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29/07/2020 | FRANCE | N°438495

France | France, Conseil d'État, 8ème chambre, 29 juillet 2020, 438495


Vu la procédure suivante :

Mme B... A... a demandé au tribunal administratif de Nice de prononcer la décharge des cotisations d'impôt sur le revenu et de contributions sociales auxquelles elle a été assujettie au titre des années 2008 et 2009, ainsi que des pénalités correspondantes. Par un jugement n° 1503717 du 5 avril 2018, ce tribunal a rejeté cette demande.

Par un arrêt n° 18MA02920 du 17 décembre 2019, la cour administrative d'appel de Marseille a, sur appel de Mme A..., prononcé la réduction des impositions dues au titre de de l'année 2008 à concurrence d

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Vu la procédure suivante :

Mme B... A... a demandé au tribunal administratif de Nice de prononcer la décharge des cotisations d'impôt sur le revenu et de contributions sociales auxquelles elle a été assujettie au titre des années 2008 et 2009, ainsi que des pénalités correspondantes. Par un jugement n° 1503717 du 5 avril 2018, ce tribunal a rejeté cette demande.

Par un arrêt n° 18MA02920 du 17 décembre 2019, la cour administrative d'appel de Marseille a, sur appel de Mme A..., prononcé la réduction des impositions dues au titre de de l'année 2008 à concurrence de l'inclusion dans ses bases d'imposition de sommes taxées d'office comme revenus d'origine indéterminée, réformé le jugement du tribunal administratif en ce qu'il avait de contraire, et rejeté le surplus des conclusions de la requête.

Par un pourvoi, enregistré le 11 février 2020 au secrétariat du contentieux du Conseil d'État, le ministre de l'action et des comptes publics demande au Conseil d'État d'annuler les articles 1er et 2 de cet arrêt.

Vu les autres pièces du dossier ;

Vu :

- le code général des impôts et le livre des procédures fiscales ;

- le code de justice administrative ;

Après avoir entendu en séance publique :

- le rapport de M. Jean-Marc Vié, maître des requêtes,

- les conclusions de M. Romain Victor, rapporteur public ;

La parole ayant été donnée, avant et après les conclusions, à Me Corlay, avocat de Mme A... ;

Considérant ce qui suit :

1. Il résulte des dispositions de l'article L. 16 du livre des procédures fiscales que l'administration peut, sur leur fondement, adresser au contribuable une demande de justifications, notamment dans le cas où elle a réuni des éléments permettant d'établir qu'il pourrait avoir disposé de revenus plus importants que ceux qu'il a déclarés. Aux termes de l'article L. 16 A du même livre : " Les demandes d'éclaircissements et de justifications fixent au contribuable un délai de réponse qui ne peut être inférieur à deux mois. / Lorsque le contribuable a répondu de façon insuffisante aux demandes d'éclaircissements ou de justifications, l'administration lui adresse une mise en demeure d'avoir à compléter sa réponse dans un délai de trente jours en précisant les compléments de réponse qu'elle souhaite. " Enfin, aux termes de l'article L. 69 de ce livre : " Sous réserve des dispositions particulières au mode de détermination des bénéfices industriels et commerciaux, des bénéfices agricoles et des bénéfices non commerciaux, sont taxés d'office à l'impôt sur le revenu les contribuables qui se sont abstenus de répondre aux demandes d'éclaircissements ou de justifications prévues à l'article L. 16. "

2. Ces dispositions autorisent l'administration à taxer d'office à l'impôt sur le revenu une disponibilité en tant que revenu d'origine indéterminée dans le cas seulement où en dépit, d'une part, des renseignements dont l'administration disposait à son sujet avant même toute demande de justifications, d'autre part, des éléments apportés par le contribuable à la suite d'une telle demande ou, le cas échéant, d'une mise en demeure de compléter sa réponse, demeurent incertains tant le caractère non imposable de cette disponibilité que la catégorie de revenus à laquelle elle serait susceptible de se rattacher. Par suite, le contribuable ne peut être regardé comme s'étant abstenu de répondre à une demande de justifications, au sens et pour l'application de l'article L. 69 du livre des procédures fiscales, lorsqu'il établit, dans les délais impartis, à la fois la provenance et la cause de cette disponibilité, par la production d'éléments de preuve précis et vérifiables. Au cas particulier où le contribuable établit que la disponibilité provient d'un membre de sa famille, il est réputé établir également qu'elle a pour cause un prêt ou une libéralité échappant à l'impôt sur le revenu, sauf à ce qu'il soit avec l'auteur du versement, à un titre quelconque, en relation d'affaires.

3. Il ressort des pièces du dossier soumis aux juges du fond que l'administration a adressé à Mme A..., le 12 avril 2011, une demande de justifications au sujet de sommes qui lui avaient été versées par un tiers au cours de l'année 2008 puis, le 1er août suivant, a mis en demeure la contribuable de compléter sa réponse. Estimant qu'en dépit des éléments produits en réponse, Mme A... s'était abstenue de répondre dans les délais qui lui étaient impartis, l'administration a taxé d'office entre ses mains les sommes en cause à l'impôt sur le revenu en tant que revenus d'origine indéterminée. Pour juger que Mme A... avait apporté, dans les délais impartis, les justifications qui lui étaient demandées et ne pouvait, par suite, pas être régulièrement taxée d'office à raison des sommes litigieuses, la cour administrative d'appel s'est fondée, d'une part, sur ce que Mme A... avait démontré, par la production des relevés bancaires de celui-ci, qu'elles correspondaient à des versements de son concubin, père de ses enfants, et, d'autre part et par suite, qu'elle devait être réputée avoir démontré que ces sommes avaient eu pour cause des prêts ou contributions à caractère familial échappant à l'impôt sur le revenu. En statuant ainsi, alors que Mme A... ne contestait pas les indications produites par l'administration, selon lesquelles elle était en relation d'affaires avec son concubin, lequel détenait et gérait avec elle plusieurs sociétés, la cour a commis une erreur de droit.

4. Il résulte de ce qui précède, sans qu'il soit besoin de se prononcer sur les autres moyens du pourvoi, que le ministre de l'action et des comptes publics est fondé à demander l'annulation des articles 1er et 2 de l'arrêt qu'il attaque. Les dispositions de l'article L. 761-1 du code de justice administrative font obstacle à ce qu'une somme soit mise à ce titre à la charge de l'Etat, qui n'est pas, dans la présente instance, la partie perdante.

D E C I D E :

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Article 1er : Les articles 1er et 2 de l'arrêt du 17 décembre 2019 de la cour administrative d'appel de Marseille sont annulés.

Article 2 : L'affaire est renvoyée, dans la mesure de la cassation ainsi prononcée, à la cour administrative d'appel de Marseille.

Article 3 : Les conclusions présentées par Mme A... au titre de l'article L. 761-1 du code de justice administrative sont rejetées.

Article 4 : La présente décision sera notifiée au ministre de l'économie, des finances et de la relance et à Mme B... A....


Synthèse
Formation : 8ème chambre
Numéro d'arrêt : 438495
Date de la décision : 29/07/2020
Type d'affaire : Administrative

Publications
Proposition de citation : CE, 29 jui. 2020, n° 438495
Inédit au recueil Lebon

Composition du Tribunal
Rapporteur ?: M. Jean-Marc Vié
Rapporteur public ?: M. Romain Victor
Avocat(s) : CORLAY

Origine de la décision
Date de l'import : 05/08/2020
Fonds documentaire ?: Legifrance
Identifiant ECLI : ECLI:FR:CE:2020:438495.20200729
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