Vu la procédure suivante :
Par une requête et un mémoire complémentaire, enregistrés les 20 février et 4 mars 2020 au secrétariat du contentieux du Conseil d'Etat, M. A... B... demande au Conseil d'Etat :
1°) d'annuler la décision n° CS 2019-69 du 21 octobre 2019 par laquelle la commission des sanctions de l'Agence française de lutte contre le dopage lui a infligé, pour une durée de deux ans à compter du 4 janvier 2020, la sanction de l'interdiction, en premier lieu, de participer directement ou indirectement, d'une part, à l'organisation et au déroulement de toute manifestation sportive donnant lieu à une remise de prix en argent ou en nature et, d'autre part, à l'organisation et au déroulement de toute manifestation sportive organisée ou autorisée par une fédération sportive française délégataire ou agréée ainsi qu'aux entraînements y préparant organisés par une fédération agréée ou l'un des membres de celle-ci ; en deuxième lieu, d'exercer les fonctions définies à l'article L. 212-1 du code du sport ainsi que toute fonction d'encadrement au sein d'une fédération agréée ou d'un groupement ou d'une association affilié à une telle fédération ; en troisième lieu, a demandé à la Fédération française de course camarguaise d'annuler les résultats qu'il a obtenus le 16 septembre 2018, lors de la manche du " Trophée des As " organisée à Mouriès, avec toutes les conséquences en découlant, y compris le retrait des médailles, points, prix et gains ; en dernier lieu, a décidé de publier, pendant toute la durée de l'interdiction qui lui est infligée, un résumé de la décision prise à son encontre sur le site internet de l'Agence française de lutte contre le dopage ;
2°) à titre subsidiaire de désigner un expert afin de déterminer si les urines analysées sont les siennes ;
3°) de mettre à la charge de l'Agence française de lutte contre le dopage la somme de 3 500 euros à verser à la SCP Rousseau - Tapie, son avocat, au titre de l'article L. 761-1 du code de justice administrative.
Vu les autres pièces du dossier ;
Vu :
- le code du sport ;
- le code de justice administrative ;
Après avoir entendu en séance publique :
- le rapport de M. Fabio Gennari, auditeur,
- les conclusions de M. Guillaume Odinet, rapporteur public.
La parole ayant été donnée, avant et après les conclusions, à la SCP Rousseau, Tapie, avocat de M. B..., et à la SCP Matuchansky, Poupot, Valdelièvre, avocat de l'Agence française de lutte contre le dopage ;
Considérant ce qui suit :
1. Le 16 septembre 2018, M. A... B..., raseteur de son état, a fait l'objet d'un contrôle antidopage à l'occasion d'une manche du " Trophée des As ", qui s'est révélé positif en révélant des traces de 6-hydroxy triamcinolone acétodine. Par une décision du 21 octobre 2019, la commission des sanctions de l'Agence française de lutte contre le dopage a prononcé à l'encontre de M. A... B... une interdiction de participer directement ou indirectement, pendant deux ans à compter du 4 janvier 2020, date de notification de cette décision à l'intéressé, à l'organisation et au déroulement de toute manifestation sportive donnant lieu à une remise de prix en argent ou en nature et à toute manifestation sportive organisée ou autorisée par une fédération sportive française délégataire ou agréée ainsi qu'aux entrainements y préparant organisés par une fédération agréée ou l'un des membres de celle-ci et d'exercer les fonctions définies à l'article L. 212-1 du code du sport ainsi que toute fonction d'encadrement au sein d'une fédération agréée ou d'un groupement ou d'une association affilié à une telle fédération. La commission des sanctions a également décidé de demander à la Fédération française de course camarguaise d'annuler les résultats obtenus par M. B... le 16 septembre 2018, lors de la manche du " Trophée des As " organisée à Mouriès, avec toutes les conséquences en découlant, y compris le retrait des médailles, points, prix et gains. Elle a enfin décidé de publier sur son site, pendant toute la durée de l'interdiction infligée à M. B..., un résumé de la décision prise à l'encontre de l'intéressé. M. B... demande l'annulation de cette décision.
