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09/11/2020 | FRANCE | N°437864

France | France, Conseil d'État, 8ème chambre, 09 novembre 2020, 437864


Vu la procédure suivante :

La société à responsabilité limitée (SARL) Paradis a demandé au tribunal administratif de Nice, à titre principal, de surseoir à statuer et de saisir le Tribunal des conflits, à titre subsidiaire, de condamner la société anonyme Yacht Club International de Saint-Laurent-du-Var à lui verser la somme de 1 941 409 euros, assortie des intérêts moratoires au taux légal. Par un jugement n° 1300873 du 28 mars 2017, ce tribunal a rejeté cette demande.

Par un arrêt n° 17MA02160 du 22 novembre 2019, la cour administrative d'appel de Marseille

a, sur l'appel de Me B... A..., agissant en qualité de mandataire liquidateur d...

Vu la procédure suivante :

La société à responsabilité limitée (SARL) Paradis a demandé au tribunal administratif de Nice, à titre principal, de surseoir à statuer et de saisir le Tribunal des conflits, à titre subsidiaire, de condamner la société anonyme Yacht Club International de Saint-Laurent-du-Var à lui verser la somme de 1 941 409 euros, assortie des intérêts moratoires au taux légal. Par un jugement n° 1300873 du 28 mars 2017, ce tribunal a rejeté cette demande.

Par un arrêt n° 17MA02160 du 22 novembre 2019, la cour administrative d'appel de Marseille a, sur l'appel de Me B... A..., agissant en qualité de mandataire liquidateur de la société Paradis, annulé ce jugement puis, statuant par la voie de l'évocation, rejeté les conclusions indemnitaires présentées en première instance.

Par un pourvoi sommaire et un mémoire complémentaire, enregistrés les 22 janvier et 25 juin 2020 au secrétariat du contentieux du Conseil d'Etat, Me A..., agissant en qualité de mandataire liquidateur de la société Paradis, demande au Conseil d'Etat :

1°) d'annuler cet arrêt ;

2°) réglant l'affaire au fond, de faire droit à son appel et d'ordonner la capitalisation des intérêts échus ;

3°) de mettre à la charge de la société anonyme Yacht Club International de Saint-Laurent-du-Var la somme de 4 000 euros au titre de l'article L. 761-1 du code de justice administrative.

Vu les autres pièces du dossier ;

Vu :

- la convention européenne de sauvegarde des droits de l'homme et des libertés fondamentales ;

- le code général de la propriété des personnes publiques ;

- le code de justice administrative ;

Après avoir entendu en séance publique :

- le rapport de M. Hervé Cassagnabère, conseiller d'Etat,

- les conclusions de M. Romain Victor, rapporteur public ;

La parole ayant été donnée, avant et après les conclusions, à la SCP Bauer-Violas, Feschotte-Desbois, Sebagh, avocat de la société Taddei A... mandataires judiciaires et de Me A... ;

Considérant ce qui suit :

1. Aux termes de l'article L. 822-1 du code de justice administrative : " Le pourvoi en cassation devant le Conseil d'Etat fait l'objet d'une procédure préalable d'admission. L'admission est refusée par décision juridictionnelle si le pourvoi est irrecevable ou n'est fondé sur aucun moyen sérieux ".

2. Pour demander l'annulation de l'arrêt qu'elle attaque, Me A..., agissant en qualité de mandataire liquidateur de la société Paradis, soutient que la cour administrative d'appel de Marseille :

- l'a insuffisamment motivé, faute de répondre au moyen tiré de ce que la société anonyme Yacht Club International de Saint-Laurent-du-Var aurait commis une faute en s'abstenant de prendre les mesures nécessaires à l'expulsion de l'occupant irrégulier des emplacements dont la société Paradis aurait dû avoir la jouissance dans le port de plaisance ;

- l'a entaché d'erreur de droit en s'abstenant de décliner la compétence de la juridiction administrative, alors que ses conclusions indemnitaires présentées sur le terrain quasi-délictuel relevaient de la compétence de la juridiction judiciaire, faute pour le litige d'avoir trait à l'exercice par la société anonyme Yacht Club International de Saint-Laurent-du-Var de prérogatives de puissance publique ;

- l'a entaché d'erreur de droit en se fondant sur la méconnaissance par la société Paradis des clauses de l'article 2.5 du règlement intérieur pour retenir à son encontre une faute de nature à exonérer de moitié la société Yacht club International de Saint-Laurent-du-Var de sa responsabilité, alors que ces clauses étaient illégales ;

- l'a entaché d'erreur de droit en se fondant sur la méconnaissance par la société Paradis, longtemps avant les faits, d'une obligation purement déclarative pour réduire de moitié son droit à indemnité ;

- a dénaturé les pièces du dossier en estimant que la gravité de cette faute ou son incidence sur le déroulement des faits étaient de nature à justifier une réduction de moitié du droit à indemnité de la société Paradis ;

