prise par l'un des organismes mentionnés à l'article L. 843-1 fait l'objet, préalablement à l'exercice d'un recours contentieux, d'un recours auprès de la commission de recours amiable, composée et constituée au sein du conseil d'administration de cet organisme et qui connaît des réclamations relevant de l'article L. 142-1. / Les recours contentieux relatifs aux décisions mentionnées au premier alinéa du présent article sont portés devant la juridiction administrative. (...) ". L'article R. 847-2 de ce code précise les conditions, notamment de délai, dans lesquelles s'exerce le recours préalable mentionné à l'article L. 845-2. Enfin, l'article L. 412-7 du code des relations entre le public et l'administration dispose que : " La décision prise à la suite d'un recours administratif préalable obligatoire se substitue à la décision initiale ".
5. Il résulte de ces dispositions que, lorsque le bénéficiaire de la prime d'activité s'est vu notifier une décision de récupération de sommes indûment perçues au titre de cette prestation et qu'il entend contester en tout ou partie le caractère indu des montants correspondants, il lui appartient de saisir préalablement la commission de recours amiable de l'organisme qui lui sert cette allocation, dans les conditions prévues à l'article R. 847-2 du code de la sécurité sociale. Il peut utilement contester devant le juge administratif tant la régularité que le bien-fondé de la décision prise à la suite de ce recours administratif préalable obligatoire par la commission de recours amiable, qui se substitue à la décision initiale de récupération de l'indu et est, par suite, seule susceptible d'être déférée au juge compétent.
6. Aux termes du premier alinéa de l'article L. 212-1 du code des relations entre le public et l'administration, applicable aux organismes de sécurité sociale en vertu de l'article L. 100-3 du même code : " Toute décision prise par une administration comporte la signature de son auteur ainsi que la mention, en caractères lisibles, du prénom, du nom et de la qualité de celui-ci ". S'agissant des décisions prises par une autorité administrative de caractère collégial, et sauf à ce que des dispositions régissent leur forme de façon particulière, il est satisfait aux exigences découlant de cet article dès lors qu'elles portent la signature de leur président, accompagnée des mentions, en caractères lisibles, prévues par cet article. Il ne peut cependant en aller ainsi, en l'absence de toute disposition législative ou réglementaire imposant une présidence au sein de la commission de recours amiable, que lorsque celle-ci a fait le choix de se doter d'un président. A défaut, il ne peut être satisfait aux exigences découlant des dispositions de l'article L. 212-1 que par la signature de la décision par l'ensemble des membres de la commission, accompagnée pour chacun d'entre eux des mentions, en caractères lisibles, prévues par cet article.
7. Pour écarter le moyen tiré de la méconnaissance de l'article L. 212-1 du code des relations entre le public et l'administration, le tribunal administratif s'est borné à relever que la décision notifiée le 9 juin 2017 confirmant la récupération de l'indu de prime d'activité comportait une signature, dont il a estimé qu'elle permettait, à elle seule et en l'absence des autres mentions prévues par cet article, d'identifier son auteur. En statuant ainsi, le tribunal a commis une erreur de droit.
8. Il en résulte que M. B... est fondé à demander, pour ce motif, l'annulation de l'article 2 du jugement qu'il attaque, en tant seulement qu'il statue sur l'indu de prime d'activité.
9. Il n'y a pas lieu, dans les circonstances de l'espèce, de faire droit aux conclusions présentées par M. B... au titre de l'article L. 761-1 du code de justice administrative.
D E C I D E :
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Article 1er : L'article 2 du jugement du tribunal administratif de Nîmes du 24 janvier 2018 en annulé en tant qu'il se prononce sur l'indu de prime d'activité.
Article 2 : L'affaire est renvoyée, dans cette mesure, au tribunal administratif de Nîmes.
Article 3 : Les conclusions de M. B... dirigées contre le jugement du tribunal administratif de Nîmes du 24 janvier 2018 en tant qu'il se prononce sur l'indu de revenu de solidarité active alloué au titre de la fraction des revenus professionnels mentionnée au 1° de l'article L. 262-2 du code de l'action sociale et des familles et celles présentées au titre de l'article L. 761-1 du code de justice administrative sont rejetées.
Article 4 : La présente décision sera notifiée à M. A... B... et au ministre des solidarités et de la santé.
Copie en sera adressée au département de la Lozère et à la caisse commune de sécurité sociale de la Lozère.