2. Aux termes de l'article L. 232-5-1 du code du sport : " L'Agence française de lutte contre le dopage comprend un collège et une commission des sanctions ". Aux termes du troisième alinéa de l'article L. 232-7-3 du même code : " La commission des sanctions statue à la majorité des membres présents. En cas de partage égal des voix, celle du président est prépondérante ". Si M. B... soutient en premier lieu que la procédure suivie devant l'Agence française de lutte contre le dopage en vue de lui infliger une sanction serait irrégulière faute pour les membres du collège d'avoir reçu une convocation accompagnée de l'ordre du jour de la séance et d'avoir respecté le quorum requis, il résulte de l'instruction que les membres de la commission des sanctions ont été régulièrement convoqués et que la décision prise l'a été par six membres sur un total de dix, soit à la majorité des membres présents comme le prescrit le troisième alinéa de l'article L. 232-7-3 du code du sport précité. Le moyen suivant lequel la procédure suivie par la commission des sanctions aurait été irrégulière et suivant lequel les membres du collège auraient été irrégulièrement convoqués ne peut donc en tout état de cause qu'être écarté.
3. En deuxième lieu, aux termes de l'article R. 232-68 du code du sport : " L'agrément des personnes chargées du contrôle au titre de l'article L. 232-11 est accordé par l'Agence française de lutte contre le dopage dans les conditions qu'elle définit. / Il ne peut être accordé aux professionnels de santé qui ont fait l'objet d'une sanction disciplinaire dans les cinq années qui précèdent. / L'agrément est donné pour une durée de deux ans renouvelable ". Le moyen selon lequel la procédure serait irrégulière faute pour l'agent préleveur d'être dûment agréé et assermenté ne peut qu'être écarté dès lors qu'il résulte de l'instruction que le médecin chargé du prélèvement a été agréé pour une durée de deux ans par une décision de l'Agence française de lutte contre le dopage en date du 2 mars 2017 et que celui-ci a prêté serment devant le tribunal de grande instance de Toulon le 4 mai 2017, l'habilitant ainsi à rechercher et à constater les infractions pénales prévues par le code du sport à l'occasion de la manche du " Trophée des As ".
4. En troisième lieu, aux termes de l'article R. 232-51 du même code : " Les prélèvements et opérations de dépistage énumérés à l'article R. 232-50 se font sous la surveillance directe de la personne chargée du contrôle. Ils sont effectués dans les conditions suivantes : (...) 5° A l'exception de l'échantillon sanguin qui est réparti par la personne chargée du contrôle, chaque échantillon est réparti, soit par l'intéressé sous la surveillance de la personne chargée du contrôle, soit par cette dernière, en deux flacons scellés qui comportent un étiquetage d'identification portant un numéro de code ; chaque flacon contient une quantité suffisante pour permettre la réalisation d'une première analyse et, si nécessaire, d'une seconde... ". Aux termes de l'article R. 232-58 du même code : " La personne contrôlée doit assister à l'ensemble des opérations de contrôle. / La personne chargée du contrôle dresse sans délai procès-verbal des conditions dans lesquelles elle a procédé aux prélèvements et opérations de dépistage. / Les observations que la personne chargée du contrôle ou le sportif contrôlé souhaite présenter sur les conditions de déroulement du contrôle sont consignées dans le procès-verbal. / Le sportif contrôlé vérifie l'identité entre les numéros de code des échantillons mentionnés au 5° de l'article R. 232-51 et ceux qui sont inscrits sur le procès-verbal. Cette vérification est consignée au procès-verbal ". Il résulte de la combinaison de ces dispositions que le sportif contrôlé procède, à l'issue du prélèvement, à la vérification de l'identité entre les numéros indiqués sur les flacons d'échantillons et ceux retranscrits sur le procès-verbal établi par l'agent chargé du prélèvement. Cette vérification doit être contresignée sur le procès-verbal par le sportif, lequel peut éventuellement y mentionner toute observation relative au déroulement de l'opération de contrôle qu'il estimerait utile. Il résulte de l'instruction que M. A... B... a signé le formulaire de contrôle du dopage, lequel atteste notamment l'exactitude des numéros d'échantillons, sans avoir ni souhaité, ni cru devoir y ajouter une quelconque observation, tout en l'accompagnant d'une photographie pour identification faite avec son accord. Il en résulte que le moyen selon lequel M. B... n'aurait pas été en mesure de vérifier la correspondance entre les numéros de code des échantillons prélevés avec ceux retranscrits sur le procès-verbal ne peut qu'être écarté.