- l'a entaché d'une erreur de droit en jugeant, pour en déduire que le préjudice de perte de loyer ne présentait pas un caractère indemnisable, que les principes de la domanialité publique, et plus particulièrement le caractère personnel d'une autorisation d'occuper le domaine public, faisaient obstacle à la sous-location de cellules commerciales situées sur ce domaine ;

- a dénaturé les pièces du dossier en écartant l'existence d'une faute commise par la société anonyme Yacht Club International de Saint-Laurent-du-Var pour avoir refusé de délivrer à la société Paradis un contrat d'amodiation, dès lors que la société concessionnaire connaissait suffisamment son projet d'exploitation commerciale ;

- a dénaturé les pièces du dossier en rejetant, pour le même motif, les conclusions indemnitaires de la société Paradis tendant à la réparation du préjudice résultant pour elle de la perte des bénéfices liés à l'exploitation des cellules commerciales ;

- s'est méprise sur la portée de ses écritures d'appel en estimant qu'il entendait obtenir l'indemnisation de la perte d'un fonds de commerce, alors que, la société Paradis ayant été induite en erreur par la société concessionnaire sur l'étendue de ses droits, il demandait à être indemnisé du préjudice résultant pour elle de sa condamnation à verser à la société Le Moorea une indemnité de 1 288 649 euros pour lui avoir consenti, à tort, un bail commercial ;

- l'a entaché d'erreur de droit en rejetant cette demande sans rechercher si l'indemnité mise à la charge de la société Paradis par l'arrêt de la cour d'appel d'Aix-en-Provence du 16 septembre 2011 trouvait son origine directe dans la faute commise par la société anonyme Yacht Club International de Saint-Laurent-du-Var et ayant consisté à l'induire en erreur sur l'étendue de ses droits ;

- a méconnu l'article 1er du premier protocole à la convention européenne de sauvegarde des droits de l'homme et des libertés fondamentales, en premier lieu, en se fondant sur la simple méconnaissance d'une obligation déclarative très antérieure à la survenance du dommage pour réduire de moitié le droit à réparation de la société Paradis, en deuxième lieu, en se fondant sur l'impossibilité pour cette société de confier à un tiers l'exploitation des cellules commerciales pour écarter tout droit à indemnité au titre d'une perte de loyers, en troisième lieu, en refusant d'accorder une indemnité au titre de la perte des bénéfices liés à l'exploitation des cellules commerciales, en dépit des refus répétés et non justifiés de la société anonyme Yacht Club International de Saint-Laurent-du-Var d'accorder à la société Paradis un contrat d'amodiation, et en quatrième lieu, en refusant de condamner la société anonyme Yacht Club International de Saint-Laurent-du-Var à verser une indemnité au titre des sommes dues par la société Paradis à la société Le Moorea à la suite de l'arrêt de la cour d'appel d'Aix-en-Provence du 16 septembre 2011, alors que cette condamnation trouve son origine directe dans la faute commise par la société concessionnaire et ayant consisté à induire en erreur la société Paradis sur l'étendue de ses droits.

3. Eu égard aux moyens ainsi soulevés, il y a lieu d'admettre les conclusions du pourvoi qui sont dirigées contre l'arrêt attaqué en tant qu'il statue sur la réparation d'un préjudice résultant pour la société Paradis de sa condamnation à verser à la société Le Moorea, au titre de la responsabilité quasi-délictuelle, une indemnité de 1 288 649 euros pour lui avoir consenti un bail commercial. En revanche, s'agissant des autres conclusions du pourvoi, aucun des moyens soulevés n'est de nature à en permettre l'admission.

D E C I D E :

--------------

Article 1er : Les conclusions du pourvoi dirigées contre l'arrêt attaqué en tant qu'il statue sur les conclusions tendant à la réparation d'un préjudice résultant pour la société Paradis de sa condamnation à verser à la société Le Moorea une indemnité de 1 288 649 euros pour lui avoir consenti un bail commercial sont admises.

Article 2 : Le surplus des conclusions du pourvoi n'est pas admis.

Article 3 : La présente décision sera notifiée à Me B... A..., agissant en qualité de mandataire liquidateur de la société à responsabilité limitée Paradis.

Copie en sera adressée à la société anonyme Yacht Club International de Saint-Laurent-du-Var.


Synthèse
Formation : 8ème chambre
Numéro d'arrêt : 437864
Date de la décision : 09/11/2020
Type d'affaire : Administrative
Type de recours : Plein contentieux

Publications
Proposition de citation : CE, 09 nov. 2020, n° 437864
Inédit au recueil Lebon

Composition du Tribunal
Rapporteur ?: M. Hervé Cassagnabère
Rapporteur public ?: M. Romain Victor
Avocat(s) : SCP BAUER-VIOLAS, FESCHOTTE-DESBOIS, SEBAGH

Origine de la décision
Date de l'import : 14/11/2020
Fonds documentaire ?: Legifrance
Identifiant ECLI : ECLI:FR:CE:2020:437864.20201109
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