5. En quatrième lieu, aux termes du premier alinéa de l'article R. 232-48 du code du sport : " La personne physique ou morale responsable des lieux mentionnés à l'article L. 232-13-1 met des locaux appropriés à la disposition de la personne chargée du contrôle ". Aux termes du premier alinéa de l'article R. 232-51 du même code : " Les prélèvements et opérations de dépistage énumérés à l'article R. 232 50 se font sous la surveillance directe de la personne chargée du contrôle ". Il résulte de l'instruction, en particulier des photographies des lieux où s'est déroulé le contrôle, et du procès-verbal établi par le médecin préleveur, que le moyen suivant lequel il aurait été porté atteinte à l'intimité de l'intéressé manque, en tout état de cause, en fait dans la mesure où le contrôle auquel a été soumis M. B... s'est tenu dans les vestiaires, à l'abri des regards et de toute perturbation de la part tant du public que des autres raseteurs, dans des conditions qui n'ont donc pas porté atteinte aux exigences de confidentialité présidant à un tel contrôle. Il résulte également de l'instruction que le grief suivant lequel tant M. B... durant l'opération que le matériel utilisé pour ce faire et les échantillons prélevés à l'issue du contrôle n'auraient pas fait l'objet d'une surveillance constante de la part du médecin préleveur ne peut qu'être écarté, les divers témoignages d'autres raseteurs produits par l'intéressé n'étant pas de nature à remettre en cause la régularité matérielle des constatations effectuées par l'agent assermenté.
6. En cinquième lieu, le 6° de l'article R. 232-51 du code du sport dispose que : " 6° Les prélèvements sont répartis et conditionnés dans des dispositifs de transport à usage unique précodés et sécurisés, qui permettent d'identifier des échantillons A et B ". Aux termes de l'article R. 232-64 du même code : " Le laboratoire auquel il a été fait appel en application de l'article L. 232-18 procède à l'analyse de l'échantillon A, transmis en application de l'article R. 232-62. / Sauf demande contraire de l'agence, il conserve l'échantillon B en vue d'une éventuelle analyse de contrôle. Celle-ci est de droit à la demande de l'intéressé. Elle est effectuée à ses frais et dans les conditions prévues par les normes internationales (...) ". Si M. B... a demandé à ce qu'il soit procédé à l'analyse de l'échantillon B recueilli le jour du contrôle, il résulte de l'instruction et notamment des échanges de courriels entre l'intéressé et la Fédération française de course camarguaise qu'en dépit des relances dont il a fait l'objet, il n'a jamais renvoyé le formulaire, dont il a pourtant accusé réception, qui lui avait été envoyé en vue de procéder à cette seconde analyse. Il en résulte que M. B... devait, dès lors, être regardé comme ayant renoncé à l'exercice de ce droit. Enfin, il résulte de ce qui a été précédemment énoncé que tant le respect par le médecin préleveur du protocole à suivre dans le cadre d'un tel contrôle que les précautions ayant entouré l'ensemble des opérations jusqu'à l'acheminement des échantillons effectués au laboratoire chargé de leur analyse suffisent à écarter le grief soulevé par M. B... suivant lequel les prélèvements analysés ne seraient pas les siens, la contestation de M. B... n'étant pas de nature à justifier que la commission des sanctions de l'Agence française de lutte contre le dopage ordonnât en outre une expertise génétique des échantillons ainsi prélevés.
7. Aux termes de l'article L. 232-9 du code du sport, dans sa rédaction alors en vigueur : " Il est interdit à tout sportif : / 1° De détenir ou tenter de détenir, sans raison médicale dûment justifiée, une ou des substances ou méthodes interdites figurant sur la liste mentionnée au dernier alinéa du présent article ; / 2° D'utiliser ou tenter d'utiliser une ou des substances ou méthodes interdites figurant sur la liste mentionnée au dernier alinéa du présent article. / L'interdiction prévue au 2° ne s'applique pas aux substances et méthodes pour lesquelles le sportif : / a) Dispose d'une autorisation pour usage à des fins thérapeutiques ; (...) / c) Dispose d'une raison médicale dûment justifiée ". Aux termes de l'article L. 232-23 du même code, dans sa rédaction alors applicable : " I.- La commission des sanctions de l'Agence française de lutte contre le dopage peut prononcer : / 1° A l'encontre des sportifs ayant enfreint les dispositions des articles L. 232-9, L. 232-9-1, L. 232-14-5, L. 232-15, L. 232-15-1, L. 232-17 ou du 3° de l'article L. 232-10 : / a) Un avertissement ; / b) Une interdiction temporaire ou définitive de participer à toute manifestation sportive donnant lieu à une remise de prix en argent ou en nature, de même qu'aux manifestations sportives autorisées par une fédération délégataire ou organisées par une fédération agréée ainsi qu'aux entraînements y préparant organisés par une fédération agréée ou l'un des membres de celle-ci ; / c) Une interdiction temporaire ou définitive de participer directement ou indirectement à l'organisation et au déroulement des manifestations sportives et des entraînements mentionnés au b du présent 1° ; / d) Une interdiction temporaire ou définitive d'exercer les fonctions définies à l'article L. 212-1 ; / e) Une interdiction d'exercer les fonctions de personnel d'encadrement au sein d'une fédération agréée ou d'un groupement ou d'une association affiliés à la fédération ". Aux termes de l'article L. 232-23-3-3 du même code, dans sa rédaction alors applicable : " I.- La durée des mesures d'interdiction mentionnées au 1° du I de l'article L. 232-23 à raison d'un manquement à l'article L. 232-9 : / a) Est de quatre ans lorsque ce manquement est consécutif à l'usage ou à la détention d'une substance non spécifiée. Cette durée est ramenée à deux ans lorsque le sportif démontre qu'il n'a pas eu l'intention de commettre ce manquement ; / b) Est de deux ans lorsque ce manquement est consécutif à l'usage ou à la détention d'une substance spécifiée. Cette durée est portée à quatre ans lorsqu'il est démontré que le sportif a eu l'intention de commettre ce manquement ". Il résulte de ces dispositions qu'une personne qui enfreint l'interdiction d'utiliser des substances prohibées par le code du sport encourt, en application de l'article L. 232-23, une interdiction de participer à une quelconque manifestation sportive, soit de manière temporaire, soit à titre définitif.
8. Ainsi, en prononçant à l'encontre de M. B... une interdiction de participer à toute compétition sportive ou à tout entraînement y préparant pendant une durée de deux ans, en annulant les résultats qu'il a obtenus lors de la manche du " trophée des As " à l'issue de laquelle a été effectué le contrôle à son encontre et en ayant décidé de publier sur son site, pendant toute la durée de l'interdiction infligée à M. B..., un résumé de la décision prise à l'encontre de l'intéressé, la commission des sanctions de l'Agence française de lutte contre le dopage n'a pas pris de sanction disproportionnée, contrairement à ce qui est soutenu.
9. Il résulte de tout ce qui précède que, sans qu'il soit besoin d'ordonner l'expertise sollicitée, M. A... B... n'est pas fondé à demander l'annulation de la décision attaquée. Ses conclusions présentées au titre de l'article L. 761-1 du code de justice administrative doivent, par suite, être rejetées. Il n'y a pas lieu, dans les circonstances de l'espèce, de mettre à la charge de M. B... une somme à ce titre.
D E C I D E :
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Article 1er : La requête de M. B... est rejetée.
Article 2 : Les conclusions présentées par l'Agence française de lutte contre le dopage au titre de l'article L. 761-1 du code de justice administrative sont rejetées.
Article 3 : La présente décision sera notifiée à M. A... B... et à l'Agence française de lutte contre le dopage.